D’un pas feutré tu arpentes les couloirs du manoir familial Blackthorn, serpentant autour de cette tour condamnée dont émane une incessante lamentation. L’endroit te passionne autant qu’il t’effrayait étant enfant. Car les lignées Blackthorn et Delgado, comme celles des autres puristes, sont nécessairement nouées les unes aux autres. Des arrangements, des mariages, des alliances, tout est possible et imaginable. Si tu n’adhérais pas un minimum à ces rites, tu ne serais pas présent à cette réception. Ce qui t’importe est de faire perdurer la lignée, qu’il y ait toujours une génération de plus et que le nom engendre de nouvelles branches.
Tes prunelles noisette sautent d’un portrait à un autre. Ce sont les ancêtres de cette longue famille. Il y a également les membres les plus récents, les plus jeunes, dont une personnalité qui ne t’est pas inconnue. Ses cheveux rayonnent d’un admirable blond. Ton aîné d’à peine deux ans, le contact est de suite bien passé entre vous. Tu te souviens de l’insouciance des jeux enfantins, des confidences adolescentes et de l’amitié persistante au fil des années.
Tu réajustes ta chevalière, comportement défensif traduisant ta profonde solitude actuelle. Toi, Vitor Delgado, tu n’as de cesse de te pavaner adroitement au sein de ta propre famille, à t’immiscer dans les relations de tous, et pourtant tu n’as personne auprès de qui te réfugier le soir venu. La gorge nouée, déglutition difficile sous le poids de ce constat. Tu as cruellement besoin de présence, de réconfort. Cette passade n’est pas des plus simples malgré ce que tu préfères laisser croire.
Tu poursuis ta contemplation de ce portrait. Kaiden est un bel homme. Si tu l’as longtemps trouvé attirant, tu n’as jamais sauté le pas. Parce qu’au fond sa douceur est contraire à tes traits chaotiques. Tu connais ses penchants les plus profonds et sa difficulté à les assumer. Toi, tu ne fais clairement pas étalage de ta fluidité sexuelle, ce n’est pas ce qui te définit avant tout. Bien que femmes et hommes peuvent t’attirer, on ne peut pas dire qu’il s’agisse d’un atout face à ce même fait : tu es seul. Trop préoccupé par tes histoires familiales pour aller de l’avant et enfin t’occuper de toi-même.
Alors tu te décides enfin à rejoindre la salle de réception. La musique, bien que subtile, emplie la salle avec prestance. Vêtu d’un costume noir, tu passeras très bien parmi les invités. Comme par réflexe, tu cherches des têtes connues, évitant probablement une part de ta propre lignée pour qui le seul héritier actuel n’est autre qu’Evandro. A force de vivre selon cette idée d’être le choix second, tu en deviens aigri et profondément rancunier.
C’est une chevelure blonde qui intercepte tes pensées. D’une haute stature – tu reconnais celui dont tu as pris le temps de contempler le portrait tout à l’heure. T’emparant de deux verres de vin rouge, tu t’embarques prestement jusqu’à lui, dans un coin de la salle, dos à la plupart des invités. Derrière lui, tu accapares son attention. « Bonsoir, Kaiden » lui intime-tu en lui tendant le cristal, l’esquisse ravie. Tu dévores un petit four avant de porter ton pouce à ta bouche, de façon suggestive et sans quitter son regard, mais d’une discrétion extrême. La communauté de sang-pur ne permettrait pas de telles relations. « Hm, ils sont délicieux … »
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[Terminé] Two souls on fire x kaiden
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Manoir Blackthorn
Alors ce soir, l’aîné de la famille avait été là, à côté de son père lorsque ce dernier avait récité un discours de bienvenue aux aristocrates ayant fait le déplacement jusqu’au manoir des Blackthorn. Il avait absorbé un costume gris anthracite ouverte sur une chemise blanche, fermée au niveau du col par un nœud papillon. Néanmoins, ce fut le seul moment de la soirée où Kaiden fut front commun avec son père. Dès que la fête commença, il s’éclipsa de la foule et des compliments mielleux et hypocrites que les sorciers s’échangeaient pour se mettre à l’écart. Kaiden était peut-être né dans ce monde, mais il n’était pas pour autant fait pour. Ses valeurs, son être, aucune pièce de qui il était ne s’emboîtait dans le puzzle lugure qu’était les alliances et les marchés des sangs purs afin de préserver leur pureté. Les faux-semblants n’étaient pas pour lui. Il était quelqu’un d’honnête et de franc. On ne pouvait sans doute pas faire plus opposé que lui à Tiberius Blacthorn.
Dans un coin de la salle de réception, l’aîné de sa génération observait les étoiles à travers la fenêtre, attendant que le temps passe pour rentrer chez lui. Ce soir, il n’avait même pas envie de faire semblant. Il n’était pas l’envoyé de la famille, seulement une potiche pour montrer une unité familiale qui n’existait pas. Il en avait déjà assez fait pour son père, il en faisant même trop. Il le savait. Il ne se faisait pas d’illusions à ce que penserait Tiberius de lui lorsqu’il apprendrait que son fils ne se marierait jamais à une femme, que seuls les hommes attiraient Kaiden. Jamais plus le blond n’aurait le titre de fils, même rebelle. Il se serait renié. Il était prêt à ça, il s’y était résigné, mais avant que la nouvelle ne sorte, Kaiden devait s’assurer que son père ne pourrait rien lui prendre de plus.
Soudain, une voix familière parvint jusqu’aux oreilles du Blackthorn. Il se retourna pour découvrir Vitor Delgado, l’un des rares sorciers de sang pur qu’il considérait comme un ami depuis l’enfance, mais aussi le seul à avoir pendant longtemps était au courant de l’homosexualité de Kaiden, à l’exception de sa fratrie et de ses cousins. C’était aussi en partie grâce à Vitor que le blond ne s’était pas senti à part des autres. L’un comme l’autre possédait une attirance pour les personnes du même sexe, bien que chez le Delgado, ce ne soit pas exclusif. Jamais les choses n’étaient allérd plus loin que de la simple amitié entre eux. Le secret et la peur de l’opinion des autres y avaient sans doute été pour beaucoup. Car ce n’était clairement pas que Kaiden n’appréciait pas Vitor, les deux hommes étaient amis et le brésilien avait de quoi plaire.
_ Bonsoir. Répondit-il finalement en souriant.
Kaiden attrapa le verre tendu, effleurant sans réaliser les doigts de Vitor. Il remercia son ami d’un signe de tête avant de tremper ses lèvres dans le liquide bordeaux. Le regard du Blackthorn se posa sur le visage de son ami, mangeant un petit four. Kaiden sentit le rouge commençait à lui montrer aux joues en voyant Vitor et entendant ses mots.
_ Hein ? Euh… Oui… Délicieux. Bégaya-t-il.
Il ne savait pas comment agir. Il n’était pas préparé à se faire draguer et encore moins par Vitor, car ça ne pouvait être rien d’autre. Ce n’était pas que l’idée n’était pas plaisante, mais Kaiden ne faisait pas étalage de sa sexualité en public, il avait même plutôt tendance à la nier afin de pas éveiller les soupçons. Aussi discret soit Vitor, ça allait à l’encontre des habitudes du Blackthorn. Ce dernier but alors une nouvelle gorgée de vin avant de reprendre la parole.
_ Vitor… Les gens pourraient nous voir.
Car oui, ce qui inquiétait Kaiden, c’était d’être sorti du placard avant que tout soit prêt pour assurer sa liberté. Le comportement de son ami était surprenant, mais pas désagréable. Il gênait un peu Kaiden, mais il n’avait pas pour autant envie que ça s’arrête. Le désavantage de garder sa sexualité secrète était qu’il était plus difficile d’avoir quelqu’un pour réchauffer ses nuits et si même Kaiden ne le montrait pas, il en souffrait.
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Re: [Terminé] Two souls on fire x kaiden
Les affres de ces amitiés atypiques bouillonnent au cœur de l’âme. C’est qu’il fut aisé pour toi de maintenir le secret de tes penchants. L’occlumancie aidant. Ce qui n’était pas le cas pour Kaiden. Cette maîtrise et cette organisation de l’esprit t’ont permis de tracer ton chemin au cœur de la lignée des Delgado. Bien qu’au fond tu ne restes qu’un héritier de seconde main, celui sur lequel le choix se portera uniquement s’il advenait le pire à Evandro. Même sous cette optique, ce ne serait pas une sélection noble. Il s’agirait d’une décision par défaut.
A tes salutations, le blond se tourne vers toi et se saisit du verre tendu, effleurant tes doigts par la même occasion. Tu resserres instinctivement ta prise sur le cristal sous cet affront inconscient mais dont la résonance en toi n’en est pas moindre. Kaiden parait bien plus rayonnant que tu ne puisses l’être toi-même. Il semble plus avenant sous bien des aspects et pourtant tu pressens en lui ces mêmes difficultés qui habitent ton propre esprit.
A tes avances – qui bien que discrètes ne laissent pas place au doute – le garçon se met à rougir et tu trouves cela incroyablement beau chez lui. Aussi loin que tu te souviennes, il se montrait plus en retrait lorsqu’il était question des relations intimes. Un point sur lequel tu n’avais aucun mal, toi-même très peu à l’aise pour parler de ceci publiquement. Son bégaiement, mais surtout le fait qu’il puisse te répondre te laisse croire qu’il ne t’est pas insensible.
Auscultant son faciès avec plus d’intérêt encore, tu te surprends à remarquer des détails que tu n’avais jamais vu jusqu’alors. Comme la couleur envoutante de ses prunelles, d’un marron doux mais incroyablement attirant ; il y a ses lèvres ; cette barbe légèrement taillée qui agrémente parfaitement la forme de son menton. Alors tu te questionnes sur cette admiration soudaine pour le Blackthorn. A l’adolescence, il t’a très vite plu mais il était plus sujet d’une proximité des corps plus que de fantasmes. En somme, les choses ne sont pas allées plus loin. Serait-ce ce profond sentiment de solitude qui te pousse vers lui de la sorte ?
Tu regagnes bien vite les pieds sur terre à la remarque de ton aîné. De vous deux, Kaiden reste le plus mature, caractère bien plus posé que le tien. Trop sanguin, tu fonces souvent tête baissée, montant trop vite dans les tours. Ce rappel à l’ordre est tout autant stimulant dans la mesure où il pose un interdit à surmonter. « Je le sais très bien » annonces-tu sans ménagement.
Tandis que tu te sers de nouveau dans un plateau non loin, tu poursuis ta mascarade, renversant discrètement – et par erreur évidemment – ton verre de vin sur ses vêtements. Tu fais mine de t’excuser, prenant une moue pleine de désolation, sans pour autant rompre le contact visuel que tu souhaites le plus intense possible. « Je te prie de m’excuser … Je suis bien trop maladroit ». Alors qu’au fond, tu ne l’es pas tant que ça.
« Il te faut endosser un nouveau costume … » constates-tu. D’un mouvement retenu pour que cet échange reste entre vous deux, tu passes le bout de tes phalanges le long de sa chemise, les passant à l’intérieur à tire-d’aile pour les retirer tout aussi brièvement. On ne peut pas dire que tes avances ne sont pas directes. Quel petit con tu fais.
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Re: [Terminé] Two souls on fire x kaiden
Manoir Blackthorn
Soudain, un frisson parcourut le corps du Blackthorn lorsqu’un liquide froid entra en contact avec sa peau, tachant sa chemise d’une aura pourpre. Kaiden regarda Vitor le regard interrogateur sans trop comprendre ce qu’il venait de se passer.
_ Je… Ce n’est rien.
Lorsque les phalanges du Delgado passèrent dans l’interstice de la chemise tachée, frôlant l’épiderme du Blackthorn, un nouveau frisson parcourut le corps de Kaiden. Ça n’avait rien à voir avec celui provoqué par le vin, là c’était agréable, le genre de sensation que l’on souhaitait éprouver de nouveau. Kaiden vida alors son verre avant de le poser. Il était perdu, perdu par toutes ces nouvelles choses qui traversaient son esprit. Le regard de Vitor sur lui avait changé la façon dont Kaiden voyait le Delgado. Ce dernier n’était plus qu’un ami d’enfance, quelque chose venait s’ajouter, perturbant le blond qui avait du mal à trouver comment agir.
_ Euh… Oui, il faut que je change de costume. Il doit y en avoir un dans ma chambre. Dit-il machinalement.
Ses parents avaient conservé cette pièce dans le même état que celui dans lequel leur fils aîné l’avait laissé en quittant la demeure familiale, une manière de faire illusion, de faire croire que Kaiden passait encore du temps au manoir. En réalité, il n’y avait pas remis les pieds depuis des années. Néanmoins, mis à part la femme de ménage, personne n’y rendrait. Ce fut à ce moment-là que Kaiden comprit. Vitor cherchait un moyen de s’éloigner de la foule de potentiels curieux. La chambre d’enfance du Blackthorn serait idéale pour ça. Durant l’adolescence, les deux amis s’y étaient retrouvés de nombreuses fois pour discuter, mais Kaiden savait que la prochaine fois serait différente. Il ne savait pas comment gérer les choses. Vitor était son ami d’enfance, mais il le draguait et Kaiden ne le repoussait pas. Le Blackthorn se perdait dans ce qu’il ressentait et à cela s’ajoutait la peur d’être découvert, c’était peut-être même ce qui bloquait réellement Kaiden. Ce dernier prit finalement une grande respiration avant de reprendre la parole.
_ Si comme au bon vieux temps, on s’éclipsait pour discuter dans ma chambre comme on le faisait enfant. S’efforça-t-il de dire sur le ton le plus naturel du monde afin de satisfaire la curiosité des oreilles indiscrètes.
Le regard de Kaiden lui par contre disait tout autre chose. Il trahissait son malaise, mais aussi son attirance grandissante et non assumée pour Vitor.
Finalement, le Blacthorn sortit de la salle de bal, non s’en s’assurait avant que son père et sa mère étaient bien occupés avec quelques sorciers de sang pur. Il attendit que son ami le rejoigne dans le couloir avant de prendre la direction de sa chambre. En chemin, il ne dit rien, se sachant tout simplement pas quoi dire. Les deux hommes finirent par arriver dans le refuge de l’enfant qu’avait été Kaiden. Tout était encore au même emplacement que le jour du départ du Blacthorn pour l’université il y a plus de dix ans. Le blond ferma la porte derrière Vitor avant de poser sa veste de costume sur une chaise et d’ouvrir une armoire à la recherche d’une chemise propre.
_ Vitor… Pourquoi ? Osa-t-il demander de dos à son interlocuteur.
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Re: [Terminé] Two souls on fire x kaiden
Jeu dans lequel tu opères adroitement, instaurant ainsi un climat de séduction. Contacts sensuels, celui de tes doigts contre son torse que tu devines bien que cela ne t’apparaisse pas suffisant. Tu te surprends à en vouloir davantage. Frustration étrangement agréable que tu comptes cultiver encore un temps. Parce que tu trouves cette joute stimulante et que ton esprit fin se délecte de la complexité de cette situation. S’il admet qu’il doit changer de tenue, Kaiden précise par ailleurs qu’il doit y en avoir un dans sa chambre, invitant à quitter ce lieux hypocrite et bondé.
Tu ne t’attendais pas à ce que sa chambre d’enfant soit préservée en ces murs hauts et froids. Tu ne l’imagine pas vouloir conserver son propre havre de paix dans un endroit aussi austère. Cela ne lui ressemble pas. Ce n’est pas l’homme que tu as connu plus jeune. Tu déduis plutôt une décision parentale, cela te semble bien plus logique. Le paraître, le faire semblant. Toutes ces manœuvres auxquelles tu adhères mais qui par moment ont le don de te rendre fou.
Une esquisse malicieuse se dessine à tes lèvres lors de la mention d’une sobre discussion entre amis. Tu prends le temps d’apprécier cette répartie qui, derrière ses airs superflus, sous-entend bien plus. Il y a de quoi te faire sombrer. En l’occurrence, c’est une folie toute autre qui s’empare de tes sens. Celle de respirer son parfum alors qu’il s’élance dans les couloirs sinueux. Lui laissant prendre les devants, tu restes silencieux. Tu peux sentir au niveau de ton cou les artères qui battent plus vite l’une que l’autre. Tu ne sais pas ce qu’il va advenir de cet échange initié par tes soins.
La gorge nouée, tu te redresses de ton mètre soixante-dix-huit, écoutant distraitement la porte de la chambre se refermer sur tes pas. Sans mot dire, tu sembles stoïque, observant simplement la scène qui s’offre à toi. Cette grande pièce n’a absolument pas changé depuis toutes ces années. Il y a aussi ce mouvement par lequel le magizoologue se débarrasse de sa veste sur le dos d’une chaise. « C’est vraiment dommage pour cette chemise … Celle-ci t’allait très bien ».
A sa demande : pourquoi ? Tu ne réponds pas de suite. Tu n’as aucune réponse à apporter. Tu t’approches alors qu’il reste de dos. Ton corps prend le pas sur la raison. Ton désir. Ton attirance. Ce que tu ne contrôles pas en somme. « Je ne sais pas, Kaiden » commences-tu, t’avançant un peu plus pour enfin te tenir juste derrière lui. Là, tu déposes ta main gauche sur sa hanche, main droite qui se balade sur son buste.
« Tu as une chemise à changer, je crois ». De tes phalanges, par la magie, tu déboutonnes le tissu nacré, ton torse à-même son dos, ton cœur battant à rompre ta cage thoracique. Délicatement, tu t’empares de ce vêtement que tu fais glisser le long de ses bras, détaillant une musculature fine et suffisamment saillante. « Je n’ai jamais osé franchir le pas ». Tu marques une pause, le tissu tombant au sol dans un bruit de froissement.
Tu ne supportes plus cette solitude. Tu humes le parfum de son épiderme, paupières fermées. Le temps s’est arrêté autour de vous. « Tu ne me repousses pas ? » L’intonation pleine d’étonnement. Il pourrait, s’il le voulait. Ton attitude est complexe, il y a une profonde tendresse dans ton approche, autant qu’une sensualité exacerbée. Un respect très ancré également, tu n’oublies pas l’amitié qui est présente avant tout entre vous. Et cette volonté de le protéger, de l’extraire de cet étau puriste qui l’enferme depuis tant d’années.