- InvitéInvité
As It Seems [PV]
Sam 17 Avr 2021 - 19:05
As it seems
Aveleen O’Donnell
Cause this life is as
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
2 mars 2021 – 16 h
Oscar avait quitté l’ébullition du ministère pour se rendre à Hungcalf. Il avait laissé derrière lui les membres de son équipe et avait même confié à son stagiaire là dure tâche de donner un dossier secondaire à Beth Crowley. Surement que le charme de @Mikhail Blackthorn saurait faire face à l’impétuosité de la directrice adjointe du quartier des oubliators. Le diplomate avait de son côté des réponses à obtenir sur un sujet bien plus discret et bien plus frivole que ce qui occupait le ministère actuellement. Il prenait ce répit avec confiance et détermination et n’avait pas regardé une seule fois en arrière lorsqu’il avait quitté le bureau qui était le siens. Il avait emprunté le réseau de cheminettes proposé par l’administration et surveillé depuis les évènements qui s’étaient déroulés la semaine passée. Il en fallait beaucoup pour tirer l’américain d’une affaire aussi importante, mais tant que le bureau des aurors n’avaient pas fait leur travail, il n’était guère en mesure de faire le siens. Il regrettait de ne pas pouvoir faire davantage, mais profitait également de ce manque de responsabilité pour enquêter sur des sujets qui étaient plus personnels et presque aussi important. Il fallait dire que la surprise avait été grande lorsqu’@Alice Hangbé lui avait mis sous le nez le dernier numéro de Life Magazine. La benjamine lui avait apporté la version moldue du magazine, imprimé sur un papier glacé extrêmement côté qui donnait de la valeur au journal, le parant de milles couleurs. Ce n’étaient nullement des couleurs qu’Oscar s’était attendu à voir en première de couverture, mais un portrait d’une simplicité déroutante qui ne faisait que souligner la complexité du visage de l’être humain que le photographe avait figé dans le temps. Au lieu de voir une image intemporelle, une image qui n’aurait pas manquer d’apporter gloire à son auteur, il ne voyait rien de transcendant. Rien d’autre que le sentiment d’avoir perdu de son temps et de son argent.
Oscar n’avait jamais eu l’esprit très artistique et ne c’était intéressé à l’art photographique que lorsque son supérieur à la mairie de New York l’avait mis sur le projet d’un vernissage. Il avait d’abord pesté, protestant qu’il n’était pas là pour faire de l’organisation d’évènements mondains et puis c’était résigné à la situation avant de finalement complètement tomber sous le charme des photos qu’on avait mis sous ses prunelles sombres. Oscar était rapidement devenu un mécène important dans la carrière artistique d’Aveleen O’Donnell. Un rôle qu’il avait pris au sérieux. Il était allé à presque toutes ses expositions, n’avait pas manqué un vernissage, n’était jamais avare de conseil et de proposition pour la carrière de la jeune femme – et la bonne santé de son investissement.
Le diplomate avait donc quitté la sombre liesse du ministère pour discuter de cette première de couverture avec celle qu’il considérait comme étant la principale concernée. Il avait récupéré l’emplois du temps de l’irlandaise sans grande difficulté, ayant lui-même besoin de connaître les horaires et les lieux de ces propres interventions. Il n’avait fait que lui envoyer une carte à son retour sur les îles britanniques, la félicitant pour son nouveau rôle au sein de l’université. Il n’aurait jamais pensé que ce nouveau travail avait été choisi au détriment de l’ancien et regrettait largement les derniers choix de carrière de son amie. Il espérait pouvoir en discuter avec elle face à face, mais la connaissait assez pour savoir qu’aborder le sujet ne serait pas une partie de plaisir. Il était déterminé, cependant, et, le dernier numéro de Life Magazine enroulé dans sa main de boxeur, Oscar déambulait dans les couloirs de son ancienne université en direction de la salle de classe d’Aveleen. Là, il attendit patiemment, épaule contre le mur, feuilletant, le visage fermé, le fameux graal qu’il avait offert à la sorcière sur un plateau d’argent. Il releva le regard au grincement d’ouverture de la porte de bois qui libéra rapidement un flot d’élèves tous plus jeunes les uns que les autres. Le diplomate observa quelques instants les visages, recherchant certains qui pouvaient potentiellement travailler au ministère en tant que stagiaire, qu’il s’agisse d’apporter le café à un énième fonctionnaire ou d’être déjà impliqués dans certaines décisions délicates. Aucun nom ne lui vint vraiment en tête et il se contenta alors de rester de marbre au signe de tête qu’on lui offrait. Lorsque le flux d’étudiant pressé d’aller prendre un gouter fut moindre, il entra. Une étudiante à la chevelure dorée manqua de lui rentrer dedans, mais un réflexe de combattant lui permis d’éviter l’accident et il reprit sa marche tranquille vers le bureau de l’enseignante.
« Professeur O’Donnell, ravi de vous revoir !» salua-t-il l’Irlandaise, d’un ton mielleux, presque trop. Un ton qui n’annonçait pas la meilleure des discussions. La blonde devait s’en douter cependant, puisqu’il posa le magazine sur son bureau de bois et laissa glisser le papier glacé jusqu’à ce qu’il percute les documents de la sorcière. « Life Magazine titre ‘’Mckoy révolutionne l’art abstrait et nous offre la vie en couleur dont nous rêvions.’’ » lu avec précision le diplomate, appuyant de son index le nom précédemment cité, là ou aurait dû être celui de l’Irlandaise. « Qu’est-ce qui s’est passé ? » questionna-t-il simplement, laissant l’honnêteté et la véracité de son ton traduire son état d’esprit. Il n’était pas ravi de ce retournement de situation et avait tout fait pour apporter un juteux contrat à son amie. Pour l’avoir refusé, elle devait avoir eu une bonne raison, une très bonne raison et il ne s’encombrerait pas de la politesse qu’il usait lors de ces journées de travail pour l’obtenir. Il n’avait jamais pris de pincette avec l’artiste, s’émerveillant des clichés qu’elle lui présentait parfois en avant-première, l’aidant au mieux de ces capacités. Il n’était cependant pas là pour l’impression ou lui faire regretter sa décision. Il ne comptait pas rouler des épaules et faire en sorte d’obtenir ce qu’il voulait. Il avait depuis bien longtemps passé ce stade. Il ne faisait qu’user de l’honnêteté parfois désagréable qui berçait leur amicale relation et qui l’avait amené jusque-là, dans cette salle de classe.
Oscar avait quitté l’ébullition du ministère pour se rendre à Hungcalf. Il avait laissé derrière lui les membres de son équipe et avait même confié à son stagiaire là dure tâche de donner un dossier secondaire à Beth Crowley. Surement que le charme de @Mikhail Blackthorn saurait faire face à l’impétuosité de la directrice adjointe du quartier des oubliators. Le diplomate avait de son côté des réponses à obtenir sur un sujet bien plus discret et bien plus frivole que ce qui occupait le ministère actuellement. Il prenait ce répit avec confiance et détermination et n’avait pas regardé une seule fois en arrière lorsqu’il avait quitté le bureau qui était le siens. Il avait emprunté le réseau de cheminettes proposé par l’administration et surveillé depuis les évènements qui s’étaient déroulés la semaine passée. Il en fallait beaucoup pour tirer l’américain d’une affaire aussi importante, mais tant que le bureau des aurors n’avaient pas fait leur travail, il n’était guère en mesure de faire le siens. Il regrettait de ne pas pouvoir faire davantage, mais profitait également de ce manque de responsabilité pour enquêter sur des sujets qui étaient plus personnels et presque aussi important. Il fallait dire que la surprise avait été grande lorsqu’@Alice Hangbé lui avait mis sous le nez le dernier numéro de Life Magazine. La benjamine lui avait apporté la version moldue du magazine, imprimé sur un papier glacé extrêmement côté qui donnait de la valeur au journal, le parant de milles couleurs. Ce n’étaient nullement des couleurs qu’Oscar s’était attendu à voir en première de couverture, mais un portrait d’une simplicité déroutante qui ne faisait que souligner la complexité du visage de l’être humain que le photographe avait figé dans le temps. Au lieu de voir une image intemporelle, une image qui n’aurait pas manquer d’apporter gloire à son auteur, il ne voyait rien de transcendant. Rien d’autre que le sentiment d’avoir perdu de son temps et de son argent.
Oscar n’avait jamais eu l’esprit très artistique et ne c’était intéressé à l’art photographique que lorsque son supérieur à la mairie de New York l’avait mis sur le projet d’un vernissage. Il avait d’abord pesté, protestant qu’il n’était pas là pour faire de l’organisation d’évènements mondains et puis c’était résigné à la situation avant de finalement complètement tomber sous le charme des photos qu’on avait mis sous ses prunelles sombres. Oscar était rapidement devenu un mécène important dans la carrière artistique d’Aveleen O’Donnell. Un rôle qu’il avait pris au sérieux. Il était allé à presque toutes ses expositions, n’avait pas manqué un vernissage, n’était jamais avare de conseil et de proposition pour la carrière de la jeune femme – et la bonne santé de son investissement.
Le diplomate avait donc quitté la sombre liesse du ministère pour discuter de cette première de couverture avec celle qu’il considérait comme étant la principale concernée. Il avait récupéré l’emplois du temps de l’irlandaise sans grande difficulté, ayant lui-même besoin de connaître les horaires et les lieux de ces propres interventions. Il n’avait fait que lui envoyer une carte à son retour sur les îles britanniques, la félicitant pour son nouveau rôle au sein de l’université. Il n’aurait jamais pensé que ce nouveau travail avait été choisi au détriment de l’ancien et regrettait largement les derniers choix de carrière de son amie. Il espérait pouvoir en discuter avec elle face à face, mais la connaissait assez pour savoir qu’aborder le sujet ne serait pas une partie de plaisir. Il était déterminé, cependant, et, le dernier numéro de Life Magazine enroulé dans sa main de boxeur, Oscar déambulait dans les couloirs de son ancienne université en direction de la salle de classe d’Aveleen. Là, il attendit patiemment, épaule contre le mur, feuilletant, le visage fermé, le fameux graal qu’il avait offert à la sorcière sur un plateau d’argent. Il releva le regard au grincement d’ouverture de la porte de bois qui libéra rapidement un flot d’élèves tous plus jeunes les uns que les autres. Le diplomate observa quelques instants les visages, recherchant certains qui pouvaient potentiellement travailler au ministère en tant que stagiaire, qu’il s’agisse d’apporter le café à un énième fonctionnaire ou d’être déjà impliqués dans certaines décisions délicates. Aucun nom ne lui vint vraiment en tête et il se contenta alors de rester de marbre au signe de tête qu’on lui offrait. Lorsque le flux d’étudiant pressé d’aller prendre un gouter fut moindre, il entra. Une étudiante à la chevelure dorée manqua de lui rentrer dedans, mais un réflexe de combattant lui permis d’éviter l’accident et il reprit sa marche tranquille vers le bureau de l’enseignante.
« Professeur O’Donnell, ravi de vous revoir !» salua-t-il l’Irlandaise, d’un ton mielleux, presque trop. Un ton qui n’annonçait pas la meilleure des discussions. La blonde devait s’en douter cependant, puisqu’il posa le magazine sur son bureau de bois et laissa glisser le papier glacé jusqu’à ce qu’il percute les documents de la sorcière. « Life Magazine titre ‘’Mckoy révolutionne l’art abstrait et nous offre la vie en couleur dont nous rêvions.’’ » lu avec précision le diplomate, appuyant de son index le nom précédemment cité, là ou aurait dû être celui de l’Irlandaise. « Qu’est-ce qui s’est passé ? » questionna-t-il simplement, laissant l’honnêteté et la véracité de son ton traduire son état d’esprit. Il n’était pas ravi de ce retournement de situation et avait tout fait pour apporter un juteux contrat à son amie. Pour l’avoir refusé, elle devait avoir eu une bonne raison, une très bonne raison et il ne s’encombrerait pas de la politesse qu’il usait lors de ces journées de travail pour l’obtenir. Il n’avait jamais pris de pincette avec l’artiste, s’émerveillant des clichés qu’elle lui présentait parfois en avant-première, l’aidant au mieux de ces capacités. Il n’était cependant pas là pour l’impression ou lui faire regretter sa décision. Il ne comptait pas rouler des épaules et faire en sorte d’obtenir ce qu’il voulait. Il avait depuis bien longtemps passé ce stade. Il ne faisait qu’user de l’honnêteté parfois désagréable qui berçait leur amicale relation et qui l’avait amené jusque-là, dans cette salle de classe.
Made by Neon Demon
- InvitéInvité
Re: As It Seems [PV]
Lun 19 Avr 2021 - 1:35
Aveleen redressa à peine la tête en entendant la démarche royale, ses yeux s’égarant à la périphérie de son champ de vision un bref instant, avant de replonger vers les notes de cours qu’elle était en train de réorganiser. Une moue perplexe donnait à son visage un air contrarié, qui venait étirer ses yeux pour en plisser la commissure alors qu’elle entreprenait posément de refermer les petits flacons d’encre alignés sur son bureau. Avec une infinie lenteur, elle enfonça un capuchon dans son écrin de verre, puis un autre, le regard obstinément concentré à sa tache.
— Professeur O’Donnel, arma l’invité surprise — la surprise résidant surtout dans le fait qu’il ait attendu la fin de son cours pour venir lui exposer sa contrariété - d’une voix s’égarant quelque part entre l’ironie et sarcasme, ravi de vous revoir !
Un bruit mat accompagna sa salutation saveur aigre douce. Les yeux limpides de la photographe se posèrent sur le prestigieux magasine, avant d’enfin remonter vers ceux d’Oscar Hangbé. Elle tergiversait encore sur la marche à suivre, et derrière le voile de ses prunelles, divers scénarios défilaient en filigranes. Devait-elle se glisser sur l’humeur de son interlocuteur, l’air de rien, ou était-il plus prudent de le laisser décocher toutes les flèches de son arc avant de daigner contre attaquer ? Dans le doute, elle inclina légèrement la tête sur la gauche tout en lui offrant son plus beau sourire : celui qu’elle avait inauguré lors de diverses manifestations caritatives et polie contre les regards acérés de tous les politiciens qui les arpentaient. Dont lui.
— Life Magazine titre « McKoy révolutionne l’art abstrait et nous offre la vie en couleur dont nous rêvions » eut-il le plaisir de lui faire la lecture, son index fermement appuyé contre le nom du dit McKoy.
Voilà exactement ce que la photographe redoutait. Ce genre de confrontation typiquement agressive qui était la marque de fabrique d’un de ses plus anciens amis : pas un mot plus haut que l’autre durant le premier quart-temps, mais une menace dissimulée et insidieuse, planant au dessus d’elle comme un orage, prêt à éclater au dessus du terrain de leur discorde d’un instant à l’autre.
— Qu’est-ce qui s’est passé ? S’agaça-t-il, avec cette façon de formuler chaque syllabe comme le couperet d’une sentence sans vraiment s’en donner l’air.
— J’imagine qu’ils ont dû aimer son travail ? Proposa-t-elle en feignant l’innocence, ancrant d’un geste vague un coude contre la table pour venir appuyer son menton contre sa paume ouverte. C’est vrai qu’il est doué, Mckoy, poursuivit-elle, ses doigts libres occupés à tourner les pages de la revue de photographie jusqu’à trouver le dossier lui étant concerné, qu’elle parcouru des yeux un instant.
Évidemment, cela n’était pas là que son mécène d’ami voulait en venir, et la photographe le savait tout aussi pertinemment qu’il lui fallait accepter qu’il ne lâcherait pas l’affaire. Pas avant de l’avoir soigneusement décortiquée, démembrée jusqu’à l’origine ayant conduit à dévier du plan qu’il avait conçu méticuleusement dans son coin, le tout agrémenté de ses remarques et indignations, avant de lui recracher le tout dans un concert de reproches, sans aucune délicatesse.
Le monde du Mécénat obéissait à des règles bien établies, où la richesse ne côtoyait pas forcément le bon goût mais ou le premier permettait souvent de s’acheter le second. Mais Aveleen avait décroché le gros lot avec Oscar : sur la pyramide sociale sorcière, les Hangbé étaient solidement ancrés sur le plus haut promontoire, tout aussi solidement que leur renommée traversait aisément les continents. Ils avaient les fonds, l’influence, le bon goût et l’intelligence pour correctement mélanger tous ces ingrédients. Oscar Hangbé était son porte-feuille et elle était la pépite artistique dont il pouvait se vanter en société d’être le généreux donateur. Un contrat dont ils étaient tous les deux conscients et qui avaient toujours rendus leurs rapports aisés parce qu’honnêtes. Oscar n’avait jamais caché désirer pouvoir bénéficier des retombés de son travail, pas plus qu’elle n’avait dissimulé avoir besoin qu’il investisse dans un nouveau voyage. Le contrat avait toujours était très clair. Et parmi tous les alinéas, dont aucun n’était vraiment inscrit dans un quelconque acte notarié, mais que pourtant tous deux connaissaient, la règle tacite selon laquelle on ne refusait pas la meilleure proposition de sa carrière, détrônait probablement toutes les autres. Néanmoins, la photographe, qui ne manquait ni de gratitude envers lui, ni de caractère, se confessa sans que sa voix ne faillisse ni ne trahisse de culpabilité :
— J’ai refusé leur proposition, fit-elle sans s’appesantir sur les détails, ses yeux défiant ceux de celui qu’elle considérait comme faisant parti de son cercle proche.
Soigneusement, elle retourna le magasine vers Oscar, son doigt joliment manucuré de nacre tapotant le sigle Copyright que l’on pouvait religieusement trouver sous chaque œuvre.
— Je sais que ce n’est pas ta branche de prédilection juridique, la propriété intellectuelle, mais dis moi, à quel moment as-tu confondu notre partenariat avec une possession de mes clichés t’autorisant à les divulguer pour faire ma promotion ? Contre attaqua-t-elle d’une voix tout aussi sucrée que son regard ne s’était soudain fait amer.
@Oscar Hangbé
— Professeur O’Donnel, arma l’invité surprise — la surprise résidant surtout dans le fait qu’il ait attendu la fin de son cours pour venir lui exposer sa contrariété - d’une voix s’égarant quelque part entre l’ironie et sarcasme, ravi de vous revoir !
Un bruit mat accompagna sa salutation saveur aigre douce. Les yeux limpides de la photographe se posèrent sur le prestigieux magasine, avant d’enfin remonter vers ceux d’Oscar Hangbé. Elle tergiversait encore sur la marche à suivre, et derrière le voile de ses prunelles, divers scénarios défilaient en filigranes. Devait-elle se glisser sur l’humeur de son interlocuteur, l’air de rien, ou était-il plus prudent de le laisser décocher toutes les flèches de son arc avant de daigner contre attaquer ? Dans le doute, elle inclina légèrement la tête sur la gauche tout en lui offrant son plus beau sourire : celui qu’elle avait inauguré lors de diverses manifestations caritatives et polie contre les regards acérés de tous les politiciens qui les arpentaient. Dont lui.
— Life Magazine titre « McKoy révolutionne l’art abstrait et nous offre la vie en couleur dont nous rêvions » eut-il le plaisir de lui faire la lecture, son index fermement appuyé contre le nom du dit McKoy.
Voilà exactement ce que la photographe redoutait. Ce genre de confrontation typiquement agressive qui était la marque de fabrique d’un de ses plus anciens amis : pas un mot plus haut que l’autre durant le premier quart-temps, mais une menace dissimulée et insidieuse, planant au dessus d’elle comme un orage, prêt à éclater au dessus du terrain de leur discorde d’un instant à l’autre.
— Qu’est-ce qui s’est passé ? S’agaça-t-il, avec cette façon de formuler chaque syllabe comme le couperet d’une sentence sans vraiment s’en donner l’air.
— J’imagine qu’ils ont dû aimer son travail ? Proposa-t-elle en feignant l’innocence, ancrant d’un geste vague un coude contre la table pour venir appuyer son menton contre sa paume ouverte. C’est vrai qu’il est doué, Mckoy, poursuivit-elle, ses doigts libres occupés à tourner les pages de la revue de photographie jusqu’à trouver le dossier lui étant concerné, qu’elle parcouru des yeux un instant.
Évidemment, cela n’était pas là que son mécène d’ami voulait en venir, et la photographe le savait tout aussi pertinemment qu’il lui fallait accepter qu’il ne lâcherait pas l’affaire. Pas avant de l’avoir soigneusement décortiquée, démembrée jusqu’à l’origine ayant conduit à dévier du plan qu’il avait conçu méticuleusement dans son coin, le tout agrémenté de ses remarques et indignations, avant de lui recracher le tout dans un concert de reproches, sans aucune délicatesse.
Le monde du Mécénat obéissait à des règles bien établies, où la richesse ne côtoyait pas forcément le bon goût mais ou le premier permettait souvent de s’acheter le second. Mais Aveleen avait décroché le gros lot avec Oscar : sur la pyramide sociale sorcière, les Hangbé étaient solidement ancrés sur le plus haut promontoire, tout aussi solidement que leur renommée traversait aisément les continents. Ils avaient les fonds, l’influence, le bon goût et l’intelligence pour correctement mélanger tous ces ingrédients. Oscar Hangbé était son porte-feuille et elle était la pépite artistique dont il pouvait se vanter en société d’être le généreux donateur. Un contrat dont ils étaient tous les deux conscients et qui avaient toujours rendus leurs rapports aisés parce qu’honnêtes. Oscar n’avait jamais caché désirer pouvoir bénéficier des retombés de son travail, pas plus qu’elle n’avait dissimulé avoir besoin qu’il investisse dans un nouveau voyage. Le contrat avait toujours était très clair. Et parmi tous les alinéas, dont aucun n’était vraiment inscrit dans un quelconque acte notarié, mais que pourtant tous deux connaissaient, la règle tacite selon laquelle on ne refusait pas la meilleure proposition de sa carrière, détrônait probablement toutes les autres. Néanmoins, la photographe, qui ne manquait ni de gratitude envers lui, ni de caractère, se confessa sans que sa voix ne faillisse ni ne trahisse de culpabilité :
— J’ai refusé leur proposition, fit-elle sans s’appesantir sur les détails, ses yeux défiant ceux de celui qu’elle considérait comme faisant parti de son cercle proche.
Soigneusement, elle retourna le magasine vers Oscar, son doigt joliment manucuré de nacre tapotant le sigle Copyright que l’on pouvait religieusement trouver sous chaque œuvre.
— Je sais que ce n’est pas ta branche de prédilection juridique, la propriété intellectuelle, mais dis moi, à quel moment as-tu confondu notre partenariat avec une possession de mes clichés t’autorisant à les divulguer pour faire ma promotion ? Contre attaqua-t-elle d’une voix tout aussi sucrée que son regard ne s’était soudain fait amer.
@Oscar Hangbé
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Re: As It Seems [PV]
Dim 25 Avr 2021 - 20:48
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Nothing's ever really
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2 mars 2021 – 16 h
Les salutations du diplomate avaient été mielleuses, vicieuses, bien peu adaptées à une amitié normale et sans différent. Ce lien qui l’unissait à l’Irlandaise n’avait rien d’une affection simple et sans prise de tête. Les caractères bien différents des deux êtres ne leur avait que rarement laissé avoir une discussion sans avis contraires. L’artiste et l’homme d’affaire avaient eus, avaient encore et allaient encore avoir deux façons bien distinctes de voir la vie. Si la photographe était bien plus humaine et plus rêveuse que l’américain, ce dernier estimait voir au-delà de l’art lui-même. Il n’avait pas la même sensibilité vis-à-vis des œuvres encore cachée de sa protégée. Des portraits aussi beau et puissant que ceux que prenait Aveleen ne pouvait décemment pas rester dans une pochette plastique au fond d’un placard. Oscar était parvenu à en sauver un de l’oubli, lui offrant une place de choix dans la penthouse qu’il partageait avec son frère aîné. Il conservait cependant les souhaits de la créatrice et ne révélait pas son nom lorsqu’un invité lui demandait l’origine de l’œuvre. Oscar avait été le témoin silencieux des doutes de l’Irlandaise quant aux quelques portraient qu’elle avait réalisé dans sa carrière. Il en avait été également le plus grand admirateur, pour ne pas dire le seul puisque ces clichés ne lui avaient été présenté qu’en huit-clos pour ne jamais être partagé au grand-publique. C’était d’ailleurs le principal sujet de discord entre le mécène et son artiste, l’américain et l’irlandaise. Il pouvait bien comprendre que certains portraient fixaient dans le temps la tristesse et l’inhumanité de certaines situations, mais n’était-ce pas là le but même du métier de l’Irlandaise ? Oscar en était convaincu, et si le diplomate n’avait pas le cœur sur la main, ni l’éthique développée, il trouvait tout de même que ces prises de vues au placard n’étaient pas rendues hommage, ni service, aux âmes qui y étaient figées à tout jamais. Alors il avait brisé le secret qu’était l’existence de ces œuvres d’art et en avait envoyé un échantillon à un magasine de renom, celui-là même qui avait par la suite fait une proposition à Aveleen. Cette dernière avait cependant saisie une tout autre opportunité qui était loin de faire plaisir à Oscar.
Et l’agacement transparaissait dans ses mots. Il ne se cachait pas, avec Aveleen et s’enrobait jamais ses propos dans un sirop de bonne manière et de faux-semblant. Il était franc avec elle – la plupart du temps – et cette dernière ne manquait pas de lui rendre la pareille. Feignant de quoi il était question, ne s’embarrant pas d’une politesse qu’ils connaissaient tout deux, l’Irlandaise n’avait fait qu’approuver le choix du magazine, feuilletant ces pages avec attention, ignorant de ses prunelles clairs le regard du diplomate. Son amie avait la capacité toute particulière de lui en faire voir de toutes les couleurs. Elle avait la candeur, la mine angélique et l’assurance nécessaire pour ne pas être écrasé par la puissance de parole de l’américain. En dehors de sa famille, il y en avait peu qui pouvait lui tenir tête comme ça. Deux anciennes Pies de Montroses, pour ne pas faire dans l’originalité : @Zahia Saouli et @Judith Thorne. La première parce qu’elle ne le connaissait que trop bien et ne se priverait jamais de lui ramener les pieds sur terre. La seconde parce qu’elle avait une importance toute particulière dans la vie du diplomate, comme une douce lueur au fond d’un long tunnel. Une lueur d’espoir, de vie.. Et d’amour ? Aveleen, elle, avait touché une autre corde sensible de l’américain : l’art, l’argent et l’honnêteté dans son plus simple appareil. Ils ne se racontaient pas tous, les deux amis et gardaient la pudeur de leur vie intime pour eux, mais pour le reste, tout y passait. Des opinions controversées aux avis artistiques partagés. Oscar appréciait chaque rencontre avec l’Irlandaise, mais ne pouvait pas dire que le début de celle-ci lui convenait. A la réponse de la jeune femme, le diplomate s’était contenté de soupirer et de lever les yeux au ciel. Il n’était pas venu là pour discuter de la légitimité du fameux McKoy, mais bien pour s’interroger sur les raisons du refus d’Aveleen à ce contrat pourtant juteux et prometteur.
Et la réponse tomba, évidente, comme le nez au milieu de la figure, comme un nuage dans le ciel Britannique. Elle avait refusé, évidement. Il le savait bien, c’était pour ça qu’il était là, et cet aveu irlandais ne répondait pas à ça question, il ne faisait que rendre plus réel la situation dans laquelle il se trouvait. « Oh, j’ai bien vu.. » rétorqua-t-il, amer, mauvais. Le regard plissé, debout devant le bureau de la blonde, il l’observait. Mille et unes questions se bousculaient dans l’esprit du diplomate. Pourtant, malgré son impatience connue et sa mauvaise humeur, il laissait volontiers à son amie le temps de s’expliquer, de lui donner des arguments viables et qu’il pourrait comprendre. Pour l’instant, elle ne lui servait rien. Elle avait refusé, soit. Mais encore ? La lueur dans le regard d’Aveleen s’était passablement assombris alors que la blonde reprenait la parole, pointant du doigt le petit sigle qu’avait ignoré Oscar dans le seul et unique but de promouvoir un travail qu’il jugeait d’une extrême qualité. Peu amusé, ses lèvres s’étirèrent tout de même en un sourire forcé. « Oh. Donc tu es en train de me dire que tu as refusé la proposition d’une vie pour me remettre à ma place ? » s’enquit-il, la provocation au bout des lèvres, le sifflement au bout de la langue. « S’il te plaît, Aveleen, ose me dire que c’est là la seule et unique raison de ton refus ! » s’impatienta-t-il, avant d’ajouter. « Tu peux essayer de te mentir à toi-même, mais pas à moi. Si cela avait été tes clichés habituels, tu n’aurais pas hésité une seule seconde. » exposa-t-il, avec toute l’honnêteté dont il faisait preuve avec l’Irlandaise. Il n’était pas doux, ni dans ses mots, ni dans son regard mais restait du bon côté de la ligne et ne la franchirait jamais pour insulter son amie. Il ne disait rien que l’Irlandaise était prête à attendre. Après toutes ces années, il était temps. Il s’était reculé de quelques pas pour s’appuyer contre l’une des tables du premier rang. Les bras croisés sur son torse, il ajouta, l’œil vif et la langue tout autant. « Je n’ai jamais eu l’intention de te blesser, tu le sais. Je n’ai fait que mettre en avant ton travail.. et te donner un petit coup de pouce. Si ce n’est pas là le rôle d’un mécène, ni celui d'un ami, tu m’excuseras. » expliqua-t-il, avant d’ajouter, d’une voix plus légère. « Si le contrat de Life Magazine ne te convenait pas, on aurait pu négocier. Si c’est autre chose.. Par Merlin, explique-moi. » suggéra-t-il. Oscar avait l’habitude d’obtenir ce qu’il voulait et était longuement contrarié lorsque certaines choses lui échappaient des mains. Il laissait pourtant le bénéfice du doute à Aveleen, il lui laissait une possibilité de s’exprimer. La blonde était loin d’être idiote, Oscar était confiant, elle finirait bien par lui exposer ce qu’elle gardait pour elle depuis si longtemps.
Les salutations du diplomate avaient été mielleuses, vicieuses, bien peu adaptées à une amitié normale et sans différent. Ce lien qui l’unissait à l’Irlandaise n’avait rien d’une affection simple et sans prise de tête. Les caractères bien différents des deux êtres ne leur avait que rarement laissé avoir une discussion sans avis contraires. L’artiste et l’homme d’affaire avaient eus, avaient encore et allaient encore avoir deux façons bien distinctes de voir la vie. Si la photographe était bien plus humaine et plus rêveuse que l’américain, ce dernier estimait voir au-delà de l’art lui-même. Il n’avait pas la même sensibilité vis-à-vis des œuvres encore cachée de sa protégée. Des portraits aussi beau et puissant que ceux que prenait Aveleen ne pouvait décemment pas rester dans une pochette plastique au fond d’un placard. Oscar était parvenu à en sauver un de l’oubli, lui offrant une place de choix dans la penthouse qu’il partageait avec son frère aîné. Il conservait cependant les souhaits de la créatrice et ne révélait pas son nom lorsqu’un invité lui demandait l’origine de l’œuvre. Oscar avait été le témoin silencieux des doutes de l’Irlandaise quant aux quelques portraient qu’elle avait réalisé dans sa carrière. Il en avait été également le plus grand admirateur, pour ne pas dire le seul puisque ces clichés ne lui avaient été présenté qu’en huit-clos pour ne jamais être partagé au grand-publique. C’était d’ailleurs le principal sujet de discord entre le mécène et son artiste, l’américain et l’irlandaise. Il pouvait bien comprendre que certains portraient fixaient dans le temps la tristesse et l’inhumanité de certaines situations, mais n’était-ce pas là le but même du métier de l’Irlandaise ? Oscar en était convaincu, et si le diplomate n’avait pas le cœur sur la main, ni l’éthique développée, il trouvait tout de même que ces prises de vues au placard n’étaient pas rendues hommage, ni service, aux âmes qui y étaient figées à tout jamais. Alors il avait brisé le secret qu’était l’existence de ces œuvres d’art et en avait envoyé un échantillon à un magasine de renom, celui-là même qui avait par la suite fait une proposition à Aveleen. Cette dernière avait cependant saisie une tout autre opportunité qui était loin de faire plaisir à Oscar.
Et l’agacement transparaissait dans ses mots. Il ne se cachait pas, avec Aveleen et s’enrobait jamais ses propos dans un sirop de bonne manière et de faux-semblant. Il était franc avec elle – la plupart du temps – et cette dernière ne manquait pas de lui rendre la pareille. Feignant de quoi il était question, ne s’embarrant pas d’une politesse qu’ils connaissaient tout deux, l’Irlandaise n’avait fait qu’approuver le choix du magazine, feuilletant ces pages avec attention, ignorant de ses prunelles clairs le regard du diplomate. Son amie avait la capacité toute particulière de lui en faire voir de toutes les couleurs. Elle avait la candeur, la mine angélique et l’assurance nécessaire pour ne pas être écrasé par la puissance de parole de l’américain. En dehors de sa famille, il y en avait peu qui pouvait lui tenir tête comme ça. Deux anciennes Pies de Montroses, pour ne pas faire dans l’originalité : @Zahia Saouli et @Judith Thorne. La première parce qu’elle ne le connaissait que trop bien et ne se priverait jamais de lui ramener les pieds sur terre. La seconde parce qu’elle avait une importance toute particulière dans la vie du diplomate, comme une douce lueur au fond d’un long tunnel. Une lueur d’espoir, de vie.. Et d’amour ? Aveleen, elle, avait touché une autre corde sensible de l’américain : l’art, l’argent et l’honnêteté dans son plus simple appareil. Ils ne se racontaient pas tous, les deux amis et gardaient la pudeur de leur vie intime pour eux, mais pour le reste, tout y passait. Des opinions controversées aux avis artistiques partagés. Oscar appréciait chaque rencontre avec l’Irlandaise, mais ne pouvait pas dire que le début de celle-ci lui convenait. A la réponse de la jeune femme, le diplomate s’était contenté de soupirer et de lever les yeux au ciel. Il n’était pas venu là pour discuter de la légitimité du fameux McKoy, mais bien pour s’interroger sur les raisons du refus d’Aveleen à ce contrat pourtant juteux et prometteur.
Et la réponse tomba, évidente, comme le nez au milieu de la figure, comme un nuage dans le ciel Britannique. Elle avait refusé, évidement. Il le savait bien, c’était pour ça qu’il était là, et cet aveu irlandais ne répondait pas à ça question, il ne faisait que rendre plus réel la situation dans laquelle il se trouvait. « Oh, j’ai bien vu.. » rétorqua-t-il, amer, mauvais. Le regard plissé, debout devant le bureau de la blonde, il l’observait. Mille et unes questions se bousculaient dans l’esprit du diplomate. Pourtant, malgré son impatience connue et sa mauvaise humeur, il laissait volontiers à son amie le temps de s’expliquer, de lui donner des arguments viables et qu’il pourrait comprendre. Pour l’instant, elle ne lui servait rien. Elle avait refusé, soit. Mais encore ? La lueur dans le regard d’Aveleen s’était passablement assombris alors que la blonde reprenait la parole, pointant du doigt le petit sigle qu’avait ignoré Oscar dans le seul et unique but de promouvoir un travail qu’il jugeait d’une extrême qualité. Peu amusé, ses lèvres s’étirèrent tout de même en un sourire forcé. « Oh. Donc tu es en train de me dire que tu as refusé la proposition d’une vie pour me remettre à ma place ? » s’enquit-il, la provocation au bout des lèvres, le sifflement au bout de la langue. « S’il te plaît, Aveleen, ose me dire que c’est là la seule et unique raison de ton refus ! » s’impatienta-t-il, avant d’ajouter. « Tu peux essayer de te mentir à toi-même, mais pas à moi. Si cela avait été tes clichés habituels, tu n’aurais pas hésité une seule seconde. » exposa-t-il, avec toute l’honnêteté dont il faisait preuve avec l’Irlandaise. Il n’était pas doux, ni dans ses mots, ni dans son regard mais restait du bon côté de la ligne et ne la franchirait jamais pour insulter son amie. Il ne disait rien que l’Irlandaise était prête à attendre. Après toutes ces années, il était temps. Il s’était reculé de quelques pas pour s’appuyer contre l’une des tables du premier rang. Les bras croisés sur son torse, il ajouta, l’œil vif et la langue tout autant. « Je n’ai jamais eu l’intention de te blesser, tu le sais. Je n’ai fait que mettre en avant ton travail.. et te donner un petit coup de pouce. Si ce n’est pas là le rôle d’un mécène, ni celui d'un ami, tu m’excuseras. » expliqua-t-il, avant d’ajouter, d’une voix plus légère. « Si le contrat de Life Magazine ne te convenait pas, on aurait pu négocier. Si c’est autre chose.. Par Merlin, explique-moi. » suggéra-t-il. Oscar avait l’habitude d’obtenir ce qu’il voulait et était longuement contrarié lorsque certaines choses lui échappaient des mains. Il laissait pourtant le bénéfice du doute à Aveleen, il lui laissait une possibilité de s’exprimer. La blonde était loin d’être idiote, Oscar était confiant, elle finirait bien par lui exposer ce qu’elle gardait pour elle depuis si longtemps.
Made by Neon Demon
- InvitéInvité
Re: As It Seems [PV]
Lun 26 Avr 2021 - 16:40
Tout du long, la photographe avait écouté son ami sans sourciller, ses doigts continuant de jouer avec le papier glacé de Life Magazine. C’était presque cocasse qu’elle ait « refusé la proposition d’une vie » pour un magazine dont c’était le nom, songea-t-elle tout en gratifiant le Hangbé de son habituel sourire mi-figue mi-raisin, qu’elle avait enrobé de suffisamment de flegme pour - et elle le savait - agacer prodigieusement son interlocuteur. Et parce que l’on interrompait pas une si savante lancée, elle se garda bien d’imposer des haltes à la leucorhee verbale de son mécène. Il fallait dire qu’Oscar n’était pas de ceux que l’on arrêtait en plein élan : il envisageait chaque conversation comme un combat, dans lequel l’orgueil se disputait une certaine sensibilité qu’Aveleen avait pris bien du temps à savoir discerner. Il fallait une infinie patience pour le contrer, et peut-être le double encore de persévérance pour effeuiller toutes les couches de son agressivité jusqu’à découvrir une bienveillance savamment dissimulée. Et passablement mal exécutée à certaines occasions. Parce qu’Oscar était de ses natures à défoncer les portes si la serrure venait à lui résister, il avait fini par faire de cette solution sa marque de fabrique : abattre d’abord les problèmes, s’arranger ensuite des méthodes. Et tant pis si on avait abîmé la fragile poignée dans la manœuvre, et si l’embrasure s’était faite écorchée de trop de bois pour être de nouveau utilisable. C’était une infraction en règle dans les incertitudes personnelles : le politicien y entrait sans avoir été invité, retournant tout jusqu’à extraire les gemmes de la honte que l’on avait pris soin de camoufler. Il était un courant d’air qui soulevait les craintes et repartait en laissant tout éparpillé sur son chemin, puis qui s’étonnait du grand fracas qu’il venait de laisser. Pire que ça : il voyait la réparation des dommages collatéraux comme un nouveau combat, retroussant les manches de sa bonne conscience pour venir ensuite expliciter à quel point un bon objectif justifiait d’avoir pris des raccourcis.
Comme celui de croire qu’elle ait pu prendre une telle décision pour le punir, comme s’il s’était agis de foudroyer une carrière par simple sursaut d’orgueil. Oh, elle n’en était pas dépourvu : mais elle était suffisamment réfléchie et ambitieuse pour savoir niveler ses priorités. Et le mal-être qu’elle ressentait à chaque fois qu’elle contemplait les visages emprisonnés, les émotions capturées à la volée, détrônait toutes ses autres considérations. A bien des égards, le choix de la photographe avait été radicalement rapide, à la manière de la main que l’on approchait trop près du feu et que l’on retirait par réflexe en sentant l’aura menaçante lécher l’épiderme. La peur était venue avant et avait conditionné sa réponse, loin devant les questionnements quant à la genèse des divulgations. Il n’y avais pas eu plus de vengeance dans son choix que de réflexion : elle avait agi sans se préoccuper de ce qui avait motivé l’instinct. Le sentiment de trahison était venu après, bien après, lorsqu’elle avait correctement imbriqué les événements pour que le puzzle ne soit complet. Lorsqu’elle avait compris que ce portrait n’avait pu se retrouver sur le dit bureau que par les soins d’un « négociateur » qui n’avait du titre qu’une vague ressemblance. Un bon médiateur libérait les otages et non l’inverse. Oscar, lui, avait fait tout le contraire : il l’avait enfermée dans une impasse, et s’essayait à présent à bricoler une porte affective qu’elle n’aurait pas su voir, ainsi qu’une échelle faites de bon sentiments permettant de s’extirper du guet-apens, oubliant qu’il avait lui-même érigé les murs de pierres.
Et parce qu’il avait confondu bonnes intentions avec respect élémentaire, Aveleen vrillait sur lui une paire d’orbes aussi réfrigérantes que le reste de ses traits. Inlassablement, son ongle glissait sur le magazine, écorchant en douceur le gramage du papier photographique tout comme elle espérait venir gratter la coque de l’Insubmersible Hangbé, venu lui expliquer que s’il l’avait jetée à l’eau sans qu’elle ne sache nager, il était à présent là pour venir la secourir. La sacro-sainte amitié avait presque aussi bon dos que le reste et Aveleen dû faire l’effort de se rappeler que l’attaque frontale n’était jamais la meilleure option avec lui. Elle ravala donc sa colère en même temps que sa verve alors qu’il suggérait une explication comme s’il n’était pas lui même responsable d’avoir travesti leur accord, tout en s’étonnant ensuite qu’elle se soit comportée exactement comme elle avait promis de le faire. Ni plus, ni moins. Et il avait l’audace d’être surpris, en plus.
Pas de portait. Ni pour Life Magazine, ni pour personne. Un peu pour lui, à la rigueur, de temps en temps, parce qu’elle avait eu assez confiance. Grossière erreur. Et à peine pour elle-même. Rarement développés, voués à rester en pellicule et à s’y faner, comme Oscar pourrait longtemps attendre que ne refleurisse la moindre ébauche d’un visage qu’elle lui offrirait. Le seul portait qu’elle était à l’instant prête à lui dresser, c’était celui de sa déception. Et comme l’on reculait pour avoir un meilleur angle, l’enseignante roula finalement vers le fond de son fauteuil, croisant ses longues jambes emprisonnées dans un pantalon cigarette noir, la pointe de ses talons Jimmy Choo venant tapoter contre le bureau derrière lequel elle était installée.
— Cela ne te concernait pas, choisi-t-elle finalement de répondre après un instant de flottement.
Ses yeux pâles fixaient toujours ceux d’Oscar, dont elle fit péniblement l’examen minutieux de son état d’esprit, avant de poursuivre de sa voix veloutée, d’un calme de blizzard annonciateur de temps brumeux. Aveleen avait la colère opaque, que seul le temps pouvoir venir adoucir. Et sa peine était un long hiver, tout en congères rancunières et stalactites acérées.
— Enfin si, cela concernait le mécène d’une façon, et l’ami de l’autre. Le mécène a vu son profit et l’ami a cru que l’affection permettrait d’excuser la méthode en l’enrobant de bonnes intentions. A être à moitié dans chaque camps, tu en deviens mauvais dans les deux, fit-elle, croisant ses bras menus le long de son tee-shirt en lin blanc, cherchant le sautoir avec lequel elle s’amusa une instant, comme pour soupeser le reste de ses paroles. Tu veux que je m’explique envers le mécène ou l’ami ? Question a-t-elle simplement en ourlant ses lèvres d’un sourire qui n’avait rien de doux. Parce que le mécène mérite un caprice d’artiste frustrée alors que l’ami, lui, mérite de savoir que c’est au nom de cette même amitié, que je ne l’excuse dans aucun des deux rôles. Quant à l’ensemble des deux, fit-elle d’une voix dans laquelle la déception se percevait sans mal, ils ont eu assez d’intelligence pour savoir que je n’aurai jamais accepté que l’on diffuse la photographie. Dommage qu’ils se soient contentés de piétiner leur bon sens en s’essuyant également les pieds sur la confiance mutuelle.
Elle marqua un arrêt entendu, figeant ses accusations dans un silence lourd de sens. Puis :
— Si ce n’est pas là le rôle d’un manipulateur, ni celui d’un traître, le singea-t-elle en reprenant ses mots pour les faire siens tout en étendant son bras gauche pour venir pousser d’une pichenette le magasine pour le faire glisser jusqu’à Oscar, alors « tu m’excuseras », insista-t-elle lourdement.
@Oscar Hangbé
Comme celui de croire qu’elle ait pu prendre une telle décision pour le punir, comme s’il s’était agis de foudroyer une carrière par simple sursaut d’orgueil. Oh, elle n’en était pas dépourvu : mais elle était suffisamment réfléchie et ambitieuse pour savoir niveler ses priorités. Et le mal-être qu’elle ressentait à chaque fois qu’elle contemplait les visages emprisonnés, les émotions capturées à la volée, détrônait toutes ses autres considérations. A bien des égards, le choix de la photographe avait été radicalement rapide, à la manière de la main que l’on approchait trop près du feu et que l’on retirait par réflexe en sentant l’aura menaçante lécher l’épiderme. La peur était venue avant et avait conditionné sa réponse, loin devant les questionnements quant à la genèse des divulgations. Il n’y avais pas eu plus de vengeance dans son choix que de réflexion : elle avait agi sans se préoccuper de ce qui avait motivé l’instinct. Le sentiment de trahison était venu après, bien après, lorsqu’elle avait correctement imbriqué les événements pour que le puzzle ne soit complet. Lorsqu’elle avait compris que ce portrait n’avait pu se retrouver sur le dit bureau que par les soins d’un « négociateur » qui n’avait du titre qu’une vague ressemblance. Un bon médiateur libérait les otages et non l’inverse. Oscar, lui, avait fait tout le contraire : il l’avait enfermée dans une impasse, et s’essayait à présent à bricoler une porte affective qu’elle n’aurait pas su voir, ainsi qu’une échelle faites de bon sentiments permettant de s’extirper du guet-apens, oubliant qu’il avait lui-même érigé les murs de pierres.
Et parce qu’il avait confondu bonnes intentions avec respect élémentaire, Aveleen vrillait sur lui une paire d’orbes aussi réfrigérantes que le reste de ses traits. Inlassablement, son ongle glissait sur le magazine, écorchant en douceur le gramage du papier photographique tout comme elle espérait venir gratter la coque de l’Insubmersible Hangbé, venu lui expliquer que s’il l’avait jetée à l’eau sans qu’elle ne sache nager, il était à présent là pour venir la secourir. La sacro-sainte amitié avait presque aussi bon dos que le reste et Aveleen dû faire l’effort de se rappeler que l’attaque frontale n’était jamais la meilleure option avec lui. Elle ravala donc sa colère en même temps que sa verve alors qu’il suggérait une explication comme s’il n’était pas lui même responsable d’avoir travesti leur accord, tout en s’étonnant ensuite qu’elle se soit comportée exactement comme elle avait promis de le faire. Ni plus, ni moins. Et il avait l’audace d’être surpris, en plus.
Pas de portait. Ni pour Life Magazine, ni pour personne. Un peu pour lui, à la rigueur, de temps en temps, parce qu’elle avait eu assez confiance. Grossière erreur. Et à peine pour elle-même. Rarement développés, voués à rester en pellicule et à s’y faner, comme Oscar pourrait longtemps attendre que ne refleurisse la moindre ébauche d’un visage qu’elle lui offrirait. Le seul portait qu’elle était à l’instant prête à lui dresser, c’était celui de sa déception. Et comme l’on reculait pour avoir un meilleur angle, l’enseignante roula finalement vers le fond de son fauteuil, croisant ses longues jambes emprisonnées dans un pantalon cigarette noir, la pointe de ses talons Jimmy Choo venant tapoter contre le bureau derrière lequel elle était installée.
— Cela ne te concernait pas, choisi-t-elle finalement de répondre après un instant de flottement.
Ses yeux pâles fixaient toujours ceux d’Oscar, dont elle fit péniblement l’examen minutieux de son état d’esprit, avant de poursuivre de sa voix veloutée, d’un calme de blizzard annonciateur de temps brumeux. Aveleen avait la colère opaque, que seul le temps pouvoir venir adoucir. Et sa peine était un long hiver, tout en congères rancunières et stalactites acérées.
— Enfin si, cela concernait le mécène d’une façon, et l’ami de l’autre. Le mécène a vu son profit et l’ami a cru que l’affection permettrait d’excuser la méthode en l’enrobant de bonnes intentions. A être à moitié dans chaque camps, tu en deviens mauvais dans les deux, fit-elle, croisant ses bras menus le long de son tee-shirt en lin blanc, cherchant le sautoir avec lequel elle s’amusa une instant, comme pour soupeser le reste de ses paroles. Tu veux que je m’explique envers le mécène ou l’ami ? Question a-t-elle simplement en ourlant ses lèvres d’un sourire qui n’avait rien de doux. Parce que le mécène mérite un caprice d’artiste frustrée alors que l’ami, lui, mérite de savoir que c’est au nom de cette même amitié, que je ne l’excuse dans aucun des deux rôles. Quant à l’ensemble des deux, fit-elle d’une voix dans laquelle la déception se percevait sans mal, ils ont eu assez d’intelligence pour savoir que je n’aurai jamais accepté que l’on diffuse la photographie. Dommage qu’ils se soient contentés de piétiner leur bon sens en s’essuyant également les pieds sur la confiance mutuelle.
Elle marqua un arrêt entendu, figeant ses accusations dans un silence lourd de sens. Puis :
— Si ce n’est pas là le rôle d’un manipulateur, ni celui d’un traître, le singea-t-elle en reprenant ses mots pour les faire siens tout en étendant son bras gauche pour venir pousser d’une pichenette le magasine pour le faire glisser jusqu’à Oscar, alors « tu m’excuseras », insista-t-elle lourdement.
@Oscar Hangbé
- InvitéInvité
Re: As It Seems [PV]
Jeu 6 Mai 2021 - 22:34
As it seems
Aveleen O’Donnell
Cause this life is as
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
2 mars 2021 – 16 h
Oscar était en colère. Il n’avait pas besoin de le cacher. Il avait cette lueur dans le fond de son regard, cette tension dans le haut de ses épaules, cette façon saccadée de bouger ses mains. Il n’était pas content de la situation dans laquelle il se trouvait. Il était le cul assis entre deux chaises, certain d’avoir fait le nécessaire pour assurer à Aveleen – et lui-même – les lauriers qu’ils méritaient tout deux. Il avait assuré la rédaction de Life Magazine du talent de celle dont il suivait la vie artistique depuis de si nombreuses années. Et pourtant elle était là, assise sur sa chaise d’enseignante, un regard d’ordinaire si claire se décorant de sombres reflets, fixant de ces prunelles chargées d’éclair le visage du diplomate. Il en fallait beaucoup pour déstabiliser l’assurance féline de l’américain. Il fallait du temps, une connaissance précise de son état d’esprit et de ses habitudes. Il fallait être important pour glisser sous le cuir épais du léopard. Aveleen y parvenait parfois. Elle avait depuis quelques temps trouvé les points sensibles du Hangbé. Elle savait appuyer sur les sommets de son égo, remettant cette arrogance toute masculine à sa place, affirmant ses choix, ses envies. L’Irlandaise était en mesure de s’infiltrer sous les pores de sa peau, comme du poil à gratter venait s’insinuer sous une chemise de soie. Elle était déterminée et fière, bien plus qu’elle ne pouvait le laisser paraître. Elle s’inclinait face au vent, comme la tige du roseau, mais ne se brisait pas. Oscar en avait passé des nuits à évacuer les frustrations attrapées lors d’une discussion avec l’artiste irlandaise, et il semblerait que la détende ne soit pas au programme de cette fin de journée.
Il ne cillait pas, le diplomate, habitué à l’attaque verbale, aux joutes orales, aux mots agencés avec précision. Il connaissait la puissance des silences ainsi que l’importance des mouvements des jambes, des doigts ou des infimes contractions des paupières. Il était attentif, observait la moindre des réactions de son amie. Il la jaugeait avec autant d’attente qu’il jaugerait un adversaire entre les murs du bâtiment accueillant la Confédération International des Sorciers. Il était en campagne, le fier représentant de la guerre. Il traitait celle qu’il considérait pourtant comme une amie proche telle une compétitrice, une contradiction qu’il devait remettre sur le droit chemin. Il avait des arguments, le sorcier. Ou plutôt des certitudes, des convictions, des opinions bien arrêtés sur la façon dont les choses se déroulaient. Il avait cette envie irrépressible de vouloir contrôler tout cela, de remettre Aveleen sur le chemin de la gloire artistise. Life Magazine. Une opportunité qu’elle avait refusée, niée, piétinée…comme tous les efforts qu’Oscar avait fait jusque-là. Il se tenait là, poussant la blonde à lui fournir des explications, usant de son assurance, de ses mots, de la concordance de ses arguments. Il ne doutait pas du bien fondé de son action, il ne doutait jamais. Il regrettait la réaction de la photographe et espérait obtenir plus d’informations de la part de la jeune femme. Des informations qui ne viendrait pas toucher à son intégrité, mais qui permettrait au diplomate de comprendre.
Dans cette conversation, Oscar était à la fois le mécène et l’ami. Le mécène était en colère, faisait frémir ses cordes vocales d’une basse vibration, exprimant son désaccord d’un ton grave et profond. Mais l’ami n’était pas loin derrière, il guidait la conversation, tentait de dénouer l’évènement, de comprendre ce qui s’était passé dans l’esprit de la blonde pour qu’ils en arrivent tout deux ici. Il la questionnait, prêchait le faux, cherchait le vrai. Il n’avait pas la précieuse habilitée d’aller plonger directement dans l’esprit de son amie pour y chercher ce dont il avait besoin, il devait donc trouver un autre moyen. Un moyen qu’il maîtrisait, jouant de ses mots avec la même agilité qu’un jongleur ferait danser son diabolo. Car Oscar soupçonnait quelque chose, comme une vérité taboo qui n’avait jamais été dite mais qui tombait sous le sens. Avec les années, le sorcier avait appris à découvrir Aveleen. Il l’avait parfois observé prendre des photos, il l’avait observé en parler, discuter de tel ou tel cliché. Et puis il avait vu l’autre visage de son artiste. Un visage soucieux, inquiet dès qu’il s’était agit d’en capturer d’autres. Avec les années, le changement s’était fait de plus en plus discret et de plus en plus évident pour le diplomate. Le mécène menaçait de mettre cette vérité au grand jour, de la formuler au nez de la photographe. L’ami lui, conservait une patience toute étrange, davantage désireux de laisser à Aveleen l’opportunité de se confier à lui. Le mécène n’avait rien d’autre à perdre que l’argent, l’ami risquait bien plus gros. Si la première rencontre de l’Américain et de l’Irlandaise n’avait pas été des plus simples, si cette relation dans toute son entièreté n’était pas des plus aisée, Oscar s’était attaché à cette façon qu’avait Aveleen de voir la vie. Nul doute que l’état d’esprit de la blonde avait bien aidé celui du politicien à s’ouvrir à un monde bien plus étendue que ce dont il avait eu l’habitude à cette époque.
C’était ainsi un mélange d’ami et de mécène qui se trouvait devant la sorcière. Assis avec nonchalance contre la première table de la salle de classe, Oscar, les bras croisés sur son torse, observait avec un œil brillant l’enseignante. Elle avait elle aussi pris du recul, sa chaise roulant dans un grésillement désagréable, l’éloignant ainsi des prunelles acérées du diplomate. Ce qui était plus acéré encore était le ton de la trentenaire. Cette assurance dont elle faisait preuve, cette contre-attaque vicieuse et sans ménagement. Oscar n’était pas surpris, ni étonné. Il connaissait suffisamment Aveleen pour imaginer un tant soit peu la dimension catastrophique qu’allait prendre cette conversation. Avec deux caractères tels, il n’avait pas eu beaucoup d’espoir. Aveleen n’était pas du genre à hocher la tête, admettant, les joues rosies par la honte, l’erreur qu’elle avait commise et Oscar n’était pas en mesure d’exprimer plus de regret qu’il ne l’avait déjà fait. Il s’était excusé, et ne pouvait pas tellement faire plus, ni les beaux yeux de l’artiste en face de lui, ni pour cet étrange lien qui les unissait depuis des années. Oscar réceptionna les mots d’Aveleen avec un certain détachement, refusant de ressentir quoique ce soit d’autre que l’incompréhension et le semblant de colère avec lesquels il était venu à Hungcalf. Tout comme il n’avait jamais douté de la beauté des clichés de l’Irlandaise, il n’irait pas remettre en question sa capacité à lui partager son ressenti et sa vision des choses. Il y avait de l’amertume dans les répliques d’Aveleen, une vérité acide. Il y avait de la provocation, des reproches aiguisées. Il y avait une pertinence douloureuse dans les mots de l’Irlandaise mais rien de ce qu’elle disait ne provoqua de réaction de la part du sorcier. Il restait à demi-assis contre le bureau estudiantin, ses prunelles brillant de l’excitation de cette joute vocale, fixées sur son ami. Il réfléchissait, pensait à la suite. Alors qu’elle insinuait des réalités, alors qu’elle le qualifiait de manipulateur et de traître, il pensait à la suite. Il considérait ses réponses, s’assurait d’avoir un train d’avance. Et, lorsqu’elle eu finalement terminé, le regard chocolaté du sorcier quitta la peau blanche de son amie pour se fixer sur le magasine glissant. Ce bout de papier qui ne valait pas plus de quelques dollars et qui venait pourtant de créer un gouffre entre le mécène et son artiste. La seule qui avait attiré l’œil du combattant, la seule qui avait été assez intéressante pour piquer la curiosité du diplomate, pour le conserver si longtemps dans le monde de l’art.
Lorsque la course du papier glacé sur le bureau de bois de l’enseignante fut terminée, quelques secondes à peines s’étaient écoulées et les lèvres du diplomate ne s’étaient toujours pas ouvertes. Il observait avec une attention presque forcée la première de couverture, s’imaginant que ce McKoy aurait été bien plus aisé à financer. Lorsque ses lèvres se décollèrent finalement, cela ne fût que pour laisser s’échapper un soupire. « Pourquoi aucun de tes portraits n’a été publié ? » questionna-t-il finalement, abandonnant la joute, esquivant l’attaque pour viser là ou le véritable problème se trouvait. Il n’estimait pas son action comme répréhensible et ne doutait pas – peut-être à tort – qu’Aveleen en viendrait à être d’accord avec lui.
Oscar était en colère. Il n’avait pas besoin de le cacher. Il avait cette lueur dans le fond de son regard, cette tension dans le haut de ses épaules, cette façon saccadée de bouger ses mains. Il n’était pas content de la situation dans laquelle il se trouvait. Il était le cul assis entre deux chaises, certain d’avoir fait le nécessaire pour assurer à Aveleen – et lui-même – les lauriers qu’ils méritaient tout deux. Il avait assuré la rédaction de Life Magazine du talent de celle dont il suivait la vie artistique depuis de si nombreuses années. Et pourtant elle était là, assise sur sa chaise d’enseignante, un regard d’ordinaire si claire se décorant de sombres reflets, fixant de ces prunelles chargées d’éclair le visage du diplomate. Il en fallait beaucoup pour déstabiliser l’assurance féline de l’américain. Il fallait du temps, une connaissance précise de son état d’esprit et de ses habitudes. Il fallait être important pour glisser sous le cuir épais du léopard. Aveleen y parvenait parfois. Elle avait depuis quelques temps trouvé les points sensibles du Hangbé. Elle savait appuyer sur les sommets de son égo, remettant cette arrogance toute masculine à sa place, affirmant ses choix, ses envies. L’Irlandaise était en mesure de s’infiltrer sous les pores de sa peau, comme du poil à gratter venait s’insinuer sous une chemise de soie. Elle était déterminée et fière, bien plus qu’elle ne pouvait le laisser paraître. Elle s’inclinait face au vent, comme la tige du roseau, mais ne se brisait pas. Oscar en avait passé des nuits à évacuer les frustrations attrapées lors d’une discussion avec l’artiste irlandaise, et il semblerait que la détende ne soit pas au programme de cette fin de journée.
Il ne cillait pas, le diplomate, habitué à l’attaque verbale, aux joutes orales, aux mots agencés avec précision. Il connaissait la puissance des silences ainsi que l’importance des mouvements des jambes, des doigts ou des infimes contractions des paupières. Il était attentif, observait la moindre des réactions de son amie. Il la jaugeait avec autant d’attente qu’il jaugerait un adversaire entre les murs du bâtiment accueillant la Confédération International des Sorciers. Il était en campagne, le fier représentant de la guerre. Il traitait celle qu’il considérait pourtant comme une amie proche telle une compétitrice, une contradiction qu’il devait remettre sur le droit chemin. Il avait des arguments, le sorcier. Ou plutôt des certitudes, des convictions, des opinions bien arrêtés sur la façon dont les choses se déroulaient. Il avait cette envie irrépressible de vouloir contrôler tout cela, de remettre Aveleen sur le chemin de la gloire artistise. Life Magazine. Une opportunité qu’elle avait refusée, niée, piétinée…comme tous les efforts qu’Oscar avait fait jusque-là. Il se tenait là, poussant la blonde à lui fournir des explications, usant de son assurance, de ses mots, de la concordance de ses arguments. Il ne doutait pas du bien fondé de son action, il ne doutait jamais. Il regrettait la réaction de la photographe et espérait obtenir plus d’informations de la part de la jeune femme. Des informations qui ne viendrait pas toucher à son intégrité, mais qui permettrait au diplomate de comprendre.
Dans cette conversation, Oscar était à la fois le mécène et l’ami. Le mécène était en colère, faisait frémir ses cordes vocales d’une basse vibration, exprimant son désaccord d’un ton grave et profond. Mais l’ami n’était pas loin derrière, il guidait la conversation, tentait de dénouer l’évènement, de comprendre ce qui s’était passé dans l’esprit de la blonde pour qu’ils en arrivent tout deux ici. Il la questionnait, prêchait le faux, cherchait le vrai. Il n’avait pas la précieuse habilitée d’aller plonger directement dans l’esprit de son amie pour y chercher ce dont il avait besoin, il devait donc trouver un autre moyen. Un moyen qu’il maîtrisait, jouant de ses mots avec la même agilité qu’un jongleur ferait danser son diabolo. Car Oscar soupçonnait quelque chose, comme une vérité taboo qui n’avait jamais été dite mais qui tombait sous le sens. Avec les années, le sorcier avait appris à découvrir Aveleen. Il l’avait parfois observé prendre des photos, il l’avait observé en parler, discuter de tel ou tel cliché. Et puis il avait vu l’autre visage de son artiste. Un visage soucieux, inquiet dès qu’il s’était agit d’en capturer d’autres. Avec les années, le changement s’était fait de plus en plus discret et de plus en plus évident pour le diplomate. Le mécène menaçait de mettre cette vérité au grand jour, de la formuler au nez de la photographe. L’ami lui, conservait une patience toute étrange, davantage désireux de laisser à Aveleen l’opportunité de se confier à lui. Le mécène n’avait rien d’autre à perdre que l’argent, l’ami risquait bien plus gros. Si la première rencontre de l’Américain et de l’Irlandaise n’avait pas été des plus simples, si cette relation dans toute son entièreté n’était pas des plus aisée, Oscar s’était attaché à cette façon qu’avait Aveleen de voir la vie. Nul doute que l’état d’esprit de la blonde avait bien aidé celui du politicien à s’ouvrir à un monde bien plus étendue que ce dont il avait eu l’habitude à cette époque.
C’était ainsi un mélange d’ami et de mécène qui se trouvait devant la sorcière. Assis avec nonchalance contre la première table de la salle de classe, Oscar, les bras croisés sur son torse, observait avec un œil brillant l’enseignante. Elle avait elle aussi pris du recul, sa chaise roulant dans un grésillement désagréable, l’éloignant ainsi des prunelles acérées du diplomate. Ce qui était plus acéré encore était le ton de la trentenaire. Cette assurance dont elle faisait preuve, cette contre-attaque vicieuse et sans ménagement. Oscar n’était pas surpris, ni étonné. Il connaissait suffisamment Aveleen pour imaginer un tant soit peu la dimension catastrophique qu’allait prendre cette conversation. Avec deux caractères tels, il n’avait pas eu beaucoup d’espoir. Aveleen n’était pas du genre à hocher la tête, admettant, les joues rosies par la honte, l’erreur qu’elle avait commise et Oscar n’était pas en mesure d’exprimer plus de regret qu’il ne l’avait déjà fait. Il s’était excusé, et ne pouvait pas tellement faire plus, ni les beaux yeux de l’artiste en face de lui, ni pour cet étrange lien qui les unissait depuis des années. Oscar réceptionna les mots d’Aveleen avec un certain détachement, refusant de ressentir quoique ce soit d’autre que l’incompréhension et le semblant de colère avec lesquels il était venu à Hungcalf. Tout comme il n’avait jamais douté de la beauté des clichés de l’Irlandaise, il n’irait pas remettre en question sa capacité à lui partager son ressenti et sa vision des choses. Il y avait de l’amertume dans les répliques d’Aveleen, une vérité acide. Il y avait de la provocation, des reproches aiguisées. Il y avait une pertinence douloureuse dans les mots de l’Irlandaise mais rien de ce qu’elle disait ne provoqua de réaction de la part du sorcier. Il restait à demi-assis contre le bureau estudiantin, ses prunelles brillant de l’excitation de cette joute vocale, fixées sur son ami. Il réfléchissait, pensait à la suite. Alors qu’elle insinuait des réalités, alors qu’elle le qualifiait de manipulateur et de traître, il pensait à la suite. Il considérait ses réponses, s’assurait d’avoir un train d’avance. Et, lorsqu’elle eu finalement terminé, le regard chocolaté du sorcier quitta la peau blanche de son amie pour se fixer sur le magasine glissant. Ce bout de papier qui ne valait pas plus de quelques dollars et qui venait pourtant de créer un gouffre entre le mécène et son artiste. La seule qui avait attiré l’œil du combattant, la seule qui avait été assez intéressante pour piquer la curiosité du diplomate, pour le conserver si longtemps dans le monde de l’art.
Lorsque la course du papier glacé sur le bureau de bois de l’enseignante fut terminée, quelques secondes à peines s’étaient écoulées et les lèvres du diplomate ne s’étaient toujours pas ouvertes. Il observait avec une attention presque forcée la première de couverture, s’imaginant que ce McKoy aurait été bien plus aisé à financer. Lorsque ses lèvres se décollèrent finalement, cela ne fût que pour laisser s’échapper un soupire. « Pourquoi aucun de tes portraits n’a été publié ? » questionna-t-il finalement, abandonnant la joute, esquivant l’attaque pour viser là ou le véritable problème se trouvait. Il n’estimait pas son action comme répréhensible et ne doutait pas – peut-être à tort – qu’Aveleen en viendrait à être d’accord avec lui.
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Re: As It Seems [PV]
Sam 8 Mai 2021 - 19:07
[langage gore – violence visuelle – âmes sensibles s’abstenir]
– Pourquoi aucun de tes portraits n’a été publié ?
La question la prit de cours, coupant en plein vol le flot de sa colère pour la faire atterrir en plein milieu de nulle part. Un champ aussi vaste que la perdition dans laquelle elle se sentie abandonnée : elle était subitement acculée, cerclée par des doutes qui filaient jusqu’à l’horizon, sans rien d’autre que le vent changeant de ses multiples remises en question pour venir faire ballotter sa confiance. Pour la première fois depuis qu’ils s’étaient rencontrés, la photographe n’osa pas relever les yeux pour affronter le regard d’asphalte d’Oscar. Elle laissa ses prunelles gelées glisser le long de son épaule pour s’égarer dans le fond de la classe, fixant un point imaginaire quelque part entre deux bureaux dans l’espoir de s’y faire happer.
Il n’y avait jamais eu de règles bien définies, seulement un accord tacite qui s’était lentement construit et solidifié au gré des années et des secousses de leurs amitiés : un respect tissé par les non-dits et l’envie mutuelle de ne pas jouer sur les plates bandes savamment identifiées au fil des années. Parmi leurs discordes houleuses, s’il y avait bien eu une valse qu’ils avaient bien su danser, c’était celle-là : un tempo soigneux et des cercles organisés autour de la piste, un pas en avant pour au moins le double en arrière, louvoyant autour des secrets de chacun sans jamais faire plus que les observer en silence et les identifier pour ne plus vraiment y revenir. Oscar avait deviné depuis longtemps qu’il ne s’agissait pas d’un simple caprice d’artiste, mais il avait eu la délicatesse de ne rien dire. Peut-être parce qu’il savait qu’elle lui aurait d’ailleurs répondu, il s’était abstenu de venir ouvrir une porte qu’Aveleen tenait soigneusement close. C’était la raison pour laquelle sa trahison l’avait blessée : parce que lui, parmi tous, savait le mieux qu’elle n’avait pas envie d’en parler. C’était aussi pour ça qu’elle l’affectionnait particulièrement : il n’avait jamais insisté, sans jamais ignoré non plus. Il avait essayé de la pousser vers l’avant, mais jamais de la précipiter dans le vide. Jusqu’à quelques mois de là.
Un spasme agita ses lèvres et Aveleen fini par expirer un peu plus fort que les autres fois : cela n’était même pas un soupire de lassitude, c’était un trop plein, qui s’échappa comme un aveux aérien, dépourvu de mots. Eux, étaient coincés dans sa gorge en un amas difforme trop souvent ravalé. Finalement, après une longue minute, elle ramena difficilement l’arctique fissuré de ses yeux vers Oscar qu’elle observa d’un regard mi-suppliant, mi-vaincu. Avec lui, elle s’était découverte particulièrement honnête. Ses secrets n’avaient été faits que d’omissions et d’esquives. Cela n’était plus de la rancœur : maintenant, ça faisait viscéralement mal, comme une oppression qui grandissait et venait comprimer le reste. Elle se revit des centaines de fois éviter de répondre à cette fameuse question – éditeurs, collègues artistes, commanditaires – usant de toutes les armes de recul possible, de la colère à l’indifférence feinte en passant par le très facile « cela ne te regarde pas ». Pourtant, cette fois, elle savait qu’elle ne résisterait pas : elle laissa donc son regard cartographier le visage de son ami, cherchant quelque chose parmi la colère qu’elle devinait dans son visage et la déception évidente qui figeait ses traits, quelque chose de suffisant pour lui donner l’impulsion nécessaire à la confidence. En silence, l’enseignante fini par faire pivoter sa chaise, puis ses doigts volèrent sur le clavier de l’ordinateur qu’elle avait fait installé dans sa salle de cours. Elle pianota un instant, puis plongea finalement la salle dans le noir d’un mouvement ample de sa baguette.
Derrière elle, le rétro-projecteur projeta sa lumière sur l’immensité blanche du mur. Sans rien dire, Aveleen contourna son bureau, puis poussa de ses mains dessus pour venir s’y assoir, faisant dos aux photographies qu’elle venait de faire apparaître en grand écran. A contre jour, elle prit une inspiration, fixant Oscar, dont lui seul se détachait dans l'obscurité. Elle n'était, quant à elle, qu'une ombre, dont les contours se dessinaient en tapinois. Doucement, elle ouvrit enfin la bouche, rompant le silence tout en espérant ne pas rompre l'image qu'il avait d'elle :
— En 1985, après une éruption volcanique en Colombie, le Français Frank Fournier entend parler de l’agonie d’une fillette piégée dans les décombres. Il prend alors un avion des États-Unis pour Bogota, et immortalise pour toujours le calvaire de l’enfant qui mourra quelques heures plus tard après 60 heures de supplice. Sa photo choquera le monde entier, fit-elle d’une voix atone. Elle n’avait pas besoin de regarder pour voir les deux yeux de noir diffus, ni la peau tannée par une eau gelée. En 1993, Kevin Carter passera 20 minutes à photographier la silhouette famélique de cet enfant, que le vautour plus gros encore guette avec appétit. Il attendra, en vain, que le charognard n'ouvre ses ailes, puis partira sans aller voir l’enfant. Un peu moins d’un an après, Carter se suicide. Il ne s’est jamais remis de la polémique entourant cette image, poursuivit-elle, l’opale nébuleux de ses yeux toujours rivé sur Oscar dont elle observait la moindre réaction, le moindre sursaut potentiel de dégoût, la moindre crispation. Et puis, fit-elle, et cette fois, sa voix s’érailla légèrement, en 2015, après la catastrophe naturelle d’Haïti, une adolescente, Fabienne, a été abattue par une balle perdue. Cette photo aussi, fera le tour du monde, déglutit-elle difficilement, et comme les deux autres, elle sera récompensée d’un célèbre prix. Pulitzer, Wolrd Press Photo… ces clichés sont cultissimes et ils ont été grassement payés.
Ses doigts cherchèrent à taton les touches , puis elle cliqua enfin sur la petite flèche, faisant surgir, cette fois en très grand écran, une quatrième photo. Les yeux remplis de nuages, la jeune femme poursuivit, sachant que trop de pauses l’empêcheraient de poursuivre.
- Spoiler:
— Voici la photographie hors champs du dernier cliché. Ses pieds se balancèrent un instant dans le vague, ses doigts jouant avec le sautoir qui pendait autour de son cou, comme une corde sur laquelle elle avait eu parfois envie de tirer. Je suis certaine que tu as fait le lien, articula-t-elle simplement. Parce que tu as compris. Tu sais que moi aussi, j’aurai sauté dans cet avion pour Bogota, parce que c’est ce genre de portrait qui m’attire inexorablement. J’aurai moi aussi attendu que le vautour n’ouvre les ailes, parce que je suis d’accord avec Carter : la photographie aurait été encore plus belle. Quant à haïti… je crois que tu sais déjà. Tu as compris que le reportage que je t’ai donné à mon retour n’était en rien complet. A quelques minutes près, je me serais aussi retrouvée sur ce cliché, parce que j’y étais. Évidemment, que j'y étais. Moi aussi, je me suis agenouillée, moi aussi, j’ai pris le temps de cadrer, d’attendre la bonne luminosité, d’attendre que le vent fasse un peu bouger le sable. J’ai dû prendre environ 35 clichés de Fabienne, confia-t-elle. Pas une seule fois, elle n’avait détourné le regard, à mesure que sa voix s’éparpillait difficilement entre le silence désagréable qui lui semblait s’épaissir. Tu sais ce que le St Petersburg Times floridien titrera sur Carter ?« L'homme qui n'ajuste son objectif que pour cadrer au mieux la souffrance n'est peut-être aussi qu'un prédateur, un vautour de plus sur les lieux ». C’est ce que je ressens, l’impression d’être une pilleuse d’émotion qui viole des tombeaux de pudeurs qui auraient dû rester scellés pour toujours, termina-t-elle d’une voix qui, cette fois, se brisa tout à fait dans l’obscurité de la pièce, dont seul la silhouette d’Oscar était éclairée par la luminosité d’un cliché pourtant d’une particulière noirceur.
Quelque part à l’intérieur, Ava sentit gonfler toute la honte qu’elle ressentait pour elle-même et un sanglot imaginaire lui bloqua la gorge et la força à détourner les yeux, qui plongèrent vers le sol. Ce n’était à présent plus qu’un chuchotement :
— Leurs visages me hantent suffisamment comme ça. Ne me demande pas de marchander l'horreur, parce que la culpabilité que je ressens est hors de prix.C’est une dette que tu ne peux pas payer. Même toi, tu n’en a pas les moyens.
@Oscar Hangbé
- InvitéInvité
Re: As It Seems [PV]
Mar 6 Juil 2021 - 0:04
As it seems
Aveleen O’Donnell
Cause this life is as
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
2 mars 2021 – 16 h
Si l’air qui s’était attaché au visage fermé du diplomate n’avait pas bougé d’un iota, la colère qu’avait ressenti l’Américain s’était échappée. Le sorcier l’avait laissé partir au moment même ou sa question avait franchi ces lèvres. Une question qui tournait dans son esprit depuis de nombreuses années, une interrogation qu’il s’était toujours gardé d’énoncer à haute voix préférant ne pas connaître la détresse qui teinterait le regard d’Aveleen si jamais cette dernière venait à y répondre. Jusqu’à aujourd’hui, Oscar n’avait osé, restant à sa place, n’osant mettre le pied sur un territoire qui ne lui appartenait pas. Le représentant de la guerre n’avait pas eu besoin de résisté à la tentation de savoir ce qui se cachait sous cette réponse. Il y avait des choses qui ne se partageaient pas, des savoirs qui devaient rester cachés, des vérités qu’il ne valait mieux pas dévoiler. Aveleen avait eut ces secrets dès le début de leur partenariat, et Oscar n’était jamais allé voir au-delà de ce que l’Irlandaise avait été prête à lui offrir. Lui qui chevauchait la monture rouge, lui qui osait aller là ou personne d’autre n’avait le courage de mettre le pied, lui, le second fils Hangbé qui côtoyait la mort sans s’en formaliser, avait préféré garder la paix. Jusqu’à récemment, la bataille avait semblé incertaine et l’issue dangereuse. Il ne savait pas vraiment ce qui l’avait poussé à passer le cap, à envoyer dans le dos de son amie ces photos qui la terrifiait tant. Peut-être était-ce un résidu du courage qu’il avait vu dans le regard de Judith à la sortie de son procès, peut-être était-ce ce courage qu’il voyait encore lorsqu’il posait le regard sur cette une de La gazette du sorcier, alors que la presse venait encore fourrer son nez dans un monde qui ne la regardait pas. Ou alors avait-il simplement saisi l’opportunité lorsqu’elle lui avait été offerte. L’ami avait dû s’effacer, ne laissant alors qu’un vide à combler pour un mécène ambitieux et passionné. Passionné par ce qu’il y avait à gagner, par ce qui ferait un homme encore plus riche fusse-t-il suivi par la poule aux œufs d’or, mais cette dernière avait – semble-t-il – décidé de n’en faire qu’à sa tête.
Oscar n’en voulu pas à Aveleen, ou pas tout à fait. Il voulait comprendre, savoir ce qui bloquait tant sa protégée. Il voulait savoir pourquoi il n’osait pas franchir cette barrière si naturellement établie entre eux. Qu’est-ce qui la retenait ? Qui avait-il dans ses portraits qui poussait l’Irlandaise à se retrancher derrière les hauts murs de l’université écossaise ? Il avait quelques idées, mais le sentiment de ne pas tout comprendre était puissant. Maintenant que la question était posée, que cet accord long et tacite était brisé, il espérait savoir, entrevoir ce qui se passait sous ses yeux glacés. Si le diplomate n’était pas toujours très avenant, il pouvait se targuer de posséder une oreille attentive lorsqu’il y en avait le besoin, pour sa famille tout d’abord – Alice n’avait jamais hésité à partager ses doutes et ses incompréhensions avec son aîné – et puis pour son entourage, ses compagnons proches. La relation qu’il avait avec Aveleen n’était pas toujours très rose ni évidente, mais la photographe se trouvait depuis assez longtemps dans son cercle de connaissance pour être qualifiée d’amie et il comptait donc l’écouter avec le plus d’attention dont il était capable, c’était dire beaucoup.
Les bras croisés contre son torse, la colère encore un peu présente sur son visage s’estompait un peu, laissant la place à la curiosité, à l’interrogation. Silencieux, il ne brisa pas le semblant de paix qui s’était installé dans la salle de cours. Une paix qui n’attendait que d’éclater, mais qui promettait également des réponses longuement attendues. Il observa d’un œil curieux les gestes de l’enseignante, guettant le bruit mécanique de l’ordinateur qui se remettait en route, puis du projecteur. Lorsque la lumière de la classe laissa la place à l’obscurité, Oscar se redressa de quelques centimètres, concentré. Le suspens qui montait doucement le mettait mal à l’aise, comme s’il savait déjà ce qu’il allait voir apparaître sur l’écran blanc, comme si l’histoire qu’allait lui conter l’ombre qu’était devenue l’enseignante était déjà ancrée dans on esprit. Lorsque trois photographies se détachèrent dans l’obscurité, le regard noisette du diplomate quitta la silhouette élancée de l’Irlandaise pour se concentrer sur ces visages, sur ces formes, sur la mort qui ne manquait pas de s’échapper de ces clichés. Le discours d’Aveleen vint alors commenter les images, apportant un contexte qu’Oscar ne connaissait que de loin. Il avait toujours été fasciné par les grands reporters, ceux qui quittaient le confort de leur pays pour se rendre là ou les choses n’allaient pas aussi bien. Ces hommes et femmes prenaient en photo ce que personne d’autre n’osait prendre. Ils immortalisaient ce que beaucoup auraient préféré oublier. Ils apportaient à un monde ignorant la dure réalité qui les entouraient. Oscar ne quitta les trois images de son regard que lorsque la voix d’Aveleen s’érailla. Ses prunelles se posèrent sur la silhouette sombre de la blonde, guettant un geste, un mouvement. L’Irlandaise ne bougea que pour trouver le clavier de son ordinateur afin de laisser un autre cliché se dessiner sur le tableau blanc. Si Oscar n’était pas en mesure de voir l’émotion dans le regard de son amie, il pouvait l’entendre dans sa voix, il pouvait sentir sa peau frémir au fur et a mesure qu’elle parlait. Muet, terriblement calme, le diplomate la laissa finir, son regard passant du cliché à son visage caché dans l’ombre. Une grimace contrariée décora quelques secondes le visage de l’Américain, alors que sa protégeait citait un journal et que la honte ne lui fasse détourner le regard.
A la fin des mots d’Aveleen, lorsque ses paroles ne furent qu’un soupir éloigné, Oscar resta un instant immobile, son regard fixé sur celle qu’il aidait depuis des années. Et puis il quitta son assise, faisant grincer le mobilier de bois. Ses bras s’étaient décroisés et sans accordé un regard au cliché exposé, il s’avança. Il avait la grâce d’un félin mais exprimait plus de douceur que son alter-ego prédateur ne lui en laissait d’ordinaire le droit. Il avançait, fixant de ses prunelles presque dorée Aveleen et cet ordinateur. Lorsqu’il arriva au niveau de la sorcière, il se pencha en avant, frôlant de sa veste de costume la photographe. Sans un mot, il appuya de longues secondes sur le bouton éclairé du portable, jusqu’à ce qu’il s’éteigne et plonge la salle dans une obscurité presque parfaite, juste assez pour que ses facultés félines lui permettent de discerner les traits contrariés d’Aveleen dont le regard était toujours fuyant. Tout en conservant le silence – il ne put retenir un profond soupir – Oscar s’installa à côté de l’Irlandaise touchant son épaule de la sienne, regardant dans la même direction qu’elle. Il brisa finalement ce repos par quelques mots. « Je suis désolé, Aveleen. » Sa voix s’était teintée d’une émotion bien différente, une honte mesurée, des regrets qu’il ne pouvait nier. Il n’était pas indifférent à l’exposé de son ami et comprenait bien ce qui terrifiait sa partenaire. L’idée de devenir un monstre était un cauchemar qu’il ne connaissait que trop bien et dont il ne parvenait jamais à se détacher. Contrairement à la photographe cependant, le diplomate ne fuyait pas, il subissait sans réellement parvenir à s’en sortir.
Un léger soupir s’échappa de ses lèvres, alors que son regard quitta l’espace devant lui pour suivre le mouvement de sa tête vers le plafond. « Qu’aurait-on su de l’éruption volcanique en Colombie si Frank Fournier n’y était pas allé ? Qu’aurait-on retenu ? Des chiffres ? Des images lointaines ? L’impression que ce n’était rien, que cela ne nous concernait pas ? Que saurait-on de la misère du monde si Kevin Carter n’était pas allé au Soudan ? Que saurait-on s’il n’avait pas fait ces autres clichés, si, pour nous, il n’avait pas assisté à des atrocités de guerre ? » Il cessa ses questions quelques secondes, laissant ses interrogations flotter dans l’air, avant d’y répondre de lui-même. « On ne saurait rien. On aurait hoché la tête, hausser les épaules. On aurait soufflé Et alors ?. » Nouvelle pause, il espérait faire valoir ses arguments. Il espérait rassurer son artiste, mais le sujet était tellement sensible, tellement tranchant que cela ne semblait pas si facile. Il continua néanmoins. « Il n’est pas question de profit, ni de vol. Ce travail permet une ouverture sur un monde qui nous entoure et dont nous ne savons rien. Un monde qui nous effraie et que l’on préfère ignorer. » Il parlait de « on », de tout le monde, de lui, des autres, de ceux qui ne partaient pas sur le terrain, de ceux qui restaient dans leur tour plus ou moins haute. « Ce travail que tu as là est loin d’être le plus facile, Aveleen. Il est pourtant essentiel, indispensable pour se rendre compte de la vérité. Ne te sent pas coupable de partager la vérité, jamais. Ne te sent pas non plus coupable de la chercher, de la traquer, de l’attendre, patiemment. » Quittant le plafond de ses iris redevenues brunes, il posa un regard inquiet et tendre sur le visage de la blonde. « Si tu souhaites toutefois la garder cachée, je respecterais ton choix. » souffla-t-il, avant d’ajouter. « Cependant, si tu penses qu’il existe un moyen de l’exposer au monde sans te sentir coupable et sans que le profit ne vienne remplir les poches d’un ami indigne alors, éclaire-moi. »
Si l’air qui s’était attaché au visage fermé du diplomate n’avait pas bougé d’un iota, la colère qu’avait ressenti l’Américain s’était échappée. Le sorcier l’avait laissé partir au moment même ou sa question avait franchi ces lèvres. Une question qui tournait dans son esprit depuis de nombreuses années, une interrogation qu’il s’était toujours gardé d’énoncer à haute voix préférant ne pas connaître la détresse qui teinterait le regard d’Aveleen si jamais cette dernière venait à y répondre. Jusqu’à aujourd’hui, Oscar n’avait osé, restant à sa place, n’osant mettre le pied sur un territoire qui ne lui appartenait pas. Le représentant de la guerre n’avait pas eu besoin de résisté à la tentation de savoir ce qui se cachait sous cette réponse. Il y avait des choses qui ne se partageaient pas, des savoirs qui devaient rester cachés, des vérités qu’il ne valait mieux pas dévoiler. Aveleen avait eut ces secrets dès le début de leur partenariat, et Oscar n’était jamais allé voir au-delà de ce que l’Irlandaise avait été prête à lui offrir. Lui qui chevauchait la monture rouge, lui qui osait aller là ou personne d’autre n’avait le courage de mettre le pied, lui, le second fils Hangbé qui côtoyait la mort sans s’en formaliser, avait préféré garder la paix. Jusqu’à récemment, la bataille avait semblé incertaine et l’issue dangereuse. Il ne savait pas vraiment ce qui l’avait poussé à passer le cap, à envoyer dans le dos de son amie ces photos qui la terrifiait tant. Peut-être était-ce un résidu du courage qu’il avait vu dans le regard de Judith à la sortie de son procès, peut-être était-ce ce courage qu’il voyait encore lorsqu’il posait le regard sur cette une de La gazette du sorcier, alors que la presse venait encore fourrer son nez dans un monde qui ne la regardait pas. Ou alors avait-il simplement saisi l’opportunité lorsqu’elle lui avait été offerte. L’ami avait dû s’effacer, ne laissant alors qu’un vide à combler pour un mécène ambitieux et passionné. Passionné par ce qu’il y avait à gagner, par ce qui ferait un homme encore plus riche fusse-t-il suivi par la poule aux œufs d’or, mais cette dernière avait – semble-t-il – décidé de n’en faire qu’à sa tête.
Oscar n’en voulu pas à Aveleen, ou pas tout à fait. Il voulait comprendre, savoir ce qui bloquait tant sa protégée. Il voulait savoir pourquoi il n’osait pas franchir cette barrière si naturellement établie entre eux. Qu’est-ce qui la retenait ? Qui avait-il dans ses portraits qui poussait l’Irlandaise à se retrancher derrière les hauts murs de l’université écossaise ? Il avait quelques idées, mais le sentiment de ne pas tout comprendre était puissant. Maintenant que la question était posée, que cet accord long et tacite était brisé, il espérait savoir, entrevoir ce qui se passait sous ses yeux glacés. Si le diplomate n’était pas toujours très avenant, il pouvait se targuer de posséder une oreille attentive lorsqu’il y en avait le besoin, pour sa famille tout d’abord – Alice n’avait jamais hésité à partager ses doutes et ses incompréhensions avec son aîné – et puis pour son entourage, ses compagnons proches. La relation qu’il avait avec Aveleen n’était pas toujours très rose ni évidente, mais la photographe se trouvait depuis assez longtemps dans son cercle de connaissance pour être qualifiée d’amie et il comptait donc l’écouter avec le plus d’attention dont il était capable, c’était dire beaucoup.
Les bras croisés contre son torse, la colère encore un peu présente sur son visage s’estompait un peu, laissant la place à la curiosité, à l’interrogation. Silencieux, il ne brisa pas le semblant de paix qui s’était installé dans la salle de cours. Une paix qui n’attendait que d’éclater, mais qui promettait également des réponses longuement attendues. Il observa d’un œil curieux les gestes de l’enseignante, guettant le bruit mécanique de l’ordinateur qui se remettait en route, puis du projecteur. Lorsque la lumière de la classe laissa la place à l’obscurité, Oscar se redressa de quelques centimètres, concentré. Le suspens qui montait doucement le mettait mal à l’aise, comme s’il savait déjà ce qu’il allait voir apparaître sur l’écran blanc, comme si l’histoire qu’allait lui conter l’ombre qu’était devenue l’enseignante était déjà ancrée dans on esprit. Lorsque trois photographies se détachèrent dans l’obscurité, le regard noisette du diplomate quitta la silhouette élancée de l’Irlandaise pour se concentrer sur ces visages, sur ces formes, sur la mort qui ne manquait pas de s’échapper de ces clichés. Le discours d’Aveleen vint alors commenter les images, apportant un contexte qu’Oscar ne connaissait que de loin. Il avait toujours été fasciné par les grands reporters, ceux qui quittaient le confort de leur pays pour se rendre là ou les choses n’allaient pas aussi bien. Ces hommes et femmes prenaient en photo ce que personne d’autre n’osait prendre. Ils immortalisaient ce que beaucoup auraient préféré oublier. Ils apportaient à un monde ignorant la dure réalité qui les entouraient. Oscar ne quitta les trois images de son regard que lorsque la voix d’Aveleen s’érailla. Ses prunelles se posèrent sur la silhouette sombre de la blonde, guettant un geste, un mouvement. L’Irlandaise ne bougea que pour trouver le clavier de son ordinateur afin de laisser un autre cliché se dessiner sur le tableau blanc. Si Oscar n’était pas en mesure de voir l’émotion dans le regard de son amie, il pouvait l’entendre dans sa voix, il pouvait sentir sa peau frémir au fur et a mesure qu’elle parlait. Muet, terriblement calme, le diplomate la laissa finir, son regard passant du cliché à son visage caché dans l’ombre. Une grimace contrariée décora quelques secondes le visage de l’Américain, alors que sa protégeait citait un journal et que la honte ne lui fasse détourner le regard.
A la fin des mots d’Aveleen, lorsque ses paroles ne furent qu’un soupir éloigné, Oscar resta un instant immobile, son regard fixé sur celle qu’il aidait depuis des années. Et puis il quitta son assise, faisant grincer le mobilier de bois. Ses bras s’étaient décroisés et sans accordé un regard au cliché exposé, il s’avança. Il avait la grâce d’un félin mais exprimait plus de douceur que son alter-ego prédateur ne lui en laissait d’ordinaire le droit. Il avançait, fixant de ses prunelles presque dorée Aveleen et cet ordinateur. Lorsqu’il arriva au niveau de la sorcière, il se pencha en avant, frôlant de sa veste de costume la photographe. Sans un mot, il appuya de longues secondes sur le bouton éclairé du portable, jusqu’à ce qu’il s’éteigne et plonge la salle dans une obscurité presque parfaite, juste assez pour que ses facultés félines lui permettent de discerner les traits contrariés d’Aveleen dont le regard était toujours fuyant. Tout en conservant le silence – il ne put retenir un profond soupir – Oscar s’installa à côté de l’Irlandaise touchant son épaule de la sienne, regardant dans la même direction qu’elle. Il brisa finalement ce repos par quelques mots. « Je suis désolé, Aveleen. » Sa voix s’était teintée d’une émotion bien différente, une honte mesurée, des regrets qu’il ne pouvait nier. Il n’était pas indifférent à l’exposé de son ami et comprenait bien ce qui terrifiait sa partenaire. L’idée de devenir un monstre était un cauchemar qu’il ne connaissait que trop bien et dont il ne parvenait jamais à se détacher. Contrairement à la photographe cependant, le diplomate ne fuyait pas, il subissait sans réellement parvenir à s’en sortir.
Un léger soupir s’échappa de ses lèvres, alors que son regard quitta l’espace devant lui pour suivre le mouvement de sa tête vers le plafond. « Qu’aurait-on su de l’éruption volcanique en Colombie si Frank Fournier n’y était pas allé ? Qu’aurait-on retenu ? Des chiffres ? Des images lointaines ? L’impression que ce n’était rien, que cela ne nous concernait pas ? Que saurait-on de la misère du monde si Kevin Carter n’était pas allé au Soudan ? Que saurait-on s’il n’avait pas fait ces autres clichés, si, pour nous, il n’avait pas assisté à des atrocités de guerre ? » Il cessa ses questions quelques secondes, laissant ses interrogations flotter dans l’air, avant d’y répondre de lui-même. « On ne saurait rien. On aurait hoché la tête, hausser les épaules. On aurait soufflé Et alors ?. » Nouvelle pause, il espérait faire valoir ses arguments. Il espérait rassurer son artiste, mais le sujet était tellement sensible, tellement tranchant que cela ne semblait pas si facile. Il continua néanmoins. « Il n’est pas question de profit, ni de vol. Ce travail permet une ouverture sur un monde qui nous entoure et dont nous ne savons rien. Un monde qui nous effraie et que l’on préfère ignorer. » Il parlait de « on », de tout le monde, de lui, des autres, de ceux qui ne partaient pas sur le terrain, de ceux qui restaient dans leur tour plus ou moins haute. « Ce travail que tu as là est loin d’être le plus facile, Aveleen. Il est pourtant essentiel, indispensable pour se rendre compte de la vérité. Ne te sent pas coupable de partager la vérité, jamais. Ne te sent pas non plus coupable de la chercher, de la traquer, de l’attendre, patiemment. » Quittant le plafond de ses iris redevenues brunes, il posa un regard inquiet et tendre sur le visage de la blonde. « Si tu souhaites toutefois la garder cachée, je respecterais ton choix. » souffla-t-il, avant d’ajouter. « Cependant, si tu penses qu’il existe un moyen de l’exposer au monde sans te sentir coupable et sans que le profit ne vienne remplir les poches d’un ami indigne alors, éclaire-moi. »
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Re: As It Seems [PV]
Lun 2 Aoû 2021 - 15:37
Aveleen goûtait à l'aigreur de sa déception et de sa tristesse dans un silence à présent religieux, seulement ponctué par le son de sa propre respiration, qui lui semblait bien trop bruyante. Ça, et le ronronnement doucereux du projecteur qui diffusait les honteuses photographies derrière elle, plongeant le reste de la salle de cours dans l'obscurité. C'était bénéfique, en un sens : si elle ne pouvait plus distinguer d'Oscar que les vagues contours, alors ce qu’il pouvait bien penser d’elle lui échappait tout autant. Depuis qu’elle avait cessé de parler, l’air avait enflé jusqu’à devenir quelque chose de palpable et désagréable, comme la fumée d’un incendie, irritante pour les yeux et la gorge. C’était un climat sec et inhospitalier dans un désert fait de glace. Tout à l’intérieur, Aveleen avait bien du mal à organiser les différentes strates de son ressentiment : elle était en colère, évidemment, déçue, terriblement, et honteuse. Désespérément. Et tout ça formait une masse diffuse qu’elle ne savait pas comment organiser. Il aurait fallu fractionner les émotions pour correctement les analyser, une à une, jusqu’à trouver une solution, les disséquer jusqu’à retrouver leurs origines, les niveler pour commencer par ce qui trônait tout en haut de la pyramide, puis les défaire une à une, s’attardant sur chaque entremêlement. Mais elle n’en avait pas l’énergie. Alors l’Irlandaise soupira, ses yeux se baladant dans cette obscurité jusqu’à effleurer son mécène, qu’elle n’osa pas fixer même ainsi dissimulé dans la pénombre. Elle détourna donc le regard, se perdit quelque part dans le néant jusqu’à décider de ne plus rien fixer d’autre que le vide. Elle aurait aimé qu’Oscar tourne les talons et lui rende les clés de son royaume : lui qui ne lâchait jamais le morceau était un adversaire qu’elle n’avait pas envie d’affronter sur un terrain aussi sensible que celui de ses incertitudes.
Quand il bougea, Aveleen pu sentir toutes ses alarmes internes s’affoler : contrairement à ses espérances, il empiétait encore plus sur ses plates bandes. En un instant, il fut près du bureau, et un mouvement plus tard, l’une de ses épaules vint frôler la sienne. Aveleen poussa un long soupire de contrariété, son menton pointant obstinément dans la direction opposée alors qu’elle soustrayait son profil à sa vision. Ce fut seulement lorsque l’obscurité les engloutit que l’enseignante osa enfin déserrer les dents. L’effet fut radical : dans la nuit complète, l’Irlandaise eut enfin l’impression d’être en sécurité, comme à l’intérieur de la chambre noire dans laquelle elle développait ses clichés. Peut-être qu’au fond, elle était faite de la même façon : des humeurs en négatifs, qu’il fallait plonger dans les bons réactifs et faire lentement sécher à l’abri des regards. Le poids de ses erreurs, ces photographies qui nimbaient jusqu’alors sa personne, comme pour mettre sous le feu du projecteur la coupable, venait de s’éteindre, au moins métaphoriquement. La photographe ferma inutilement les yeux, comme pour s’enfermer un peu plus dans ce cocon : là, dans le noir complet qu’Oscar venait de lui offrir, elle avait enfin le sentiment que plus rien n’essayait de venir décortiquer ses émotions. Déjà mise à nue, elle eut l’impression qu’on lui offrait enfin de quoi se soustraire.
– Je suis désolé, Aveleen.
La respiration de l’Irlandaise manqua de tituber. Elle rouvrit les yeux et les vrilla inutilement vers la silhouette toute proche. Il y avait eu quelque chose dans la tonalité de ses excuses de particulièrement juste, quelque chose qui glissa sur l’enseignante comme des plumes soyeuses et qui vint se nicher tout contre elle. Certaines personnes passaient une vie entière à s’excuser de tout, du moindre désagrément à la météo indépendante de leur volonté jusqu’à ce que les mots ne soit érodés par la répétition, comme les rochers par le ressac incessant des vagues. D’autres se refusaient à les formuler, même lorsque leurs actions auraient méritées que les portes fermées à double tour de leur orgueil ne laissent enfin passer un peu d’abnégation. Et puis, il y avait les vraies excuses, celles prononcées au bon moment, celles qui étaient chargées de suffisamment d’émotions et d’honnêteté pour trouver le bon chemin, qu’importe le nombre d’obstacles. Les mots avaient leur importance, la justesse de leur organisation en phrase encore plus. Mais parfois, la simple façon de les dire battait tout le reste. Les excuses ouvrirent la porte, et Aveleen laissa les paroles d’Oscar s’engouffrer dans la brèche sans l’interrompre une seule fois.
Elle connaissait l’Oscar orgueilleux, ses yeux fauves en embuscade derrière le sourire carnassier : le riche héritier, son costume hors de prix et son porte-feuille toujours en main pour clore des avis qui n’étaient pas les siens, avec cet air sûr de lui et ces phrases acérées qui promettaient l’enfer si l’on abdiquait pas dans son sens ; il avait toujours représenté une certaine force de la nature, qu’une solide réputation familiale avait polie jusqu’à ce que la main soit faîte d’un métal inflexible. Il était aussi Oscar l’impulsif, celui qui exorcisait toute cette colère contenue dans des rixes populaires, celui qui jouait des poings pour s’émanciper de toute la frustration que les discours politiciens sans fins cultivaient lentement jusqu’à l’implosion. C'était la rage de vaincre pour dissimuler la peur de perdre, c'était écraser les autres pour arriver au sommet, c'était le félin qui traquait et s’amusait de ses proies pour oublier qu’il faisait pourtant lui aussi parti de la chaîne alimentaire. Oscar, c’était tout ça à la fois, mais elle n’avait jamais eu l’occasion de creuser le reste, comme autant de petits cailloux qui jonchaient pourtant le chemin de leur étrange relation. Mais maintenant, elle voyait autre chose : comme une délicate aspérité à la surface du métal. Le secret, c’était toujours la faille. C’était comme cela que l’on pouvait briser des armures.
Cet Oscar là, dont la voix se faisait velours dans la pénombre, lui, c’était soudain les mots chargés de réconforts, les réflexions teintées de bon sens pour venir adoucir la honte et la rendre plus acceptable en l’enrobant de miel, c’était l’édulcoration de la noirceur de la photographe pour façonner un compromis acceptable. Et plus que le sens de ses phrases, c’était l’intention sous-jacente, peut-être parce que pour une fois, les affres de la manipulation lui semblèrent aussi loin que l’envie de faire un profit à ses dépens. Et surtout, surtout, c’était ce drôle de sentiment. Elle avait longtemps cru que les racines de leur entente reposaient avant tout sur les modalités donnant-donnant d’un mécène et de son artiste, dont la santé amicale était proportionnelle aux profits. Et comment ne pas se laisser berner ? La photographie avait toujours pris toute la place, et l’intérêt d’Oscar pour elle lui avait toujours semblé dépendre de sa capacité à lui montrer le monde sous papier glacé en format trois demi. Mais, au fur et à mesure qu’il parlait, Aveleen cru entrevoir pour la première fois une inversion dans le fragile équilibre de la balance. C’était quelque chose d’insidieux et de doux. Quelque chose comme le vent et la pluie s’immisçant à travers une vitre mal refermée, l’un de ces soirs où la fatigue avait fait oublier de précautionneusement tout refermer. Quelque chose d’un peu fragile, dans cet instant d’entre d’eux après qu’une dispute ait râpée a vif tout le reste jusqu’à ne laisser qu’une extrême sensibilité : un de ces moments où les mots étaient comme de la soie, caressante et glissante, pour venir recouvrir la peau sensible d’une relation qui avait peut-être plus de fragilité qu’ils ne l’auraient tous les deux crû. Avec cette délicatesse qu’Aveleen ne lui connaissait pas, Oscar venait d’accepter de perdre pour faire triompher autre chose. Peut-être que c’était ça, prendre soin de quelqu’un de cher : s’excuser de la forme, mais pas d’avoir voulu la pousser vers l’avant. S’excuser d’avoir bousculer un peu trop fort le nid des problèmes, accepter qu’à cet instant cela soit trop compliqué, mais persister à vouloir la voir avancer. C’était pour cette raison, que ses excuses avaient autant de saveur : parce que tout semblait soudain motivé par la bienveillance. Elle qui avait toujours l’impression de voler aux autres leurs sentiments refoulés avaient l’impression de s’être faite entièrement dépouillée : Oscar avait pillée sans vergogne ses portraits, mais c’était à présent avec la plus infinie douceur qu’il lui volait quelque chose de plus précieux, un secret qu’elle n’avait pas su partager sans y être forcée mais qu’il avait su interpréter. Sa promesse de renoncer si elle le lui demandait lui soufflait qu’en étant libre de fuir, elle venait de gagner le courage de s’affronter.
– Merci, murmura-t-elle alors simplement lorsqu’il eu fini, d’une voix un peu éraillée par les émotions.
Juste ça. Un merci qui déborda de ses lèvres par un soudain sentiment de gratitude. Et puis, sans vraiment se l’expliquer, Aveleen posa doucement sa tête sur l’épaule d’Oscar. Il sentait un mélange de propre et d’agrumes, comme un linge qui aurait séché près d’un orangé. Elle ferma les yeux. Cette proximité avait quelque chose d’étrange et d’évident à la fois, comme l’impression qu’elle avait toujours été possible si elle avait su mieux s’y attarder.
– Tu n’es pas indigne, corrigea-t-elle finalement.
De l’orange et quelque chose d’autre, comme de l’amande. Oscar sentait les fins d’après-midi d’été, l’herbe rougie par le soleil rasant et la discrète effluve saline de l’océan. Cela avait quelque chose de réconfortant, comme une maison de campagne que l’on savait pouvoir retrouver à chaque vacances, comme un cocon Proustien qui lui rapellait pourquoi elle finissait toujours par rentrer.
– Tu es, reprit-elle, butant un peu sur les mots, cherchant la meilleure définition, avant de se décider : un véritable ami.
@Oscar Hangbé
Quand il bougea, Aveleen pu sentir toutes ses alarmes internes s’affoler : contrairement à ses espérances, il empiétait encore plus sur ses plates bandes. En un instant, il fut près du bureau, et un mouvement plus tard, l’une de ses épaules vint frôler la sienne. Aveleen poussa un long soupire de contrariété, son menton pointant obstinément dans la direction opposée alors qu’elle soustrayait son profil à sa vision. Ce fut seulement lorsque l’obscurité les engloutit que l’enseignante osa enfin déserrer les dents. L’effet fut radical : dans la nuit complète, l’Irlandaise eut enfin l’impression d’être en sécurité, comme à l’intérieur de la chambre noire dans laquelle elle développait ses clichés. Peut-être qu’au fond, elle était faite de la même façon : des humeurs en négatifs, qu’il fallait plonger dans les bons réactifs et faire lentement sécher à l’abri des regards. Le poids de ses erreurs, ces photographies qui nimbaient jusqu’alors sa personne, comme pour mettre sous le feu du projecteur la coupable, venait de s’éteindre, au moins métaphoriquement. La photographe ferma inutilement les yeux, comme pour s’enfermer un peu plus dans ce cocon : là, dans le noir complet qu’Oscar venait de lui offrir, elle avait enfin le sentiment que plus rien n’essayait de venir décortiquer ses émotions. Déjà mise à nue, elle eut l’impression qu’on lui offrait enfin de quoi se soustraire.
– Je suis désolé, Aveleen.
La respiration de l’Irlandaise manqua de tituber. Elle rouvrit les yeux et les vrilla inutilement vers la silhouette toute proche. Il y avait eu quelque chose dans la tonalité de ses excuses de particulièrement juste, quelque chose qui glissa sur l’enseignante comme des plumes soyeuses et qui vint se nicher tout contre elle. Certaines personnes passaient une vie entière à s’excuser de tout, du moindre désagrément à la météo indépendante de leur volonté jusqu’à ce que les mots ne soit érodés par la répétition, comme les rochers par le ressac incessant des vagues. D’autres se refusaient à les formuler, même lorsque leurs actions auraient méritées que les portes fermées à double tour de leur orgueil ne laissent enfin passer un peu d’abnégation. Et puis, il y avait les vraies excuses, celles prononcées au bon moment, celles qui étaient chargées de suffisamment d’émotions et d’honnêteté pour trouver le bon chemin, qu’importe le nombre d’obstacles. Les mots avaient leur importance, la justesse de leur organisation en phrase encore plus. Mais parfois, la simple façon de les dire battait tout le reste. Les excuses ouvrirent la porte, et Aveleen laissa les paroles d’Oscar s’engouffrer dans la brèche sans l’interrompre une seule fois.
Elle connaissait l’Oscar orgueilleux, ses yeux fauves en embuscade derrière le sourire carnassier : le riche héritier, son costume hors de prix et son porte-feuille toujours en main pour clore des avis qui n’étaient pas les siens, avec cet air sûr de lui et ces phrases acérées qui promettaient l’enfer si l’on abdiquait pas dans son sens ; il avait toujours représenté une certaine force de la nature, qu’une solide réputation familiale avait polie jusqu’à ce que la main soit faîte d’un métal inflexible. Il était aussi Oscar l’impulsif, celui qui exorcisait toute cette colère contenue dans des rixes populaires, celui qui jouait des poings pour s’émanciper de toute la frustration que les discours politiciens sans fins cultivaient lentement jusqu’à l’implosion. C'était la rage de vaincre pour dissimuler la peur de perdre, c'était écraser les autres pour arriver au sommet, c'était le félin qui traquait et s’amusait de ses proies pour oublier qu’il faisait pourtant lui aussi parti de la chaîne alimentaire. Oscar, c’était tout ça à la fois, mais elle n’avait jamais eu l’occasion de creuser le reste, comme autant de petits cailloux qui jonchaient pourtant le chemin de leur étrange relation. Mais maintenant, elle voyait autre chose : comme une délicate aspérité à la surface du métal. Le secret, c’était toujours la faille. C’était comme cela que l’on pouvait briser des armures.
Cet Oscar là, dont la voix se faisait velours dans la pénombre, lui, c’était soudain les mots chargés de réconforts, les réflexions teintées de bon sens pour venir adoucir la honte et la rendre plus acceptable en l’enrobant de miel, c’était l’édulcoration de la noirceur de la photographe pour façonner un compromis acceptable. Et plus que le sens de ses phrases, c’était l’intention sous-jacente, peut-être parce que pour une fois, les affres de la manipulation lui semblèrent aussi loin que l’envie de faire un profit à ses dépens. Et surtout, surtout, c’était ce drôle de sentiment. Elle avait longtemps cru que les racines de leur entente reposaient avant tout sur les modalités donnant-donnant d’un mécène et de son artiste, dont la santé amicale était proportionnelle aux profits. Et comment ne pas se laisser berner ? La photographie avait toujours pris toute la place, et l’intérêt d’Oscar pour elle lui avait toujours semblé dépendre de sa capacité à lui montrer le monde sous papier glacé en format trois demi. Mais, au fur et à mesure qu’il parlait, Aveleen cru entrevoir pour la première fois une inversion dans le fragile équilibre de la balance. C’était quelque chose d’insidieux et de doux. Quelque chose comme le vent et la pluie s’immisçant à travers une vitre mal refermée, l’un de ces soirs où la fatigue avait fait oublier de précautionneusement tout refermer. Quelque chose d’un peu fragile, dans cet instant d’entre d’eux après qu’une dispute ait râpée a vif tout le reste jusqu’à ne laisser qu’une extrême sensibilité : un de ces moments où les mots étaient comme de la soie, caressante et glissante, pour venir recouvrir la peau sensible d’une relation qui avait peut-être plus de fragilité qu’ils ne l’auraient tous les deux crû. Avec cette délicatesse qu’Aveleen ne lui connaissait pas, Oscar venait d’accepter de perdre pour faire triompher autre chose. Peut-être que c’était ça, prendre soin de quelqu’un de cher : s’excuser de la forme, mais pas d’avoir voulu la pousser vers l’avant. S’excuser d’avoir bousculer un peu trop fort le nid des problèmes, accepter qu’à cet instant cela soit trop compliqué, mais persister à vouloir la voir avancer. C’était pour cette raison, que ses excuses avaient autant de saveur : parce que tout semblait soudain motivé par la bienveillance. Elle qui avait toujours l’impression de voler aux autres leurs sentiments refoulés avaient l’impression de s’être faite entièrement dépouillée : Oscar avait pillée sans vergogne ses portraits, mais c’était à présent avec la plus infinie douceur qu’il lui volait quelque chose de plus précieux, un secret qu’elle n’avait pas su partager sans y être forcée mais qu’il avait su interpréter. Sa promesse de renoncer si elle le lui demandait lui soufflait qu’en étant libre de fuir, elle venait de gagner le courage de s’affronter.
– Merci, murmura-t-elle alors simplement lorsqu’il eu fini, d’une voix un peu éraillée par les émotions.
Juste ça. Un merci qui déborda de ses lèvres par un soudain sentiment de gratitude. Et puis, sans vraiment se l’expliquer, Aveleen posa doucement sa tête sur l’épaule d’Oscar. Il sentait un mélange de propre et d’agrumes, comme un linge qui aurait séché près d’un orangé. Elle ferma les yeux. Cette proximité avait quelque chose d’étrange et d’évident à la fois, comme l’impression qu’elle avait toujours été possible si elle avait su mieux s’y attarder.
– Tu n’es pas indigne, corrigea-t-elle finalement.
De l’orange et quelque chose d’autre, comme de l’amande. Oscar sentait les fins d’après-midi d’été, l’herbe rougie par le soleil rasant et la discrète effluve saline de l’océan. Cela avait quelque chose de réconfortant, comme une maison de campagne que l’on savait pouvoir retrouver à chaque vacances, comme un cocon Proustien qui lui rapellait pourquoi elle finissait toujours par rentrer.
– Tu es, reprit-elle, butant un peu sur les mots, cherchant la meilleure définition, avant de se décider : un véritable ami.
@Oscar Hangbé
- InvitéInvité
Re: As It Seems [PV]
Jeu 5 Aoû 2021 - 21:01
As it seems
Aveleen O’Donnell
Cause this life is as
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
Fragile as a dream, and
Nothing's ever really
As it seems Lily Kershaw
2 mars 2021 – 16 h
Un léger blanc avait suivi la mise dans l’ombre de la salle de classe. En chassant toute source lumineuse, le diplomate tenait en ces mains un outil d’importance capitale. Ça et le fait qu’Aveleen n’osait le regarder dans les yeux. L’Américain pouvait ainsi trouver le courage de s’excuser, de se repentir sans toutefois trop se sentir coupable de l’action qu’il avait faite. Oh, il s’en voulait. Repousser une personne nullement prête dans ses retranchements n’était pas quelque chose de facile, pour ladite âme et celui qui persistait, plus encore lorsque les relations étaient cordiales et qu’une amitié étrange venait s’intégrer à l’équation. Mais le calme qui régnait dans la salle d’étude apportait un certain apaisement à l’esprit du diplomate, malgré les images qu’on lui avait exposé, malgré les reproches acérés dont on l’avait gratifié. L’obscurité avait toujours été un bon moyen pour se calmer, pour se recentrer sur ce qui comptait vraiment, sur soi, ses sentiments et ceux des autres. Oscar ne s’excusait pas souvent, mais lorsqu’il le faisait, l’honnêteté de ses mots ne pouvait pas être remise en cause. Désolé, il l’était pour avoir dépasser les limites, pour avoir proposer ces photos si jalousement gardées par l’Irlandaise. Désolé, il l’était plus encore pour ce que la blonde ressentait vis-à-vis de ces clichés, vis-à-vis de ce métier dans lequel elle excellait pourtant. La douceur de cette nuit artificielle, cette proximité tout inédite amplifiait les pardons du diplomate. Dans cet environnement, il comprenait tout, il voyait claire sur un sujet qu’il avait jusque-là laissé au bon vouloir des éléments et des état-d ’âmes de l’artiste. Dans cette ambiance si étrange, si tranquille, il espérait que ces mots suffiraient à exprimer ses regrets, qu’ils suffiraient à rassurer, à initier une réconciliation nécessaire de l’artiste et de son art.
Ses excuses furent suivies par un discours honnête et profond sur l’importance du travail des reporters tels que Fournier, Carter et Aveleen. Peut-être qu’Oscar ne pouvait pas tout comprendre. Il avait cependant l’impression de connaître cette envie irrépressible d’avoir le meilleur cliché possible, le plus impactant, celui qui représentait la réalité et serait assez choquant pour marquer les esprits du monde entier. Le diplomate comprenait cette envie irrésistible de vouloir aller au bout, de cadrer son sujet, d’appuyer sur son objectif au bon moment. Lui qui n’avait jamais tenu en main un seul appareil photo, n’avait que trop bien idée de l’importance qu’il avait pour ceux qui s’en saisissaient chaque jour. Ils prenaient des clichés, marquant un seul instant dans l’immortalité d’un papier glacé, ils étaient capables d’attendre des heures pour s’assurer d’obtenir la bonne lumière. Ils étaient alors tout aussi passionnés et minutieux que l’était le sorcier durant ces négociations quotidiennes. Il y avait là comme un assouvissement nécessaire, une bataille parfois rude mais qui n’avait qu’une seule visée : réussir, obtenir le cliché que l’on souhaitait ou bien avoir le dessus sur une discussion politique. Alors non, le diplomate n’y connaissait rien en art photographique, mais il connaissait le procédé psychologique qui s’y attachait. La volonté, la patience, la rage d’arriver à ses fins. Chez Aveleen – comme chez d’autres – il y avait également le talent, les idées. Oscar l’avait vu, il en avait été le premier témoin. L’Irlandaise cherchait les émotions, la fébrilité des regards, la fragilité des visages et cette quête insatiable menait aux plus beaux des clichés, pourtant resté caché loin des visages des amateurs et que la sorcière, elle, était rongée par la honte et les remords.
Lorsqu’Oscar eut terminé son discours, argumentant quant à l’importance du métier, de l’art, partageant son avis sur la honte que ressentait son amie, il espérait avoir marqué quelques points. Il ne pouvait pas aspirer à voir les remords dans le regard de la blonde s’effacer aussi rapidement, mais il aimait imaginer qu’Aveleen trouverait le moyen d’user de son appareil photo sans se censurer, sans s’inquiéter de capturer la beauté d’un monde fragile et douloureux. La voix de la blonde ne mis pas très longtemps avant de répondre à celle, bien plus grave, du diplomate. Les émotions pointaient encore dans ces remerciements et le simple mot proposé par la photographe rassura l’Américain quant à la santé de leur partenariat. Lorsqu’elle posa sa tête sur l’épaule d’Oscar, ce dernier observa un instant la trentenaire du coin de l’œil avant de poser son regard au loin, de laisser à ce moment la paisibilité étrange mais agréable de cette conversation. Oh, tout cela ne réglait pas le problème du mécène, loin de là. L’ami lui, le véritable ami qui n’est pas indigne était plus que satisfait. Un sourire s’était d’ailleurs étiré sur le visage du diplomate, avec ce qu’il avait fait et les reproches de son artiste, il était bien étonnant que cette conversation se termine ainsi. « Attention, je note tout cela et je ne manquerais pas de les ressortir la prochaine fois que nous ne serons pas d’accord sur quelque chose. » souffla-t-il, le ton bien plus léger que lorsqu’il avait salué l’enseignante, que quand il lui avait posé cette fameuse question, que lorsqu’il s’était excusé. Usant de ses prunelles légèrement dorée – s’il ne contrôlait pas son côté animagus lorsqu’il était en colère, la maîtrise était parfaite lorsqu’il était en pleine possession de ces moyens - le diplomate fixa quelques secondes l’horloge accrochée dans la classe. « Ton véritable ami devrait probablement retourner voir si son stagiaire n’a pas déclenché une guerre administrative avec le bureau des Oubliators. » soupira-t-il, ne doutant pas en les capacités du Blackthorn, mais plutôt sur la diplomatie de celle a qui il aurait très certainement à faire. « Que dirais-tu d’aller prendre un café, dans la semaine ? » proposa-t-il finalement, demandant en tant qu’ami et non mécène. Il avait comme l’impression que la photographie ne serait pas un sujet dont ils parleraient de sitôt, pas tant qu’Aveleen n’en exprime le désir.
Un léger blanc avait suivi la mise dans l’ombre de la salle de classe. En chassant toute source lumineuse, le diplomate tenait en ces mains un outil d’importance capitale. Ça et le fait qu’Aveleen n’osait le regarder dans les yeux. L’Américain pouvait ainsi trouver le courage de s’excuser, de se repentir sans toutefois trop se sentir coupable de l’action qu’il avait faite. Oh, il s’en voulait. Repousser une personne nullement prête dans ses retranchements n’était pas quelque chose de facile, pour ladite âme et celui qui persistait, plus encore lorsque les relations étaient cordiales et qu’une amitié étrange venait s’intégrer à l’équation. Mais le calme qui régnait dans la salle d’étude apportait un certain apaisement à l’esprit du diplomate, malgré les images qu’on lui avait exposé, malgré les reproches acérés dont on l’avait gratifié. L’obscurité avait toujours été un bon moyen pour se calmer, pour se recentrer sur ce qui comptait vraiment, sur soi, ses sentiments et ceux des autres. Oscar ne s’excusait pas souvent, mais lorsqu’il le faisait, l’honnêteté de ses mots ne pouvait pas être remise en cause. Désolé, il l’était pour avoir dépasser les limites, pour avoir proposer ces photos si jalousement gardées par l’Irlandaise. Désolé, il l’était plus encore pour ce que la blonde ressentait vis-à-vis de ces clichés, vis-à-vis de ce métier dans lequel elle excellait pourtant. La douceur de cette nuit artificielle, cette proximité tout inédite amplifiait les pardons du diplomate. Dans cet environnement, il comprenait tout, il voyait claire sur un sujet qu’il avait jusque-là laissé au bon vouloir des éléments et des état-d ’âmes de l’artiste. Dans cette ambiance si étrange, si tranquille, il espérait que ces mots suffiraient à exprimer ses regrets, qu’ils suffiraient à rassurer, à initier une réconciliation nécessaire de l’artiste et de son art.
Ses excuses furent suivies par un discours honnête et profond sur l’importance du travail des reporters tels que Fournier, Carter et Aveleen. Peut-être qu’Oscar ne pouvait pas tout comprendre. Il avait cependant l’impression de connaître cette envie irrépressible d’avoir le meilleur cliché possible, le plus impactant, celui qui représentait la réalité et serait assez choquant pour marquer les esprits du monde entier. Le diplomate comprenait cette envie irrésistible de vouloir aller au bout, de cadrer son sujet, d’appuyer sur son objectif au bon moment. Lui qui n’avait jamais tenu en main un seul appareil photo, n’avait que trop bien idée de l’importance qu’il avait pour ceux qui s’en saisissaient chaque jour. Ils prenaient des clichés, marquant un seul instant dans l’immortalité d’un papier glacé, ils étaient capables d’attendre des heures pour s’assurer d’obtenir la bonne lumière. Ils étaient alors tout aussi passionnés et minutieux que l’était le sorcier durant ces négociations quotidiennes. Il y avait là comme un assouvissement nécessaire, une bataille parfois rude mais qui n’avait qu’une seule visée : réussir, obtenir le cliché que l’on souhaitait ou bien avoir le dessus sur une discussion politique. Alors non, le diplomate n’y connaissait rien en art photographique, mais il connaissait le procédé psychologique qui s’y attachait. La volonté, la patience, la rage d’arriver à ses fins. Chez Aveleen – comme chez d’autres – il y avait également le talent, les idées. Oscar l’avait vu, il en avait été le premier témoin. L’Irlandaise cherchait les émotions, la fébrilité des regards, la fragilité des visages et cette quête insatiable menait aux plus beaux des clichés, pourtant resté caché loin des visages des amateurs et que la sorcière, elle, était rongée par la honte et les remords.
Lorsqu’Oscar eut terminé son discours, argumentant quant à l’importance du métier, de l’art, partageant son avis sur la honte que ressentait son amie, il espérait avoir marqué quelques points. Il ne pouvait pas aspirer à voir les remords dans le regard de la blonde s’effacer aussi rapidement, mais il aimait imaginer qu’Aveleen trouverait le moyen d’user de son appareil photo sans se censurer, sans s’inquiéter de capturer la beauté d’un monde fragile et douloureux. La voix de la blonde ne mis pas très longtemps avant de répondre à celle, bien plus grave, du diplomate. Les émotions pointaient encore dans ces remerciements et le simple mot proposé par la photographe rassura l’Américain quant à la santé de leur partenariat. Lorsqu’elle posa sa tête sur l’épaule d’Oscar, ce dernier observa un instant la trentenaire du coin de l’œil avant de poser son regard au loin, de laisser à ce moment la paisibilité étrange mais agréable de cette conversation. Oh, tout cela ne réglait pas le problème du mécène, loin de là. L’ami lui, le véritable ami qui n’est pas indigne était plus que satisfait. Un sourire s’était d’ailleurs étiré sur le visage du diplomate, avec ce qu’il avait fait et les reproches de son artiste, il était bien étonnant que cette conversation se termine ainsi. « Attention, je note tout cela et je ne manquerais pas de les ressortir la prochaine fois que nous ne serons pas d’accord sur quelque chose. » souffla-t-il, le ton bien plus léger que lorsqu’il avait salué l’enseignante, que quand il lui avait posé cette fameuse question, que lorsqu’il s’était excusé. Usant de ses prunelles légèrement dorée – s’il ne contrôlait pas son côté animagus lorsqu’il était en colère, la maîtrise était parfaite lorsqu’il était en pleine possession de ces moyens - le diplomate fixa quelques secondes l’horloge accrochée dans la classe. « Ton véritable ami devrait probablement retourner voir si son stagiaire n’a pas déclenché une guerre administrative avec le bureau des Oubliators. » soupira-t-il, ne doutant pas en les capacités du Blackthorn, mais plutôt sur la diplomatie de celle a qui il aurait très certainement à faire. « Que dirais-tu d’aller prendre un café, dans la semaine ? » proposa-t-il finalement, demandant en tant qu’ami et non mécène. Il avait comme l’impression que la photographie ne serait pas un sujet dont ils parleraient de sitôt, pas tant qu’Aveleen n’en exprime le désir.
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