Mr Duvall est occupé, souhaitez-vous prendre rendez-vous ?

Mon regard se lève vers la secrétaire qui me pose la question. Et calmement, je lui réponds que Non, je vais attendre. Une réponse qui semble ne pas satisfaire à la jeune femme, qui s'apprête à renchérir mais que j'interromps de suite : J'ai dit que j'attendrais. Quand il sera disponible, dites lui que son beau-frère souhaite lui parler. Et comme si j'étais chez moi dans ce lieu, je venais prendre place sur l'un des fauteuil du couloir, déposant le journal d'un autre éditeur sur la table basse toute proche.

Je n'étais jamais venu voir Roman sur son lieu de travail, mais je devais reconnaitre qu'il avait su agencer les bureaux de ce lieu de manière fonctionnelle visiblement. Il n'y avait qu'à voir comment circulait une information pour s'en rendre compte. Très peu de pas inutile, des notices volantes par ci par là, ... Je pouvais au moins reconnaitre ça à mon beau-frère : ce lieu respirait son âme.

Mr Lacroix... Mon regard se relève vers la même secrétaire. Visiblement, elle a fini par apprendre mon nom. Je suppose que c'est bon signe. Mr Duvall a demandé qu'on vous amène à son bureau. Veuillez me suivre. Je me relevais à cette annonce, attrapant le torchon avec lequel j'étais venu pour suivre la secrétaire, qui m'annonçait que j'allais quand même encore devoir attendre ce cher Roman, mais qu'il allait voir pour se libérer quelques minutes de son précieux temps pour me recevoir.

Vous souhaitez boire quelque chose en attendant ? Scotch double glace si vous avez. Bien sur, nous vous amenons ça tout de suite. Je prenais alors place sur l'une des chaises du bureau, attendant le Maitre des lieux avec une certaine impatience.

Lundi 5 décembre 2022

Roman est en pleine réunion avec la plupart de son équipe pour discuter et valider l'édition spéciale de Noël. Elle est pour ainsi dire prête mais il y a toujours des rectifications à apporter, des améliorations de mise en page, des articles de dernières minutes qui paraissent indispensables.
Le rédacteur en chef orchestre cette réunion, restant à l'écoute des salariés. Il tranche cependant lorsqu'il y a désaccord.
Une note vient de se poser devant lui. Tandis que Mélinda et Duncan débattent de la place de la cérémonie du sapin de Noël d'Inverness, à savoir qui aura le privilège de faire le reporter, Roman se rassoit, dépité de les voir se chamailler pour une broutille.
Il prend le temps de lire la note et on peut lire sur son visage une légère surprise.
Il écrit à son tour une réponse et le papier s'envole de nouveau.
Que vient faire Ethan ici ?

Légèrement agacé pour les enfantillages se déroulant devant lui, il tranche, cinglant. Ce sera @maximilien qui écrira un article sur cette cérémonie ayant lieu chaque année. Voilà, les deux journalistes sont bouches bées. Il prendra le temps de les recadrer plus tard. En attendant il donne des dernières directives et termine la réunion.

Sans un regard pour ses salariés, il s'éclipse rapidement de la salle pour arriver dans son bureau, parchemins à la main.

-"Bonjour Ethan."

Il constate que son beau-frère s'est déjà mis à son aise, avec un verre à la main.

-"Je te prie de m'excuser pour cette attente. Que me vaut l'honneur de ta visite ?"

Il s'assoit sur son fauteuil en face du Lacroix. Roman est intrigué. C'est bien la première fois qu'Ethan vient lui rendre visite sur son lieu de travail.
Autant aller droit au but, le temps est précieux pour le Duvall.

Roman. Tu réponds à la salutations, sans pour autant te lever. Vous n'en êtes plus aux politesses et autres formules de l'étiquette de toute façon, sauf peut-être en présence de cette chère Siegliede, ou d'autres espère de Galas. Bien au contraire, loin de cette hypocrisie flagrande, tu as appris à aimer le Canadien pour sa valeur et ce qu'il apporte à votre famille, en plus du fait qu'il a l'air de rendre ta soeur heureuse. Et bien que tu ne l'avouerais pas facilement, et probablement que sous l'effet de Veritaserum, tu apprécies de savoir qu'elle a trouvé ce bonheur.

Mais le maitre des lieux n'a pas le temps non plus pour ces échanges et tu ne peux que le comprendre, au travers de ta vie qui est également excessivement remplie. Au dela d'une excuse tout ce qu'il y a de plus formelle, le couperet tombe pour t'inviter à dire ce qui t'amène, et ta main libre attrape le journal avec lequel tu es venu, pour le jeter sur le bureau de l'Editeur.

Page 4. J'imagine que tu maitrises toujours le français. L'éditorial avait publié un article, ou un préquel pour être honnête. Une mise en appétit qui n'annonçait rien de bon à l'ainé de la seconde branche des Lacroix. Ils parlent de mon divorce à venir. Ils disent qu'ils vont bientot révéler des choses "croustillantes". Et ce mot, autant que le sujet, tu ne pouvais pas le tolérer. Un scandale entacherait le nom que tu portes, mais aussi ton reflet dans le miroir tu en es convaincu. Et ce torchon le promettait, à demi-mots. Cette gazette venait jouer sur un divorce qui tendait à aller vers un accord à l'amiable, et tu doutais que Peneloppe ne joue avec le feu à ce point. Mais alors, la question demeurait : J'ai besoin de savoir qui, et j'ai besoin d'une contre-attaque solide. Est-ce que tu connais ce journaliste, Pietro Dagonne, ou même ses méthodes ?

L’Editorial, quel nom pritoyable pour un journal. En terme d’originalité, on aura vu mieux. Cela dit, on ne peut pas dire que Roman apprécie grandement le nom « Chouette Enchainée » mais ce n’est pas lui qui l’a choisit et ce n’est pas le directeur.
Il hausse un sourcil, intrigué.
Il prend le journal en question, regarde rapidement la Une et va ensuite à la page demandée.
C’est le genre d’hebdomadaire que Roman déteste : peu de contenu en réalité, de gros titres accrocheurs. Bref, rien de bien brillant, rien de bien intéressant aux yeux du Duvall. Malgré cela, il y avait un détail non négligeable : l’Editorial plaisait à beaucoup de monde et était lu par la populace.

Roman est au courant pour la demande de divorce de la part de Penelope. Et que les journaux en parlent n’a rien de surprenant. Il existe peu de divorce parmi les mariages sang-pur.
Il prit tout de même la peine de lire l’article en question. Pour le moment, que de promesses, rien de concret. C’est bien dans leur habitude. Du blabla, voilà tout.

« Qu’est-ce qui t’inquiète vraiment au juste Ethan ? »

Ne devient pas journaliste n’importe qui. C’est dans sa nature de questionner, de chercher, fouiller.
Alors au lieu de prendre la peine de répondre à son beau-frère, il préfère comprendre ce qui se passe.

« Ne me dis pas qu’un torchon pareil arrive à t’inquiéter. Tu connais le fonctionnement de la presse et de ses titres accrocheurs. »

Il s’adossa un peu plus confortablement contre son fauteuil, reposant l’hebdo sur son bureau. Si cela ne tenait qu’à lui, il l’aurait déjà détruit mais Ethan en avait encore peut-être besoin.

« Que crains-tu au juste ? »

Ce que je ne controle pas. La réponse était venue comme une évidence. Aussi naturelle et limpide à tes yeux que de l'eau de source. Tu n'aimais pas que les choses t'échappent, et qu'importe que le journal en question ne soit qu'un vulgaire torchon, tu ne souhaitais pas que cela vienne entacher ton image. Parce que l'image était essentielle.

Tu te relèves et tu te diriges vers la fenêtre du bureau, buvant une fois arrivée une nouvelle gorgée de ton verre. La vue est parfaite d'ici. Tu comprend aisément pourquoi quelqu'un à la position de Roman peut apprécier cette vue.

Je n'ai pas envie qu'un fouille merde vienne remuer de vieilles histoires. La réputation, notre réputation, serait entachée. Tu l'incluais, parce qu'il faisait partie de la famille. Et lui mieux que quiconque pouvait comprendre comment un seul article de journal pouvait détruire beaucoup de choses. Un divorce n'est pas monnaie courante chez nous, dans nos sphères. Qui sait ce que ce journaliste sera prêt à croire, à inventer pour déformer les faits ? Et si cet homme n'était pas prévisible, les dégats collatéraux ne seraient que démultipliés. Penses aux petites, doivent-elles connaitre ça ? Pense à l'image que ça peut donner de Sophie ? Crois-tu que je veuilles laisser un idiot risquer de salir nos réputations ? Notre portrait s'en retrouverait entaché, tout ça à cause de Pénéloppe et de sa décision de divorcer.

Regarde Carlisle Muller. Et Matthews. Ils ont merdé sur toute la ligne. Je compte pas faire pareil. Je veux gravir les échelons de PURE, et ça, à mes yeux, c'est de la mauvaise pub. Le genre de mauvaise pub que tu ne pouvais pas tolérer.

Roman Duvall est un homme réfléchis, qui démontre rarement exagérément ses sentiments. Il trouve qu'Ethan s'agite beaucoup trop vite pour des promesses venant d'un journaliste certainement de bas étage.
Cela dit, il comprend l'inquietude de son beau-frère. En tant qu'homme d'une famille sang-pur, Ethan se doit de protéger les Lacroix. D'autant plus qu'il est l'aîné de la fratrie.
C'est son devoir, et il prend cela très à cœur.

Son mariage est détruit, cela va faire du bruit, à n'en pas douter. Reste à savoir comment cela va se mettre en place.
Ethan tient à son image non seulement pour l'honneur de sa famille mais aussi parce qu'il a de l'ambition. Ainsi donc Roman avait vu juste. L'aîné des Lacroix envisage de se lancer en politique. Évidemment, Roman avait été très décu des résultats des dernières élections. Matthews qui s'était entaché avec le procès de son frère risque d'avoir la côte en baisse.

Roman, confortablement installé dans son fauteuil observe son beau-frère qui lui tourne le dos. Il voit en lui du potentiel pour la politique, bien qu'il ait encore des "defaults" à revoir.
En tout cas, il est heureux d'apprendre ce projet, car il connaît les valeurs d'Ethan et il les partage.

Après l'avoir laissé démontrer son inquiétude, Roman prend la parole, toujours d'une voix claire et douce, comme à son habitude.

"Écoute, je comprends ton inquiétude. Ce que je peux faire..."

Il prend un temps pour réfléchir rapidement puis continue.

"C'est, d'une part, me renseigner sur ce journaliste. Ensuite, s'il s'avère être un danger potentiel, le mettre à l'écart."

Roman a de nombreux contacts, alors envoyer un journaliste à l'autre bout du monde pour un reportage ne lui semble pas impossible.

"Par contre, cela ne garanti en rien que le journal ne publie tout de même quelque chose sur ton divorce. Tu ne vas pas pouvoir échapper à la presse."

Roman se penche vers son bureau pour s'accouder.

"Si une personne commence une guerre médiatique, il te faudra répliquer. Mais cela aura forcément des répercussions sur ta famille."

Le mettre à l'écart ? S'imaginait-il, le Canadien, ce que cette phrase pouvait signifier dans ton esprit ? Ce que ces mots avaient déjà représenté pour toi ? Ta mère avait été mise à l'écart, et n'était plus capable d'assumer ses responsabilités. Ton père avait été mis à l'écart, et n'était plus capable de rien quant à lui. C'est peut-être ce souvenir qui te faisait sourire en coin, regard porté vers l'extérieur. Oh oui, ça t'allait. Ca te convenait.

Très bien.

Tu écoutes la contrepartie, et tu concèdes que si Roman indique que tu n'as pas le choix, c'est qu'il a surement raison. Il est maitre dans son art à tes yeux après tout. Ton regard tournant vers lui, tu mesures d'ailleurs le sérieux avec lequel il prend cette affaire et comprend ce qui t'intrigue. Répliquer, quelque soit l'ennemi, est un facteur qui ne te dérange pas.

Attaque alors. Siegliede dit toujours que l'attaque prime sur la défense.

Tu quittes ton observatoire et revient au fauteuil en face de lui, déposant le verre vide au passage. Si je ne peux échapper à la presse, je préfère que tu t'en charges. Envoie moi tes rédacteurs ou prenons rendez-vous. Poses moi tes questions et écris cet article. Au moins, tu avais confiance en lui. Tu étais certain que le Canadien ne te décevrait pas, parce que tu le connaissais maintenant assez bien. Dis moi ce dont tu as besoin, et je m'y plierais dans la mesure du raisonnable. Mais... Parce qu'il y a toujours un mais. Rien sur les petites. Tes enfants seront toujours les joyaux que tu protèges le plus.

Est-il étonné par la réaction de son beau-frère ? Non, pas vraiment. Ethan est une personne impulsive mais aussi intelligente. Le combos peut se retourner contre lui, surtout avec cette impulsivité, mais jusqu'ici cela a l'air de plutôt bien le servir. Hormis bien sûr sa relation avec sa soeur qui peut être houleuse à cause justement de leur caractère respectif.
Attaquer est-elle la solution ? Roman n'en voit pas de meilleure en tout cas.

"Ok. Je veux bien écrire un article sur ton divorce. Il paraîtra dans le Sparkle of Magic."

Il aura ainsi plus d'impact dans le monde des sorciers et surtout de la haute sphère.

"Je pense en effet que c'est la meilleure solution. Il vaut mieux que cela vienne de ta part pour éviter que ton nom ne soit sali par des personnes peu scrupuleuses."

Evidemment, Ethan va vivre une période mouvementée dans sa vie personnelle et professionnelle. Mais bien accompagné, il est capable d'en sortir la tête haute.

"Tu sais bien que je ferai n'importe quoi pour protéger ma filleule. Je veux écrire un article qui expose le fait, qui explique cette décision, et comment tu envisages le futur. Il faut faire justement comprendre aux lecteurs que tu tiens à tes enfants, que tu es un bon père de famille. C'est à toi de protéger ton nom peu importe les circonstances. "

Cela va faire du bruit, il ne faut pas se leurrer.
Un divorce chez les sang pur est rare et les gens ne vont pas se gêner pour émettre un jugement. Alors autant faire une annonce correctement pour limiter les dégâts.

Roman sort son agenda et se frotte le front du bout des doigts en voyant son planning bien rempli.

"Bon. Passe donc à la maison demain soir. Nous discuterons de cet article plus en détails et je te donnerai les informations que j'aurai pu recueillir concernant ce journaliste. Et autant faire cela accompagné d'une bouteille de vin. Sophie sera certainement à son appartement, donc nous aurons tout le temps nécessaire pour discuter de tout ça. "

Ethan sait parfaitement que le Duvall est un grand amateur de vin et a une belle cave chez lui.

Tu le savais oui. Mais Cassandre n'était pas ta seule enfant. Et son ainée méritait d'être protégée tout autant. Tu ne serais pas Ethan Silver si tu ne raisonnais pas ainsi, si tu ne pensait pas à elles. Ces enfants pour qui tu étais constamment prêt à tout, pour qui aucune extrémité n'était de trop. Alors ça te faisait du bien de le réclamer, et d'entendre ton beau-frère te rassurer sur ce point. Comme n'importe lequel de ses clients au fond, tu venais d'édicter tes règles, ta limite à ce pouvoir que tu lui donnais sur un pan de ton avenir. Mais au moins, tu étais sur que lui ne franchirais pas la ligne, et même que la tentation ne se manifesterait pas. C'était ce que tu étais venu chercher apres tout, qu'on se le dise.

Ta tête hoche doucement à l'annonce de la date. Tu te libérerais facilement de tes engagements, quels qu'ils soient. Parce que cette histoire le méritait bien, et qu'une fois cela derrière toi, tu pourrais te concentrer à nouveau sur le reste sans avoir l'esprit préoccupé par ces fadaises. Parce que ce n'était que ça au fond. Qui que soit ce journaliste, il ne pouvait s'agir que de fadaise n'est-ce-pas ?

Tu as de la chance, il doit me rester quelques bouteilles d'un excellent Sigalas. Tu l'énonces comme une possibilité, mais la vérité est que tu en es sur. Fausse modestie, tu annonces le prix que tu paieras pour ce service rendu, ou plutôt l'acompte car tu te doutes qu'il pourra y avoir autre chose par la suite. Que tu sera redevable au Canadien. Mais qu'importe, tant que tu obtiens ce que tu souhaites. Aucun sacrifice n'était trop grand, alors qu'il s'agissait de ton avenir à toi et à celui de tes enfants. Alors qu'il s'agissait de préserver ta réputation. D'éviter d'entacher ton reflet.

Je vais te laisser, j'imagine que t'a mieux à faire. Et toi, on t'attendais à l'hopital. Je te dirais bien de remettre mon bonjour à Sophie, mais... Tu sais pertinemment qu'elle serait la réponse de ta soeur, ... je m'en chargerais demain.

Ethan et Roman partagent le goût pour le bon vin, voir les vieux whiskys. C'est donc un sourire qui s'affiche sur son visage lorsque son beau frère mentionne une excellente bouteille de Sigalas. C'est un grand cru qui est exquis en bouche.

"Parfait."

Certainement qu'Ethan souhaite le remercier de son soutien en lui proposant de ramener un breuvage aussi délicieux. Et Roman accepte ce cadeau. Oh bien sûr, les bonnes manières dictent à Ethan de ramener quelque chose en tant qu'invité. Mais rien ne l'oblige à apporter une bouteille de vin aussi prestigieux. 
Ce n'est pas non plus un achat pour la participation à Roman. Ce dernier n'a pas besoin de ça pour protéger ce qu'il considère sa famille.

"Je m'en chargerai car elle ne sera pas présente demain soir,"répondit-il amicalement.

Il se lève pour accompagner Ethan vers la porte.

"Je ne peux te promettre encore une fois qu'il n'y aura pas de dérappage médiatique mais je m'engage à tout faire pour qu'il y en ait le moins possible."

Roman, bien que rédacteur en chef d'un journal et propriétaire d'un autre ne peut gérer l'Information en général. La presse est libre, si elle veut être cinglante, elle en a les armes. Mais il sait justement comment manier ces armes et s'il y a provocation, il y aura réponse.

"Tu as bien fait de venir m'en parler."

Il ouvre la porte, le salue puis referme derrière lui.
Il prend ensuite un instant devant la fenêtre pour rassembler ses idées. Puis il donne quelques directives à sa secrétaire avant de quitter les lieux pour se diriger vers les bureaux du Sparkle, afin de commencer son enquête.