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la nuit je mens • fay.
Mar 8 Mar 2016 - 22:23
J'ai dans les bottes des montagnes de questions »
Le feu crépite doucement, presque sans bruit, sous la voûte de la grande cheminée. Le vert de tes yeux effleure le subtil mélange de brun et de blanc cassé, la pierre et le bois qui se mêlent et s'attirent, s'embrassent parfois. Les braises rougeoyantes te chauffent les membres et le visage, puis le corps entier. Un agréable frisson te dévale l'échine. Tu as les joues un peu rosées, sans doute, la faute à la caresse des flammes fauves. Ça t'amuse. Tu aimes bien rester jusque tard le soir souvent, lové dans le cuir épais d'un de ces larges fauteuils. Tu as les paupières lourdes. Les flammes dansent dans tes iris. Tu as chaud et tu es bien. Tu pourrais t'endormir. Tu entends le murmure du feu ; au loin les rires de la salle commune s'estompent. Tu t'ébroues soudain et agites la pile de parchemins qui sommeille sur tes genoux, oubliée. Tu jettes un oeil fatigué aux alentours : les acolytes de ta maison ont déguerpi, chassés par l'heure tardive. Te voilà esseulé ou presque. Tu baisses les yeux. Ton chien somnole à tes pieds. Tu l'observes. Il respire bruyamment, jappe dans son sommeil. Ça te vole un sourire.
Un bruit étouffé t'arrache à la contemplation.
« Quiélà ? »
Ta voix est un peu rauque, pâteuse et embourbée de s'être tue si longtemps. Le bruit se répète, un enchaînement discret de petits pas feutrés. Tu fronces les sourcils, tout à ta surprise, à demi assoupi encore. Alors tu redresses et t'extirpes à regret de la tiédeur de ton nid. Un peu plus loin, dans la pénombre, une silhouette se distingue. Tu reconnais aussitôt ces traits fins, féminins, adorables. Tu te mords la lèvre, pour retenir le sourire qui frémit aux coins de ta bouche.
« Salut Fay, j'aurais pas cru te voir debout si tard. »
Le ton que tu emploies est doux et taquin, un peu moqueur aussi. Le sarcasme est léger, subtil ; il tremblote sur le bout de ta langue. Tu te rapproches de la brune d'une démarche assurée. Vous vous faîtes face alors. Une étincelle espiègle chancèle et pétille dans tes prunelles. Ta curiosité frissonne, explose et s'exclame. Tu es tout réveillé.
« Je peux t'aider ? »
Ta question reste en suspend. Tu n'as prononcé que quelques mots, anodins. Tu veux dire tellement plus.
Quel est donc ton secret Fay. Que caches-tu sous le verni luisant de ta perfection ?
Une fossette se dessine dans le creux de ta joue, Balthazar. Un rictus mutin t'échappe, c'est plus fort que toi. Fay t'étonne avec son accent qui sent l'Asie et les épices ; ce petit effet qui grelotte sur les syllabes et les mots parfois, cet accent qui tranche si profondément avec son visage poupin, caucasien. Elle ne cache peut être rien, elle est sans doute aussi innocente que son air le suggère. Mais tu ne sais pas. Tu doutes et hésites, et surtout tu aimerais bien découvrir ce qui ce trame derrière ces grands yeux noirs et ce joli front, sur lequel valse et danse le brun d'une frange.
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