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Bloodmoon
Lun 19 Fév 2018 - 14:34
Le manteau de la nuit vient de s'abattre sur les Highlands. Depuis les hauteurs des murailles, j'observe la lune se lever, charriant dans son sillage les heures à venir.
L'université dort, rien ne bouge : c'est le retour du silence et des bêtes de la nuit. L'annonce des rondes solitaires et des rencontres inattendues : celles des étudiants oubliés par le sommeil et que je me plaît à accompagner dans l'insomnie.
Entre chasse et confidence.
Mais je ne suis pas d'humeur à interagir avec qui que ce soit, ce soir.
Ma dernière conversation avec Penelope me suit depuis quelques jours. J'y repense sans trop savoir pourquoi : mes réflexions sont des bribes d'impressions inabouties. J'ignore ce que je cherche, ce que ça me fait, si ce n'est un vague sentiment de mélancolie diffus.
En outre, je repense à la Roumanie et les années passées là bas. C'est un fait étrange, mais il me reste très peu de choses de cette période. Tout est flou. Je ne sais plus à quoi ressemblait ma vie alors, la maison, le quartier : rien. J'étais jeune mais malgré tout, cela me semble étrange de n'avoir rien gardé.
Cela dit, je suis à peu près sûr que ce regain soudain d'intérêt pour mes jeunes années est directement lié avec le résultat des analyses de la sorcière. De savoir que je suis plus vampire que prévu, pour dire les choses comme ça, me laisse un drôle de goût dans la bouche.
Je crois que ça m'a simplement mis en face de choses que je préférais ignorer jusqu'ici.
Et c'est là que l'on réalise toute la complexité de la notion d'identité. Je ne me suis jamais reconnu dans les valeurs et le mode de vie défendus par ma famille paternelle. Ma vie est celle d'un sorcier pratiquement ordinaire. Pourtant, je ne suis pas non plus l'un d'eux : le quotidien me le rappelle bien assez souvent.
On pourrait aussi dire que seules les actions comptent et que le sang n'a aucune importance. Sauf que les choses ne marchent pas comme ça dans la vraie vie. Les groupes sociaux existent et les rapports de force aussi. Je pourrais courir autant que je veux après la normalité, le fait est que ma différence est bien réelle et qu'on ne peut pas l'ignorer non plus.
Les hybrides ne sont pas assez nombreux pour porter une identité propre ou une culture à part. Chez les vampires, je suis un humain et chez les humains, je suis un vampire. C'est aussi con que ça.
Bref, tout ça pour dire que je suis dans le flou. Je ne sais pas où me placer et ça m'imprègne d'un sentiment vaguement désagréable avec lequel je pensais avoir terminé. Le genre qui me donne envie de rester tout seul, pour changer.
La muraille cercle le château comme un serpent noir dans la pénombre. Je me hasarde à en suivre la courbure, le regard dissout en direction du le domaine et la forêt en contrebas. Il fait froid : le genre qui perce à travers les vêtements. Le croissant de lune apparaît comme un sourire dans le ciel nocturne. Un humain ordinaire n'y verrait pas grand chose, si ce n'est des ombres couvrant d'autres ombres.
Je m'arrête un moment pour fumer une cigarette.
L'université dort, rien ne bouge : c'est le retour du silence et des bêtes de la nuit. L'annonce des rondes solitaires et des rencontres inattendues : celles des étudiants oubliés par le sommeil et que je me plaît à accompagner dans l'insomnie.
Entre chasse et confidence.
Mais je ne suis pas d'humeur à interagir avec qui que ce soit, ce soir.
Ma dernière conversation avec Penelope me suit depuis quelques jours. J'y repense sans trop savoir pourquoi : mes réflexions sont des bribes d'impressions inabouties. J'ignore ce que je cherche, ce que ça me fait, si ce n'est un vague sentiment de mélancolie diffus.
En outre, je repense à la Roumanie et les années passées là bas. C'est un fait étrange, mais il me reste très peu de choses de cette période. Tout est flou. Je ne sais plus à quoi ressemblait ma vie alors, la maison, le quartier : rien. J'étais jeune mais malgré tout, cela me semble étrange de n'avoir rien gardé.
Cela dit, je suis à peu près sûr que ce regain soudain d'intérêt pour mes jeunes années est directement lié avec le résultat des analyses de la sorcière. De savoir que je suis plus vampire que prévu, pour dire les choses comme ça, me laisse un drôle de goût dans la bouche.
Je crois que ça m'a simplement mis en face de choses que je préférais ignorer jusqu'ici.
Et c'est là que l'on réalise toute la complexité de la notion d'identité. Je ne me suis jamais reconnu dans les valeurs et le mode de vie défendus par ma famille paternelle. Ma vie est celle d'un sorcier pratiquement ordinaire. Pourtant, je ne suis pas non plus l'un d'eux : le quotidien me le rappelle bien assez souvent.
On pourrait aussi dire que seules les actions comptent et que le sang n'a aucune importance. Sauf que les choses ne marchent pas comme ça dans la vraie vie. Les groupes sociaux existent et les rapports de force aussi. Je pourrais courir autant que je veux après la normalité, le fait est que ma différence est bien réelle et qu'on ne peut pas l'ignorer non plus.
Les hybrides ne sont pas assez nombreux pour porter une identité propre ou une culture à part. Chez les vampires, je suis un humain et chez les humains, je suis un vampire. C'est aussi con que ça.
Bref, tout ça pour dire que je suis dans le flou. Je ne sais pas où me placer et ça m'imprègne d'un sentiment vaguement désagréable avec lequel je pensais avoir terminé. Le genre qui me donne envie de rester tout seul, pour changer.
La muraille cercle le château comme un serpent noir dans la pénombre. Je me hasarde à en suivre la courbure, le regard dissout en direction du le domaine et la forêt en contrebas. Il fait froid : le genre qui perce à travers les vêtements. Le croissant de lune apparaît comme un sourire dans le ciel nocturne. Un humain ordinaire n'y verrait pas grand chose, si ce n'est des ombres couvrant d'autres ombres.
Je m'arrête un moment pour fumer une cigarette.
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