[02.10.24] Seul devant une glace sur pied qu’il avait fait ajouter à la chambre bleu de l’Ardmeanach House, Fourth validait que l’intégralité des consignes et recommandations du tailleur Londonien responsable pour sa tenue avait été appliquées avec le soin que la situation dictait. Par nécessité au moins autant que pour l'occasion toute particulière, Erawan avait profité d’un interlude entre deux réunions de travail pour se procurer des habits qui soient à la fois à la hauteur des premières rafales réfrigérantes d’octobre ainsi que d’une certaine élite anglaise, dont il maîtrisait de mieux en mieux les standards les plus ostentatoires.

En tant qu’employé du Département de la Coopération magique internationale, il était évidemment attendu qu’il assiste à un événement fédérateur pour la communauté sorcière. Comme héritier d’une lignée étrangère dominant les marchés d’Asie du Sud-Est, il était impératif qu’il profite d’une telle opportunité d'entretenir un réseau de relations chez leurs homologues européen. C’était toutefois en tant que simple trentenaire naviguant les courants énigmatiques d’une relation récente qu’il lui plaisait réellement de s’y présenter ; il serait l’invité officiel de la professeure @Isabelle D'Essenault, une considération qu’il aurait été inconvenant d'entacher par un manque de ponctualité ou une présentation négligée.

Après un transit efficace par le réseau ― fraîchement connecté au domicile Chankimha ― des cheminées, Erawan s’était présenté aux portes du domaine d’Hungcalf et avait aussitôt été accompagné jusqu’au Campement des centaures, lieu de rassemblement désigné pour le lancement des festivités. Dans l’attente qu’un certain petit hérisson fantomatique ne vienne lui annoncer la disponibilité de sa dame, le Thaïlandais s’était approché d’un stand offrant une diversité de boissons chaudes, toutes listées sur un parchemin flottant doucement en surplomb d’un duo d’elfes de maison dont les habits semblait couvert d’une couche de crasse pour le moins repoussante. Occupé à réconcilier cette salubrité litigieuse et une soif capricieuse, il lui fallut plusieurs minutes pour remarquer qu’une autre âme attendait sans doute de passer commande, aussi s’empressa t-il de lui céder son rang lorsqu’il le réalisa enfin. « Pardon, je vous en prie. » D’un geste assuré, il avait invité la jeune femme à s’avancer un peu plus au-devant du comptoir improvisé et sans consciemment chercher à éviter le regard de celle-ci, il avait quand même rapidement reporté le sien sur le menu. « Je dois encore réfléchir à mon choix. » Et même à plus d’un sans doute, mais aucun qui n'implique une visite par le kiosque des BeerFlops à tout de moindre, ce qui s’avérait une décision plus étonnante de la part de la rouquine, qui bien que distinguée en apparence, n’en demeurait pas moins soumise aux tentations propres à son âge ?

[02.10.24] Dans un contexte où il était prévu que le ciel et ses astres soient les grandes vedettes de la soirée, c’était plutôt les effluves de sucre et de houblon, portés par la brise vespérale des Highlands, qui semblaient retenir les premiers l'intérêt des invités. « Je vous remercie. » Le fiscaliste avait incliné la tête sans ressentir le besoin de verbaliser de politesses supplémentaires. Pour tout dire, son attention à ce stade se trouvait divisée entre ce nouveau portable procuré dans le seul but de faciliter leurs communications avec @Isabelle D'Essenault, mais aussi, cette liste de breuvages chauds inventoriés sous leurs appellations européennes, des nominés avec lesquels il ne se trouvait pas confortablement famillier.

« Peut-être puis-je vous apporter quelques modestes conseils ? » C’est sans se faire prier que Fourth s’était détourné des créatures aux commandes du kiosque, fuyant ainsi habilement un dédain complexe à dépeindre et encore plus à disculper ; la vision de ce long manteau couvert de boucles rousses devenait une accroche visuelle des plus agréables en comparaison, l’offre d’un éventuel service-conseil bonifiant agréablement le tableau. « Je crains qu’aucune autre âme ne daigne se bousculer pour cette pauvre échoppe. C’est là l’occasion parfaite pour se laisser le temps de la réflexion. Dites, quels sont vos goûts monsieur… ? »

Sans être surpris par la nature des affirmations ou même la question relative à son identité, le trentenaire s’était tout de même détaché un moment de l’attention que lui réservait l’étudiante pour mieux balayer d’un oeil rapide l’espace autour d’eux. La manœuvre donnait sans doute l’impression qu’il cherchait d'abord à confirmer que c’était bien à lui qu’on s’adressait, mais en vérité, il souhaitait simplement confirmer que tout potentiel public à cette interaction ne se trouverait point gêné par l’attente imposée. « Chankimha. » Une main distraite avait ajusté le col de son propre trench. « Bien qu'à mon goût, Erawan suffirait. » Puisqu’il semblait raisonnable d’imaginer ― par le choix du vocabulaire déjà, mais aussi le soin apporté à sa tenue ― que la demoiselle avait été exposée dès le berceau à un d'un style éducatif coercitif, il crut judicieux d’offrir d’entrée de jeu le choix de recourir ― ou non ― à ce degré de familiarité que l’aristocratie se refusait bien souvent par soucis de bienséance, tout à contrario de ces petits serfs répugnants qui venaient de s'immiscer dans un échange où ils n'avaient guère été invités.

« Un Pumpkin Spice Latte. Sans muscade et avec une pointe de vanille. » Le caractère expéditif ― mais surtout parfaitement désinvolte ― du geste de la belle creusa quelques rides aussi superficielles qu'intriguées sur le front du Thaïlandais. « Vous m’avez tout l’air de vous y connaître en matière d’expérience de consommation agréable. » Sa curiosité quant à elle, s’était fixée sur ces orbes bleutées qui appelaient à ses préférences en matière de breuvages chauds. « Peut-être pourriez-vous d’abord me renseigner sur cette boisson qui a remporté vos faveurs et celle d'une saison tout entière semble t-il. Pumpkin and spices ? » Un demi-sourire s’était ajouté à la physionomie d'Erawan, accentuant ainsi une incrédulité qui n’était pas tout à fait innocente.