Les cours ont repris sous la neige. Mon emploi du temps, allégé par le fait d’avoir arrêté de suivre le cours de médias moldus et sorciers, est tout de même chargé. Dans un craquement, j’apparais à l’entrée du manoir. Les talons claquant sur le paquet du salon, j’échoue sur le canapé, poussant un énorme soupir, d’une manière qui contraste avec mon apparence tirée à quatre épingles. Jetant mon sac à mes pieds, je regarde les parchemins se déverser sur le sol d’un air dédaigneux. Un soupir me soulève la poitrine et je souffle fort. Aucun de mes colocataires n’est en vue, et c’est tant mieux. Jamais je n’aurais accepté qu’ils me voient ainsi. Lançant mes escarpins à travers la pièce, je masse mes pieds endoloris. Cette journée a été harassante, et maintenant est le seul moment où je peux me poser. Ce matin, j’ai revu Elios. Il semblerait qu’il n’ait pas décidé d’arrêter de suivre le cours de sciences politiques, et de ce fait, je n’ai rien suivi du cours. Une grande honte m’a d’ailleurs envahie lorsque Miss Rosebury m’a interpellée à la sortie, me rappelant notre entrevue la semaine prochaine, pour discuter de ma thèse. Puis j’ai passé l’après-midi au ministère, sans trouver le temps de me poser cinq minutes pour souffler, tellement il y avait de choses à faire.

Je regarde ma montre. Dix-neuf heures. Robin devrait bientôt arriver. Décrochant les épingles de mon chignon, je laisse mes cheveux noirs tomber sur mes épaules, me massant le crâne. La perspective de passer la soirée à réviser ne m’enchante pas des masses. Voire même, m’afflige. Ma vie affective est un vrai foutoir, et j’ai de plus en plus de mal à réussir à faire le tri entre mon coeur et ma raison. Ma rencontre avec le Texan, dans sa loge avant les vacances, où je me suis fait littéralement virer après lui avoir ouvert mon coeur, m’a blessée. Lors de ces vacances en Norvège, j’ai eu mon premier essayage de ma robe de mariée. La perspective de me lier à Gabriel continue toujours de me révulser, mais mon fiancé semble prendre son rôle au sérieux et se tient à carreaux. Et enfin, pour m’achever, le retour de Svein. Des larmes me montent aux yeux alors que son corps frêle et faible me revient en tête. C’est le moment choisi par la sonnette pour résonner dans la pièce. Pieds nus, cheveux en bataille, yeux humides, je m’avance lentement pour ouvrir la porte. Mon ami se trouve derrière, et la vue de son visage enthousiaste m’arrache un sanglot. "Hi." Je le laisse rentrer dans la bâtisse, essayant de sécher mes larmes. "I don’t think I’ll be much help with homework tonight." Sourire désolé adressé à cet ami, tellement différent de tous les autres. Avec lui, je peux être moi-même, je peux laisser tomber le masque, faire éclater la façade de princesse.

info importante:

darling just hold on

ft. @irina nygården song by steve aoki (listen)

Les cours qui viennent de reprendre et t'es absolument détruit de l'intérieur. Les cicatrices qui constellent ton corps et aucun aveu qui a franchi tes lèvres. Personne sait. Personne doit savoir. Sourires et blagues à tout va, comme d'hab, mais la nuit tu te réveilles en sueur, les blessures qui hurlent de douleur, un cri coincé dans la gorge. Pourtant faut faire semblant. Tu traînes ta carcasse en cours, t'échanges des banalités sur les vacances de Noël, la soirée du nouvel an, les vœux de bonne année qui fusent dans les couloirs alors que la tienne a déjà été déchiquetée au-delà de toute compréhension. Le cerveau qui pédale dans la semoule, t'arrives toujours pas à savoir pourquoi. Pourquoi toi, pourquoi ça, pourquoi là, pourquoi pourquoi pourquoi, et ça tourne dans ta tête et ça te rend dingue, l'envie de te fracasser le crâne contre les murs de l'université qui devient de plus en plus dure à résister. T'oses même plus approcher le squad, de peur qu'ils voient tes blessures dans le fond de tes yeux, de peur qu'ils te jugent, te rejettent, de peur tu sais même pas vraiment de quoi. Comme une envie de préservation. Pourtant tu peux pas échapper à ta séance révisions de ce soir avec ta princesse préférée. Léger sourire qui s'esquisse alors que tu sonnes chez elle, sourire qui s'évanouit quand tu vois ses yeux humides et son allure complètement défaite. T'as l'habitude de la voir décontractée, pas tirée à quatre épingles comme elle peut l'être à l'université -privilège de l'intimité sûrement-, mais là c'est pas de la décontraction, c'est de la négligence, du désespoir qui transpire par tous les pores de sa peau. Tous tes problèmes s'évanouissent face à cette nouvelle menace, distraction bienvenue de tes propres soucis, autrement plus graves qu'un cœur brisé. Et tu sais pas dans quoi tu t'embarques alors que tu la suis, une main posée sur son épaule et la voix inquiète. « What's wrong? Wanna talk about it? Homework can wait, honestly. We're definitely not behind on course work. » Euphémisme teinté d'un sourire. Pourtant t'as jamais été bon en conseils Robin. T'es plutôt le genre de pote à lâcher les blagues à tout va pour détendre l'atmosphère, parce que les émotions et les sentiments, tu sais pas faire. Mais toute occasion est bonne pour repousser ton traumatisme au fin fond de ta pensée, et t'es prêt à n'importe quoi pour oublier.

BY CΔLΙGULΔ ☾

Je crois que j’ai une tête à faire peur. En tout cas, c’est l’impression que me donne Robin quand je lui ouvre. D’un petit sourire, qui s’évanouit rapidement, il prend un air soucieux. Je le laisse entrer dans un sanglot, et tente quelques mots d’humour pour excuser mon état. Mais l’humour retombe comme un soufflé, cela n’a jamais été mon fort après tout. Et le Summerbee l’a bien remarqué. “What's wrong? Wanna talk about it? Homework can wait, honestly. We're definitely not behind on course work.” Mes lèvres s’étirent en un sourire triste, mimant celui du sorcier. Main qui passe dans mes cheveux, pour avoir l’impression de faire quelque chose. Soupir qui me soulève la poitrine. “I don’t think rich girls’ problems are worth talking about.” Haussement d’épaule désolé, pourtant qu’est-ce que j’aimerais pouvoir en parler. Mais à qui ? Tzvetelina est clairement un mauvais choix. Meilleure amie de mon fiancé, rivale d’Elios, et son histoire avec Svein la met hors compétition directement. Kiko ? Connaissant le tempérament de la japonaise, elle me pousserait à rompre mes fiançailles directement. Puis vu comment elle est proche de Jazmin, impossible que je m’épanche sur la situation Flores. Et Robin, et bien… Je pense qu’il a mieux à faire que m’entendre me plaindre, alors que je suis tellement plus privilégiée que lui. Faisant de mon mieux pour sécher mes larmes, je l’invite à s’installer sur le canapé, déplaçant mon sac pour faire plus de place. Comme s’il n’y en avait déjà pas assez. “My landlord wants me to move out by the end of the week.” Avec un peu de chance, le Summerbee pensera que mes larmes étaient motivées par cette nouvelle. Alors que je ne suis pas vraiment dérangée par le fait de me faire expulser de ma demeure. Après tout, j’y ai emménagé en Novembre, seulement. J’ai juste à trouver une solution de repli rapide, sinon je retournerai vivre à l’Université. “What about you, how are you ?” Regard soucieux alors que je m’installe à mon tour sur le canapé. Je ne l’ai pas beaucoup croisé, depuis la rentrée. J’espère qu’il va bien.