4 mars 2023, après le match

Encore une défaite. Franchement, j’en ai marre. Je vois mon rêve, celui de devenir un jour une joueuse professionnelle s’éloigner. On ne peut pas dire que j’ai fait un mauvais match, pourtant. Mais qui va regarder les joueurs d’une équipe qui perd tout le temps? Aucun bon recruteur. Ou alors, je vais finir dans une équipe de cinquième zone, obligée d’avoir un boulot à côté pour payer mes entrainements. Je raccroche le balai dans le rack et me rends dans le vestiaire, cette fois. Rafael m’a engueulé la dernière fois, me menaçant de me mettre sur le banc de touche pour le reste de l’année et de me faire dégager de l’équipe l’année prochaine si je pars à l’issue du match, qu’on gagne ou qu’on perde. Alors je suis là. Mais clairement, je ne participe pas. Je suis dans un coin du vestiaire, assise sur le banc, les bras croisés, refusant de prêter attention à son discours de consolation. Je n’en peux plus, de ça. J’ai hâte qu’il soit diplômé, qu’on change de capitaine. Est-ce que je postulerai pour la place? Peut-être. Est-ce que j’aurais une chance d’être choisie? Pas sûre. Mais il n’est qu’en cinquième année, Goldstein et il va s’accrocher au poste. Pour prendre la place, il faudrait un miracle - pour moi. Un coup d’état, peut-être. Et encore. Je ne suis même pas certaine que ça suffirait réellement. Et puis de toute façon, j’en connais un qui s’opposerait à ce que je devienne capitaine, c’est Maximilien. Il lui reste encore un an - si tout va bien - à Hungcalf. Il ne voudra jamais que je devienne capitaine tant qu’il est là. Même si je pense que ce poste devrait revenir à quelqu’un qui veut faire carrière… Ce qui n’est le cas ni de l’un, ni de l’autre. Peut-être devrais-je songer à le mettre en avant, ça.

C’est ce à quoi je réfléchis pendant que Rafael tente de réconforter l’équipe. J’ai hâte qu’il ait terminé de parler. Je retiens un baillement et, dès qu’il a terminé, je passe sous la douche et me change avant de partir. Je ne reste pas plus que nécessaire, même si je sens que je vais encore me prendre une réflexion de merde la prochaine fois. C’est pas grave. J’assumerai. Je lui dirai que s’il veut que je me sente plus investie dans son équipe, il va falloir que lui-même s’investisse. Que ce n’est pas avec ses petits discours dont tout le monde se fout qu’on va gagner un match. Je lui dirai qu’il ne reste qu’un seul match d’ici à la fin de l’année et que je veux qu’on ait la 3e place de la coupe, cette fois. Hors de question de finir à nouveau derniers. Et pour ça, il va falloir qu’on mette les bouchées triples et qu’on gagne contre les Pokeby. Hors de question pour moi de finir encore avec le bonnet d’âne. Je le lui balancerai que si pour lui, c’est juste un jeu à l’université, pour moi, c’est ma carrière qui se joue et qu’avec les mauvais résultats qu’on se tape, je risque fort de finir par perdre ma bourse. C’est un peu abusé, mais c’est comme ça que je le pense. Ma bourse est une bourse au mérite. Si les notes comptent, les résultats de l’équipe comptent aussi pour beaucoup.

Salem été 2021

Je suis à Walmart, en train de recharger les rayons quand un de mes collègues arrive en disant qu’Aelig me cherche. Hein ? Aelig ? Mais je connais pas d’Aelig, moi ! Je fronce les sourcils du haut de mes dix-huit ans mais suis néanmoins mon collègue. Je ne connais pas Aelig. Je ne l’ai jamais vu. Sur le moment, je pense à une blague de mes collègues, mais la façon dont iel se jette à mon cou me fait brusquement penser à autre chose. Je me souviens de ce qu’ont dit les profs, à Ilvermorny, concernant les filtres d’amour. Si je ne suis pas la meilleure en potions, j’ai néanmoins retenu quelques trucs, dont les pupilles dilatées. Tant bien que mal, j’essaye de me dégager de cette étreinte non voulue, mais iel me serre un peu plus fort encore dans ses bras et je comprends que ce n’est pas normal et pas forcément souhaité de sa part. Mais comment ? Pourquoi Je ne comprends tellement pas comment ça s’est fait. Aelig semble avoir mon âge, mais je ne l’ai jamais vu à Ilvermorny, ça s’est sûr. Je parviens finalement à me dégager mais iel panique et je lui prends la main. « Viens. Allons dans un endroit plus intime. » lui dis-je. Iel se calme tout de suite et pose sur moi un véritable regard de merlan fris. Je l’entraine non pas dans la réserve, mais dehors sous un arbre.

Depuis que je t'ai vue, ébloui par l'éclair,
Mon œil s'est voilé d'un mirage ;
Je regarde sans voir, ou je ne vois dans l'air
Flotter qu'une forme, ta douce image ;

Le jour, tout éveillé, je songe ; et, dans la nuit,
Comme un feu follet qui se lève,
Cette image, la tienne, apparaît, et me suit
Au plus profond de mon âme et de mon rêve.

Arrivés là, iel se met à me déclamer un poème d’amour. Je porte ma main à mon front, blasée, alors qu’en vérité, j’ai juste envie d’éclater de rire. Mais c’est méchant. Il faut que je me retienne. « Non… Tu ne m’aimes pas. C’est une illusion. Un rêve. Un mirage…. » J’essaye de lui expliquer, en vain. Iel ne comprend pas. Je comprends, tout à coup, à son « Tu mets de la magie dans ma vie. Tu m’as littéralement ensorcelée. » qu’iel est un moldu. Mais que faire ? Comment me débarrasser ? Quel sortilège lui a-t-on infligé ? Quelle potion lui a-t-on fait boire ? Pourquoi, surtout, n’ai-je pas un bezoard là, sur moi pour le lui faire avaler histoire de le débarrasser de ça. Mais vraiment, je ne comprends pas comment… Je profite de son état complètement confus pour l’entrainer encore ailleurs, là où personne ne nous verra, où iel tente de m’embrasser. Je transplane avec iel, après lui avoir intimé de ne pas bouger et nous nous retrouvons près de l’école de sorcellerie. J’ai honte, un peu, de l’avoir entrainé là. De risquer de révéler le secret magique, mais je n’ai pas pu penser à qui que ce soit d’autre que mon prof de potions pour lui rendre son état normal. Je me fais, bien sûr, terriblement engueuler quand il voit que j’ai amené un moldu dans une école de sorcellerie, mais il comprend rapidement le problème et lui donne un antidote avant de l’oublietter et de renvoyer à Salem. Moi, de mon côté, et bien…. Heureusement que j’ai fini l’école, parce que sinon, nul doute que j’aurais finie en retenue toute l’année, sans quoi !