La table que tu as choisi est résolument excentrée du reste de l'établissement. Dans un coin de la pièce, près de la cheminée inconsumable. Tu es assis en face de l'un des plus grands sorciers d'Inverness. Du moins l'un des plus grands dans les bas-fonds de la ville. Un grand blond, yeux verts, une cicatrice sur la paupière gauche, et des tatouages en gaélique dans le cou. La plupart des clients vous regardent d'un mauvais œil. C'est l'Écossais qui engage la conversation. L'odeur du sang, de la destruction. C'est l'Écossais qui engage la conversation. "J'aurais pensé tes goûts plus rustres, Joseph." Une pique. Le combat de qui à la plus grosse commence. Faut pas se leurrer, dans ce genre de rencontre, rien n'est bourré de bons sentiments, tout est voué à montrer à l'autre qui est le patron. Et ce soir, tu sais plus ou moins que tu n'as pas l'avantage, mais tu n'es pas prêt de le montrer à ce blondinet. "Je sais que j'ai peu de manières, mais je sais faire honneur à votre bon goût national." On caresse dans le sens du poil, pour arriver à ces fins. "Mais si tu m'as fait venir ici, c'est pas pour discuter décoration d'intérieur, n'est-ce pas ?" Tu grimaces. Il a raison. Si tu rencontres le grand Muirhead, c'est certainement pas pour lui demander conseil en tricot. Tu lui revends certaines de tes marchandises. Notamment des armes magiques. Tu ne sais pas vraiment ce qu'il en fait, mais tes contacts t'ont plus ou moins dit que ça partait en Irlande. "J'ai une cargaison qui devrait arriver d'ici deux, voir trois jours." Ton interlocuteur hausse un sourcil. "On avait pas convenu que les armes devaient arriver ce soir ?" Merde. Il va vraiment faire chier sur ce point. Quel peigne-cul. Tu passes une main dans tes cheveux pour une fois détachés, avant de prendre une gorgée de whisky. Dégueulasse ce truc. "Écoute Muirhead, le fournisseur a eu un retard." "Dis plutôt que ton pipeline est biaisé." Tu serres les dents. Pour une fois que t'es honnête, cet abruti se méfie. C'est pas ta faute si t'as la Justice Magique à ton cul, t'essayes de faire ton taff proprement, mais y a toujours quelque chose qui merde. "Ça va réduire le prix d'achat, Joseph." Tu tapes du poing. "C'est quand qu'ils viennent prendre notre commande ces putains d'incompétents ?!" Tu changes de sujet, évidemment. Tu préfères que ton associé ait le ventre plein avant de parler de choses qui fâchent. Ce dernier te regarde avec agacement, mais tu l'ignores royalement. Tu décides de prendre les devants et te lèves. "Je vais voir ce qu'ils foutent pour mettre autant de temps." lâches-tu avant de te diriger vers l'accueil.

C'est là que tu vois sur ton chemin un petit serveur. La peau un peu mat, des cheveux noirs, et des yeux si clairs qu'on s'y noierait dedans. Tu l'arrêtes d'un geste de main, juste devant son torse, manquant de le faire tomber. "Eh. Ca fait trois quarts d'heure que moi et mon pote on se regarde dans le blanc des yeux." Tu te fais insistant, et bien peu agréable pour le jeune homme qui n'avait absolument pas demandé qu'un ours lui tombe dessus, toutes griffes dehors. "Je prendrai deux American Burgers, supplément bacon. Et lui..." Tu jettes un léger coup d'œil à ta table avant de revenir vers le serveur. "Un haggis." Cliché. "T'as bien compris ? Fissa maintenant, et j'ai pas intérêt à attendre une demi-heure de plus." Tu tournes les talons, les poings serrés, tes bagues multiples luisantes aux lumières de la salle. "Ah !" Tu te retournes, le doigt en l'air. "J'oubliais, une bouteille de Merlot en plus."

( Pando )

Le black wolf avait l'air calme en surface, mais grouillait d'ordres et d'efficacité derrière les portes du personnel. Personnel foutrement manquant aujourd'hui. Selim avait été appelé à faire le service en plus de son rôle de barman. Depuis le départ de deux employés, les employés devaient redoubler d'efficacité pour servir tout leurs clients. « Ces gens vont attendre, mais ils vont le faire avec le sourire, compris, Ouznadji ? Sers toi de ton beau sourire et va me gérer cette salle ! » Travailleur, l'égyptien était reconnu dans son travail, et apprécié des clients habitués pour son grand sourire et ses yeux pétillants. Heureusement pour son patron, Selim était en pleine forme ce soir. Il posa un plat après avoir fait une révérence, faisant un clin d'oeil à la cliente qu'il venait de servir « Un très bon appétit ma gente dame, que votre plaisir gustatif soit aussi grand que celui d'être en si charmante compagnie. » Il posa ensuite le plat devant l'homme qui l'accompagnait, récupéra la bouteille de vin rouge et remplit le verre avec des gestes précis bien que très théâtral. « Monsieur trouve le vin à sa convenance ? Oui ? Vous m'en voyez ravi, votre pièce de viande n'en sera que plus exquise, si bien accompagnée. » Suivant les tables, selim pouvait jouer, s'amuser, faire rire ses clients d'une façon ou d'une autre. Le brun retourna derrière le bar, jetant un torchon blanc sur son épaule, remontant les manches de sa chemise jusqu'aux coudes, se penchant sur le comptoir pour regarder tour à tour les deux jeunes sorciers accoudés « tout vas bien les mecs ? Oui ? Niquel. J'te remets un verre ? »

La sonnette de la cuisine sonne et comme tout les autres serveurs sont visiblement occupés, Selim part en prétextant qu'on ne peut se passer de lui, faisant semblant d'être le roi du monde avant de repartir vers la cuisine en souriant. L'adrénaline de ces soirées-là lui plaisait, il n'avait le temps que de contenter ses clients, pas le temps de réfléchir, et son salaire était souvent doublé en fin de journée : de quoi ravir un Ouznadji. Trois assiettes entre les doigts, Selim se dirigeait vers une table quand il se fit couper la route par un réel colosse, d'une tête de plus que lui. Le serveur retint ses assiettes de justesse, retrouvant son équilibre alors qu'il se faisait engueuler par le barbu. « Eh. Ca fait trois quarts d'heure que moi et mon pote, on se regarde dans le blanc des yeux » Selim releva les yeux (littéralement, il fallait lever la tête pour regarder ce monsieur.), redressant implicitement les épaules, ayant trop l'habitude qu'on lui marche dessus « Mes excuses, monsieur... » Il ne finit pas sa phrase, que l'ours passait commande. Selim pinça discrètement les lèvres, hochant la tête en retenant la commande, un léger sourire commençant à s'imprégner sur son visage, la malice faisant jouer son regard vert émeraude. « Avec plaisir, monsieur, veuillez excuser la maison, monsieur. » L'ironie dans sa voix s'entendait, et pendant quelques secondes Selim se dit que ce n'était peut-être pas le bon bout d'homme à qui chercher des noises. Trop tard pour ça, l'étincelle de malice ne quittait plus Selim. Quand son client se retourna à nouveau vers lui, Selim s'empressa de baisser le haut de son corps en une courbette, les plats ne bougeant pas de ses mains agiles. « Vos désirs sont des ordres. » Selim se redressa rapidement, jetant un regard au barbu avant de le contourner (littéralement, il fallait le contourner pour pouvoir passer tant il était impressionnant) pour aller servir sa table.

Selm fila en cuisine pour donner la nouvelle commande, avant de descendre dans la cave à vin chercher une de ses meilleures bouteilles. Il revint dans la salle, attrapa deux verres ballons et s'approcha d'une des dernières tables. L'ambiance n'y était clairement pas la même qu'à celle des deux amants de tout à l'heure, ou des deux jeunes étudiants qui étaient venus boire un verre. En approchant, Selim sonda les deux brutes (en tout cas, c'est ce qu'ils donnaient comme impression.), et détaillait particulièrement le profil de l'homme barbu. Cheveux longs, visage sombre, fermé, sa carrure et la force à l'état pur qui se dégageait de lui. Un léger frisson le parcouru. Il avala sa salive, puis vint poser les verres de vin devant les deux garçons. « La maison s'excuse pour le temps d'attente, et vous offre un digestif en fin de repas au bar pour se faire pardonner. » Il passa le torchon sur son avant-bras et montra l'étiquette de la bouteille de vin aux deux hommes, sondant dans leur regard pour trouver cette étincelle intéressée d'un bon cru pour leurs papilles. Un geste dédaigneux du tatoué signifia à Selim qu'il pouvait servir, ce qu'il s’apprêta à faire, la bouteille en suspens au-dessus de la table « qui de ces deux gentlemen sera le goûteur ? » Demanda t-il, légèrement insolent.

( Pando )

Le petit serveur fait le malin devant toi. Bien trop souriant, ça te déplaît. T'aimes pas les gens souriants, ils ont toujours quelque chose à cacher, et souvent c'est pas du bon. Pour toi, les gens ne peuvent pas être heureux naturellement. Tu te rassois à ta table en ruminant. "Un problème Joseph ?" te demandes l'Écossais en face de toi. Putain, mais arrête de m'appeler Joseph nom de Dieu. Tu ravales ces mots qui t'auraient apporté plus préjudices que soulagement. "Les commandes arrivent." lâches-tu sèchement. Muirhead adopte un petit sourire satisfait, content que tu sois un si bon toutou. Ça à le don de te foutre en rogne de devoir obéir au doigt et à l’œil de cet abruti inintelligible. Oui parce que pour toi l'accent écossais est inintelligible, bien sûr. Comme si l'américain était plus compréhensible.


Tu aperçois le serveur revenir avec votre bouteille de vin sous le bras. Tu ne peux t'empêcher de lâcher un soupir de soulagement. Tu ne voulais surtout pas que Muirhead reparte sur le sujet des prix à la baisse. Tu laisses ça pour le dessert. Tu remarques que l'employé aux yeux clairs te scrute de part en part. Qu'est-ce qu'il me veut lui ? Mais il reprends vite ses esprits et posent vos deux verres sur la table. "La maison s'excuse pour le temps d'attente, et vous offre un digestif en fin de repas au bar pour se faire pardonner." Tu grimaces. "J'espère que vous servez pas que du whisky." Muirhead te lance un regard noir que tu ignores royalement en te penchant plutôt sur l'étiquette que te présente le garçon de salle. Tu esquisses un sourire, très léger, à peine discernable, un léger mouvement de la commissure droite de ta lèvre. Il a du goût. L’Écossais acquiesce. "Tu nous a dégoté un serveur de grande classe, Joseph." Encore ton prénom complet. C'en est infernal. Tes jointures se blanchissent très légèrement, ce qui fait sourire Muirhead bien évidemment. "Qui de ces deux gentlemen sera le goûteur ?" Tu lèves tes yeux noisette sur le jeune homme bien trop souriant. "C'est moi". Tu attends patiemment qu'il te serve, regardant ses gestes tout en finesse. Tu attrapes le verre et le vide, d'une traite. Muirhead te dévisage avec dégoût. "Il est bon." "Tes bonnes manières se sont vite estompées." C'est à ton tour de dévisager l’Écossais. L'ambiance doit être très étrange vu de l'extérieur. "Tu en as dans ta barbe Joseph. Ça goûte sur ton cuir." Tu lâches un rire sarcastique en constatant les petits tâches bordeaux tâcher légèrement tes patchs. "Eh bien, notre nouvel ami va me conduire aux sanitaires pour que je puisse essuyer ceci." Tu lèves à nouveau de la table en attrapant le serveur par l'épaule. "Tu vas me montrer où c'est, hein ?"

Tu attends d'être assez loin de la table pour arrêter le jeune homme. "Écoute ce que j'ai à te dire et ne pose pas de questions." Le regard n'est plus sarcastique ou riant. Tu fais preuve d'un sérieux détonant par rapport aux minutes précédentes. Tu saisis une petite fiole qui traînait dans ta poche. Un liquide aux nuances ambré se balade dans le petit objet que tu places soigneusement dans la paume de ton nouveau "complice" inattendu. "Tu vas mettre ceci dans le haggis de mon ami, à l'abri des regards." Tu ne le quittes pas des yeux, refermant soigneusement sa main sur la fiole. "Si quelqu'un l'apprend, considère-toi comme mort." Le ton est dur, glacial, tranchant. "Si tu réussis, attends-toi à plus que 50 gallions de pourboire." Tu lâches sa main pour saisir son torchon afin d'essuyer partiellement le vin qui tâche tes vêtements et ta barbe, avant de le reposer soigneusement sur son bras. Tu commences à revenir vers Muirhead, priant tous les Dieux pour que tu aies fait assez peur au jeune homme pour qu'il t'obéisse.

( Pando )

« j'espère que vous ne servez pas que du whisky » Selim sourit, l'air tranquille en débouchant la bouteille. « J'ai une grande diversité d'alcool qui saura, j'en suis certain, vous ravir. » L'égyptien faisait son possible pour alléger l'ambiance autour de cette table, bien qu'il aurait pu parler à un mur que c'en était du même acabit. Il servit un fond de vin dans le verre du colosse à l'accent américain, haussant un sourcil en se pinçant les lèvres pour ne pas sourire à ses gestes brusques, sa façon si peu protocolaire de goûter un bon vin. Son collègue le lui fait remarquer d'ailleurs. Selim jugea bon de ne pas s'en mêler, et servit silencieusement le vin dans chaque verre, essuya la bouteille d'un geste habitué et la posa entre les deux hommes, gardant le dos bien droit, les yeux suivant néanmoins le goutte à goutte du Merlot sur le cuir du blond. « Eh bien, notre nouvel ami va me conduire aux sanitaires pour que je puisse essuyer ceci. » Ça y est, il va me casser la gueule, c'est sur, t'es fini Selim. Le serveur inspira discrètement, gonflant les poumons en souriant pour ne pas paraître catastrophé par la poigne sur son épaule. « Mais bien sûr, veuillez me suivre s'il-vous-plait. » Selim prit la direction des sanitaires, passant l'angle de la salle pour le mener vers le couloir. Jouant le tout pour le tout, Selim fit un petit mouvement de tête vers leur table en parlant avec légèreté « pas commode, votre ami, on dirait ! » Peut-être que s'il arrivait à le dérider, le colosse cognerait moins fort.

Selim sentit la poigne se refermer sur son épaule pour l'obliger à s'arrêter. « Écoute ce que j'ai à te dire et ne pose pas de questions. » Il leva ses yeux verts pour observer le regard dur et sérieux de l'américain, un frisson parcourant son échine lorsque le froid de la fiole touche tes doigts, refermé par la force. « Tu vas mettre ceci dans le haggis de mon ami, à l'abri des regards. » C'est pas toi, qui vas mourir ce soir, mon pauvre vieux... « Si quelqu'un l'apprend, considère-toi comme mort. Si tu réussis, attends-toi à plus que 50 gallions de pourboire. » Se glisse dans le regard vert d'habitude narquois et rieur de Selim beaucoup de sérieux, pas mal de peur, et un peu d'insolence, qu'il laissa ressortir au travers d'une phrase marmonné à voix basse « Comme monsieur le désire... ». Si Selim avait appris une chose, en vivant dans les quartiers pauvre du Caire, puis de Londres, c'est que parfois, pour sauver sa peau, mieux valait ne pas poser de question. Selim garda la main fermée sur la fiole alors que son client reposait soigneusement le torchon sur son bras et retournait à sa place. Dès qu'il eu le dos tourné, l'égyptien soupira longuement, voûtant le dos en passant une main dans ses cheveux, fourrant la fiole dans la poche de son tablier. « Et voilà, Selim, encore une fois, tu te glisses dans des situations impossibles... » Soupira t-il en faisant demi-tour, affichant à nouveau un sourire (possiblement faux, ce coup-ci) en allant prendre une nouvelle commande.

La cloche de la cuisine sonna à nouveau, le cuisinier hurlant le numéro de la table en question. Sa table. Selim inspira longuement, allant chercher sa commande. Il prit les deux plats et les mena jusqu'au bar, ou il fit une pause. Ce qui était bien, sur une soirée comme celle-ci, c'est que personne ne prêtait attention au faire de leur collègues, trop occupés à gérer leur portion de salle. Surveillant chaque mouvement, chaque regard, Selim, les mains cachées par le comptoir, déboucha la fiole pour la déverser dans le haggis. Il attendit que le liquide disparaisse complètement dans la panse, remettant la fiole dans son tablier. Il se pencha légèrement pour sentir si on parvenait à reconnaître un quelconque problème, mais une panse de brebis restait une panse de brebis, même avec un liquide possiblement mortel à l'intérieur. Mais qu'est-ce que t'es en train de faire, pauvre vieux. Selim, comme à chaque fois qu'il faisait ce genre de choses, évita de trop penser chassant sa conscience d'un revers de main, transformant une possible anxiété sur son visage, en masque de bonne humeur dont il avait le secret, lui, le bout en train éternel. C'est confiant qu'il arriva à la table de ses deux convives pour les moins originaux dans ce genre de restaurant. Il posa d'abord la grande assiette contenant les deux burgers devant le barbu. « Le double American burger pour monsieur, et le haggis pour ce gentleman. » dit-il en posant l'assiette devant l'homme tatoué. Selim sourit légèrement à ses hôtes, « Un très bon appétit. » Avant de repartir sans un regard, surtout pas, pour le barbu.

( Pando )

« Comme monsieur le désire... » Bien. Tu lui as fait assez peur pour qu'il t'obéisse, du moins tu l'espères vraiment. Tu lui jettes un dernier regard avec de te diriger vers l'Écossais qui paraît s'impatienter. "Tu en as mis du temps." Tu ne répliques pas. Tu attends le moment propice pour mettre tes cartes sur table. Un prédateur qui attend le dernier moment pour attaquer, ce moment où la proie n'a plus aucune défense, aucune parade. Et tu pries pour que ce soit ce petit serveur qui t'apporte ce précieux moment sur un plateau d'argent.

Il ne faut pas bien longtemps avant que vos deux plats arrivent. Il pose délicatement les plats devant vos nez. Muirhead affiche un air consterné sur vos repas. "Les clichés ont la dent dure à ce que je vois." Un sourire narquois grime ton visage. Tu lèves alors les yeux sur le serveur qui vous souhaite un bon appétit. Un regard que tu veux entendu, dur, plein de sens pour le secret que vous partagez à présent. Mais il évite soigneusement tout contact visuel avec toi. Soit il t'a écouté, soit il t'a trahi. Muirhead commence son repas. Tu prends le risque de croire en ce serveur et prends une première bouchée dans un de tes hamburgers. Vous mangez en un silence religieux. Seuls les bruits de mastication acharnée viennent titiller vos oreilles. Pas un regard, pas un mot. Juste deux grands gars qui mangent leur repas. L'ambiance se mystifie de plus en plus. Les aiguilles tournent et ton anxiété monte de secondes en secondes. Tu attends les effets de la potion d'amnésie avec une impatience difficile à masquer. Et soudain, à quelques bouchées de la fin de son plat, Muirhead brise ce silence si anxiogène. "Pourquoi est-ce qu'on est venu manger ici déjà ?" Son regard est hagard, ses mots moins posés, moins confiants. Tu souris. De ce genre de sourire ou on peut y voir toute la malice et l'ingéniosité de ton plan. "Oh, tu sais bien Muirhead. De la livraison dans trois jours." Les yeux clairs de l'Ecossais s'illuminent soudain. "Ah oui. Tu peux me rappeler le prix aussi ?" Le serveur t'as obéis et tu ne peux que l'en remercier. Il vient de te rendre un très grand service, plus grand qu'il ne doit le penser.

Le reste du repas se passe sans encombre. Vous ne prenez pas de dessert, Muirhead se sent... vaseux. Vous vous quittez devant le bar, après qu'il t'ait donné la mallette contenant les trente-mille gallions convenus et qu'il ait réglé la note aussi. Tu comptes rester boire un verre, "un digestif" comme t'as promis le serveur. Tu guettes du coin de l'œil ses allers venus. Tu profites d'un moment de calme pour lui faire signe de s'approcher. Mais cette fois, ce n'est pas cette grimace d'ours que tu lui offres, mais un léger sourire placardé sur les lèvres. "Tu me dois un verre, si je me rappelle bien." Tu passes une main dans tes longs cheveux, la faisant glisser jusqu'à ta barbe. "Je prendrai un gin, j'en ai marre de votre whisky imbuvable." ricanes-tu.

( Pando )

Les minutes semblaient plus longue à Selim depuis qu'il avait donner son plat à l'homme tatoué assis en face du grand méchant loup. Il regardait parfois en direction de leur table (comme le ferait n'importe quel serveur pour vérifier qu'ils ne manquent de rien) sans pour autant s'en approcher. Malgré tout, l'heure devenait de plus en plus tardive et la salle se vidait peu ) peu, plongeant le restaurant dans cette ambiance un peu plus douce, lumières tamisées. Selim ne s'en formalisait pas, il y avait encore beaucoup de travail. Il jonglait entre les tables pour assurer une fin de service tout aussi efficace que le début, jusqu'à être à nouveau envoyé derrière le bar pour préparer les digestifs, ou les cocktails demandés.

Derrière son comptoir, le garçon était encore plus à l'aise. C'était ici qu'il avait l'habitude de travailler et il y avait ses habitudes. Néanmoins il fut rappeler sur la salle et c'est là que le tatoué l'interpela. Serrant les deux, l'égyptien s'approcha en silence, ses yeux verts fixés sur ceux (d'un possible tueur) du client. « tu me dois un verre, si je me rappelle bien. » Selim ne broncha pas. « Je prendrai un gin, j'en ai marre de votre whisky imbuvable. » Un sourire narquois se dessina sur son visage alors qu'il se penchait pour débarrasser le reste des couverts encore présent à sa table. Pas attendrit pour un sou du sourire que lui offrait l'homme, il ne prit pas la peine de le regarder pour lui répondre. « Je crois que je ne vous doit plus rien, après ce que j'ai fait pour vous. » Il avait parler à voix basse, une pointe de défi, de rébellion dans la voix. Selim, décidément, cherchait les problèmes. Il se redressa et parla plus fort, avec plus d'entrain. « Si monsieur veux bien me suivre au bar, nous y servons les digestifs afin de pouvoir libérer la salle. »

Sans un mot ou un regard de plus, Selim tourna les talons pour aller débarrasser une autre table puis poser le tout en cuisine. Il retourna derrière le comptoir du bar ou il se sentit plus en sécurité. Le grizzly qu'était son client ce soir ne tarda pas à le rejoindre, et il posa alors devant lui un très bon gin. « Je suis néanmoins d'accord. Le whisky est une invention du diable. » Selim figea ses gestes quelques secondes pour planter son regard dans celui de l'homme assis en face de lui. Il sondait son regard comme pour y trouver la réponse. Qu'avait t-il fait à ce pauvre homme. D'un côté, il n'avait aucune envie de le savoir, et s'il mourrait ce soir chez lui, Selim ne le saurait jamais. Mais de l'autre... « vous êtes pas mal imbuvable aussi, dans votre genre. » Pas un merci, de l'intimidation... Et Selim, lui, ne se disait pas qu'il ne fallait pas continuer à piquer à vif monsieur sous peine de se retrouver lui aussi avec un contenue de la fiole (voir pire) dans l'estomac.

( Pando )