Fin mai 2018 - RED HOT CHILI PEPPERS - five guys.

Je suis devant l'immeuble. Affalée sur l'un des canapés moelleux ornant le grand salon, la française sursaute, surprise par le son strident que vient d'émettre le smartphone négligemment posé sur la table basse. Elle ne maîtrise qu'assez peu cette sombre technologie moldue, et celle-ci fait décidément beaucoup trop de bruit à son goût. Fixant l'écran de l'appareil, la gamine se mord nerveusement la lèvre. Elle vient de se rendre compte de quelque chose qu'elle avait complètement oublié. En cette fin du mois de mai, la cinquième chambre de l'appartement est restée tristement vide pendant près d'un mois, et aujourd'hui, enfin, un nouveau locataire est susceptible de venir l'occuper. En panique, la française arrache brusquement ses fesses vissées au canapé et se précipite dans le couloir en hurlant comme une hystérique, ne songeant absolument pas que Jazmin, Arianna et Levi étaient peut-être en train de faire la sieste ou un truc dans le genre. « Putain les gars, j’avais complètement oublié mais c’est aujourd’hui que le mec intéressé par la chambre vient visiter l’appart’ ». Elle est bien trop influencée par ses cours de théâtre, la gamine, et se met à faire de grands gestes d'un air démesurément dramatique. Plantée sur le pas de la porte de la chambre de Jazmin, Aude croise le regard interloqué de l'américaine. « Ne me dis pas que j'avais oublié de vous en parler ». Oh. Merde. Il lui suffit de prononcer ces quelques mots pour se rendre compte qu'effectivement, la visite de ce potentiel nouvel arrivant lui était complètement sorti de la tête. Elle est pourtant d'ordinaire assez organisée, la française, mais entre ses milliards de cours, ses scripts et ses partitions à apprendre, et les examens approchant à grands pas, la location de la chambre vacante de l'appartement reste le cadet de ses soucis. « Ok, pas de panique, tout va bien se passer ». « Essayez juste d'avoir l'air présentables et pas trop bordéliques ». Si Aude reste relativement ordonnée, voire un peu maniaque sur les bords, ce n'est pas forcément le cas de tout le monde dans la colocation.   Elle n'ose d'ailleurs même pas jeter un oeil dans le frigo pour vérifier que rien n'est en train d'y moisir - un reste de fromage ou de bouffe asiatique, par exemple, et ne se risque pas à inspecter les autres chambres. Tout est sous contrôle. Respire. Alors que la française s'agite dans tous les sens, les secondes s'écoulent, et le fameux Lincoln qui l'avait contactée il y a quelques jours attend toujours comme une plante verte devant la porte de l'immeuble. « Je descends le chercher du coup » elle lance à tue tête en arpentant le couloir de l'appartement de ses pantoufles licornes. Dans sa précipitation, la jeune femme oublie royalement de révéler l'identité de la personne qui fera irruption chez eux un dimanche à ses colocataires. Elle ne connaît elle-même que très peu Lincoln, ne l'ayant aperçu qu'en compagnie de Giuseppe, et estime que la plupart des membres des red hot ne doivent pas le connaître non plus. Lancée dans les escaliers de l'immeuble, la française dévale les marches des quatre étages, consciente que le lufkin patiente déjà depuis dix bonnes minutes. Alors qu'elle ouvre la porte d'entrée à la volée et qu'elle tombe sur Lincoln, elle peine encore à reprendre sa respiration. « Vraiment désolée de t'avoir fait attendre »  elle lâche simplement, essoufflée, en l'invitant à entrer dans l'immeuble et à la suivre. Alors, la gamine s'engouffre de nouveau dans la cage d'escaliers, Lincoln sur ses talons. « J'avais un peu oublié que tu devais venir visiter l'appart' aujourd'hui, alors on va dire qu'il est peut-être pas sous son meilleur jour ». Euphémisme. Arrivant enfin au quatrième et dernier étage, la française pénètre de nouveau dans le vaste appartement, et se retient à grand peine de grimacer lorsqu'elle se rend compte qu'aucun des membres de la colocation n'a jugé utile de ne pas laisser traîner sa vaisselle du midi partout dans la pièce. « Les gars, on a un invité » elle lance de nouveau, en espérant que les autres finissent par sortir de leurs tanières pour venir à sa rescousse. Elle est définitivement dépassée par les évènements, Aude, mais elle décide tout de même de faire de son mieux pour donner envie à Lincoln de les rejoindre.

Fin mai 2018 - RED HOT CHILI PEPPERS - five guys.

Un horrible mal de tête, cette envie de vomir ses tripes tout en jurant que c’était la dernière. Encore. Elle a bu la gamine en bonne Wright ; fêtant hier soir … Fêtant quoi déjà ? Peu importe la belle n’a jamais eu besoin d’une raison pour se mettre une murge de toute façon. Dans son lit, bassine qu’elle chérit dans ses bras, elle se meurt depuis deux heures.  Elle chouine ; enfant qui n’assume jamais rien. C’est qu’elle n’arrive pas à dormir en plus. Comment c’est possible ? C’est simple. Il y en a une qui hurle devant la porte de sa chambre, elle crie des choses que l’Américaine ne comprend qu’à moitié. Tais-toi ! Aude. Si elle l’aime d’un amour sincère, la gamine n’a qu’une seule envie là tout de suite : la tuer sur place pour qu’elle se taise à jamais. C’est qu’elle est susceptible Jazmin quand elle cuve … Non, quand elle est sobre aussi en fait. Avada kedavra. Ça la démange, mais c’est interdit parait-il. Dommage. Elle se lève difficilement, bouge sa carcasse ; mort vivante qui survit plus qu’elle ne vit actuellement. La magie du whisky pur-feu c’est super bon, mais ça ravage ; le cerveau, les tripes, tout. Elle se pose à l’entrée de la chambre, s’appuyant pour ne pas tomber. Elle est encore un peu – beaucoup ? – saoul. Affûtée d’un simple t-shirt d’homme trop grand pour elle en guise de chemise de nuit. Elle regarde son amie d’enfance, cernée, vidée par la nuit qu’elle vient de passer. « C’est toi qui est en train de paniquer. » Ah c’est qu’il a bien choisi son jour le nouveau. Jazmin est presque certaine qu’il va repartir aussi vite qu’il est venu en plus. Les gens qui vivent ici sont … Particuliers. Un panel de plusieurs personnalités. « Présentable ? J’en suis presque à oublier mon nom là, ne m’en demande pas trop. » Dit-elle, petit sourire sur le visage face au regard réprobateur de la jolie Aude. Elle n’a pas l’air comme ça, mais il ne faut pas trop la titiller la française ; cette histoire de dernière chambre lui tient à cœur bien qu’elle ait oublié le nouvel arrivé. C’est de sa faute aussi, quelle idée de faire ça un dimanche matin. Samedi soir sacré, il n’existe dans le calendrier que pour s’amuser, boire et décompresser … Aude partit ; Jazmin entre dans la chambre de Levi. Sans toquer, ni s’annoncer. Abrupte. Elle se fiche pas mal de la bienséance la gamine. Il aurait très bien pu conclure, qu’elle n’aurait pas sourciller. Et puis c’est lui ; l’acolyte, partenaire de conneries. Il a l’habitude de supporter la tornade exotique. « Lâches ta brindille, faut qu’on accueille ‘correctement’ le nouveau. » Humour, bonjour. Jazmin continue son avancée, entrant dans la cuisine là où se trouve Arianna. Salutation d’un signe de main. Douce odeur de pancake qui plane, annonçant un petit déjeuner parfait. En bonne Américaine c’est agréable, mais qui lui donne des hauts le cœur pourtant. Assis toi, respires, ça ira. Elle se prend un jus d’orange, au moment où Aude revient en compagnie du nouveau venu. Elle se retourne, et voit. Lincoln. « Je crois qu’on va s’amuser finalement. » Elle esquisse un sourire, regardant le jeune homme.