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›› renoncements et contradictions
Ven 18 Aoû 2017 - 14:32
R E N O N C E M E N T S E T C O N T R A D I C T I O N S
#weddingtalk
.
La soirée était fraiche, annonçant une ambiance encore plus glaciale à venir. Caleb avait transplané, et était apparu sur le perron de sa toute nouvelle demeure, courtoisie de ses parents. Un portail en fer forgé se tenait immobile devant ses yeux. Mécaniquement, il sortit sa baguette qu’il passa devant la serrure de ce dernier. Dans un grincement très léger, les portes de sa maison s’écartèrent sur son passage. Il marchait d’un pas nonchalant, passa devant l’allée de roses blanches que sa mère avait pris un plaisir à dresser. Cette maison, en d’autres circonstances, auraient sûrement été celle de ses rêves. Il arriva devant une grande porte en bois. Cette maison, c’était la prison de Caleb. C’était la fin de ses années de vadrouille, le dru retour à la réalité, la reprise de la grande comédie qu’avait été en partie sa vie jusqu’alors. Il tapotait du pied, peu certain de vouloir franchir cette porte. Il espérait ne pas croiser Edme, sa toute nouvelle colocataire. Sa future femme oui… Caleb se reprit aussitôt. Il ne l’aimait pas, sans pour autant la détester. Il éprouvait un sentiment assez partagé à son égard. C’était une femme charmante, pleine de fragilité et d’une intelligence rare. Ô combien Caleb aurait aimé pouvoir éprouver de la compassion pour elle… Ils étaient dans le même bateau après tout. Ce mariage était tout autant un cauchemar pour lui que pour elle. Mais il n’y arrivait pas. A ses yeux, elle représentait la cage dans laquelle il était désormais enfermé. Quelques années plus tôt, alors que les fiançailles étaient plus que récentes, il s’était dit qu’Edme avait l’air de quelqu’un de très bien, et qu’ils surmonteraient ce mariage en tant que partenaires, en pouvant compter l’un sur l’autre, à défaut de s’aimer. Il n’en était rien.
Il finit par pousser la porte de l’entrée délicatement. Il se glissa à l’intérieur d’un pas feutré, prenant garde à ne rien renverser sur son passage. La nuit était tombée depuis quelques heures. Caleb – même si cela ne l’amusait guère – avait pris l’habitude de rentrer tard dans la nuit, pour laisser le temps à Edme de s’endormir et – finalité qui semblait les arranger tout deux – pour que leur rythme soit si différent qu’ils n’aient que très peu de temps à passer ensemble. Alors que le jeune professeur accrochait sa veste sur le porte-manteau de l’entrée – cette fois-ci courtoise des parents Greenfields, antiquité d’une valeur certaine mais d’un goût incertain – un filet de lumière parvint à ses yeux. Il se retourna, et eut le déplaisir de remarquer, au bas de la porte close de la cuisine, qu’il ne pourra pas échapper ce soir à un échange, même cordiale, avec la future Mme Blackwood. Résigné, lâchant un soupir, il arrêta ses efforts pour être discret et se rendit dans la cuisine. Alors qu’il entra dans la pièce, sans même prêter attention à sa potentielle interlocutrice, il marmonna un « Bonsoir Edme. Tu ne dors pas ? » sans grand enthousiasme, mais avec un très léger sourire de façade.
Elle était de dos. Une lettre ouverte traînait sur la table de la cuisine. Elle n’en détourna pas le regard, pas même pour saluer Caleb. Quelque chose dans la façon dont elle était assise, peut-être un mouvement de main, une façon de respirer, lui laissait penser qu’elle était bouleversée. Caleb stoppa net son mouvement, confus, comme un enfant qui attend des instructions. Il n’osait plus bouger davantage, attendant simplement une réaction d’Edme pour connaître la marche à suivre, la tournure qu’allait prendre cette soirée.
Il finit par pousser la porte de l’entrée délicatement. Il se glissa à l’intérieur d’un pas feutré, prenant garde à ne rien renverser sur son passage. La nuit était tombée depuis quelques heures. Caleb – même si cela ne l’amusait guère – avait pris l’habitude de rentrer tard dans la nuit, pour laisser le temps à Edme de s’endormir et – finalité qui semblait les arranger tout deux – pour que leur rythme soit si différent qu’ils n’aient que très peu de temps à passer ensemble. Alors que le jeune professeur accrochait sa veste sur le porte-manteau de l’entrée – cette fois-ci courtoise des parents Greenfields, antiquité d’une valeur certaine mais d’un goût incertain – un filet de lumière parvint à ses yeux. Il se retourna, et eut le déplaisir de remarquer, au bas de la porte close de la cuisine, qu’il ne pourra pas échapper ce soir à un échange, même cordiale, avec la future Mme Blackwood. Résigné, lâchant un soupir, il arrêta ses efforts pour être discret et se rendit dans la cuisine. Alors qu’il entra dans la pièce, sans même prêter attention à sa potentielle interlocutrice, il marmonna un « Bonsoir Edme. Tu ne dors pas ? » sans grand enthousiasme, mais avec un très léger sourire de façade.
Elle était de dos. Une lettre ouverte traînait sur la table de la cuisine. Elle n’en détourna pas le regard, pas même pour saluer Caleb. Quelque chose dans la façon dont elle était assise, peut-être un mouvement de main, une façon de respirer, lui laissait penser qu’elle était bouleversée. Caleb stoppa net son mouvement, confus, comme un enfant qui attend des instructions. Il n’osait plus bouger davantage, attendant simplement une réaction d’Edme pour connaître la marche à suivre, la tournure qu’allait prendre cette soirée.
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Re: ›› renoncements et contradictions
Sam 19 Aoû 2017 - 1:17
❝ A LA HAINE, A L'AMOUR
L'IVRESSE DE NOS VIES PERDUES ❞Le vent soufflait durement lorsque la jolie rousse ouvrit les yeux ce matin-là. Le soleil brillait faiblement, comme s’il était happé par une ombre invisible qui l’interdisait de diffuser sa chaleur coutumière du mois août. Sans grand enthousiasme, l’Edme se prépara rapidement, elle ne jeta qu’un vague regard dans le miroir poli de sa chambre avant de transplaner à l’hôpital. Le temps passant, la journée s’assombrit à l’instar de son humeur. Le visage masqué par une paire de lunette qu’elle ne portait que rarement, elle ignora les paroles douces de ses collègues, s’enferma dans son bureau autant que possible, mis à jour une paperasse qui ne demandait pas à l’être. L’air aseptisé de l’hôpital lui portait au cœur, ombre timide qui voguait dans les couloirs blanchâtres, elle ignora l’invitation à prendre un verre qui se présenta à elle en fin de journée. Elle ignora les regards interrogateurs qui se posèrent sur elle toute la journée, les chuchotis qui suivaient son sillage. L’Edme n’était pas elle-même depuis quelques jours, elle s’était enfermée dans son habit de sang pur réservée, elle parlait d’un rhume magique lorsque ses patients s’inquiétaient de son manque d’entrain. Elle souriait faiblement. Elle mentait, honteusement, malhabilement. Et dès qu’elle le put, elle quitta l’établissement magique. Il lui fallait rentrer chez elle, se terrer encore, s’oublier.
Lorsqu’elle passa les lourdes grillent en fer forgé, un étrange sentiment de soulagement l’étreignit. Son futur époux ne serait pas là. Caleb n’était jamais là quoiqu’il arrive. Il semblait la fuir avec un acharnement exacerbé. Rien ne pouvait plus soulager la rouquine que l’absence de son fléau personnel, la preuve vivante de son absence de liberté. Ses yeux s’embuèrent à nouveau de larme. Le cœur en berne, la médicomage erra quelques heures dans la maison silencieuse, se laissant aller à exprimer la profonde tristesse qui l’assaillait. L’inertie et la vacuité de son existence lui ôtait tout espoir. Rien ici ne témoignait le moindre signe de vie, de bonheur et encore moins d’espoir. Le son d’un hibou frappant au carreau la tira de ses sombres rêveries. Nouveau malheur, nouveau rappel. Elle sentait l’enveloppe lui brûler les doigts, elle devinait le contenu de la missive : le coup fatal.
Posant la lettre sur le comptoir de la cuisine, l’Edme se saisie de la bouteille de whisky pur feu qui traînait dans un des placards de la cuisine, cadeau d’un des frères de Caleb, sans doute avait-il pensé que son ainé aurait besoin de cela pour supporter le destin qui était le sien. L’Edme s’autorisait a être voleuse du présent. La première gorgée lui brûla entièrement la bouche, ses lèvres semblaient s’enflammer au contact de l’alcool. Elle n’était pas femme à boire, et encore moins ce genre d’alcool, mais ce soir c’était différent. Ce soir, elle perdait officiellement l’espoir d’être heureuse un jour. Ce soir, elle emmerdait ses convenances et ses habitudes. A toi même, pauvre fille, trinqua-t-elle silencieusement en avalant une autre gorgée.
Trois verres plus tard, toujours perchée sur l’une des chaises de la cuisine, les yeux à présent vide de toutes larmes, le visage défait par ses heures passées à se lamenter sur son sort, l’Edme stagnait devant le pli ouvert. La porte de la maison s’ouvrit, les pas de Caleb résonnèrent dans son esprit engourdi mais elle ne se sentait pas la force de prétendre quoique ce soit. Heureux de vous annoncer. La tournure de phrase tournait en boucle de son esprit. Heureux de vous annoncer. Ses parents avaient-ils écrit le même message, le même mensonge ?
La voix de Caleb résonna dans la cuisine. Pitié. Que faisait-il ? Pas ce soir, qu’elle rêvait de lui dire, pas ce soir. Qu’il l’ignore, qu’il la haïsse et la méprise comme il le faisait chaque jour. Portant le verre à ses lèvres d’un mouvement vague, la petite flamme avala une gorgée avant de se retourner vers lui. Son regard hagard lui donna une nouvelle fois envie d’éclater en sanglot. Elle n’était pas ce genre de femme apte à supporter, elle n’était que faiblesse. « Tu n’es pas obligé de me parler », souffla-t-elle en s’accrochant avec désespoir à son verre. Son regard glissa sur la feuille de papier à nouveau. Heureux de vous annoncer … que personne n’aimera jamais Edme Greenfield. Un soupir résonna dans le silence, Caleb ou elle-même ? Elle l’ignorait. « Tu me déteste ? ». Les mots lui échappèrent sans qu’elle n’en ait conscience, sans qu’elle ne cherche réellement à les retenir du reste. Mais l’espace de cette seconde, il lui était vital de savoir, de l’entendre : la détestait-elle comme elle détestait son frère en cet instant ? Brisait-elle sa vie comme il brisait la sienne ?
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Re: ›› renoncements et contradictions
Dim 20 Aoû 2017 - 14:47
R E N O N C E M E N T S E T C O N T R A D I C T I O N S
#weddingtalk
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Les mots tranchants d’Edme résonnèrent un moment dans l’esprit de Caleb. Sa question – si tant est que c’en fut vraiment une – lui glaçait le sang. Il ne prit pas la peine de répondre immédiatement, encore surpris par le manque de préambule à la conversation que sa future épouse souhaitait visiblement avoir. Elle semblait tenir une lettre entre ses mains, elle la parcourait fébrilement du regard. Caleb finit par contourner la table de la cuisine. Il faisait désormais face à Edme, les yeux bouffis, ou alors embrumés par l’alcool. Il ne s’agissait pas de son premier verre. Caleb ne put s’empêcher de se rendre compte qu’il s’agissait d’une des bouteilles offertes par son petit frère, à l’occasion de leur fiançailles si ses souvenirs étaient bons. Ce qui était à lui était à elle après tout. Il recula délicatement une des chaises, soucieux de déranger le silence lourd qui régnait. Il s’assit et, comme une main tendue à la jeune médicomage, un signe de complicité, lui ôta le verre des mains pour y boire une gorgée.
Il réfléchissait avec prudence à sa réponse. Il ne la détestait pas. Il détestait l’idée qu’il se faisait d’elle, ce qu’elle impliquerait désormais dans sa vie. Il aurait voulu lui dire que, si cela était possible, il l’aimerait de tout son cœur, serait un pilier indéfectible dans sa vie, jouerait au mari parfait et, avec un peu de chance même, y prendrait goût. Mais, par manque de compassion et sûrement d’égoïsme, il n’arrivait pas à dépasser cette animosité, qu’il savait pourtant injuste. Elle aussi devait ressentir la même chose, elle aussi était prisonnière de sa moitié, peut-être elle aussi en aimait un autre ou en aimera un autre. Lui qui avait pourtant eu les épaules assez larges, était dépassé par le poids de la situation et ne pouvait certainement pas prendre sur lui davantage. Ce qui lui devait, c’était d’être honnête. « Je ne te déteste pas. La réponse que tu cherches dépasse de loin ta question… » Il porta de nouveau le verre à ses lèvres. Elle méritait tellement mieux. Non pas que Caleb, du moins c’est ce qu’il pensait – une haute estime de soi quasiment infaillible – mais mieux que ce mariage arrangé, fait de compromis, renoncement, magouille sur fond d’aristocratie sorcière suprémaciste.
La conversation était délicate. Caleb souhaitait véritablement dépassé toute cette amertume. Peut-être avec le temps y arriverait-il. Ou alors ce sera pire… Il finit le verre d’un coup de poignet, balayant cette pensée par la même occasion. Il aurait aimé avoir la force et le courage de lui dire qu’ils allaient survivre à ça ensemble, qu’elle pourrait compter sur lui, qu’il la porterait à bout de bras s’il le fallait. Mais il ne le pouvait pas. Ou ne le pensait pas. Il l’ignorait. Tout était flou, alors même que l’alcool n’avait pas encore atteint son cerveau. Ses yeux croisèrent de nouveau le chemin de la missive, ouverte sans vraiment de précaution. Elle semblait être l’objet de la discorde. Caleb crut apercevoir une calligraphie assez soignée, des couleurs assez sombres. Il ne put retenir sa curiosité davantage, même s’il se doutait que cela ne réchaufferait pas du tout l’ambiance glaciale que la jeune rousse, malgré elle, avait instauré : « Je peux savoir ce que c’est ? » osa-t-il enfin dire à Edme, empruntant un ton assez amical, bien que réservé, pour ne pas envenimer les choses davantage. Il vint alors à l’idée de Caleb que cette lettre, ce très redouté bout de papier pouvait s’agir d’un faire-part de mariage. Ou alors serait-ce un avis de décès ? Celui de leur vie si prometteuse respective et de leur bonheur ?
Il réfléchissait avec prudence à sa réponse. Il ne la détestait pas. Il détestait l’idée qu’il se faisait d’elle, ce qu’elle impliquerait désormais dans sa vie. Il aurait voulu lui dire que, si cela était possible, il l’aimerait de tout son cœur, serait un pilier indéfectible dans sa vie, jouerait au mari parfait et, avec un peu de chance même, y prendrait goût. Mais, par manque de compassion et sûrement d’égoïsme, il n’arrivait pas à dépasser cette animosité, qu’il savait pourtant injuste. Elle aussi devait ressentir la même chose, elle aussi était prisonnière de sa moitié, peut-être elle aussi en aimait un autre ou en aimera un autre. Lui qui avait pourtant eu les épaules assez larges, était dépassé par le poids de la situation et ne pouvait certainement pas prendre sur lui davantage. Ce qui lui devait, c’était d’être honnête. « Je ne te déteste pas. La réponse que tu cherches dépasse de loin ta question… » Il porta de nouveau le verre à ses lèvres. Elle méritait tellement mieux. Non pas que Caleb, du moins c’est ce qu’il pensait – une haute estime de soi quasiment infaillible – mais mieux que ce mariage arrangé, fait de compromis, renoncement, magouille sur fond d’aristocratie sorcière suprémaciste.
La conversation était délicate. Caleb souhaitait véritablement dépassé toute cette amertume. Peut-être avec le temps y arriverait-il. Ou alors ce sera pire… Il finit le verre d’un coup de poignet, balayant cette pensée par la même occasion. Il aurait aimé avoir la force et le courage de lui dire qu’ils allaient survivre à ça ensemble, qu’elle pourrait compter sur lui, qu’il la porterait à bout de bras s’il le fallait. Mais il ne le pouvait pas. Ou ne le pensait pas. Il l’ignorait. Tout était flou, alors même que l’alcool n’avait pas encore atteint son cerveau. Ses yeux croisèrent de nouveau le chemin de la missive, ouverte sans vraiment de précaution. Elle semblait être l’objet de la discorde. Caleb crut apercevoir une calligraphie assez soignée, des couleurs assez sombres. Il ne put retenir sa curiosité davantage, même s’il se doutait que cela ne réchaufferait pas du tout l’ambiance glaciale que la jeune rousse, malgré elle, avait instauré : « Je peux savoir ce que c’est ? » osa-t-il enfin dire à Edme, empruntant un ton assez amical, bien que réservé, pour ne pas envenimer les choses davantage. Il vint alors à l’idée de Caleb que cette lettre, ce très redouté bout de papier pouvait s’agir d’un faire-part de mariage. Ou alors serait-ce un avis de décès ? Celui de leur vie si prometteuse respective et de leur bonheur ?
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Re: ›› renoncements et contradictions
Mar 22 Aoû 2017 - 0:43
❝ A LA HAINE, A L'AMOUR
L'IVRESSE DE NOS VIES PERDUES ❞L’âpreté de ses mots n’échappa pas à la douce flamme. Elle sentit l’air se charger immédiatement d’une tension presque palpable, un zeste de colère frétillait doucement dans la pièce. Baissant les yeux sur le pli, l’Edme ne put retenir une vague de rancœur lui soulever le cœur. L’impuissance s’infiltrait dans chacun des pores de sa peau, se distillait dans son organisme comme un traite poison que même l’alcool ingurgité ne parvenait pas à annihiler. Sa vie durant, l’Edme avait toujours mit un point d’honneur à correspondre à l’image de ce que l’on attendait d’elle. Elle s’était laissée glisser dans le moule que ses parents avaient conçu pour elle dès le berceau, devenant cette jeune femme douce et simple, cette tendre froideur que l’on appréciait par un matin d’été. Ce soir, en face de l’homme à qui elle allait lier sa vie pour l’éternité, une sombre lettre entre eux lui rappelait comme cette vie n’était pas celle qu’elle avait voulue. Relevant les yeux vers Caleb, elle laissa ses iris au bleu troublé glisser sur lui. D’une beauté saisissante, l’homme qui lui faisait face dégageait une aura sombre, un vague frisson au plus profond de son être soufflait à Edme qu’il lui fallait jouer de prudence avec lui. Ses yeux d’un brun chaud et léger avaient perdu la douceur qu’elle leur avait toujours connue pour se charger d’ombre et de mystère. Ses traits jadis rieur lui semblèrent devenu durs et froids. Pourtant, d’un mouvement délicat, il glissa ses doigts contre les siens pour se saisir du verre qu’elle avait gardé perché à son bras.
Le contact de sa peau contre la sienne, la chaleur à peine perceptible de sa présence auprès d’elle, lui rappela qu’elle n’était pas seule à naviguer dans les eaux troubles d’un avenir tracé à l’encre par d’autres volontés. Ses paroles, pleines d’ambivalence et dénuées de toute réponse, curieusement la réconfortèrent un instant. Une minute durant laquelle elle se remémora le bal d’hivers de ses quinze ans, à Poudlard. Elle se revit dans sa robe verte, se souvint que ce soir là encore son cœur s’était serré lorsque l’homme qu’elle aimait depuis toujours l’avait une nouvelle fois relégué au rang d’amie translucide. Petite poufsouffle aux boucles de feu, imparfaite jeune fille masquée par la beauté et l’esprit des autres, ombre parmi les étoiles. Ce soir-là pourtant, le beau Caleb l’avait invité à danser : compassion d’un ami de la famille pour un être dont la détresse l’avait touché assurément. Pourtant, au bras de ce presque ami, elle s’était senti compté, juste une fois. Et ce soir encore, malgré la situation, en dépit de tous ses efforts pour l’ignorer : elle n’était pas seule. Caleb était face à elle. « Je n’ai jamais voulu ça », soupire-t-elle en brisant l’expression froide qu’elle avait choisi d’adopter dès son entrée.
Un étrange sentiment lui saisit l’esprit, elle se surprit à penser qu’il était l’homme dont elle aurait dû tomber amoureuse des années auparavant. Il n’aurait jamais partagé ses sentiments non plus assurément, elle n’était pas le genre de sorcière qui se faisait aimé, elle était la brume sauve et imperceptible. Un pâle fantôme aux seins d'une nuée d'hommes et de femmes, qui rivalisaient tous pour attirer l'attention. Secouant la tête imperceptiblement pour chasser ses pensées surréalistes et manifestement gorgées de whisky pur feu, elle soupira doucement. Caleb n'avait rien de différent, il était comme tout les autres. Elle hésita une seconde avant d’accéder à sa demande, puis tourna la lettre en face de lui, partageant pour la première fois le secret qu’elle gardait en elle depuis des jours. Le mariage de cet homme qui hantait son cœur depuis vingt ans. « Je l’aime depuis toujours ». Les mots sont hésitants. Le masque échappe à l’Edme. Elle tend la main, à peine ouverte, vers lui. D’un mouvement de baguette, elle remplit à nouveau le verre vide abandonné entre eux : un lien à peine existant, un pont fragile entre deux êtres que tout oppose. « Ou bien j’aime l’idée de l’aimer, je ne sais plus … Il me voit à peine depuis vingt ans alors comment je pourrais l'aimer n'est ce pas ? Mais j'ai toujours pensé qu'un jour .. Plus rien n’est simple depuis que tu es revenu, tout empire ». L’accusation est à peine voilée malgré ses efforts, sa lèvre se coince entre ses dents regrettant déjà les mots malhabiles qu’elle vient de prononcer.
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