La pochette plaquée contre lui, Mikhaïl marche d’un pas pressé dans les rues du quartier sorcier. Malgré son air souriant et avenant, il y a ce nuage sombre au-dessus de sa tête ; la préparation d’une tempête. Il vient de sortir du fameux détective privé employé par ses chers parents et il ne s’attendait pas à voir autant de clichés de sa vie privée, aussi bien certains anecdotiques que d’autres qui lui semblent comme une violation. Oh, il sait les tyrans des Blackthorn fourbes, incroyablement cruels et apprentis marionnettistes mais la vue de telles choses a réveillé en lui la haine qu’il tente de dominer. Si la perte de ses parents est un fantasme plaisant, il se refuse de brûler les étapes et donc condamner son entreprise à l’échec. Ses désirs sont sombres, mais sa patience est immense. C’est du moins ce qu’il se plaît à croire. Et il faut qu’il en soit ainsi, pour son bien et celui de ses frères, sœurs et cousins.
C’est d’ailleurs chez l’un de ces derniers qu’il se rend et il ne peut qu’imaginer le masque de dégoût qui prendrait le visage de Claudia si elle savait. Kaiden est l’âme rebelle, l’affranchi, qu’on jalouse parfois dans les enfants Blackthorn. Les tensions entre les deux cousins, les deux aînés, ont existé, Mikhaïl beaucoup trop obsédé par son devoir de Joker pour cautionner les agissements de Kaiden. Mais, en grandissant, évoluant, il comprend mieux et la rancune n’est plus que des brides de mauvaise foi et reliques de jalousie. Aujourd’hui, il est même persuadé qu’il est le seul à pouvoir pleinement comprendre sa situation. Il est aussi l’unique figure fraternelle plus âgé que lui, quelqu’un qu’il n’a pas à protéger de la barbarie de leur famille. Un refuge, aussi, un peu. Comme quand il l’avait aidé à croire les attirances dont il avait si peur. Alors, même s’il dompte son cœur reptilien, le Russe respecte et a une profonde affection pour son ainé. Tout être humain a une valeur particulière et pour Kaiden, c’est indéniablement la bienveillance qui règne dans son cœur. Caractéristique que Mikhaïl est heureux de ne pas partager.
Enfin, il arrive devant le logement. Son arrivée n’a été annoncée qu’à travers un message et sans réellement laisser le choix à l’hôte de refuser sa visite. Ce dernier n’a à peine le temps de promettre une part de tiramisu que le fourchelang frappe à sa porte. Quand celle-ci s’ouvre, il lui sourit : « Salut Kaiden. Désolé de m’imposer, surtout vu l’heure tardive mais j’ai quelque chose à te montrer. » Il s’invite dans les lieux, regardant par-dessus son épaule avec un sourcil courbé avant d’ajouter en montrant la pochette : « J’ai ici une nouvelle raison de haïr nos parents. » Mots étonnamment honnêtes, venant de lui, le si parfait Nullus, Joker des Blackthorn.


@kaiden blackthorn

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Sans réellement être honteux de son intrusion si précipitée, Mikhaïl adresse tout de même un sourire chargé d’excuses à Kaiden. Néanmoins la politesse est quelque peu dure à tenir quand sous son bras ce dossier le brûle presque. Il voudrait déjà l’ouvrir et exposer au grand jour ces clichés des plus dérangeants, mais son cousin fait preuve de sa preuve tranquille. Bien que le fourchelang lâche un soupire à la mention de se détendre, il suit les indications et va se fondre dans la cuisine. Le grand corbeau attire son attention et, l’espace d’un instant, il se prend à l’admirer. Ces créatures sont intelligentes, aussi curieuses que sages, de parfaits observateurs -certains diraient espions. Sous sa peau, un mouvement -Lady, son petit serpent tamnophis. Étrangement timide, elle pointe le bout de son museau pour voir l’oiseau de ses propres yeux. « Il ne va pas te croquer. » Murmure-t-il dans ses sifflements si particuliers pour rassurer sa bestiole méfiante. « Kaiden doit lui servir des festins de roi. »
Ce dernier rappelle alors l’attention à lui, donnant des ordres au corbeau. Cela arrache un sourire au Russe, se rappelant alors de cet autre point commun avec son ainé -leur aisance à communiquer avec leurs compagnons si particuliers.
Kaiden lui présente alors une bière ainsi qu’un plat de tiramisu, arrachant un sifflement impatient du plus jeune. C’est agréable, pour une fois, d’être celui dont on prend un peu soin. Celui dont on se souvient des détails comme son plat préféré et comment il le préfère. Un luxe auquel Mikhaïl s’efforce de ne pas s’habituer, car il doute que sa route soit fréquentée par des âmes aussi bienveillantes.
« Merci, Kaiden. Vraiment. » Sans se faire prier d’avantage, Mikhaïl se sert une part et en profite pour en donner une à son pâtissier personnel d’abord. Il accepte aussi la bière de bonne grâce, bien qu’habituellement peu adulateur de ce genre de boisson. Il en boit une gorgée, le liquide refroidissant et détendant sa gorge encore nouée de ses découvertes. Lady en profite pour se glisser hors de sa manche, bien que discrète pour ne pas attirer l’œil acéré de Beitris. Il rit à cette vue, puis se délecte d’une cuillérée. Son palais est plus que ravi de cette rencontre, après ces insipides buffets que qu’il a dû enduré aux dernières soirées mondaines. « A chaque fois j’oublie à quel point ton tiramisu est un don des dieux… J’en avais besoin. »
Un soupire, un retour aux affaires pressantes accentué par l’agitation du Grand Corbeau. Le dossier encore scellé à ses côtes, son œil devient lugubre. Son ongle vient le tapoter et il commence son récit. « Il y a quelques jours… J’ai intercepté cette lettre -purement par hasard je t’assure… » Regard entendu, peu de choses chez le Joker sont laissées au hasard. « C’était une lettre signée d’un détective privé, payé par Aloysius et Claudia. Ils m’ont espionné à mon insu pendant quelques semaines maintenant. Et dans cette lettre il y avait des photos de moi et… Et d’un autre étudiant. Une simple soirée d’Hungcalf, tu les connais ces soirées. J’ai tout brûlé et ce matin je suis allée voir le fameux détective pour qu’il arrête son enquête et j’ai récupéré ça. » Il tait les menaces, la baguette sous la gorge et quelques amis reptiliens aux crocs bien trop proches de la jugulaire.
Enfin, il ouvre le maudit dossier et en découle une myriade de photos de Mikhaïl, certaines sans intérêt et d’autres violant sans honte aucune sa vie privée. Mais il n’était pas le seul protagoniste, certains clichés représentaient le reste de la petite famille Blackthorn, les jours où ils avaient le malheur de croiser la route du Joker.


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( Pando )

La douceur du tiramisu sur ta langue ne peut défaire le goût amer venu se loger sur ton palais. Toi qui avais joué le parfait pion pour endormir les soupçons, voilà que tes propres parents se fassent joueurs insolents. Une colère froide s’invite alors en toi, ainsi que cette pointe dans ta poitrine, à l’inconfort agréable. Celle qui née en toi quand tu te sens provoqué, défié. Elle te stimule autant qu’elle peut te faire tourner la tête, et c’est la lutte en toi pour garder le contrôle qui te procure tant de plaisir. Jouer avec le feu. Se brûler, mais être le dernier debout dans la pluie de cendres. C’est une lutte qui se fait dans la durée, dans la patience et Merlin sait à quel point la chose est rendue difficile quand l’arène est plongée dans un incendie infernal. Mais cette fois, tu sais à quel point l’enjeu est grand et ce qui peut s’écouler au moindre faux pas ; alors tu subis en restant de marbre et te tourne vers tes rares alliés. Autant pour les protéger que pour les utiliser.
Avec un ton si posé pour ton tumulte intérieur, tu décris les raisons de ta visite. Un regard vers le front sombre Kaiden t’indique que les révélations sont loin de lui plaire ou lui être indifférents, surtout quand les photos dévoilent l’intimité violée du reste de leur famille. « Détective » est un mot qui touche une corde sensible, tu le sens à la tension qu’il crée sur les traits de ton ainé. Ses mots s’accordent à son expression, et un sourire narquois nait sur ton visage. « C’est étrange, parce que personnellement, cela ne m’a pas étonné outre mesure. Juste le fait de demander une enquête aussi poussée… » Un soupire s’échappe de tes lèvres alors que lui prend son visage dans les mains. Le corbeau, déçu face à ce qui lui était présenté, s’envole pour aller se percher plus loin. Lady se sent plus soulagée et va se perdre dans la multitude de photographies. Enfin, il reprend la parole, un sourcil levé quand Kaiden demande si tu es capable de tromper un détective. « Tu doutes de moi ? J’ai déjà fait en sorte qu’ils ferment les yeux quelques instants, juste pour me laisser le temps de trouver un subterfuge. » Tu prends une nouvelle bouchée, t’accordant quelques secondes pour profiter de la saveur. « Je n’ai pas pris toutes les photos. J’en ai laissé, les plus inoffensives, celles où vous n’êtes pas et quelques-unes où je ne suis pas trop parfait. Pour ne pas nous trahir. Il va les envoyer sous peu, avec une lettre indiquant qu’il souhaite clore son travail avec eux d’ici quelques jours -urgence familiale et un besoin de retourner à Brighton, ce sera ça ses excuses. » Claudia verrait immédiatement la mascarade si tout ce qui lui était présenté n’était pas objet à un léger scandale. Ainsi, on peut voir un cliché où tu es bien trop proche d’une femme mariée et une autre où tu sembles préférer la brûlure de l’alcool au savoir d’une salle de conférence. « Dans le meilleur des cas, j’aurai le droit à quelques piques autour de la table et dans le pire à une énième tentative de fiançailles surprises. Mais vous devriez être saufs, je n’ai rien laissé qui pourrait vous mettre en danger. » T’es trop bon pour ce monde, pas vrai Mikhaïl ? Ta joue contre ton poing, tu observes les yeux mi-clos ton cousin. Puis c’est l’honnêteté qui parle, un court instant. « Si tu savais à quel point j’ai hâte qu’ils crèvent. »

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Ta patience est une de tes rares qualités. Même provoqué, tu laisses le temps faire son œuvre et tu perfectionnes ta main avec minutie. Néanmoins, à l’image de ton patronus, être impétueux en te menaçant peut te pousser à mordre et laisser derrière une plaie gorgée de venin. Et les agissements de tes parents te font espérer que ta patience paiera et que tu ne regretteras pas de ne pas avoir mis un terme ici et maintenant à leur règne. Les conséquences seraient lourdes, oui, pour toi mais aussi ta fratrie -et puis tu serais d’une imprudence insolence d’attaquer ainsi de front. Au moins échanger sur le sujet avec Kaiden te permet de ne pas ruminer et de t’assurer de laisser s’échapper un peu de fumée.
Ton cousin commente, et déclare -à raison, que si ça se savait, ils perdraient la face dans le monde des familles de sang-pur. Tu te dois d’acquiescer, bien que tu aies la triste certitude que ton cas ne soit pas si exceptionnel que ça. « J’imagine que c’est pour ça qu’ils ont été si discrets, heureusement pour moi j’ai appris à les connaître sur le bout des doigts. » Tu expliques ensuite comment tu as géré la situation jusque là et les quelques répercutions que tu attends des bouts de miette que tu leur as laissé. Reconnaissant, tu hoches la tête quand il dit être prêt à t’aider à te couvrir ou faire sauter d’éventuelles fiançailles. « Merci Kaiden. Je sais que tu tiendras parole. » Tu doutes néanmoins pouvoir échapper longtemps à la bague au doigt, au vu de ta position dans ta famille, mais la perspective d’un mariage ne te révulse pas. Tes seules espérances sont que ce ne soit pas avec une de tes cousines et que ta dulcinée ne sera pas d’un ennui mortel.
Les mots qui franchissent la bouche de Kaiden te font alors rire. Mais ton rire n’est pas de bon cœur, il est sombre, amer et empli de désillusion. Si ton rictus est narquois, ton œil est d’une grande froideur. « Kaiden, Kaiden, Kaiden. J’avais une famille. J’avais un père et une mère. Ils ne m’ont pas recueilli, ils m’ont acheté. Mais je ne vais pas t’en vouloir de ne pas savoir, je me doute bien qu’ils ont dû inventer une bien jolie histoire pour dire que mon pauvre père a sombré dans la magie noire et que ma mère se laisse mourir d’une terrible maladie n’est-ce pas ? » Avouer à tous et à toutes que leur aîné n’est rien d’autre qu’une marchandise volée, ça ferait tache. Non, il faut faire croire qu’ils ont fait preuve de charité et que leur geste était désintéressé. Il fallait dire que Claudia se désespérait d’un fils, et que le petit et miséreux Mikhaïl se trouvait là comme un miracle des cieux. Et que c’est ainsi que le couple a décidé d’adopter toutes les petites âmes en peine -tant que leur sang était aussi noble que le leur. Tout n’est que bonté dans cette famille.
Non, ta libération sera le jour de leurs morts. Ce sont tes plus sombres désirs. Néanmoins, tu n’expliques pas plus, écoutant les idées de Kaiden -ton visage alors devenu froid et plus calculateur. Il explique que ça recommencera, inévitablement, mais qu’acheter tous les espions de la ville serait impossible. Tu hoches la tête. « Il ne faut pas tous les acheter, mais acheter les bons. Tu l’as dit, ils ne veulent pas que ça se sache pour ne pas entacher leur réputation et perdre de leur influence. Ils vont donc faire appel qu’à quelques-uns, et l’idéal serait que leur choix porte sur celui ou ceux qu’on aura préparé pour eux. C’est risqué, mais au moment où je te parle, ils ne savent pas encore qu’ils n’ont plus de détective sous leur botte. On a un coup d’avance. »

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Fils indigne, c’est maintenant le complot qui dicte tes mots. Et pour ne pas laisser la froideur gagner pleinement ton cœur, la présence de Kaiden est un réconfort. Plus modéré, enclin à la discussion et prudent, il est sans aucun doute le plus humain et chaleureux de vous deux. Il te faut cela. Pour ne pas céder à la pression constante. L’envie de tout laisser tomber, se libérer du poids d’Atlas. Il te rassure, te met en garde. Ne deviens pas comme eux, t’as le rictus triste -peut-être est-il déjà trop tard. Mais toi, t’as encore un peu d’amour. Venimeux, certes, pas toujours très sain, mais tu sais ce que c’est, de vouloir voir ses proches s’épanouir, d’avoir de réels alliés et pas simplement des pions sur un échiquier.
Bien vite, la conversation ravive rancune et cicatrices. De vagues mirages voilent ton regard, où ta mère, celui qui t’a mis au monde, te murmure ces mots : « tu dois me promettre, promets-le, que tu ne deviendras pas leur pantin. ». Ils ont guidé ta vie, t’ont sauvé d’un terrible lavage de cerveau. Ils t’ont fait tenir malgré les insultes, les coups, des heures passés à genoux bras tendus devant toi dans la cour du manoir en tout temps. Ils les ont empêchés d’entièrement te briser. Alors tes paroles se font acerbes quand tu annonces la vérité, constatant leur effet sur le visage de ton cousin. Face à sa stupéfaction, ton expression s’adoucit. « Tu n’as pas à t’excuser, tu ne savais pas. Je me sais meilleur qu’eux, j’ai réussi à élever mes frères et sœurs à leur place. Je ne pense pas qu’ils auraient été capables de faire en sorte qu’Eliott sache à peu près se tenir en société… Et me parle pas de Kiran, c’est une autre histoire. » Tu plaisantes, chassant ainsi le sujet de ton adoption. Ce n’est pas l’affaire du jour. Tes pensées sont déjà bien sombres ainsi.

Ainsi, vous réfléchissez à comment cibler les bons détectives. Kaiden évoque la potentielle existence d’une liste. Tu hoches la tête, pensif. « Je n’ai pas vu la mention d’autres noms dans leurs lettres. Même avec leurs amis proches, donc j’imagine qu’ils doivent vraiment tenir à garder le secret sur cette pratique. D’habitude ils aiment les longues déclarations pour montrer à quel point ils mènent leur famille d’une main ferme, ils s’attribuent le moindre de nos mérites. » De nouvelles pistes sont amorcées, un coffre-fort, leurs papiers confidentiels. Ton cousin avoue son impuissance pour fouiner, ce qui ne t’étonne pas. Il a toujours cette jalousie qui vient parsemer votre relation, être affranchi serait si agréable. Mais tu tais cela, tu es le Joker et il te faut jouer ce rôle. Et il est bien plus excitant… Être celui qui sabote de l’intérieur, un imposteur des plus prometteurs. « C’est vrai que te voir dans le bureau privé de ton oncle serait des plus suspects. » Ironises-tu. « J’imagine qu’il faudra que je profite d’une quelconque réception… » Tu réfléchis encore un peu, une ébauche de plan te vient mais tu fronces les sourcils. « Et je peux déjà commencer à me renseigner pour créer le parfait profil de détective pour eux. C’est vrai qu’ils voudraient quelqu’un de fiable, mais ils savent aussi que parfois un infiltré est plus efficace, quelqu’un qui serait vraiment dépendant d’eux et donc plus simple à manipuler… Un étudiant en Justice magique, comme moi, qui voudrait absolument bien se faire voir de mes parents lors d’un quelconque stage… Un garçon sans nom d’apparence facile à manipuler, avec qui Aloysius pourrait prétendre être un peu paternel. C’est risqué, mais ce serait parfait. S’il est enclin pourquoi pas le séduire un peu, pour éviter qu’il ne change de camp. Parfois c’est plus efficace que de l’argent. » Tu pouffes un peu, te doutant des potentiels remontrances de ton cousin sur le dernier point que tu évoques.

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Les inquiétudes de tes proches, tu les entends et les comprends. Ils ont peur que tu deviennes la copie parfaite de tes parents, un modèle élitiste et complotiste, prêt à sauter à la gorge de la moindre proie qui passerait sur ton chemin. Et dans un sens, oui, tu leur ressembles ; pas comme une simple réplique mais comme un miroir. D’apparence, copie carbone mais en réalité toute est inversé ; là où pour eux la famille est un instrument, pour toi elle est une finalité, là où pour eux le pouvoir est le gain, pour toi il n’est qu’outil. Oh, tu t’y complais et tu t’amuses à jouer les charmeurs de serpents mais tu en connais aussi la futilité.
Un soupire s’empare de ta gorge et Lady s’enroule autour de tes doigts, alors que tu laisses ton orgueil parler sur un ton de plaisanterie. La réponse de Kaiden te fait glousser, t’imaginant en père formidable. « Que Merlin m’en garde, Kaiden, que Merlin m’en garde. » Tu secoues légèrement ta tête à l’idée, presque inconcevable pour le moment. Tu y as déjà pensé, tête de file dans la liste des héritiers, mais souvent tu rends tes pensées muettes -trop de scénarii sur un futur hypothétique peuvent être contreproductifs pour tes plans sur le présent. Notamment sur le problème qui vous préoccupe aujourd’hui.

Tu hoches la tête quand il résume la situation. Vous avez quelques temps de battement avant qu’un nouveau détective fasse son entré, mais cette fois vous serez préparé. L’idée de profiter d’une réception jaillie, parfait pour se faufiler dans le bureau privé du grand manitou et trouver de quoi compromettre ses plans. Kaiden s’excuse par avance du fait qu’il ne pourra pas faire mieux que le guet, mais tu chasses ceci d’un revers de main : « Avoir un allié dans la salle est déjà un avantage énorme. Et comme tu le dis, tu pourras garder Aloysius hors de son bureau, ce sera déjà une grande menace en moins. Et puis on pourra utiliser Lady pour nous aider. Il faudra faire aussi attention à Claudia… Elle a tendance à se déplacer sans qu’on l’entende arriver. » La fourberie est une qualité qu’elle aime particulièrement mettre en avant quand les regards sont tournés.
Réfléchissant à voix haute, tu laisses tes réflexions s’enchaîner et dessiner une esquisse du parfait détective pour servir ta cause. Alors que les mots s’enchainent, ton cousin montre son inquiétude sur un point : le fait de séduire votre pantin. Avec un air faussement offensé à la mention de vendre ton corps, tu places une main devant ta bouche. « Ciel, Kaiden ! » Un rire et tu reprends ton air habituel. « Je parle juste de séduire, pas de consommer quoi que ce soit. Entretenir le doute. Je sais que ce n’est pas très sain, mais promis, je ne briserai pas un joli cœur si ce n’est pas absolument nécessaire -et puis, ce n’était qu’une hypothèse. Je préfère envisager toutes les possibilités. Et si jamais il tente de faire du chantage… J’aurai aussi de quoi riposter. » Tu te veux confident dans tes mots, sachant très bien que tout ce que tu énonces ne plaira pas à ton ainé, mais à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. Il exprime son approbation pour le reste du profil que tu dresses de votre détective imaginaire et te demande si tu as un nom en tête. À ce moment, tu annonces ton problème : « pour le moment, malheureusement non. Les seuls noms que j’ai sont soit trop proches de quelques Blackthorn pour que je risque quoi que ce soit ou alors attaché à une autre famille, ce qui pourrait provoquer un conflit d’intérêts. Ce qui pourrait devenir contre productif. » Un soupir. « Il va falloir que je fasse du repérage, mais même si on a un temps mort devant nous, on doit quand même être efficace. » Tu hoches la tête et te redresses légèrement, le front soucieux. Laissant Lady glisser hors de la paume, tu entreprends de mettre de l’ordre dans les documents que tu as emmenés ici. « Est-ce que je peux te laisser les preuves ici ? Ce ne sera pas le premier endroit où ils iront chercher et on devrait les garder un peu au chaud au cas où, même si j’ai très envie de les détruire maintenant. Je ne vais pas tarder à y aller je pense, malheureusement je dois les voir ce soir. » Un air dépité traverse ton visage, et tes yeux se lorgnent sur la dernière bouchée de tiramisu qu’il te reste. Tu la savoures, l’œil passant sur le corbeau toujours perché et tu te demandes même si tes parents seraient assez fous pour utiliser des animaux comme espion. Parce que toi, tu l’es.

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