17.12.21 | Hello, my old friend ft. @Ackley Wesson

Depuis son retour sur les terres écossaises, Arthur passait une grande partie de son temps libre à renouer avec des contacts plus ou moins de longue date. Normal pour un diplomate, dira-t-on, d’entretenir lesdits liens qui forgeaient tout son réseau professionnel actuel. Il n’y avait pourtant pas que ce type de contact dans ses rencontres récentes, certains chevauchaient à la fois l’amitié personnelle et professionnelle. Ackley en faisait partie et il était même étonnant qu’ils aient attendu tout ce temps pour finalement se rencontrer. La faute au travail des deux hommes qui comptait plus pour eux que n’importe quelle beuverie de seconde zone. Arthur éprouvait une grande satisfaction à retrouver l’Auror car il ne comptait que peu d’amis sincères dans son entourage et une petite partie de lui estimait le Britannique comme étant l’une des rares connexions humaines ayant son lot de vérités. Mais bien sûr, de par leur travail respectif, le Roumain faisait constamment attention à ses propos car un incident diplomatique était vite arrivé - même lors d’une conversation de courtoisie.

Le cochon à plumes avait été son refuge lors de son arrivée en Ecosse quelques mois plus tôt, jusqu’à ce qu’il trouve un logement digne de sa position - et payé par ses employeurs, bien sûr. Toute l’ambiance du pub lui sauta au visage lorsqu'il passa la porte et une étrange sensation de familiarité l’envahit. Il connaissait le lieu et donc, il se sentait plus à même de se détendre. Bien vite, il troqua cette sensation pour une recherche active de son ami, qu’il trouva à une table discrète en pleine lecture d’un journal sorcier. Il remarqua aussitôt le signe de la Gazette et eut un léger rictus, préférant largement écumer les pages de la Chouette Enchaînée qui, à ses yeux, relevait bien plus de la réalité. Sans plus attendre, il rejoignit l’Auror et s’installa face à lui, dérangeant sa lecture par sa simple présence.

« Bonsoir l’ami, j’espère que je ne t’interromps pas trop ? » Il jeta un coup d’oeil au journal qu’il avait encore entre les mains et lui fit part d’un sourire qu’il gardait bien souvent caché à l’intérieur de lui-même. Mais Ackley étant un ami, il se devait de faire preuve d’un peu d’humanité à ses côtés. Il en oubliait même parfois la signification…

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Arthur regarda son ami avec attention. Il n’avait pas beaucoup changé depuis leur dernière entrevue mais on pouvait en dire de même de lui. Le temps ne semblait pas avoir d’emprise sur l’Auror et le diplomate, comme si les années leur avaient appris à passer entre les gouttes de la vieillesse. On discernait pourtant quelques rides aux coins de leurs yeux qui laissaient entendre que leur prime jeunesse était bien derrière eux. Il lui semblait que leur dernière conversation datait de la veille à la façon dont l’homme l’accueillit à sa table. Sa sincérité ne faisait aucun doute pour le Roumain, qui la partageait avec bonne volonté. Il s’installa un peu plus confortablement en face de l’Auror, retirant manteau, gants et écharpe comme s’il en avait réellement besoin pour combattre le froid. Arthur était un habitué des basses températures et si cela ne tenait qu’à lui, il se promènerait en chemise uniquement - mais cela ne ferait que poser plus de questions et sa discrétion en serait affaiblie. Pour parfaire à son travail, il se devait de se fondre dans la masse.

« Plaisir partagé, tu t’en doutes bien. Il est plus agréable de conduire une discussion de vive voix que par hibou interposé. » Eh oui, il lui arrivait de temps en temps de faire quelques traits d’humour, même s’ils n’étaient ni communs, ni drôles. Un humour aussi froid que l’école où il avait été éduqué mais il témoignait de sa sympathie réelle pour Ackley.

« Je ne te le fais pas dire, et ce n’est pas prêt de changer… » commença-t-il par dire en désignant du menton l’intitulé de la page Une de la Gazette du Sorcier. Inutile de préciser que ces élections allaient secouer le monde sorcier - Britannique, tout du moins. En dehors du continent, les autres Ministères regardaient ces élections d’un œil plus ou moins critique, et ne s’y mêlaient qu’avec une extrême précaution. Arthur ne se trouvait pas sur Londres par hasard et il se doutait qu’Ackley en avait conscience.

« Je vais bien, sinon. Aussi bien que nous le permettent nos métiers. Et toi, Auror senior ? Pas trop bouleversé par l’actualité ? Les derniers événements ont dû mettre ton équipe à rude épreuve. » Il parlait bien entendu du renforcement des effectifs dans les rues d’Inverness et les accidents qui en découlaient. Les Aurors, selon à qui on demandait, n’avaient pas bonne figure dernièrement.

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Ackley et lui se ressemblaient en ce point. Arthur ne comprenait pas l’engouement autour de la “nouvelle” année, sachant que le jour qui la débutait ne changeait en rien son prédécesseur. On n’effaçait pas une trois-centaine de jours comme par magie, juste parce qu’un 1 était devenu un 2. Mais il mettait cela sur le compte de son stoïcisme à toute épreuve. Ce qui enjouait les autres ne lui faisait, en général, que peu d’effet. Le sujet de la politique vient bien plus rapidement sur la table qu’il ne l’avait présagé, sauf que le diplomate s’y était préparé. Forcément, cela allait devenir le cœur de leurs conversations mais ce n’était pas un mal. Arthur voulait connaître l’opinion de l’Auror à ce sujet et déceler dans ses mots des informations qu’il ne possédait pas encore.

« Tu t’en doutes bien. Une passation de pouvoir de cet ordre ne relève pas de la discrétion. Tous les ministères sont en haleine, actuellement. Le candidat final changera - ou non - la face des relations internationales magiques. Nous devons nous préparer à toute éventualité. » Le Roumain laisse ainsi savoir l’une des raisons de sa présence sur le territoire : surveiller, observer, rendre compte et de temps en temps, donner un appui supplémentaire à l’un des candidats pour lui donner les chances de se faire élire. Mère Russie avait une volonté propre dans cette histoire et son objectif était clair : faire élire le candidat qui arrangerait le mieux ses affaires. Arthur, lui, n’était qu’un pantin parmi tant d’autres.

« J’ai cru comprendre, oui. Comment s’est passée l’entente avec l’unité de capture des loup-garous ? S’ils agissent comme en Bulgarie, il y a de quoi s’inquiéter. » Ces deux factions obtenaient toutes deux des résultats, mais pas de la même façon. Il était réputé que cette unité possédait des méthodes un peu plus “musclées”, qui ne plaisaient pas au plus grand nombre. Surtout aux Aurors, dont le schéma d’action s’avérait bien différent. Pas étonnant que depuis tout cela, les sorciers aient de moins en moins confiance en eux… Arthur ne cherche pas à enfoncer son ami dans ses problèmes. Il est même persuadé que le fait d’évoquer à voix haute ce qui l’a embêté lors de ces missions lui permettra de mieux en accepter les conséquences. Tout se passait rarement comme on l’avait espéré, le Roumain en savait quelque chose, en tant que maniaque du contrôle.

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Quelles étaient les qualités d’un bon ministre ? Ackley lui posait une question aussi large que sinueuse. Il n’y avait pas de bonne façon d’y répondre et la dévier relevait d’une grande capacité. Il le regarda longuement en cherchant quoi répondre, même si Arthur savait parfaitement quel était son avis sur le sujet. Il était en effet passé par de nombreux Ministères et avait discuté avec plus d’un membre de pouvoir - et aucun d’eux ne semblait avoir la même vision de ses fonctions. En répondant à cette question, il laissait potentiellement connaître son “vote” - sachant qu’en tant que ressortissant étranger, il n’y avait pas droit. Les intentions du Ministère Bulgare de la magie ne devaient pas être connues, du moins pas dans ces conditions, autour d’une bièraubeurre.

« Le problème, ce ne sont pas les qualités que l’on peut attendre d’un ministre, mais bien les défauts qui l’habitent déjà. Au mieux, je pourrais dire qu’un ministre ayant un peu de jugeote vaut mieux que son contraire. Bien trop se pensent également intouchables, ce qui leur fait toujours défaut. » Un diplomate ne l’était pas, malgré les nombreuses protections dont ils étaient pourvus en territoire adverse. Il préféra néanmoins ne pas continuer sur le sujet et évoquer la débandade des Aurors car Arthur avait toujours plus de facilité à faire parler les autres qu’à évoquer sa propre vie. Elle était intéressante, mais bien trop truffée de secrets pour être évoquée. Il doutait que l’Auror en ait autant à cacher que lui.

« Malkov… » fit le Roumain d’un air pensif, sa ride du lion venant légèrement se creuser à l’évocation de ce nom. Bien sûr qu’il connaissait le Russe, ce dernier lui avait même cassé un bras. Drôle d’histoire - pas tant. Il eut presque envie de rire en imaginant le doux Ackley faire face à cette machine tout droit sortie de Durmstrang. « Je connais les Malkov. Ce sont en effet de sacrés phénomènes, tu as dû t’amuser. » À le tenir en laisse, ce qui était pratiquement impossible avec un tel homme. Il donnerait cher pour avoir accès aux souvenirs de l’Auror sur cette nuit-là. Arthur accueillit leurs boissons avec un petit air satisfait et reporta bien vite son attention sur son ami après avoir trempé ses lèvres.

« Comment t’a-t-il paru ? Hormis le côté… rustre. »

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Arthur avait beau être d’accord - ou non - avec Ackley, il ne pouvait se permettre de discuter plus en avant de ce sujet. Trop de sous-entendus pouvaient y être emmêlés et les mots mal interprétés. Il avait en tout temps conscience de représenter son pays et s’il ne partageait pas toujours les idéologies et les opinions politiques, on l’associait directement au Ministère de la Magie Bulgare. De ce fait, il se devait d’être prudent dans ses opinions. L’Auror le savait assurément, voilà pourquoi il n’insista pas plus. Il remercia d’ailleurs tacitement, d’un simple regard, son ami de ne pas pousser la conversation plus loin. Ackley n’était sûrement pas prêt à entendre ce qu’il avait à dire sur les candidats au poste de Premier Ministre de la magie Britannique…

Cela ne l’étonnait pas que la rencontre avec Ivan n’ait pas été si amusante que ça. L’homme était un phénomène, Arthur y avait été confronté par le passé et depuis, s’en tenait éloigné. Il ne craignait pas le Malkov mais prudence était mère de sûreté et chercher la confrontation ne menait souvent à rien. Pas dans son métier, en tout cas. Il se trouvait pourtant curieux à propos de cette collaboration inédite et demanda plus de détails à l’Auror, qui s’empressa de les lui donner. Ses lèvres trempant dans sa boisson tout en l’écoutant, il eut un petit sourire. Cela ressemblait parfaitement au Russe d’agir de la sorte, qui pouvait être surpris ? Ceux qui ne le connaissaient pas encore, probablement. Ackley en avait fait les frais mais ne semblait pas plus traumatisé que ça, signe que l’impact d’Ivan sur ses congénères s’amenuisait. Il restait mémorable pour autant.

« Il y a une grande vérité dans ce que tu dis. J’ai moi-même connu Ivan quand je n’étais encore qu’un adolescent mais il m’a le plus marqué lorsque j’étais à Hungcalf. Vois-tu, j’ai fait l’erreur de sortir avec sa sœur cadette, et de la plaquer. Mon bras ne s’en est jamais totalement remis. » Arthur plaisantait mais il n’y avait que de la vérité dans ses propos. Ivan l’avait salement amoché lorsqu’il avait appris la nouvelle et pour cause : il avait quitté Ludmila pour se mettre en couple avec Isabelle, sans crier gare. Il ne regrettait pas cette décision, mais un peu plus la façon dont il l’avait fait connaître. Aujourd’hui, ce n’était plus qu’une anecdote à raconter, un vieux souvenir et quelques douleurs fantômes qui apparaissaient les jours de grand froid.

« Conclusion : ne t’approche pas de Ludmila. Ni de sa fille, au passage. »

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Il pouvait difficilement reprocher son geste à Ivan, il aurait sûrement fait pire à sa place. Cependant, la façon dont ils géraient leur relation sentimentale ne regardait que Ludmila et lui. Il n’avait pas apprécié que le Russe s’en mêle, et encore moins la douleur qui avait suivi leur altercation. L’homme n’avait pas apprécié la façon dont il avait terminé cette histoire mais, à l’époque, Arthur ne voyait pas d’autre solution. Il ne pouvait pas rester avec sa petite-amie tout en pensant à une autre - cela revenait à la tromper et il n’était pas comme ça. Même aujourd’hui. Non, il ne regrettait pas et de toute évidence, le passé ne se modifiait pas d’un claquement de doigt. Peu importe comment il l’aurait annoncé à Ludmila, cette rupture aurait été douloureuse.

« D’autres auraient essayé de comprendre, aussi. Mais je ne peux pas le blâmer. De plus, Ivan a toujours plus utilisé ses mains que sa langue… » Contrairement à lui, son opposé. Il suffisait de voir son duo passé avec Oscar, où il prenait le rôle du cerveau tandis que son ami avait celui des poings. Arthur n’usait que rarement de sa force physique, trouvant en la parole une arme beaucoup plus affutée et mortelle. On pouvait au moins accorder au Malkov que sa famille comptait pour lui.

« Continue comme ça et tu pourras rester intact. Mais tu avoueras que c’est une belle femme, n’est-ce pas ? » Il eut un sourire en coin car au fond, l’avis personnel d’Ackley n’importait pas vraiment dans cette situation. C’était une affaire de goût et peut-être que la Russe ne lui plaisait tout simplement pas ? Il voulait simplement l’entendre répondre à cette question et voir si un trouble s’affichait sur son visage. Il ne lui connaissait pas de vraie compagne - du moins pas dernièrement - et se demandait quel type de femme intéressait l’Auror. Ils ne parlaient que peu de leurs relations sentimentales ou physiques lors de leurs échanges et cette rencontre était idéale pour rétablir cela. Même si Arthur ne comptait pas s’épancher. Notons néanmoins qu’il avait fait part d’un souvenir personnel accablant et qu’il considérait que c’était au tour d’Ackley de s’adonner à cet exercice.

« Et toi ? Tu ne fréquentes personne ? »

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Ils devaient forcément en passer par là et le plus tôt était le mieux. Du moins, Arthur en avisait ainsi. Lui non plus n’aimait pas les questions trop personnelles de ce genre mais cela ne l’empêchait pas de les poser aux autres. De plus, il fallait se rendre à l'évidence : ils étaient deux beaux hommes matures, d’un certain âge et dotés d’un physique plaisant. Il était donc tout à fait normal de se poser des questions sur leurs fréquentations respectives. Le Roumain voulait être le premier à faire feu et ainsi, potentiellement, éviter le tir mortel. Cela l’amusait cependant de voir les réactions de son ami. Son rictus laissait clairement entendre ce que cette question lui inspirait, tout comme le commentaire sur Ludmila qui ne manqua pas de le faire sourire. Il ne pouvait pas en vouloir à Ackley d’avoir eu un instant de survie… et une bonne conduite professionnelle. Même si cela ne faisait pas tout.

Sa réponse lui tira un plus grand sourire encore et lui fit penser à sa propre situation. Ou plutôt, celle du passé. Isabelle avait toujours été si espiègle et aventureuse qu’il pensait qu’elle serait à ses côtés jusqu’à son dernier souffle - mais cela ne s’était pas passé ainsi. Face à son ambition, leur couple n’avait pas résisté. Elle serait peut-être restée à ses côtés s’il l’avait laissé faire, mais il n’avait fallu à Arthur que peu de temps pour comprendre que là où il allait, elle ne voulait pas le suivre. C’était sûrement la même chose pour l’Auror, dont l’implication et l’ambition dépassaient les envies d’une famille tranquille et d’une vie pépère. Ils ne faisaient pas ces métiers pour rien…

« Je peux le comprendre. Rares sont celles qui ont l’endurance nécessaire, de toute évidence. C’est bien regrettable. » Le diplomate a pourtant cherché remplacement à celle qu’il aimait, sans succès. Aucune ne lui arrivait à la cheville et il avait fini par se faire à l’idée que si Isabelle n’était pas suffisante, aucune d’entre elles ne le serait jamais à ses yeux. Il enchainait donc les histoires sans lendemain ou qui ne demandaient aucune réelle implication car il n’était pas capable d’en donner. Arthur ne se voyait plus poser son cœur sur la table, le risque était bien trop grand. Et plus il avançait en âge, moins l’envie y était. Pourtant, il avait songé à fonder une famille… Idée qui s’était bien vite évaporée face à sa quête des Joyaux. Hors de question pour lui de laisser tomber et une vie de famille ne lui semblait pas compatible avec toutes les obligations qu’il avait déjà. Tant de responsabilités et si peu de temps…

« Des aventures, donc ? Voyons, tu peux me le dire, à moi. Nous ne sommes pas si différents de ce côté-là. »

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« Mah, je ne peux pas vraiment te blâmer. Quand l’envie n’y est pas… » Ou le temps, les circonstances… Il existait de nombreuses raisons suffisantes pour justifier une absence de relation sentimentale et Arthur aimait s’en servir auprès de sa famille pour excuser le fait qu’il n’était pas encore marié. Comme chaque homme arrivé à ce stade de sa vie, il “redoutait” cette question fatidique et ennuyeuse, qui soulignait une tradition archaïque. Le diplomate ne suivait que rarement ses envies profondes mais en ce qui concerne ce sujet, il avait décidé de ne pas aller à l’encontre de sa propre volonté. S’il décidait de ne jamais se marier, cela le tenait qu’à lui et à personne d’autre. Donc oui, il pouvait comprendre ce manque d’effort, cette lassitude qui accompagnait chaque rencontre avec le sexe opposé. Derrière chaque mot se cachait une perspective de vie commune pour laquelle il n’était clairement pas prêt. Tout comme Ackley, il avait un passé qui justifiait cette prudence et ce manque d’implication - la faute finissant toujours par revenir au travail bien trop important pour laisser de la place au reste. Et l’Auror vint confirmer cette théorie dans les minutes suivantes, tirant un nouveau sourire à Arthur.

« Tant mieux, j’en suis ravi pour toi. » Il est mal placé pour lui donner un quelconque conseil à ce sujet, et encore moins pour lui faire la morale. Ce n’est pas son genre, de toute façon. Le diplomate prit quelques secondes pour détailler son interlocuteur du regard et prit une nouvelle gorgée de son breuvage, appréciant cette sensation qui accompagnait la descente du liquide dans son œsophage. Il se rendit compte qu’ils avaient fait le tour des sujets “classiques” et que pour continuer leur conversation, il allait devoir faire preuve d’un peu plus d’ingéniosité.

« Il ne me semble t’avoir jamais réellement posé la question, mais pourquoi es-tu devenu Auror ? Je sais, c’est un peu idiot comme questionnement mais je trouve toujours intéressant de connaître les vraies motivations des gens. Après tout ce que tu as enduré, qu’est-ce qui te fait tenir à ce poste ? Hormis l’amour du travail, s’entend. » Il se demandait réellement ce que Ackley allait répondre. L’envie de se sacrifier pour les citoyens ? De les protéger ? De faire régner la justice ? Ou simplement un désir un peu pervers d’être un bras armé prêt à s’abattre sur le premier qui sortirait des rangs ? Peut-être le plaisir du danger, aussi. Les sensations fortes, ça en ameutait toujours plus d’un.e !

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Il pouvait le comprendre sur ce point. Quand, comme eux, on structurait sa vie d’une certaine manière et de façon solitaire, il s’avérait difficile d’imaginer cette dernière inclure une autre personne. Les sentiments compliquaient bien des tâches et celles qui attendaient le diplomate préféraient s’en passer. Il ne se voyait pas emmener une famille parcourir le Brésil à la recherche des Joyaux. À vrai dire, une seule personne était susceptible de se tenir à ses côtés dans cette vision et malheureusement, elle ne faisait désormais plus partie de sa vie. Arthur voulait tourner la page - et estimait l’avoir fait - mais il ne cessait de se demander à quoi ressemblerait sa vie s’il avait osé continuer cette histoire d’amour compliquée.

Comprenant que le sujet n’était pas le préféré d’Ackley, il enchaîna sur son travail qui, il le savait pertinemment, le passionnait au-delà de l’incommensurable. Il n’y passerait pas tout son temps, sinon. Le verre à la main et le regard rivé sur son ami, il écoutait attentivement son explication, y trouvant à la fois du sens et de la logique. La nostalgie de l’université le gagna et il soupira doucement en se remémorant ces années un peu folles où tout semblait permis. La vie adulte, elle, ne laissait pas de place à l’erreur. Il éprouva une étrange tendresse en écoutant Ackley exprimer toute la détermination et l’amour qu’il mettait dans son travail. Il n’y avait pas l’once d’un regret dans sa voix et Arthur ne pouvait être que ravi pour lui. Beaucoup ne trouvaient pas leur voie professionnelle et erraient pendant des années à sa recherche. Certains, même, ne la trouvaient jamais.

Il savait que la question lui reviendrait en pleine face tel un boomerang bien lancé. Il s’y attendait et s’y était mentalement préparé. Mais même si c’était le cas, Arthur éprouvait des difficultés à mentionner ses ambitions, quand elles étaient fortement liées à un tel secret. Absolutum était sa vraie passion, pas la diplomatie. Elle, elle n’était qu’un tremplin, un matelas confortable, une situation positive qui lui permettait de se faire des contacts utiles… Mais il ne pouvait pas présenter la chose ainsi. Cela donnerait l’impression de n’avoir ni vie professionnelle, ni vie sentimentale. Une misère.

« Mes raisons sont bien moins passionnelles que les tiennes. Mon père travaille au Ministère de la Magie Bulgare et j’ai toujours su que, d’une façon ou d’une autre, j’en serais un membre à mon tour. J’ai bien plus réfléchi au métier pour lequel mes compétences seraient efficaces, plutôt qu’à celui qui ferait vibrer mon cœur. La diplomate m’est apparue très vite évidente et le fait de bosser à l’internationale me permet de voyager, ce qui est un bonus non négligeable à mes yeux. En plus de ça, j’ai l’impression de compter, que ma voix a une quelconque importance. On passe notre vie à tenter de lui trouver un sens et je pense l’avoir trouvé. As-tu cette même impression en allant travailler chaque jour ? »

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Arthur s’était toujours montré secret avec tout le monde. La seule qui avait pu bénéficier d’un laisser-passer pour accéder à ses sentiments et ses craintes ne faisait plus partie de sa vie désormais et possédait un pouvoir sur lui que le diplomate redoutait. Mais aux autres, il éprouvait de la peine à s’ouvrir, ne serait-ce qu’un peu. Il ne laissait place à aucune émotion dans son travail et sa vie personnelle semblait parfois aussi sèche sentimentalement. La question de sa famille restait souvent en suspens également. Après tout, il tenait cette discrétion directement de son paternel, qui ne s’étendait jamais en sentiment ou autres niaiseries - pour le paraphraser. Pas étonnant qu’Arthur n’ait jamais vraiment su exprimer les siens.

« Toujours, oui. Il compte probablement rester autant de temps que lui permet sa santé. Donc ce n’est pas demain la veille qu’il quittera le Ministère. » Les Batthyány étaient des hommes robustes, comme il pouvait le prouver lui-même. Ils n’étaient que rarement malades et Arthur, lors de ses expéditions, avait subi de nombreuses déconvenues entraînant cicatrices et autres bleus. Pourtant, il était encore debout, l’air de rien, comme si une énorme cicatrice n’était pas venue se figer le long de son dos il y a de ça quelques semaines. La seule chose qu’il épargnait, c’était son visage car il représentait l’élément le plus utile dans son métier de diplomate. Il ne devait pas paraître abîmé. A contrario, personne n’allait vérifier le reste de son corps…

« Tu me demandes si un jour, je briguerais un poste de Ministre de la Magie ? » Il eut un sourire en direction d’Ackley. Dans les faits, sa position lui convenait parfaitement et il ne comptait pas en changer. Mais même face à un ami, il ne pouvait pas s’exposer comme un homme qui refuserait une promotion. Il devait montrer de l’ambition, aussi fausse soit-elle. « Bien sûr que j’en ai. Sans vouloir être présomptueux, je pense avoir beaucoup à apporter et j’ai l’âge et la maturité pour avoir plus de responsabilités au Ministère. Reste à voir si l’idée plairait à mon père. » L’homme avait le bras long et s’il ne voulait pas de son fils comme son égal, il ferait tout pour que cela ne se produise pas. A contrario, il pouvait être un bon tremplin pour une meilleure position. Tout dépendait de son état d’esprit au moment de sa prise de décision. Mais Arthur aimait sa vie actuelle, qui lui permettait de consacrer le peu de temps libre qu’il avait à la recherche des Joyaux. Sa famille comptait là-dessus et il se mit à penser que son père devait avoir la même vision que lui sur le sujet. Rester un diplomate était bien suffisant.

« C’est toujours très gratifiant, je te le concède. Les échecs, aussi, ont leur lot d’importance. Qu’est-ce que j’aurais pu mieux faire, mieux dire ou gérer différemment… Chaque décision compte plus qu’on ne l’imagine. Qu’elle se retranscrive par des mots ou des actes ne change rien. » Comme tout un chacun, Arthur avait eu son lot d’erreurs dans ce métier. Il ne s’en vantait pas mais tentait de n’en éprouver aucune honte, se disant qu’elles lui servaient à mieux comprendre ce qu’on attendait de lui et à s’améliorer dans ses fonctions.

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La réalité des propos d’Ackley lui força un sourire. Pourtant, il était rare qu’Arthur ait ce type d’expression lorsque le sujet concernait son paternel. Un homme dur, adepte de la discipline et du châtiment corporel. Arthur, en grandissant, avait arrêté de compter le nombre de coups de ceinturon qu’il avait reçus parce que son travail n’avait pas “suffit”. Il tenait sans aucun doute de la froideur de son père mais n’envisageait pas un tel traitement à sa future progéniture. Certes, cette éducation l’avait mené là où il est aujourd’hui, mais il se refusait toujours à penser qu’elle n’en était que seule responsable. A contrario, cette même éducation le poussait à détourner les autres de lui, ce qui pouvait être un grand handicap. Il n’émanait que peu de chaleur d’Arthur.

« Tu supposes bien. Je ne pense pas déroger des autres diplomates en la matière. » Seulement, ses objectifs étaient un peu différents de ceux de ses collègues mais encore une fois, il n’était pas libre d’en parler avec Ackley. Il se demanda quelle serait la réaction de l’Auror s’il venait à apprendre l’existence de ces pierres et leur pouvoir. À quel camp se joindrait-il ? Voudrait-il seulement participer à cette quête ? Et au nom de qui ? De lui-même ? Qu’en ferait-il ? Tant de questions qui ne trouvaient pas de réponses même quand cela le concernait personnellement. Arthur ne faisait que chercher, sans vraiment envisager sa décision lorsqu’il aura réuni tous les joyaux - car pour lui, il ne fait aucun doute sur le sujet.

« C’est un homme sage - ou du moins, sa philosophie l’est. De qui s’agit-il ? » Des revers, il en essuyait chaque année, mais plutôt du côté chercheur que du côté diplomate. Dans son “vrai” travail, il obtenait en général ce qu’il voulait, ce qui expliquait que le Ministère Bulgaire le garde aussi précieusement. Arthur avait pourtant subi moultes défaites depuis ces sept dernières années. Beaucoup lui causaient des traumatismes physiques qui restaient gravés sur son corps pour toujours. Mais son mental aussi s’en trouvait affecté. Si peu de réussite le poussait forcément à se remettre en question. Avait-il sa place à Absolutum ? Allait-il encore faire la déception de son père en revenant les mains vides, après avoir perdu la seule chose qui rendait leur famille si spéciale ? Si au moins il pouvait remettre la main sur le réceptacle…

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« C’est la beauté de la chose. Il n’y a pas d’ombre sans lumière. C’est un peu le même principe dans un Ministère qui se veut efficace. » Un diplomate sait se défendre - voire attaquer - mais il ne sera jamais aussi efficient sur le terrain qu’un Auror entraîné à réagir dans ce type de situation. L’inverse se valait également. Arthur prendrait beaucoup de plaisir à voir l’un de ces agents actifs prendre la parole et défendre les intérêts et idéaux d’une nation entière devant une assemblée de dignitaires assoiffés de pouvoir et, parfois même, de vengeance. Le moindre mot mal exprimé menaçait de mettre à mal l’entente entre deux pays voisins, dont la stabilité se montrait déjà précaire.

Arthur eut un faible sourire à l’évocation de ce vieil Auror et plusieurs noms lui vinrent en tête, sans qu’aucun ne soit vraiment le bon. Il avait lui aussi eut son lot de mentors au sages paroles lancées en l’air aux disciples, mais peu respectée par l’énonciateur lui-même. Les adultes se montraient doués pour formuler des morales et des conseils qu’eux-mêmes ne suivaient pas, ni ne respectaient. Arthur avait appris à voir la vérité derrière ces faux enseignements et ces phrases toutes faites, entièrement prémâchées, que l’on vomissait à la moindre occasion en s’inventant une supériorité.

« C’est probablement à ça qu’on reconnaît un bon Auror, n’est-ce pas ? » Il se demandait combien de détenus à Azkaban rêvaient de faire la peau à Ackley et quel pourcentage d’entre eux parviendra un jour à assouvir sa vengeance. En tant que diplomate, le Roumain avait des ennemis, mais d’un tout autre ordre. Plus dangereux ou non, il ne saurait le dire. Cela ne se comparait sûrement pas. La perte de l’un pouvait soulever plus de questions que celle de l’autre, à bien des égards. Arthur n’était pas le seul représentant du Ministère de la Magie Bulgare sur le territoire écossais, mais sa mort soudaine ne serait pas vue d’un très bon œil, vu les affaires qu’il entretenait à Londres et qu’on lui connaissait publiquement.

« Je me prendrais bien quelque chose à grignoter, m’accompagnes-tu ? » La bièraubeurre était certes délicieuse, mais ne suffira jamais à contenter l’homme qu’il était. S’il lui était déjà arrivé de jeûner durant ses périodes d’explorations en Egypte ou au Brésil, il préférait entretenir un rapport sain avec son corps, qui pouvait le sortir de nombreux pétrins malgré son âge certain. De la même façon, il savait qu’Ackley nécessitait autant d’énergie que lui pour faire son travail, si ce n’était plus.

« Je t’invite. »