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[Avril 2021] Les enfants curieux
Sam 17 Avr 2021 - 17:58
L’enseignante sentait le regard l’effleurer sans avoir encore l’intention de relever les yeux pour mettre fin à la timidité de l’étudiant installé à une des terrasses d’un café bordant la place centrale d’Inverness.
Elle avait pris racine voilà plusieurs heures sur un petit muret de pierre qui longeait les quais de la ville, son argentique lové entre ses cuisses croisées en tailleur. Le vent espiègle qui s’immisçait à travers ses vêtements lui faisait déjà regretter de ne pas avoir convié à sa ballade son cardigan à grosses mailles, mais elle avait suffisament échouée à négocier avec les nuages pour risquer de louper l’éclaircît tant attendue — qu’elle espérait assez ponctuelle pour ne pas venir tout gâcher. Comme toujours lorsqu’il était question d’alimenter sa patience, la photographe sirotait sa boisson de prédilection dans un grand Thermos d’un bleu roi, au moins deux fois trop grand pour ses petites mains. La paille crépitait légèrement sous l’effet de l’air et du liquide qu’elle aspirait, sans jamais dévier ses prunelles de cette horizon timide qui refusait encore avec paresse de s’exécuter. Si elle était chanceuse et avait bien su décortiquer le bulletin météorologique qui se notifiait scrupuleusement chaque matin sur son smartphone, et qu’elle lisait tout aussi scrupuleusement, les yeux encore engourdis par les chimères de Morphée, il allait y avoir sous peu une magie un peu particulière. Une magie d’un tout autre genre, un peu déroutante parce que scientifiquement expliquée, mais tout aussi charmante que les sortilèges les plus poétiques. Alors qu’elle avalait de l’air d’un énième mouvement d’aspiration, témoignage ostensible qu’il n’y avait plus que du carton à déguster depuis bien longtemps, la photographe retira consciencieusement l’opercule de caoutchouc qui recouvrait son verre, puis entreprit de faire glisser les glaçons dans le creux de sa main. Ce choix de boisson avait de quoi rendre perplexe en cette saison encore pleine de courant d’air et de baisses insidieuses de température : on s’attendait plus à une breuvage chaud qu’à un sirop et de l’eau gazeuse faisant flotter des dizaines de cubes glacés. Toujours éperdue dans sa contemplation de la progression de ce qui devait être un porte-conteneurs s’aventurant à rejoindre les mers du Nord, la jeune femme porta à ses lèvres les concentrés d’Iceberg, qu’elle croqua tout en plissant son nez moucheté de taches de rousseurs. C’était froid. Mais, si elle n’était étrangement pas le genre de personnalité à se bétonner dans des habitudes, il y avait une certaine religion à respecter lorsqu’elle se mettait en chasse. Et la sensation râpeuse, un peu brûlante, des carrés givrés contre son palais en faisait curieusement partie. Immédiatement suivi par la légère sensibilité de l’émail de ses dents attaquant la glace, exacerbant sa concentration en même temps que sa grimace. Si la caféine avait une action stimulante retardée, le froid était saisissant instantanément.
Et alors que la présence se faisait plus forte dans son dos et que des bruits de pas enfin aventureux semblaient venir investir son territoire, un sourire plein de satisfaction s’étala brusquement sur les lèvres de la photographe. D’un mouvement agile, elle exerça une pression souple de ses chevilles et talon sur le muret, se relevant d’un bond gracile. L’instant d’après, elle s’était laissée glisser sur les genoux à même le sol, et, la murette rocheuse en guise de trépied et les coudes solidement enfoncés entre deux aspérités, Aveleen avait vissé son œil derrière l’objectif à grand angle. Elle avait choisi la plus courte focale et cela nécessitait une ultime concentration pour correctement cadrer — afin d’éviter aux mieux les aberrations de courbure de champs périphériques. Elle savait déjà que de longues heures de corrections informatiques lui seraient nécessaires pour ajuster les aberrations chromatiques latérales, quoi que minimes.
— Dans ma machine qui vole, qui vole, s’envole... fredonna-t-elle pour elle-même, alors que le cargo dont elle suivait la progression jusque-là semblait soudainement flotter dans une dimension propre, surgit de nulle part, coincé entre le ciel nébuleux et l’océan agité. La deuxième étoile à droite et tout droit jusqu’au petit matin, souria-t-elle largement, profondément émue, en mitraillant la curiosité météorologique dans un cliquetis caractéristique.
Lors d’un de ses voyages en Arctique, la photographe avait eu la chance de tomber sur ce mirage supérieur d’un potentiel photographique grisant, plus fréquent à ces latitudes. Une inversion des courants d’air chaud et d’air froid, lequel se retrouvant plaqué tout contre la mer, donnait l’impression étrange que les bateaux naviguaient en dessous de la ligne de l’horizon, comme des fantômes... Ce qui, pour l’œil humain, facilement distrait et naïf, laissait croire que les navires se mettaient à flotter dans le ciel, poussés par des ailes imaginaires et des courants ascendants jusqu’à tutoyer les nuages. Le phénomène était bien plus rare en Ecosse et Aveleen bouillonnait de contentement d’avoir eu un bon pressentiment, et assez de chance surtout pour le saisir. Le spectacle était tout simplement magique.
— J’ai bientôt fini, Monsieur Leroy, informa-t-elle d’une voix calme, contenant mal son excitation, sans se retourner sur son curieux observateur dont elle sentait sans voir la présence juste derrière elle.
Elle gratifia l’envolée trompeuse d’une nouvelle salve de cliquetis, avant de se relever, son précieux objectif dans les mains, une sangle enroulée autour de son poignet gauche, étouffant un frisson. Elle était gelée, à présent. Mais satisfaite. Et ça valait bien toutes les laines oubliées, les joues rosies et la voix enrouée qui ne manquerait pas de la transformer en baryton le lendemain.
— Maintenant que j’ai assouvi ma curiosité, je vais vous laisser tout le loisir de faire de même, fit-elle, sa voix dénuée de la moindre trace de remontrances, carillonnant d’un nouvel intérêt : Vous vouliez me parler de quelque chose en particulier ?
@Maximilien Leroy
Elle avait pris racine voilà plusieurs heures sur un petit muret de pierre qui longeait les quais de la ville, son argentique lové entre ses cuisses croisées en tailleur. Le vent espiègle qui s’immisçait à travers ses vêtements lui faisait déjà regretter de ne pas avoir convié à sa ballade son cardigan à grosses mailles, mais elle avait suffisament échouée à négocier avec les nuages pour risquer de louper l’éclaircît tant attendue — qu’elle espérait assez ponctuelle pour ne pas venir tout gâcher. Comme toujours lorsqu’il était question d’alimenter sa patience, la photographe sirotait sa boisson de prédilection dans un grand Thermos d’un bleu roi, au moins deux fois trop grand pour ses petites mains. La paille crépitait légèrement sous l’effet de l’air et du liquide qu’elle aspirait, sans jamais dévier ses prunelles de cette horizon timide qui refusait encore avec paresse de s’exécuter. Si elle était chanceuse et avait bien su décortiquer le bulletin météorologique qui se notifiait scrupuleusement chaque matin sur son smartphone, et qu’elle lisait tout aussi scrupuleusement, les yeux encore engourdis par les chimères de Morphée, il allait y avoir sous peu une magie un peu particulière. Une magie d’un tout autre genre, un peu déroutante parce que scientifiquement expliquée, mais tout aussi charmante que les sortilèges les plus poétiques. Alors qu’elle avalait de l’air d’un énième mouvement d’aspiration, témoignage ostensible qu’il n’y avait plus que du carton à déguster depuis bien longtemps, la photographe retira consciencieusement l’opercule de caoutchouc qui recouvrait son verre, puis entreprit de faire glisser les glaçons dans le creux de sa main. Ce choix de boisson avait de quoi rendre perplexe en cette saison encore pleine de courant d’air et de baisses insidieuses de température : on s’attendait plus à une breuvage chaud qu’à un sirop et de l’eau gazeuse faisant flotter des dizaines de cubes glacés. Toujours éperdue dans sa contemplation de la progression de ce qui devait être un porte-conteneurs s’aventurant à rejoindre les mers du Nord, la jeune femme porta à ses lèvres les concentrés d’Iceberg, qu’elle croqua tout en plissant son nez moucheté de taches de rousseurs. C’était froid. Mais, si elle n’était étrangement pas le genre de personnalité à se bétonner dans des habitudes, il y avait une certaine religion à respecter lorsqu’elle se mettait en chasse. Et la sensation râpeuse, un peu brûlante, des carrés givrés contre son palais en faisait curieusement partie. Immédiatement suivi par la légère sensibilité de l’émail de ses dents attaquant la glace, exacerbant sa concentration en même temps que sa grimace. Si la caféine avait une action stimulante retardée, le froid était saisissant instantanément.
Et alors que la présence se faisait plus forte dans son dos et que des bruits de pas enfin aventureux semblaient venir investir son territoire, un sourire plein de satisfaction s’étala brusquement sur les lèvres de la photographe. D’un mouvement agile, elle exerça une pression souple de ses chevilles et talon sur le muret, se relevant d’un bond gracile. L’instant d’après, elle s’était laissée glisser sur les genoux à même le sol, et, la murette rocheuse en guise de trépied et les coudes solidement enfoncés entre deux aspérités, Aveleen avait vissé son œil derrière l’objectif à grand angle. Elle avait choisi la plus courte focale et cela nécessitait une ultime concentration pour correctement cadrer — afin d’éviter aux mieux les aberrations de courbure de champs périphériques. Elle savait déjà que de longues heures de corrections informatiques lui seraient nécessaires pour ajuster les aberrations chromatiques latérales, quoi que minimes.
— Dans ma machine qui vole, qui vole, s’envole... fredonna-t-elle pour elle-même, alors que le cargo dont elle suivait la progression jusque-là semblait soudainement flotter dans une dimension propre, surgit de nulle part, coincé entre le ciel nébuleux et l’océan agité. La deuxième étoile à droite et tout droit jusqu’au petit matin, souria-t-elle largement, profondément émue, en mitraillant la curiosité météorologique dans un cliquetis caractéristique.
Lors d’un de ses voyages en Arctique, la photographe avait eu la chance de tomber sur ce mirage supérieur d’un potentiel photographique grisant, plus fréquent à ces latitudes. Une inversion des courants d’air chaud et d’air froid, lequel se retrouvant plaqué tout contre la mer, donnait l’impression étrange que les bateaux naviguaient en dessous de la ligne de l’horizon, comme des fantômes... Ce qui, pour l’œil humain, facilement distrait et naïf, laissait croire que les navires se mettaient à flotter dans le ciel, poussés par des ailes imaginaires et des courants ascendants jusqu’à tutoyer les nuages. Le phénomène était bien plus rare en Ecosse et Aveleen bouillonnait de contentement d’avoir eu un bon pressentiment, et assez de chance surtout pour le saisir. Le spectacle était tout simplement magique.
— J’ai bientôt fini, Monsieur Leroy, informa-t-elle d’une voix calme, contenant mal son excitation, sans se retourner sur son curieux observateur dont elle sentait sans voir la présence juste derrière elle.
Elle gratifia l’envolée trompeuse d’une nouvelle salve de cliquetis, avant de se relever, son précieux objectif dans les mains, une sangle enroulée autour de son poignet gauche, étouffant un frisson. Elle était gelée, à présent. Mais satisfaite. Et ça valait bien toutes les laines oubliées, les joues rosies et la voix enrouée qui ne manquerait pas de la transformer en baryton le lendemain.
— Maintenant que j’ai assouvi ma curiosité, je vais vous laisser tout le loisir de faire de même, fit-elle, sa voix dénuée de la moindre trace de remontrances, carillonnant d’un nouvel intérêt : Vous vouliez me parler de quelque chose en particulier ?
@Maximilien Leroy
- Maximilien LeroyMODO - french style ♔ sweet golden boy
- » parchemins postés : 8266
» miroir du riséd : francisco lachowski
» crédits : wcstedrose (ava)
» multinick : arty / joe / keir
» âge : vingt-huit ans
» situation : en couple
» année d'études : 10ème année
» options obligatoires & facultatives : ♔ options obligatoires : histoire de la magie, sciences politiques magiques, médias moldus et sorciers. ♔ options facultatives : métamorphose, sortilèges et enchantements.
» profession : chroniqueur à la Chouette Enchaînée
» particularité : animagus
» nature du sang : sang-pur
» gallions sous la cape : 8292
Inventaire Sorcier
Inventaire Sorcier:
Re: [Avril 2021] Les enfants curieux
Dim 25 Avr 2021 - 12:28
Les enfants curieux ft. @Aveleen O’DonnellC’est instants curieux qui font les rencontres, Maximilien n’en a pas vécu tant. Il apprend à faire sa vie comme il l’entend et l’exercice n’est que rarement aisé. Le repos est donc mérité pour le guerrier français qui panse encore ses plaies récentes. S’immiscer dans le monde moldu et s’y perdre pendant quelques heures fait partie de ses passe-temps et il aime se promener dans les rues d’Inverness avec pour seul but de ne rien faire de particulier. Pas de prévision, pas d’attente particulière… Le sorcier se laisse juste porter par le moment, les discussions, les sons et ces douces éclaircies dont l’Écosse se teint depuis peu de temps. Peut-on passer sa vie à ne faire que cela ? Après s’être promené sans intention particulière, le jeune homme s’arrête à un café où il s’installe, seul à une table. Cette solitude publique ne le gêne nullement et il commande un café, trouvant du réconfort dans cette pratique qui lui rappelle la France de façon nostalgique. La tasse à la main, son regard parcourt les passants, les badauds, les promeneurs inconscients. Ses yeux s’arrêtent sur une silhouette qu’il connaît, sorcière parmi les moldus. Son appareil l’accompagnant, il ne doute pas un seul instant qu’il se trouve en présence de l’un de ces moments où une toute autre sorte de magie se produit : celle de la création artistique. Maximilien l’observe un long moment, sûrement bien trop d’ailleurs, curieux de voir le prochain mouvement de l’enseignante et de son objectif sur ce muret : car elle en a forcément un, il en est persuadé. Il envisage un nombre incalculable de fois de venir la déranger, mais la simple idée de s’immiscer dans son processus de création le paralyse à sa table. Il finit pourtant son café et en voyant que rien ne change, le Français prend son courage à deux mains pour aller ne serait-ce que la saluer poliment. Il a bien en tête quelques compliments qu’il a toujours voulu lui adresser concernant ses œuvres, mais qui n’ont jamais trouvé le bon timing pour être formulée à voix haute. Ses pas le rapprochent d’Aveleen et elle se redresse alors pour se mettre en position de prise photographique. Maximilien s’arrête aussi sec. Son regard se porte tout d’abord sur l’appareil, avant de tenter de discerner son objectif. C’est cela qui lui fait remarquer le mirage à la surface de l’horizon, dont les couleurs et les effets ont une touche de magie indéniable. Le Summerbee se laisse happer par cette contemplation, ne faisant désormais que peu attention à l’enseignante ou à ses techniques - ce qui, pourtant, l’intéressait plus que tout au départ. Il revient à lui alors qu’elle prononce son nom, le faisant aussitôt rougir de honte d’avoir ainsi été démasqué. Mais il ne peut plus revenir en arrière désormais et ne le souhaite pas. Patient, l’étudiant silencieux attend qu’elle se redresse et lui fasse face pour lui adresser un sourire reconnaissant.
“Je veux déjà vous remercier de m’avoir laissé ‘participer’ à votre séance.” Elle aurait pu être très instructive s’il ne s’était pas fait détourner l’attention par l’effet surnaturel à l’horizon, mais elle n’est pas obligée d’en avoir connaissance… “La curiosité m’a amené ici, tout simplement. J’ai déjà pu apprécier certains de vos cours par le passé et j’étais intrigué par ce qui vous a amené à photographier ici. Ce phénomène a-t-il un nom particulier dans votre métier ?” S’enquit-il, réellement intrigué par tous ces événements naturels qu’il ne saisit pas encore.
il est libre max
y'en a même qui disent qu'ils l'ont vu voler
y'en a même qui disent qu'ils l'ont vu voler
- merci :
- InvitéInvité
Re: [Avril 2021] Les enfants curieux
Jeu 6 Mai 2021 - 18:39
— Je veux déjà vous remercier de m’avoir laissé « participer » à votre séance, amorça-t-il avec politesse.
La photographe inclina la tête, pensive, ses yeux glissant vers les courbes de son appareil photo encore sagement niché dans sa main transie de froid.
— Pas de quoi, fit-elle simplement en haussant doucement ses épaules. C’est moi qui te remercie d’avoir la curiosité silencieuse, c’est quelque chose qui se fait bien rare.
Elle ne comprenait pas pourquoi il la remerciait, cela dit : elle n’avait fait que lui dire de patienter, après tout, et l’aurait de toute façon ignoré obstinément s’il n’avait pas obtempéré à sa requête. D’aussi loin qu’elle se souvienne, Aveleen avait toujours considéré ses interludes photographiques comme des bulles aux parois bien particulières, dans lesquelles elle ne laissait s’immiscer aucune distraction, au risque que la pellicule de savon n’éclate au premier contact. Elle n’y pouvait pas grand chose : les murs s’érigeaient d’eux même pour lui permettre de s’enfermer dans cette dimension toute particulière. C’était comme un voile qui lui glissait devant les yeux, ajustant le cercle chromatique en imaginaire pour savoir capter la luminosité qu’elle désirait et calculant sans qu’elle n’y songe l’intensité du zoom avec laquelle il serait le plus intéressant de travailler. Dans ses instants, son cerveau entier se faisait accaparer par l’Imaginaire photographique dans lequel elle se glissait, parfois quelques minutes, parfois quelques heures durant, oblitérant tout le reste. Elle n’avait pas laissé le jeune Leroy participer : elle l’avait stoppé justement en dehors de son monde, lui autorisant tout juste la périphérie. Elle était trop introvertie durant ces instants pour vraiment les partager avec qui que ce soit. Et il lui avait fallu des années pour consentir à diviser la propriété de ce qu’elle considérait comme ses propres curiosités. Encore plus de temps pour accepter d’en faire son métier, tant elle avait eu du mal à comprendre l’engouement qui se faisait autour de ses clichés. Elle ne voulait pas devenir une usine à rêves empaquetés dans du papier glacé, aussi conservait-elle encore jalousement une grande partie de ce monde emprisonné en deux dimensions. Comme aujourd’hui, où elle n’était là que pour elle-même : beaucoup dans sa profession perdaient le plaisir de photographier pour eux-même, mais Aveleen elle, perdait peu à peu le plaisir de photographier pour autrui.
— La curiosité m’a amené ici, tout simplement. J’ai déjà pu apprécier certains de vos cours par le passé et j’étais intrigué par ce qui vous a amené à photographier ici. Ce phénomène a-t-il un nom particulier dans votre métier ?
— C’est un simple mirage supérieur, expliqua-t-elle en tournant son visage vers le bateau qui semblait doucement regagner le confort rassurant de la mer sur laquelle il naviguait. Un trompe l’œil météorologique qui, en plus de nous berner, est capable aussi de jouer un tour à l’objectif de mon appareil. C’est un mensonge, comme la plupart des photographies qui circulent d’ailleurs, remarqua-t-elle, plus pour elle même cependant que pour le jeune homme. C’est ce qui m’a amenée ici : les mensonges, après une petite overdose de vérité, fila-t-elle son avis d’une voie rêveuse.
Un soupire resta coincé dans sa gorge. Si elle était revenu sur le sol Écossais, c’était parce qu’on lui avait menti en lui promettant la confiance, et qu’on avait ainsi divulgué des photographies qu’elle aurait préféré voir rester sagement dans l’ignorance, et non pas propulsées en tête d’affiche de sa dernière exposition. C’était peut-être le juste châtiment pour avoir voulu photographier une réalité sur laquelle on ne lui avait pas demandé d’avoir d’avis : quand un prestataire souhaitait à ce que l’on mette en valeur les plages Italiennes et leurs criques rocheuses et escarpées, les oliviers et les façades aux couleurs chamoirés des petites villages, cela n’était pas pour se retrouver avec des clichés de visages tous aussi escarpés, de rameaux d’Olivier depuis longtemps oubliés devant les portes des camps de migrants méditerranéens, et des couleurs tout aussi chamoirées de ces vêtements enrobés de gilets de sauvetages, dont l’orange jurait tragiquement dans une l’eau turquoise faite d’espoirs avortés. Cela faisait trop longtemps qu’elle n’avait pas pris de photographies pour son propre plaisir, et trop longtemps aussi qu’elle faisait plier sa volonté aux grés de ses différents directeurs artistiques.
— La photographie, c’est une affaire de point de vue. Ce n’est pas un miroir : c’est une interprétation, une réalité diffuse qui varie selon le point d’observation... et l’observateur. C’est un ragot avec un fond de vérité et beaucoup trop de données hors champ. Je trouve que photographier un mirage, c’est une mise en abime assez interessante...
Elle le fixa un instant, ses doigts glissant sur le métal de son précieux argentique par simple réflexe. Elle ne se souvenait pas vraiment d’avoir aperçu l’étudiant dans un de ses cours. En revanche, il aurait fallu être complètement sourde pour échapper à toutes les rumeurs qui circulaient sur le cadet de la famille Leroy : des fiançailles avortées avec fracas, des sangs-purs aux valeurs conventionnelles qui devaient se retourner dans leurs tombes, des désirs inavoués dont au final tout le monde se faisait un plaisir d’en commenter l’aveux. Le Summerbee avait attiré toutes les abeilles autour du miel sulfureux de ses épopées amoureuses. Il avait été la cible de toutes les interprétations de ses congénères et il y avait fort à parier que cela n’était que le début d’un long, long printemps de bruits de couloirs et rires moqueurs étouffés. Mue par cet attendrissement qui la prenait souvent après ses instants d’introversion, l’Irlandaise tendit son appareil vers l’étudiant :
— Que dirais-tu de tenter ta propre interprétation, maintenant que le mirage se dissipe ? Demanda-t-elle tout en désignant du menton le paquebot, qu’un rayon de soleil oblique faisait à présent rougeoyer comme si un incendie en léchait la coque.
@Maximilien Leroy
La photographe inclina la tête, pensive, ses yeux glissant vers les courbes de son appareil photo encore sagement niché dans sa main transie de froid.
— Pas de quoi, fit-elle simplement en haussant doucement ses épaules. C’est moi qui te remercie d’avoir la curiosité silencieuse, c’est quelque chose qui se fait bien rare.
Elle ne comprenait pas pourquoi il la remerciait, cela dit : elle n’avait fait que lui dire de patienter, après tout, et l’aurait de toute façon ignoré obstinément s’il n’avait pas obtempéré à sa requête. D’aussi loin qu’elle se souvienne, Aveleen avait toujours considéré ses interludes photographiques comme des bulles aux parois bien particulières, dans lesquelles elle ne laissait s’immiscer aucune distraction, au risque que la pellicule de savon n’éclate au premier contact. Elle n’y pouvait pas grand chose : les murs s’érigeaient d’eux même pour lui permettre de s’enfermer dans cette dimension toute particulière. C’était comme un voile qui lui glissait devant les yeux, ajustant le cercle chromatique en imaginaire pour savoir capter la luminosité qu’elle désirait et calculant sans qu’elle n’y songe l’intensité du zoom avec laquelle il serait le plus intéressant de travailler. Dans ses instants, son cerveau entier se faisait accaparer par l’Imaginaire photographique dans lequel elle se glissait, parfois quelques minutes, parfois quelques heures durant, oblitérant tout le reste. Elle n’avait pas laissé le jeune Leroy participer : elle l’avait stoppé justement en dehors de son monde, lui autorisant tout juste la périphérie. Elle était trop introvertie durant ces instants pour vraiment les partager avec qui que ce soit. Et il lui avait fallu des années pour consentir à diviser la propriété de ce qu’elle considérait comme ses propres curiosités. Encore plus de temps pour accepter d’en faire son métier, tant elle avait eu du mal à comprendre l’engouement qui se faisait autour de ses clichés. Elle ne voulait pas devenir une usine à rêves empaquetés dans du papier glacé, aussi conservait-elle encore jalousement une grande partie de ce monde emprisonné en deux dimensions. Comme aujourd’hui, où elle n’était là que pour elle-même : beaucoup dans sa profession perdaient le plaisir de photographier pour eux-même, mais Aveleen elle, perdait peu à peu le plaisir de photographier pour autrui.
— La curiosité m’a amené ici, tout simplement. J’ai déjà pu apprécier certains de vos cours par le passé et j’étais intrigué par ce qui vous a amené à photographier ici. Ce phénomène a-t-il un nom particulier dans votre métier ?
— C’est un simple mirage supérieur, expliqua-t-elle en tournant son visage vers le bateau qui semblait doucement regagner le confort rassurant de la mer sur laquelle il naviguait. Un trompe l’œil météorologique qui, en plus de nous berner, est capable aussi de jouer un tour à l’objectif de mon appareil. C’est un mensonge, comme la plupart des photographies qui circulent d’ailleurs, remarqua-t-elle, plus pour elle même cependant que pour le jeune homme. C’est ce qui m’a amenée ici : les mensonges, après une petite overdose de vérité, fila-t-elle son avis d’une voie rêveuse.
Un soupire resta coincé dans sa gorge. Si elle était revenu sur le sol Écossais, c’était parce qu’on lui avait menti en lui promettant la confiance, et qu’on avait ainsi divulgué des photographies qu’elle aurait préféré voir rester sagement dans l’ignorance, et non pas propulsées en tête d’affiche de sa dernière exposition. C’était peut-être le juste châtiment pour avoir voulu photographier une réalité sur laquelle on ne lui avait pas demandé d’avoir d’avis : quand un prestataire souhaitait à ce que l’on mette en valeur les plages Italiennes et leurs criques rocheuses et escarpées, les oliviers et les façades aux couleurs chamoirés des petites villages, cela n’était pas pour se retrouver avec des clichés de visages tous aussi escarpés, de rameaux d’Olivier depuis longtemps oubliés devant les portes des camps de migrants méditerranéens, et des couleurs tout aussi chamoirées de ces vêtements enrobés de gilets de sauvetages, dont l’orange jurait tragiquement dans une l’eau turquoise faite d’espoirs avortés. Cela faisait trop longtemps qu’elle n’avait pas pris de photographies pour son propre plaisir, et trop longtemps aussi qu’elle faisait plier sa volonté aux grés de ses différents directeurs artistiques.
— La photographie, c’est une affaire de point de vue. Ce n’est pas un miroir : c’est une interprétation, une réalité diffuse qui varie selon le point d’observation... et l’observateur. C’est un ragot avec un fond de vérité et beaucoup trop de données hors champ. Je trouve que photographier un mirage, c’est une mise en abime assez interessante...
Elle le fixa un instant, ses doigts glissant sur le métal de son précieux argentique par simple réflexe. Elle ne se souvenait pas vraiment d’avoir aperçu l’étudiant dans un de ses cours. En revanche, il aurait fallu être complètement sourde pour échapper à toutes les rumeurs qui circulaient sur le cadet de la famille Leroy : des fiançailles avortées avec fracas, des sangs-purs aux valeurs conventionnelles qui devaient se retourner dans leurs tombes, des désirs inavoués dont au final tout le monde se faisait un plaisir d’en commenter l’aveux. Le Summerbee avait attiré toutes les abeilles autour du miel sulfureux de ses épopées amoureuses. Il avait été la cible de toutes les interprétations de ses congénères et il y avait fort à parier que cela n’était que le début d’un long, long printemps de bruits de couloirs et rires moqueurs étouffés. Mue par cet attendrissement qui la prenait souvent après ses instants d’introversion, l’Irlandaise tendit son appareil vers l’étudiant :
— Que dirais-tu de tenter ta propre interprétation, maintenant que le mirage se dissipe ? Demanda-t-elle tout en désignant du menton le paquebot, qu’un rayon de soleil oblique faisait à présent rougeoyer comme si un incendie en léchait la coque.
@Maximilien Leroy
- Maximilien LeroyMODO - french style ♔ sweet golden boy
- » parchemins postés : 8266
» miroir du riséd : francisco lachowski
» crédits : wcstedrose (ava)
» multinick : arty / joe / keir
» âge : vingt-huit ans
» situation : en couple
» année d'études : 10ème année
» options obligatoires & facultatives : ♔ options obligatoires : histoire de la magie, sciences politiques magiques, médias moldus et sorciers. ♔ options facultatives : métamorphose, sortilèges et enchantements.
» profession : chroniqueur à la Chouette Enchaînée
» particularité : animagus
» nature du sang : sang-pur
» gallions sous la cape : 8292
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Re: [Avril 2021] Les enfants curieux
Ven 7 Mai 2021 - 16:26
Les enfants curieux ft. @Aveleen O’DonnellOn l’a toujours félicité pour sa discrétion. Pourtant, les rumeurs courant à son sujet dernièrement sont bien loin d’appuyer cette qualité. Maximilien fait un léger sourire à la photographe, tout autant intrigué par son travail que par ce qui l’a amené. Il ne sait poser de mots sur le phénomène qui se produit devant lui et l’aide d’une professionnelle n’est que la bienvenue. Il manifeste d’ailleurs sa curiosité et son ignorance à ce sujet, peu embêté d’avoir à l’afficher de la sorte. Il n’y a aucun mal à ne pas savoir, tant que l’on cherche à combler ce manque. Gardant cette position discrète, il l’écoute avec attention lui expliquer ce à quoi il fait face et hoche de temps en temps la tête en signe de compréhension.
“Un mensonge…” Le Français fronce légèrement les sourcils, perturbé par les propos de la professeure qui ne reflètent que trop son état d’esprit actuel. Il est en ce moment-même en train de se défaire des conséquences d’un mensonge, brisé par une vérité bien trop douloureuse. Le discours mystérieux d’Aveleen ne lui donne que plus envie d’en savoir davantage à son sujet et ce qui, justement, “l’a amené ici”. Il aurait bien quelques idées mais ne se sent pas en position légitime de faire des allégations sur cette grande artiste. Il jette donc un regard nouveau sur le mirage qui lui fait face, à l’horizon, tout en réfléchissant aux propos de la photographe. Il se demande donc naturellement ce qu’elle voit qui serait différent de sa propre perspective mais il lui faudrait un peu de culot supplémentaire pour demander à voir la photographie se trouvant dans l’appareil qu’elle tient rigoureusement dans sa main. Maximilien hausse un sourcil surpris alors qu’elle lui propose de prendre sa place derrière l’objectif et l’exercice, bien que tentant, lui paraît terrifiant. Il n’a aucune réelle connaissance dans ce domaine, si ce n’est les quelques informations qu’il a grappillé ici et là pour se faire une idée du sujet. Bien sûr qu’il est intéressé, mais cela ne fait pas de lui un bon applicateur de cette pratique. Le risque de se ridiculiser est grand, mais il finit par hocher de la tête. Une telle opportunité ne se présente que rarement par deux fois et il ne veut rien regretter.
“Ce serait un honneur” répond-il dans un léger sourire, conscient de son ton un peu pompeux qui se veut humoristique. Avec toute la délicatesse dont il est capable, il s’empare de l’appareil et pendant plusieurs secondes, cherche la position qui lui sera la plus avantageuse pour immortaliser sa propre interprétation du phénomène. Le sorcier finit par s’accroupir devant le mur, fait craquer sa tête une ou deux pour et rouler ses épaules pour se détendre, puis positionne l’appareil entre ses mains, direction l’horizon. Le mirage, à travers l’objectif, lui semble particulièrement différent et il lui trouve un nouvel intérêt. Maximilien fixe un long moment la coque du paquebot en mouvement, dont l’apparence change chaque seconde dû aux rayons du soleil. Une seconde passe, puis une autre… et un temps indéfini se développe avant que, finalement, le Français n’appuie sur le déclencheur. Unique, la photo est prise et le jeune homme se relève, tendant l’appareil vers Aveleen. Il ne s’attend pas spécialement à ce qu’elle trouve sa technique ou son résultat impressionnant, mais comme elle l’a dit elle-même, c’est son interprétation du phénomène et on ne peut pas lui retirer cela. Il aurait certes pu faire quelques réglages supplémentaires, mais il n’en a pas ressenti la nécessité.
“Wow. C’était… très intense. Il est vraiment magnifique” dit-il en désignant l’objet du menton. Il n’en a jamais tenu de tel.
il est libre max
y'en a même qui disent qu'ils l'ont vu voler
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Re: [Avril 2021] Les enfants curieux
Jeu 13 Mai 2021 - 18:13
Il avait réceptionné l’appareil photo avec des gestes presque révérencieux, comme s’il s’était agi d’un objet trop fragile et démesurément précieux. Aveleen le couva d’un sourire reconnaissant : elle avait beau ne pas être matérialiste, ses argentiques et numériques comptaient suffisament pour qu’elle les considère avec une particulière délicatesse. Ses objectifs étaient toujours démontés de manière rigoureuse, puis nettoyés de façon tout aussi appliquée. Il n’était pas question de constater lors de la phase de développement qu’un grain de quoi que ce soit venait gâcher une série complète. Possessive, la photographe avait longtemps été incapable de confier, même pour quelques minutes, ses précieux appareils à qui que ce soit, comme si elle craignait que d’autres doigts moins sensibles que les siens ne viennent les manipuler. Mais quelque chose chez l’étudiant lui avait donné envie de lui faire confiance : il avait le visage calme des jeunes adultes respectueux, que l’on imaginait prendre soin de leurs affaires. Allez savoir pourquoi il dégageait cette aura de confiance, l’impression qu’il n’était pas de ces natures assez fougueuses pour tout envoyer en l’air.
— Ce serait un honneur, fila-t-il la démonstration de sa parfaite éducation.
L’enseignante étouffa à demi un petit rire. Les clichés sur les sangs-purs et leur lignée n’étaient peut-être pas complètement démodés, songea-t-elle tout en observant l’étudiant se positionner. Elle avait suffisament fréquenter les Hangbé et d’autres cercles tout aussi nobles pour savoir à quel point l’étiquette était importante. On avait dû lui enseigner le respect des ainés et de l’autorité avait une rigueur à faire pâlir une organisation militaire, tout en saupoudrant de principes pré-conçus une bonne partie de ses avis, afin qu’il puisse rester dans la continuité de ses ancêtres. Du ton pompeux à l’allure particulièrement soignée de sa diction, de ses gestes calmes à ses vêtements biens sous tous rapports, le jeune Leroy lui inspirait la même chose que beaucoup d’autres étudiants de bonne famille. Pour elle qui avait toujours eu la phobie d’être enchainée, tous ces carcans de principes et d’obligations ne lui promettait qu’une lente agonie, un sentiment d’oppression qu’elle savait être purement imaginatif, sans réelle preuve que cela en soit vraiment le cas. Cela relevait probablement de la simple supposition, qu’une tendance artistique à la dramatisation ne faisait qu’exacerber. Toute à ses réflexions, l’Irlandaise couvait du regard le photographe en herbe qu’une concentration toute nouvelle faisait irradier d’une aura de curiosité.
Il avait fini par opter par une position similaire à celle qu’elle avait choisi un peu plus tôt, accroupi, comme si la ligne de mire venait lécher à la perpendiculaire l’étendue d’eau, jusqu’à l’horizon. Aveleen laissa son regard de glace glisser sur l’étudiant, vaguement fascinée par la propension que la photographie avait à créer des bulles tout autour de ceux qui voulait s’y lover, pour quelques prises en amateur ou pour toute une carrière. Elle glissa sa main dans son sac à bandoulière, duquel elle extirpa un second appareil, qui ne la quittait que très rarement, qu’elle braqua vers le jeune Leroy avec discrétion. Il était tellement concentré qu’il en était devenu immobile, son index figé sur le déclencheur. La posture - était loin d’être confortable, mais c’était souvent le cas : aussi, le dos était courbé dans un contorsion que l’enseignante devinait désagréable, les coudes frottant contre le muret dans une pression irritante, les genoux contre le sol râpeux. Néanmoins, il était tout à fait immobile, léché par les rayons obliques du soleil qui finissaient par baigner toute la marina d’un halo mordoré et rougeoyant. Il était patience. Et Aveleen, elle, éternelle curieuse prise de voyeurisme.
Elle s’assit sur le muret, contre-balança son poids en ancrant ses mollets contre la pierre pour projeter son dos en arrière jusqu’à pouvoir cadrer le visage de l’étudiant, complètement camouflé par l’objectif à grand angle qu’il tenait entre ses mains. La mise en abime lui parut tout aussi interessante que la révérencieuse façon dont elle avait essayé de capter le mirage météorologique un peu plus tôt. Il y avait une vraie douceur dans la façon avec laquelle le jeune Leroy s’appliquait à prendre son temps, égrenant les minutes les unes après les autres sans se précipiter. Un cliquetis plus tard, elle emprisonnait toute cette concentration et se relevait en silence, un petit carré blanc encore vierge de son trésor entre le pouce et l’index. Il n’y avait plus qu’à attendre, songea-t-elle, tout comme elle attendit sans jamais interrompre que le Leroy termine. L’expectative du bon moment, c’était peut-être la partie la plus interessante du métier, et la raison pour laquelle elle avait toujours préféré travailler sans le numérique. Elle n’avait pas envie de mitrailler une quarantaine de clichés en un seul clic, pour ensuite espérer avoir saisi le parfait instant. C’était de la triche. Ce qu’elle aimait, c’était réussir à emprisonner l’instant qui lui faisait éprouver un profond sentiment, de coordonner l’émotion au moment ou elle enclenchait le détonateur : une explosion sans possible retour en arrière. Un instant trop tôt ou trop tard, et on pouvait certes passer à coté d’un excellent cliché. Mais rien ne remplaçait l’excitation d’avoir réussi, qui perdurait d’ailleurs jusqu’à pouvoir enfin voir le résultat final après plusieurs longues heures dans la chambre noire. Pas d’artifice, mais tout autant de patience à voir enfin se dessiner petit à petit les contours de ce que l’on avait arraché à la course du temps pour venir l’immortaliser dans un petit rectangle pourvoyeur de sensations comme celles que l’on avait ressenti lors de la prise.
— Wow. C’était… très intense. Il est vraiment magnifique, rompit-il le silence en se redressant.
Aveleen hocha la tête tout en récupérant l’appareil qu’il lui tendait. En échange, elle lui glissa le petit Polaroïd le représentant, dont les contours commençaient lentement à prendre forme : on devinait à présent en filigranes les prémices de sa silhouette et de l’objectif, et un peu de la joue écrasée tout contre l’appareil. Difficile de reconnaître réellement l’étudiant sous cet angle qui mettait bien plus en valeur l’action que cela n’était un portrait.
— C’est l’un de mes préféré, acquiesça la sorcière tout entreprenant de démonter l’objectif et de glisser ensuite les différentes parties des instruments dans leurs étuis respectifs. Ils sont secrets, les argentiques : il n’y a pas de fonctionnalité pour venir contrôler ton cliché, ni de révélation instantanée comme pour le Polaroïd que tu as entre les doigts, expliqua-t-elle. Pour connaitre le résultat de ta patience, lui souria-t-elle en relevant enfin la tête vers lui, il faut lui sacrifier encore un peu plus de temps, souria-t-elle d’un air énigmatique. C’est le principe de la photographie : offrir des heures pour un instant éphémère. Sauf si tu as mieux à faire, termina-t-elle gentiment. Dans ce cas là, ton œuvre restera un secret qui t’appartiendra.
Elle ne savait toujours pas réellement pourquoi il avait décidé d’interrompre son repos pour venir vois l’enseignante qu’elle était, pas plus que s’il avait envie de vraiment être là.
@Maximilien Leroy
— Ce serait un honneur, fila-t-il la démonstration de sa parfaite éducation.
L’enseignante étouffa à demi un petit rire. Les clichés sur les sangs-purs et leur lignée n’étaient peut-être pas complètement démodés, songea-t-elle tout en observant l’étudiant se positionner. Elle avait suffisament fréquenter les Hangbé et d’autres cercles tout aussi nobles pour savoir à quel point l’étiquette était importante. On avait dû lui enseigner le respect des ainés et de l’autorité avait une rigueur à faire pâlir une organisation militaire, tout en saupoudrant de principes pré-conçus une bonne partie de ses avis, afin qu’il puisse rester dans la continuité de ses ancêtres. Du ton pompeux à l’allure particulièrement soignée de sa diction, de ses gestes calmes à ses vêtements biens sous tous rapports, le jeune Leroy lui inspirait la même chose que beaucoup d’autres étudiants de bonne famille. Pour elle qui avait toujours eu la phobie d’être enchainée, tous ces carcans de principes et d’obligations ne lui promettait qu’une lente agonie, un sentiment d’oppression qu’elle savait être purement imaginatif, sans réelle preuve que cela en soit vraiment le cas. Cela relevait probablement de la simple supposition, qu’une tendance artistique à la dramatisation ne faisait qu’exacerber. Toute à ses réflexions, l’Irlandaise couvait du regard le photographe en herbe qu’une concentration toute nouvelle faisait irradier d’une aura de curiosité.
Il avait fini par opter par une position similaire à celle qu’elle avait choisi un peu plus tôt, accroupi, comme si la ligne de mire venait lécher à la perpendiculaire l’étendue d’eau, jusqu’à l’horizon. Aveleen laissa son regard de glace glisser sur l’étudiant, vaguement fascinée par la propension que la photographie avait à créer des bulles tout autour de ceux qui voulait s’y lover, pour quelques prises en amateur ou pour toute une carrière. Elle glissa sa main dans son sac à bandoulière, duquel elle extirpa un second appareil, qui ne la quittait que très rarement, qu’elle braqua vers le jeune Leroy avec discrétion. Il était tellement concentré qu’il en était devenu immobile, son index figé sur le déclencheur. La posture - était loin d’être confortable, mais c’était souvent le cas : aussi, le dos était courbé dans un contorsion que l’enseignante devinait désagréable, les coudes frottant contre le muret dans une pression irritante, les genoux contre le sol râpeux. Néanmoins, il était tout à fait immobile, léché par les rayons obliques du soleil qui finissaient par baigner toute la marina d’un halo mordoré et rougeoyant. Il était patience. Et Aveleen, elle, éternelle curieuse prise de voyeurisme.
Elle s’assit sur le muret, contre-balança son poids en ancrant ses mollets contre la pierre pour projeter son dos en arrière jusqu’à pouvoir cadrer le visage de l’étudiant, complètement camouflé par l’objectif à grand angle qu’il tenait entre ses mains. La mise en abime lui parut tout aussi interessante que la révérencieuse façon dont elle avait essayé de capter le mirage météorologique un peu plus tôt. Il y avait une vraie douceur dans la façon avec laquelle le jeune Leroy s’appliquait à prendre son temps, égrenant les minutes les unes après les autres sans se précipiter. Un cliquetis plus tard, elle emprisonnait toute cette concentration et se relevait en silence, un petit carré blanc encore vierge de son trésor entre le pouce et l’index. Il n’y avait plus qu’à attendre, songea-t-elle, tout comme elle attendit sans jamais interrompre que le Leroy termine. L’expectative du bon moment, c’était peut-être la partie la plus interessante du métier, et la raison pour laquelle elle avait toujours préféré travailler sans le numérique. Elle n’avait pas envie de mitrailler une quarantaine de clichés en un seul clic, pour ensuite espérer avoir saisi le parfait instant. C’était de la triche. Ce qu’elle aimait, c’était réussir à emprisonner l’instant qui lui faisait éprouver un profond sentiment, de coordonner l’émotion au moment ou elle enclenchait le détonateur : une explosion sans possible retour en arrière. Un instant trop tôt ou trop tard, et on pouvait certes passer à coté d’un excellent cliché. Mais rien ne remplaçait l’excitation d’avoir réussi, qui perdurait d’ailleurs jusqu’à pouvoir enfin voir le résultat final après plusieurs longues heures dans la chambre noire. Pas d’artifice, mais tout autant de patience à voir enfin se dessiner petit à petit les contours de ce que l’on avait arraché à la course du temps pour venir l’immortaliser dans un petit rectangle pourvoyeur de sensations comme celles que l’on avait ressenti lors de la prise.
— Wow. C’était… très intense. Il est vraiment magnifique, rompit-il le silence en se redressant.
Aveleen hocha la tête tout en récupérant l’appareil qu’il lui tendait. En échange, elle lui glissa le petit Polaroïd le représentant, dont les contours commençaient lentement à prendre forme : on devinait à présent en filigranes les prémices de sa silhouette et de l’objectif, et un peu de la joue écrasée tout contre l’appareil. Difficile de reconnaître réellement l’étudiant sous cet angle qui mettait bien plus en valeur l’action que cela n’était un portrait.
— C’est l’un de mes préféré, acquiesça la sorcière tout entreprenant de démonter l’objectif et de glisser ensuite les différentes parties des instruments dans leurs étuis respectifs. Ils sont secrets, les argentiques : il n’y a pas de fonctionnalité pour venir contrôler ton cliché, ni de révélation instantanée comme pour le Polaroïd que tu as entre les doigts, expliqua-t-elle. Pour connaitre le résultat de ta patience, lui souria-t-elle en relevant enfin la tête vers lui, il faut lui sacrifier encore un peu plus de temps, souria-t-elle d’un air énigmatique. C’est le principe de la photographie : offrir des heures pour un instant éphémère. Sauf si tu as mieux à faire, termina-t-elle gentiment. Dans ce cas là, ton œuvre restera un secret qui t’appartiendra.
Elle ne savait toujours pas réellement pourquoi il avait décidé d’interrompre son repos pour venir vois l’enseignante qu’elle était, pas plus que s’il avait envie de vraiment être là.
@Maximilien Leroy
- Maximilien LeroyMODO - french style ♔ sweet golden boy
- » parchemins postés : 8266
» miroir du riséd : francisco lachowski
» crédits : wcstedrose (ava)
» multinick : arty / joe / keir
» âge : vingt-huit ans
» situation : en couple
» année d'études : 10ème année
» options obligatoires & facultatives : ♔ options obligatoires : histoire de la magie, sciences politiques magiques, médias moldus et sorciers. ♔ options facultatives : métamorphose, sortilèges et enchantements.
» profession : chroniqueur à la Chouette Enchaînée
» particularité : animagus
» nature du sang : sang-pur
» gallions sous la cape : 8292
Inventaire Sorcier
Inventaire Sorcier:
Re: [Avril 2021] Les enfants curieux
Dim 16 Mai 2021 - 15:35
Les enfants curieux ft. @Aveleen O’DonnellL’expérience est prenante, saisissante et bien différente de tout ce qu’il a expérimenté à ce jour. Tapis contre ce muret, le corps tendu et prêt à se mettre en action dans un seul et unique but, il s’imagine tel un reporter de guerre en territoire ennemi. Malgré le calme qui réside en lui et en ses gestes, les battements de son cœur sont effrénés et trahissent son intérêt grandissant pour cette pratique hors du commun. Il reste dans cet état un temps indéfini et le temps qui passe lui importe peu. Il veut bien faire et obtenir un résultat qui saura le satisfaire. Pendant le processus, il ne porte aucune attention aux faits et gestes d’Aveleen, portant l’entièreté de son dévolu sur l’horizon et ce bateau qu’il finit, tôt ou tard, par immortaliser de l’appareil. Un seul clic, rien qu’un, et cette image, cette vision vivra à tout jamais. Après cela, Maximilien ne tarde pas à se relever et offre à la professeur un léger sourire timide en lui rendant son appareil, qu’il complimente au passage. Il est certain qu’il n’a jamais eu l’opportunité d’en avoir un tel dans les mains et se sent presque illégitime d’avoir eu l’occasion de s’en servir. Le Français est particulièrement surpris de recevoir en retour une espèce de petit carton blanc qui, magiquement, commence à faire apparaître une image. Le jeune homme fronce les sourcils et rapproche le polaroïd de son visage, avant de finalement reconnaître l’image qui s’y dessine. Il a un air surpris et admiratif à la fois, car ce n’est certainement pas à cela qu’il pensait ressembler pendant cet exercice. Bien sûr, sa lecture du rendu est bien différente que l’œil qu'a eu Aveleen sur son modèle, mais il trouve néanmoins le cadrage vraiment réussi. Maximilien a un léger sourire, voyant cela comme un cadeau en souvenir de ce moment d’échange lourd de poésie.
Il regarde la jeune femme ranger son matériel, le polaroïd toujours entre les doigts et hoche de la tête à ses propos. Tout ce qu’elle dit semble tellement intéressant, comment fait-elle cela ? Il se trouve fasciné par ses explications et a la sensation d’être redevenu ce petit Beauxbâtons gringalet affamé de découverte et d’apprentissage. Celui qui ne vivait que pour ingérer de nouvelles informations afin de mieux s’en servir plus tard. Il faut dire que sa curiosité joue un très grand rôle dans tout cela et il a l’impression qu’il lui reste encore tant de choses à découvrir sur la photographie ! S’il ne souhaite pas en faire son métier, cela pourrait totalement devenir un hobby, d’autant plus utile dans la filière journalistique. Mais se contenter de simplement prendre des photos ne suffit pas et Aveleen a attisé sa curiosité par ses propos. Que faut-il faire pour accoucher d’une telle vision du monde ?
“Je n’ai rien de mieux à faire pour le moment, en vérité. Je serais curieux de voir comment on s’y prend pour terminer d’immortaliser un tel instant. Si je ne vous prends pas de votre temps, bien sûr.” Sur le polaroïd, l’image a fini de s’installer pour ne plus jamais en partir et il la range avec délicatesse dans son portefeuille, bien à plat. “Je peux aussi vous offrir un café ou autre, en compensation de tout ce que vous êtes susceptible de m’apprendre aujourd’hui. Ce serait la moindre des choses, à vrai dire.” Bien élevé, il attend qu’elle prenne la décision qui lui conviendra le mieux. Même si on lui a appris à prendre les devants en considérant que les femmes devaient être forcément menées par un homme - merci Charles - Maximilien s’est vite défait de cette idée selon laquelle il a seul voix au chapitre. Au contraire, il préfère même parfois ne pas être celui qui fera le premier pas dans une direction, ou une autre.
il est libre max
y'en a même qui disent qu'ils l'ont vu voler
y'en a même qui disent qu'ils l'ont vu voler
- merci :
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