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plume et abîme ((miucca)
Mar 12 Mar 2019 - 20:26
“plume et abîme .” @lucca pinto
Une journée qui aurait pu bien se passer. Tu vaquais à tes occupations d’étudiante studieuse. Assise toujours à la même place, tu ne te laissais pas distraire une fois que tu foulais le sol boisé de la bibliothèque. Pas un seul coup d’œil vers une connaissance, un ami ou même une vermine que tu aurais pris un malin plaisir à anéantir dans d’autre conditions. Il n’y avait que toi et les grimoires de sortilège, empilée indéfiniment. Un cours à préparer, une session complexe qui nécessitait un apprentissage rigoureux en amont. Et donc, du silence. Outre pour les études, tu appréciais le silence. Bien que tu sois de nature animée, tu connais et maîtrises sa signification la plus ombrageuse. Le silence qui culpabilise, qui heurte et qui tranche l’autre. Celui qui le ferrait même douter de sa propre existence. Accoler le néant, rendre invisible, art dont tu connais les moindres secrets. Le rompre venait à morceler sans scrupule les efforts de chacun, dont les tiens. Un grincement, une murmure ou un livre qui se ferme brusquement, reçoit ton regard incendier. Impassible, inscrite dans l’atmosphère qui se dégage des lieux. Les livres d’un côté, le parchemin de l’autre, tu sembles particulièrement efficace. Organisée et appliquée. Tu pourrais presque rivaliser avec une Lufkin. T’étais prête à y rester une bonne partie de la journée, si ce n’est l’après-midi toute entière. Seulement, quelque chose vint te rompre ta sérénité. Un coup de vent, qui t’a fait lever les yeux, cherchant la source de la perturbation. Et en l’espace de quelques secondes, le temps qu’il te fallait pour retourner dans ton travail, une enveloppe apparut entre les pages du livre. Tu fronces les sourcils, surprise. T’attrapes le courrier, que tu retournes. Au sommet du pli, le nom Delarco. Ton père, encore une fois. Il doit certainement vouloir te donner des nouvelles, se plaindre, voire les deux. Histoire que tu n’oublies pas tes impératifs outre-Atlantique, ton lien avec l’entreprise. A force, tu connais ses tournures de phrase par cœur, tu devines ce qu’il va te dire avant même que tu commences la lecture. Néanmoins, tu restes étonnée de voir qu’il n’a pas pris la peine de solliciter le service postier, lui qui aime concevoir que son nom se propage massivement autour du globe. Il doit drôlement s’ennuyer pour faire ce genre de tour de passe-passe. T’arraches le papier pour accéder à la lettre. Écriture fine et élégante, sans rature ni usure. Comme envisagé, tu as droit à un paragraphe introductif qui clame les mérites de ta famille. Fierté exacerbée, assise du pouvoir. Tu passes facilement ce passage pour lire le véritable contenu – s’il y en a un. Et au fur et à mesure des lignes, ton visage neutre laisse place à l’inquiétude, au désarroi.
Tu parcours les couloirs de l’université à une allure qui en dise long sur ton état d’esprit. Vive, sans prêter attention au monde autour. A cette heure de l’après-midi, les étudiants s’apprêtaient à entrer en classe pour suivre leur dernier cours de la journée. Cours ou pas cours, tu cherches une personne bien particulière. Et vaut mieux ne pas être ta cible. Car, en plus d’être tenace, tu ne la manques jamais. Tu ressasses la lecture d’il y a quelques minutes, celle qui a fait que tu t’es levée de ta chaise, tempétueuse. Celle qui a fait que tu as quitté l’environnement propice à l’érudition. Pour que tu laisses derrière toi tes affaires, il te faut une bonne raison. La finesse de la famille Pinto (…) nous avons conclu à un arrangement. (…) des fiançailles bientôt. T’as cru mal lire. Et pourtant, c’est ce que tu peux vérifier, la feuille entre les mains. C’est impossible qu’ils puissent te faire ça à toi. Impossible. Donc automatiquement, tu pensais à une mauvaise blague. Ca ne pouvait être que ça. Le chineur qui aurait décidé de se pencher sur ton cas, des personnes extérieures, voire le fils Pinto lui-même. S’il croit pouvoir te berner toi, il se trompe lourdement. T’aimes ce genre de jeux, la manipulation et les manigances. Mais en être la victime, t’apprécies beaucoup moins. Un groupe commence à entrer dans une salle, tu le perçois parmi les têtes qui se meuvent. Habile traqueuse, fine observatrice. Tu t’immisces dans la masse pour y extirper le garçon, par le col et pour le coup, sans délicatesse. « Hola Lucca. », as-tu commencé, dans la langue latine. Langue maternelle, intime, instinctive. « Il y a beaucoup de manières de m’avouer ton amour… » Un sourire faux. Tu déplies la lettre et tu lui montres. Suffisamment près pour qu’il puisse savoir de quoi il s’agit. Suffisamment loin pour ne pas que tu l’étouffes avec. Chose qui se produirait certainement si tu n’étais pas intéressée par sa réponse. « En revanche, celle-ci ne me plaît pas du tout. » Le ton froid, t’attends des aveux. Imminente déflagration.
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Re: plume et abîme ((miucca)
Mer 13 Mar 2019 - 18:23
Plus les journées passaient, plus ma situation semblait s'empirer. C'était toujours aussi compliqué avec Soledad, je peinais à retrouver cette complicité qui faisait notre force. Un fossé entre nous qui ne disparaissait pas, malgré mes efforts... Alors je me plongeais dans les cours, passant énormément de temps à lire, relire mes cours, essayer de comprendre les subtilités de l'anglais, écrire mes devoirs dans toutes les matières que je devais suivre. Heureusement pour moi, j'avais trouvé des étudiants sympathiques qui m'aidaient en cours à suivre et surtout qui me traduisaient parfois ce que je n'arrivais pas à comprendre. Un soupir m'échappa alors que je repensais avec perplexité à la lettre que j'avais reçu le matin même. Cachet de la famille Pinto, j'avais reconnu directement l'écriture de ma mère, fine et très aristocrate. Oh je m'étais attendu à ce qu'elle m'oblige à rentrer, qu'elle menace de me couper les vivres pour me pousser à lui obéir. Il n'en était rien. Non, c'était bien pire que ça. Des mots que je n'avais jamais souhaité lire dans ma vie. Moi. Fiancé. A une fille que je ne connaissais que de vue et parce qu'elle partageait la chambre de ma Soledad. Sérieusement. Croyant à une blague de mauvais goût, je l'ai relu de nombreuses fois. Seulement, c'était bien l'écriture de Madame Pinto, et le sceau sur la lettre était bien le nôtre. Insupportable vérité que je voulais oublier. Parce que c'était impossible. Que ça ne pouvait pas se faire. Que de toute façon, jamais, jamais je ne me lierai à cette fille. Plutôt mourir. Cachant la lettre dans la poche de ma veste, je me rendais à mon prochain cours avec très peu d'entrain, réfléchissant à une solution pour me débarrasser de ce futur engagement. Perdu dans mes pensées, je suivais le groupe qui rentrait dans la classe. Sauf qu'une pression inconnue sur mon col me tira de mes réflexions et je fronçais les sourcils, peu habitué à ce qu'on me traite de cette manière. Fierté masculine mise à mal par une furie brune. Une fois sorti du groupe, je m'extirpais violemment de son emprise, une lueur de rage dans le regard. La voilà donc, cette fameuse future fiancée. Cette blague. Je ne répondais pas, préférant la laisser déverser sa haine et son venin, préparant une réponse bien sentie. L'usage d'une langue latine, commune, m'arrangeait bien, mais prouvait que ce qu'elle avait envie de me dire était de l'ordre de l'intime. Sourcils froncés, la colère bouillonnant dans mes veines. Il suffisait d'un rien pour allumer ce feu sacré dissimulé sous ma peau. "Parce que tu crois vraiment qu'on pourrait ressentir de l'amour pour toi?... T'es complètement cinglée ma pauvre..." que je commençais doucement, d'une voix froide. Pique loin d'être innocente. Les attaques, je les rendais au centuple. La brune ne me connaissait pas encore. Sortant la lettre de ma veste, je la lui montrais avec un sourire presque carnassier, conscient que ce n'était peut-être pas à ce à quoi elle s'attendait. Que croyait-elle? Que je m'étais amusé à lui envoyer ce torchon par plaisir? Sérieusement. "Je suppose que ce qui est écrit là-dedans ressemble à ce qui est écrit dans la tienne? Des fiançailles entre Pinto et Delarco, un arrangement hauuuutement profitable pour les deux parties. Bonne blague, pas vrai? Y'a que des parents pour avoir des idées pareilles..." que j'ajoutais sur un ton cynique. Rangeant la lettre, je remettais le col de ma veste en place. Malmené par une gamine qui se croyait tout permis. Agacement terrible qui faisait vibrer mes muscles. Pour un peu, j'aurais voulu la remettre à sa place et l'envoyer bouler sans dire un mot. Pourtant, ces lettres signifiaient qu'on était tombé dans la même galère. Soit on acceptait cette vérité et on cherchait une issue de secours ensemble, soit on s'étripait et finalement, on nous obligera à nous marier. "Tu pensais sérieusement que je t'avais écrit cette lettre?" lui demandais-je, curieux de savoir si c'était cette idée qui l'avait mise en colère.
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Re: plume et abîme ((miucca)
Jeu 21 Mar 2019 - 17:46
“plume et abîme .” @lucca pinto
La liberté, c’est un sentiment que tu as rarement connu. Parce que la majeure partie de ta vie a été contrôlée par les doigts avares de tes parents, bien décidés à ne pas que tu t’écartes de la voie à laquelle ils t’ont destinée. Les années à Ilvermorny se sont mêlés à tout ça, tu as pu t’éloigner d’une certaine manière du contrôle absolu de ces derniers. Élève en pleine découverte, qui peine à contrôler le caractère explosive au fin fond de ses viscères. Tu te cherchais, faisais tes premières expériences. Les plus honorables comme les plus mauvaises. Déjà dans la dichotomie. Attirée par le risque mais toujours avec les règles inculquées par l’autorité paternelle. Thunderbird à l’apparence irréprochable, parfaite, dans les codes si bien définis par les sang-purs. Ca te tenait déjà à cœur, déjà pour ne pas les décevoir, mais surtout parce que c’est le cadre vers la prospérité, la sécurité, le pouvoir. Ne pas les suivre, c’est accepter la difficulté, le poids de la culpabilité et les possibles représailles de toute une famille. Pourquoi les familles de sang immaculé sont-elles majoritairement riches et influentes ? Par l’héritage, par le respect des règles et des valeurs. Valeurs plus ou moins morales. Des avantages et des contraintes, comme beaucoup de choses. Dans cette logique, tu devrais accepter les fiançailles, conformes aux exigences de tes parents. Or, sur ce point, tu as toujours témoigné une certaine résistance. Parce que ce n’est pas quelque chose à prendre à la légère. Des fiançailles, c’est des promesses que l’on fait à quelqu’un d’autre. Promesses au long terme, qu’elles soient sincères ou non. Pour tes parents, l’amour a su marquer leur union bien avant les manigances de leurs propres géniteurs. Et malgré les mascarades et autres jeux de l’apparat, t’as pu te rendre compte que la majorité des mariages de ton rang n’avaient rien de véritable. Quelque part, ton entourage était une exception et c’est pour ça que tu le prendrais mal s’ils te forçaient la main. Désir hypocrite, maniaques du contrôle. T’avais pourtant conclu à un marché avec ces derniers. Mais tu n’as pas été suffisamment sur tes gardes, pour une fois. Voilà que tu es l’objet de la sentence. Décision écrite, lâcheté dont tu devais te douter. Ils auraient pu au moins te le dire en face, montrer le peu d’honneur familial qu’ils ont. Si ce courrier venait d’eux. Et toi, les incertitudes, tu les piétinais pour toujours y dégager la vérité.
T’es là, en face de celui auquel la lettre te lie. Tu ne le connais pas vraiment, tu ne sais pas s’il est capable de te manipuler. Forcément, tu as des doutes. En revanche, s’ils s’avèrent vrais, tu laisserais de côté la préoccupation pour ce que tu sais faire de mieux : la démolition. « Parce que tu crois vraiment qu'on pourrait ressentir de l'amour pour toi?... T'es complètement cinglée ma pauvre... » Un sourire éphémère se dessine sur ton visage. Tu ne t’attendais pas à ce genre de propos introductifs. Pour le coup, il a du caractère. Mais au jeu de celui qui a le plus de mordant, tu sièges sur le trône. « Tu ne me connais pas assez pour savoir que c’est ce qui fait mon charme. » En tous cas, c’est ce que tu estimes. T’as rien des femmes lisses et sans personnalité. Toi, t’es de celles qui prennent de la place à travers leur caractère flamboyant. Vive lumière, bombe à retardement. Il sort un papier qu’il déplie de la même manière que toi quelques instants avant. T’analyses rapidement son contenu. Du portugais. « Je comprends rien à votre langue de barbares. » Si. Mais c’est l’occasion qu’il te fallait pour lancer une pique. Toujours. Tu soupires, attrapant le courrier, et le places au-dessus du tien, commençant la lecture. En même temps, tu compares la calligraphie, écoutant à moitié les commentaires de ton interlocuteur. Aucune similitude, rien. Tu lui jettes son papier dans les mains, la tension parlant. « Tu pensais sérieusement que je t'avais écrit cette lettre? » Tu roules des yeux, l’évidence pourtant très apparente. « Pourquoi je serai là sinon ? » Tu soupires de nouveau. La résilience. C’est donc vrai. La déception, sentiment passager, vient se mêler à la raideur déjà présente. « Je me demande comment tes parents ont su attiser l’attention des miens. » Tu marques une pause, regard vénéneux. « A part des favelas, je ne vois pas ce que vous avez d’autres. » Pas de finesse, marqueur d’un sarcasme dont tu aimes abuser. Néanmoins, ça mène à une question importante. Pourquoi lui ?
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