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A la mémoire de Whitaker père. [LUST]
Ven 3 Sep 2010 - 20:16
Tokyo. Bar clandestin branché et sordide, mon univers depuis 8 jours. J’étais là, accoudée au bar avec quelques amis de passage, je contemplais mon univers avec fierté. La musique emportait dans ses arpèges une atmosphère d'allégresse surprenante. Très vite elle communiquait son enthousiasme à ces êtres déchus, anesthésiés par quelque substance chimique, emportés par quelque liquide incendiant. Il me serait difficile de vous décrire cette mélodie tant sa nature proprement immatérielle la rendait presque inaccessible à l'entendement, une suite simple de battements semblables au gong fracassant de nos palpitants euphoriques. Pourtant à cet instant précis il me semblait que cette mélodie fracassante sécrétait le même goût sucré que cet alcool aromatisé que je venais d’avaler. Les notes vibraient à l'unisson avec mes papilles gustatives. Je ressentais l'extraordinaire impression de faire corps avec elles, comme si elles pénétraient au plus profond de ma chair pour s'y fondre totalement. Mes yeux tremblants glissaient sur les corps en mouvement, frénétiques, transcendés, un rictus violent se dessina sur mes lèvres cerise à la vue de cette orgie lubrique, de cette débauche libidineuse à laquelle j‘étais maintenant habituée. Quel bonheur, moi qui n’avais plus de cœur, je venais en effet de l’abandonner à Leodagan qui s’était empressé de fuir avec. Il pouvait se vanter dans sa nouvelle vie, de posséder le palpitant d’un satyre. Alors j’avais rempli ce vide insoutenable par un sentiment plus violent que l’amour, l’autodestruction. Je m’étais isolée de tous, livrée à moi-même, je retrouvais enfin mes vieux démons. Une main posée sur la mienne m’arracha à ma contemplation, je me retournai face au bar pour voir un shoot de tequila que me présentait Keiko, une douce japonaise qui me vouait une admiration sans borne. Je lui souris faiblement avant de verser le perfide liquide dans mon larynx pour qu’il puisse rejoindre mes veines violettes. Il glissait avec facilité, incendiant ma gorge, ma langue, mon estomac sur son passage. Je laissai cette substance envahir pleinement mon esprit déjà brouillé. Lorsque mes prunelles curieuses glissèrent sur un homme que je ne cessais de croiser depuis mon arrivée, c'était un jeune homme de vingt-six à vingt-huit ans, ou du moins auquel on était tenté d'attribuer cet âge au premier abord, car lorsqu'on le regardait avec attention on le trouvait ou plus jeune ou plus vieux, tant sa physionomie énigmatique mélangeait la fraîcheur et la fatigue. Ses cheveux d'un blond obscur tiraient sur cette nuance que nous, les Anglais appelons auburn, et s'incendiaient à la lumière artificielle de reflets cuivrés et métalliques, son profil offrait des traits purement accusées, un front protubérant, un nez d'une noble courbe aquiline, une bouche divinement dessinée, et un menton dont la rondeur puissante faisait penser aux monnaies antiques ; et cependant tous ces traits, beaux en eux-mêmes, ne composaient point un ensemble agréable. Il leur manquait cette mystérieuse harmonie qui adoucit les contours et les fond les uns dans les autres. Je le toisai d’un air sombre, contemplant ses traits affaiblis, son maintient brisé, son regard transparent alors que je pouvais lire en ses yeux un désir violent, il me déshabillait littéralement du regard. Il s‘approcha alors de moi avec la prestance déjantée de l‘alcool, je m’éloignai de mes amies pour rejoindre cet homme qui me fixait avec intensité.
« je vous observe depuis 8 jours »
« c’est tout à votre honneur… »
« Je peux vous offrir un verre ? »
« Merci mais j’étais sur le départ. Par contre, j’organise une petite fête dans ma suite, Libre à vous de me suivre… »
« Je vous suis… »
Je fixais ses traits pernicieux et son teint diaphane. il avait du faire un effort considérable pour laisser filtrer de ses lèvres d’incarnat quelques phrases compréhensives. Plongeant mes pupilles assombries dans ses yeux dilatés je l’invitai donc à suivre mes sous-fifres qui déjà couraient derrière moi dans les rues de Tokyo. L’une d’entre elle, jeune moldue anglaise échouée au Japon arriva à ma hauteur totalement essoufflée. « Ta fête va être trop cool, la meilleure de l’année, et le garçon que tu as choisi de ramener ce soir est carrément canon…et… » Je la coupai d’un mouvement sec de la main avant de me tourner vers elle, un rictus se dessina sur mes lèvres rougeâtres. « Tu parles trop honey, prends plutôt une gorgée de ceci pour faire descendre cette petite pilule… » Je lui tendis une petite pastille acidulée, qu’elle enfouit sans réfléchir entre ses lèvres avant de faire descendre ce présent avec une gorgée d’Ether démoniaque. Perfide boisson ! Ça vous fait vous comporter comme l’ivrogne du village dans un roman irlandais... L’Ether démoniaque.. C’est la perte complète de toutes capacités motrices... vision brouillé, perte d’équilibre, langue pâteuse. L’esprit se replie avec horreur, incapable qu’il est de communiquer avec la colonne vertébrale. Ça rend le phénomène fascinant... Vous pouvez vraiment vous regarder avoir cet horrible comportement mais vous ne pouvez rien contrôler. Et ce cauchemar pour les débutants était mon exutoire pour ne plus penser à Leo, à Lust, à ma tentative. Je ne pensais qu’au bonheur de mettre ma vie en danger.
Quand on fut arrivé aux portes de mon hôtel, immeuble réputé de 64 étages, dont je possédais l’une des meilleures suites, l’un des portiers sur rua sur moi avec un air contrarié que je lui connaissais bien. « Miss Bradshaw… une foule de gens attendre pour soirée. » je lui souris avec amusement, glissant un chèque entre ses mains moites bien que je le payais déjà une fortune pour sa complicité et son silence sur mes fréquentations et le types de personnes qui venaient me visiter. Pourtant ce soir il semblait plus qu’embarrassé. Il se livrait à des gesticulations effrénées et à un discours où les formules suppliantes se mêlaient aux menaces dans la proportion la plus comique ; il parlait fort avec une volubilité effrayante et un accent à couper au couteau, réclamant un surcroît de paie, et jurant sur dieu qu'il n'avait pas été suffisamment récompensé de sa fatigue et de ses mensonges à son patron. « Nobu calme toi, tu ne risques rien, nous ne seront pas très bruyant ce soir. » Il jeta un regard perfide à ma horde qui déjà investissait l’immense immeuble pour rejoindre ma chambre. « ils sont déjà grand nombre dans votre suite… et il y a anglais, pas pour soirée, il vient de…Norbitch.. Norvish… » Je fronçai les sourcils avec inquiétude. « Norwich ? Nobu acquiesça avec gravité. J‘observai la douceur dans ses yeux satinés, je glissai ensuite ma main sur son épaule. « Nobu, il est brun ? Joli garçon ? Charismatique, l’œil un peu grave ? Le maintient puissant ? Il hocha la tête une nouvelle fois et un sourire attendrit se dessina sur mes lèvres cerise, un murmure s’échappa de ma bouche lorsque déjà je me ruais vers l’ascenseur. Lust… »
Arrivée dans ma suite déjà bondée, je cherchai du regard mon meilleur ami que je n’avais plus vu depuis l’incident, un sourire franc était gravé sur mon visage de poupée, alors que je traversais la foule qui m’adressait tantôt un mot, tantôt un geste que je choisissais d‘ignorer pour le moment. « Meteora… » Une voix douce et suave que je pouvais reconnaître entre milles interrompit mes recherches. Je me retournai lentement avec la délicatesse et la grâce d’un félin, affichant sur mon doux visage une expression contrastée de surprise et de douceur. Je plongeai alors mes yeux dans les prunelles d’Elia qui se tenait devant moi, et qui venait de m’aborder de sa voix mielleuse. Un rire m’échappa, il correspondait à la description que j’avais fait à Nobu tout autant que Lust, pourtant, malgré l’amour que je portais à Elia j’aurais aimé ne point me tromper, 8 jours que j’étais partie et le manque de mon meilleur ami se faisait ressentir. Déjà. Qui plus est, je connaissais la raison de la venue d‘Elia, il désirait certainement que je rentre, malheureusement pour mon ami ça n’était pas dans mes plans. Il se rua tout de même dans mes bras et je le laissai m’étreindre un instant avant de me retirer le sourcil froncé. « Eli… je ne veux pas rentrer ! Ça ne sert à rien… » Et je m’éloignai pour rejoindre l’immense vitre de ma suite, qui m’offrait un panorama somptueux.
Les doigt longs et fins de ma main posée sur le mur de glace glissaient sur cette surface transparente, mon épiderme fut parcourue de frissons. Mon visage, d’une pâleur porcelaine, ruisselait sous la lumière de la lune-mère, ce doux visage rond, brillant et bienveillant qui gouvernait le ciel une fois la nuit tombée et traversait la maigre vitre scintillante de ma chambre pour venir éclairer mes traits carnassiers en m’aveuglant partiellement. L’alcool se propageait dans mon sang trop liquide à une vitesse folle, faisant monter la chaleur d’un feu ardent dans mon corps osseux. La sueur perlait sur mon visage fatigué tandis que je glissais doucement le revers de ma main sur mon front bombé. Le monde semblait tourner sous mes pieds, j’aimais cette sensation enivrante de légèreté, cette divine impression que plus rien n’est comme avant, que l’univers et ma perception de la vie se trouvaient totalement chamboulés, qu’une autre personne faisait son apparition au sein de mon corps. C’était à cette sensation que je me droguais plus qu’a l’alcool lui-même, c’était ça ma réelle dépendance. Je glissai mon regard injecté de la ville à la voie lactée. Cependant mon observation astrale était brouillée, la vitre dessinait en effet sur sa mince glace les traits de ma personne. Mon visage couleur porcelaine me semblait d’une maigreur accablante, une imperceptible auréole entourait mes yeux azurés. Perché dans ma tour d’argent, j’étais isolée une fois de plus des tous ces adolescents en perdition, désireuse de garder ce soir l’alcool que j’avais assimilé, pour seul compagnon. Mais les voix de la boisson ne sont pas impénétrables.
« Tu dois rentrer ! L’école reprend. »
« Ce n’est pas une raison suffisante… »
« Tu nous manques… »
« Ca va passer… »
« On s’inquiète pour toi… »
« Je n’ai pas besoin de votre pitié… »
« Lust a besoin de toi. »
« Il a sa copine… »
« METEORA ! C’est sérieux. »
« QUOI Elia ? Si c’est mon corps qui te manque ça peut s’arranger ici tout de suite… » Un rictus de satyre lubrique se dessina sur mes traits angéliques, je laissai échapper un rire effrayant, lorsque je compris que mon ami ne rigolait pas. Je fronçai les sourcils intriguée. Je sifflai vilement avant de me tourner totalement vers lui avec grande peine, je croisai mes bras sous ma poitrine, plantant mes pupilles d’ébène dans l’océan de ses yeux fuyant. Mes traits étaient habités d’une expression de prestance presque démoniaque. Et il savait qu’il devait parler à cœur ouvert, c’était l’unique moyen qu’il lui restait pour me faire tomber de ma tour d’argent. Il s’éclaircit la voix avec gravité avant de glisser ses yeux sur la vitre. « Je voulais qu’il te l’annonce lui-même mais tu ne me laisses pas d’autre choix… » Mon cœur s’emballait avec douleur, je savais que le « Il » dont il parlait était Lust. Je retins ma respiration, muée dans une attente insoutenable. Lorsqu’enfin le couperet tomba.
« Le père de Lust est mort. » Mes yeux s’écarquillèrent et la bouteille que je tenais fermement dans ma main glissa naturellement pour se briser sur le sol. Je fus paralysée un instant, muée dans la surprise, la peur, la honte de n’avoir pas été là, le douleur pour mon âme sœur que je savais meurtrie. Mais rapidement, je retrouvai cette force qui me caractérisait, et voilant mon visage de cet air de dureté, je me ruai dans mon placard pour saisir une veste et mon sac. « Tu vas ou ? » La voix d’une de mes amies retentit, je lui saisi l’épaule avant de glisser ma bouche jusqu’au lobe de son oreille. « Occupe toi de cette soirée, je reviens rapidement, je dois aller voir un ami. » Et je relâchai ma prise. Brutalement j’attrapai la main d’Elia et me dirigeai vers la sortie sous les cris de mes amis ahuris. Une fois dans l’ascenseur je refermai ma prise autour des doigts osseux de mon amant avant de transplaner avec lui. Je ne sais combien de temps dura notre voyage dans ce brouillard immatériel, mais bientôt nos pieds touchèrent le sol terreux du parc d’Hungcalf. Je plongeai alors mes yeux anxieux sur les alentours lorsqu’Elia entoura mon visage porcelaine de ses mains de velours. « Il est aux remparts… mes yeux se durcirent un peu plus, que faisait-il aux remparts seul, une peur intense saisit mes trippes, allait-il faire une bêtise? Je pouvais sentir mon cœur marteler ma poitrine branlante. Mais Elia me rassura, mon amour… aurais-tu la faculté de lire dans mes pensées ? Ne t’en fais pas… il ne va pas faire de conneries, il a juste besoin de réfléchir, vas-y! » J’embrassai Elia avec tendresse, lui témoignant ainsi ma gratitude. « Merci… » et je m’enfuis dans un murmure, une pointe d’insécurité s’enfonça avec violence au creux de mon cœur oppressé par un nombre incalculable de sentiments incontrôlés. Je courais à en perdre haleine pour retrouver mon Lust et l’idée de le voir bouleversé me fissurait le cœur. Arrivée aux remparts je grimpai rapidement, et j’aperçu sa silhouette majestueuse au loin, alors que deux filles se tenaient devant moi et discutaient librement, pauvres petites, vous auriez du regarder aux alentours avant de vous imaginer seules.
« Il est seul… Désorienté, je pense qu’il a bu… puis tu as mis tes plus beaux atouts en valeur… vas-y. » Un rire violent m’échappa et les demoiselles surprises se tournèrent vers moi avec étonnement. Leurs teint de rose carnée devint rapidement plus livide et plus blême que l’astre lunaire qui nous surveillait depuis sa couche cosmique. « Si être habillée comme une catin est pour toi montrer tes plus beaux atouts, tu as raison. Je veux que vous partiez d’ici avant que je ne détruise vos petites vies insignifiantes. »Mes pupilles convulsèrent comme des vipères prêtent à attaquer, je laissai échapper un grognement presque animal, avant de m’approcher de ces imprudentes avec la prestance de la drogue, de l‘amour et de l‘alcool. Je glissai avec délicatesse la paume de ma main chaude sur le cou flexible et onduleux d‘une des demoiselles, avant de refermer avec force ma poigne sur sa peau de neige. Une expression de surprise traversa ses prunelles scintillantes, je pouvais mesurer la peur que je faisais naître en elle. « Il est casé. Et vous avez de la chance que ça ne soit pas avec moi, si ça avait été le cas… Je vous aurais détruit sur le champ! Maintenant dégagez ! » La jalousie naissait dans les yeux de ces adolescentes. Qui ne savait pas dans le milieu des junkies qui étaient Lust et sa belle Meteora ? Notre relation était édénique et sulfureuse. Jamais amants n’avaient été aussi enviés. Et même sans ce lien charnel et malsain, notre amour était aussi indéniable qu’inexplicable. C’était une chose céleste et démoniaque. Etrange filiation que la cour des junkies jalousait avec ferveur. J’étais si protectrice envers lui. Je m’attirais les foudres des catins que Lust avait eu le malheur de délaisser au lendemain d’une valse torride, alors que moi, je restais à ses côtés depuis toujours. J’étais son reflet, je me mouvais comme si je m’orientais systématiquement en fonction de lui, disait-on. Lorsqu'il lui arrivait d‘émettre un mouvement, même un infime déplacement, moi, doux satellite, ajustais ma position à la sienne. Il était tout ce qui faisait mon importance dans cette école, et ces filles jalousait la place à laquelle il m’avait propulsé le jour où il avait décidé de faire de moi sa poupée. Cependant elles n’osaient rien faire pour me faire chuter, elles étaient bien trop effrayées par ma personne et je ne m’en plaignais pas. Ainsi je les vis déguerpir à toute vitesse et je pu me ruer sur Lust avec inquiétude.
Je m’approchai de Lust, accoudé à un rempart, et plantant mon regard paniqué sur sa silhouette statique, j‘esquissai un sourire tendre qui se voulait sincère et fragile mais qu‘il ne pouvait voir. Cet homme dans toute sa prestance magnifique avant le don de guérir une légère partie de mon âme, il rebouchait chaque jour une nouvelle petite fissure, lui seul avait cette capacité et j’ignorais totalement pourquoi. Ce dont j’avais conscience c’est que ça me perturbait et que je devais apprendre à vivre avec cette partie de moi que je ne connaissais pas, avec ce pouvoir indescriptible qu‘il possédait sur moi. Il me semblait parfois qu’il savait lire en moi mieux que l’enfant stupide et fragilisé que j’étais devenu ne savait le faire. Et une partie de moi espérait avoir le même pouvoir sur lui. Arrivée à sa hauteur, je glissai mes bras tremblants autour de sa taille pour poser mon front entre ses deux omoplates saillantes, gagnée par son odeur de fleur d’oranger et de vanille, mon cœur se serra un peu plus encore. Je ne bougeai pas pendant un instant, me contentant d’enrouler mes bras autour de son torse bombé. Et finalement je glissai ma main glacée le long de son bras pour délicatement, lui ôter la bouteille qu’il tenait entre ses doigts. Une fois ceci fait, je la posai sur le sol avant de m’accouder contre le rempart à ses côtés. « Lust… je suis désolée. » Ma voix se fit faible, une douceur affligeante s’emparait de mon timbre toujours poussé par la divine substance liquide, guidée par ce feu enflammé qui courait toujours dans mes veines trop épaisses, avec bien moins de violence qu’auparavant mais avec plus de prestance et de poids, il me semblait que face à Lust, je dessaoulais rapidement comme si mon cerveau avait décrété qu’il avait besoin de toute sa lucidité pour maîtriser cette situation et que l’alcool s’évaporait pour quitter mon corps tremblant. Mes yeux glissèrent avec trop de facilité sur le profil de Lust que je scrutais pour se percuter à la pierre fissurée du rempart. « Parle moi… je suis là. » Un élan de douceur s’échappait de ma bouche, en y enlevant au passage le goût acre de l’alcool et la puissante amertume qui habitaient mes lèvres habituellement pour y laisser une douceur fugace et une sincérité brève. Je glissai ensuite le revers de ma main de velours sur sa joue nacrée, geste maternel et d’une tendresse émouvante venant de ma personne. Mais j’avais peur qu’il ne me repousse, je connaissais le Lust blessé, mais ce soir, je n’avais pas peur de m’y confronter. Je le fixai pendant quelques minutes, avec une intensité opiniâtre, les regards de mes prunelles bleues se firent plus tendre ; mes sourcils se dessinèrent avec plus de gravité, mes joues s'arrondirent et se veloutèrent comme des pêches de toute la fraîcheur de la jeunesse ; mes yeux s'ouvrirent scintillants voilé par un filet salé. Et ma bouche tremblante s’ouvrit pour laisser glisser ma voix, cependant aucun son ne pu sortir. Je me contentai de le scruter avec douleur. Mon doux Lust, je t’en prie, parle moi…
« je vous observe depuis 8 jours »
« c’est tout à votre honneur… »
« Je peux vous offrir un verre ? »
« Merci mais j’étais sur le départ. Par contre, j’organise une petite fête dans ma suite, Libre à vous de me suivre… »
« Je vous suis… »
Je fixais ses traits pernicieux et son teint diaphane. il avait du faire un effort considérable pour laisser filtrer de ses lèvres d’incarnat quelques phrases compréhensives. Plongeant mes pupilles assombries dans ses yeux dilatés je l’invitai donc à suivre mes sous-fifres qui déjà couraient derrière moi dans les rues de Tokyo. L’une d’entre elle, jeune moldue anglaise échouée au Japon arriva à ma hauteur totalement essoufflée. « Ta fête va être trop cool, la meilleure de l’année, et le garçon que tu as choisi de ramener ce soir est carrément canon…et… » Je la coupai d’un mouvement sec de la main avant de me tourner vers elle, un rictus se dessina sur mes lèvres rougeâtres. « Tu parles trop honey, prends plutôt une gorgée de ceci pour faire descendre cette petite pilule… » Je lui tendis une petite pastille acidulée, qu’elle enfouit sans réfléchir entre ses lèvres avant de faire descendre ce présent avec une gorgée d’Ether démoniaque. Perfide boisson ! Ça vous fait vous comporter comme l’ivrogne du village dans un roman irlandais... L’Ether démoniaque.. C’est la perte complète de toutes capacités motrices... vision brouillé, perte d’équilibre, langue pâteuse. L’esprit se replie avec horreur, incapable qu’il est de communiquer avec la colonne vertébrale. Ça rend le phénomène fascinant... Vous pouvez vraiment vous regarder avoir cet horrible comportement mais vous ne pouvez rien contrôler. Et ce cauchemar pour les débutants était mon exutoire pour ne plus penser à Leo, à Lust, à ma tentative. Je ne pensais qu’au bonheur de mettre ma vie en danger.
Quand on fut arrivé aux portes de mon hôtel, immeuble réputé de 64 étages, dont je possédais l’une des meilleures suites, l’un des portiers sur rua sur moi avec un air contrarié que je lui connaissais bien. « Miss Bradshaw… une foule de gens attendre pour soirée. » je lui souris avec amusement, glissant un chèque entre ses mains moites bien que je le payais déjà une fortune pour sa complicité et son silence sur mes fréquentations et le types de personnes qui venaient me visiter. Pourtant ce soir il semblait plus qu’embarrassé. Il se livrait à des gesticulations effrénées et à un discours où les formules suppliantes se mêlaient aux menaces dans la proportion la plus comique ; il parlait fort avec une volubilité effrayante et un accent à couper au couteau, réclamant un surcroît de paie, et jurant sur dieu qu'il n'avait pas été suffisamment récompensé de sa fatigue et de ses mensonges à son patron. « Nobu calme toi, tu ne risques rien, nous ne seront pas très bruyant ce soir. » Il jeta un regard perfide à ma horde qui déjà investissait l’immense immeuble pour rejoindre ma chambre. « ils sont déjà grand nombre dans votre suite… et il y a anglais, pas pour soirée, il vient de…Norbitch.. Norvish… » Je fronçai les sourcils avec inquiétude. « Norwich ? Nobu acquiesça avec gravité. J‘observai la douceur dans ses yeux satinés, je glissai ensuite ma main sur son épaule. « Nobu, il est brun ? Joli garçon ? Charismatique, l’œil un peu grave ? Le maintient puissant ? Il hocha la tête une nouvelle fois et un sourire attendrit se dessina sur mes lèvres cerise, un murmure s’échappa de ma bouche lorsque déjà je me ruais vers l’ascenseur. Lust… »
Arrivée dans ma suite déjà bondée, je cherchai du regard mon meilleur ami que je n’avais plus vu depuis l’incident, un sourire franc était gravé sur mon visage de poupée, alors que je traversais la foule qui m’adressait tantôt un mot, tantôt un geste que je choisissais d‘ignorer pour le moment. « Meteora… » Une voix douce et suave que je pouvais reconnaître entre milles interrompit mes recherches. Je me retournai lentement avec la délicatesse et la grâce d’un félin, affichant sur mon doux visage une expression contrastée de surprise et de douceur. Je plongeai alors mes yeux dans les prunelles d’Elia qui se tenait devant moi, et qui venait de m’aborder de sa voix mielleuse. Un rire m’échappa, il correspondait à la description que j’avais fait à Nobu tout autant que Lust, pourtant, malgré l’amour que je portais à Elia j’aurais aimé ne point me tromper, 8 jours que j’étais partie et le manque de mon meilleur ami se faisait ressentir. Déjà. Qui plus est, je connaissais la raison de la venue d‘Elia, il désirait certainement que je rentre, malheureusement pour mon ami ça n’était pas dans mes plans. Il se rua tout de même dans mes bras et je le laissai m’étreindre un instant avant de me retirer le sourcil froncé. « Eli… je ne veux pas rentrer ! Ça ne sert à rien… » Et je m’éloignai pour rejoindre l’immense vitre de ma suite, qui m’offrait un panorama somptueux.
Les doigt longs et fins de ma main posée sur le mur de glace glissaient sur cette surface transparente, mon épiderme fut parcourue de frissons. Mon visage, d’une pâleur porcelaine, ruisselait sous la lumière de la lune-mère, ce doux visage rond, brillant et bienveillant qui gouvernait le ciel une fois la nuit tombée et traversait la maigre vitre scintillante de ma chambre pour venir éclairer mes traits carnassiers en m’aveuglant partiellement. L’alcool se propageait dans mon sang trop liquide à une vitesse folle, faisant monter la chaleur d’un feu ardent dans mon corps osseux. La sueur perlait sur mon visage fatigué tandis que je glissais doucement le revers de ma main sur mon front bombé. Le monde semblait tourner sous mes pieds, j’aimais cette sensation enivrante de légèreté, cette divine impression que plus rien n’est comme avant, que l’univers et ma perception de la vie se trouvaient totalement chamboulés, qu’une autre personne faisait son apparition au sein de mon corps. C’était à cette sensation que je me droguais plus qu’a l’alcool lui-même, c’était ça ma réelle dépendance. Je glissai mon regard injecté de la ville à la voie lactée. Cependant mon observation astrale était brouillée, la vitre dessinait en effet sur sa mince glace les traits de ma personne. Mon visage couleur porcelaine me semblait d’une maigreur accablante, une imperceptible auréole entourait mes yeux azurés. Perché dans ma tour d’argent, j’étais isolée une fois de plus des tous ces adolescents en perdition, désireuse de garder ce soir l’alcool que j’avais assimilé, pour seul compagnon. Mais les voix de la boisson ne sont pas impénétrables.
« Tu dois rentrer ! L’école reprend. »
« Ce n’est pas une raison suffisante… »
« Tu nous manques… »
« Ca va passer… »
« On s’inquiète pour toi… »
« Je n’ai pas besoin de votre pitié… »
« Lust a besoin de toi. »
« Il a sa copine… »
« METEORA ! C’est sérieux. »
« QUOI Elia ? Si c’est mon corps qui te manque ça peut s’arranger ici tout de suite… » Un rictus de satyre lubrique se dessina sur mes traits angéliques, je laissai échapper un rire effrayant, lorsque je compris que mon ami ne rigolait pas. Je fronçai les sourcils intriguée. Je sifflai vilement avant de me tourner totalement vers lui avec grande peine, je croisai mes bras sous ma poitrine, plantant mes pupilles d’ébène dans l’océan de ses yeux fuyant. Mes traits étaient habités d’une expression de prestance presque démoniaque. Et il savait qu’il devait parler à cœur ouvert, c’était l’unique moyen qu’il lui restait pour me faire tomber de ma tour d’argent. Il s’éclaircit la voix avec gravité avant de glisser ses yeux sur la vitre. « Je voulais qu’il te l’annonce lui-même mais tu ne me laisses pas d’autre choix… » Mon cœur s’emballait avec douleur, je savais que le « Il » dont il parlait était Lust. Je retins ma respiration, muée dans une attente insoutenable. Lorsqu’enfin le couperet tomba.
« Le père de Lust est mort. » Mes yeux s’écarquillèrent et la bouteille que je tenais fermement dans ma main glissa naturellement pour se briser sur le sol. Je fus paralysée un instant, muée dans la surprise, la peur, la honte de n’avoir pas été là, le douleur pour mon âme sœur que je savais meurtrie. Mais rapidement, je retrouvai cette force qui me caractérisait, et voilant mon visage de cet air de dureté, je me ruai dans mon placard pour saisir une veste et mon sac. « Tu vas ou ? » La voix d’une de mes amies retentit, je lui saisi l’épaule avant de glisser ma bouche jusqu’au lobe de son oreille. « Occupe toi de cette soirée, je reviens rapidement, je dois aller voir un ami. » Et je relâchai ma prise. Brutalement j’attrapai la main d’Elia et me dirigeai vers la sortie sous les cris de mes amis ahuris. Une fois dans l’ascenseur je refermai ma prise autour des doigts osseux de mon amant avant de transplaner avec lui. Je ne sais combien de temps dura notre voyage dans ce brouillard immatériel, mais bientôt nos pieds touchèrent le sol terreux du parc d’Hungcalf. Je plongeai alors mes yeux anxieux sur les alentours lorsqu’Elia entoura mon visage porcelaine de ses mains de velours. « Il est aux remparts… mes yeux se durcirent un peu plus, que faisait-il aux remparts seul, une peur intense saisit mes trippes, allait-il faire une bêtise? Je pouvais sentir mon cœur marteler ma poitrine branlante. Mais Elia me rassura, mon amour… aurais-tu la faculté de lire dans mes pensées ? Ne t’en fais pas… il ne va pas faire de conneries, il a juste besoin de réfléchir, vas-y! » J’embrassai Elia avec tendresse, lui témoignant ainsi ma gratitude. « Merci… » et je m’enfuis dans un murmure, une pointe d’insécurité s’enfonça avec violence au creux de mon cœur oppressé par un nombre incalculable de sentiments incontrôlés. Je courais à en perdre haleine pour retrouver mon Lust et l’idée de le voir bouleversé me fissurait le cœur. Arrivée aux remparts je grimpai rapidement, et j’aperçu sa silhouette majestueuse au loin, alors que deux filles se tenaient devant moi et discutaient librement, pauvres petites, vous auriez du regarder aux alentours avant de vous imaginer seules.
« Il est seul… Désorienté, je pense qu’il a bu… puis tu as mis tes plus beaux atouts en valeur… vas-y. » Un rire violent m’échappa et les demoiselles surprises se tournèrent vers moi avec étonnement. Leurs teint de rose carnée devint rapidement plus livide et plus blême que l’astre lunaire qui nous surveillait depuis sa couche cosmique. « Si être habillée comme une catin est pour toi montrer tes plus beaux atouts, tu as raison. Je veux que vous partiez d’ici avant que je ne détruise vos petites vies insignifiantes. »Mes pupilles convulsèrent comme des vipères prêtent à attaquer, je laissai échapper un grognement presque animal, avant de m’approcher de ces imprudentes avec la prestance de la drogue, de l‘amour et de l‘alcool. Je glissai avec délicatesse la paume de ma main chaude sur le cou flexible et onduleux d‘une des demoiselles, avant de refermer avec force ma poigne sur sa peau de neige. Une expression de surprise traversa ses prunelles scintillantes, je pouvais mesurer la peur que je faisais naître en elle. « Il est casé. Et vous avez de la chance que ça ne soit pas avec moi, si ça avait été le cas… Je vous aurais détruit sur le champ! Maintenant dégagez ! » La jalousie naissait dans les yeux de ces adolescentes. Qui ne savait pas dans le milieu des junkies qui étaient Lust et sa belle Meteora ? Notre relation était édénique et sulfureuse. Jamais amants n’avaient été aussi enviés. Et même sans ce lien charnel et malsain, notre amour était aussi indéniable qu’inexplicable. C’était une chose céleste et démoniaque. Etrange filiation que la cour des junkies jalousait avec ferveur. J’étais si protectrice envers lui. Je m’attirais les foudres des catins que Lust avait eu le malheur de délaisser au lendemain d’une valse torride, alors que moi, je restais à ses côtés depuis toujours. J’étais son reflet, je me mouvais comme si je m’orientais systématiquement en fonction de lui, disait-on. Lorsqu'il lui arrivait d‘émettre un mouvement, même un infime déplacement, moi, doux satellite, ajustais ma position à la sienne. Il était tout ce qui faisait mon importance dans cette école, et ces filles jalousait la place à laquelle il m’avait propulsé le jour où il avait décidé de faire de moi sa poupée. Cependant elles n’osaient rien faire pour me faire chuter, elles étaient bien trop effrayées par ma personne et je ne m’en plaignais pas. Ainsi je les vis déguerpir à toute vitesse et je pu me ruer sur Lust avec inquiétude.
Je m’approchai de Lust, accoudé à un rempart, et plantant mon regard paniqué sur sa silhouette statique, j‘esquissai un sourire tendre qui se voulait sincère et fragile mais qu‘il ne pouvait voir. Cet homme dans toute sa prestance magnifique avant le don de guérir une légère partie de mon âme, il rebouchait chaque jour une nouvelle petite fissure, lui seul avait cette capacité et j’ignorais totalement pourquoi. Ce dont j’avais conscience c’est que ça me perturbait et que je devais apprendre à vivre avec cette partie de moi que je ne connaissais pas, avec ce pouvoir indescriptible qu‘il possédait sur moi. Il me semblait parfois qu’il savait lire en moi mieux que l’enfant stupide et fragilisé que j’étais devenu ne savait le faire. Et une partie de moi espérait avoir le même pouvoir sur lui. Arrivée à sa hauteur, je glissai mes bras tremblants autour de sa taille pour poser mon front entre ses deux omoplates saillantes, gagnée par son odeur de fleur d’oranger et de vanille, mon cœur se serra un peu plus encore. Je ne bougeai pas pendant un instant, me contentant d’enrouler mes bras autour de son torse bombé. Et finalement je glissai ma main glacée le long de son bras pour délicatement, lui ôter la bouteille qu’il tenait entre ses doigts. Une fois ceci fait, je la posai sur le sol avant de m’accouder contre le rempart à ses côtés. « Lust… je suis désolée. » Ma voix se fit faible, une douceur affligeante s’emparait de mon timbre toujours poussé par la divine substance liquide, guidée par ce feu enflammé qui courait toujours dans mes veines trop épaisses, avec bien moins de violence qu’auparavant mais avec plus de prestance et de poids, il me semblait que face à Lust, je dessaoulais rapidement comme si mon cerveau avait décrété qu’il avait besoin de toute sa lucidité pour maîtriser cette situation et que l’alcool s’évaporait pour quitter mon corps tremblant. Mes yeux glissèrent avec trop de facilité sur le profil de Lust que je scrutais pour se percuter à la pierre fissurée du rempart. « Parle moi… je suis là. » Un élan de douceur s’échappait de ma bouche, en y enlevant au passage le goût acre de l’alcool et la puissante amertume qui habitaient mes lèvres habituellement pour y laisser une douceur fugace et une sincérité brève. Je glissai ensuite le revers de ma main de velours sur sa joue nacrée, geste maternel et d’une tendresse émouvante venant de ma personne. Mais j’avais peur qu’il ne me repousse, je connaissais le Lust blessé, mais ce soir, je n’avais pas peur de m’y confronter. Je le fixai pendant quelques minutes, avec une intensité opiniâtre, les regards de mes prunelles bleues se firent plus tendre ; mes sourcils se dessinèrent avec plus de gravité, mes joues s'arrondirent et se veloutèrent comme des pêches de toute la fraîcheur de la jeunesse ; mes yeux s'ouvrirent scintillants voilé par un filet salé. Et ma bouche tremblante s’ouvrit pour laisser glisser ma voix, cependant aucun son ne pu sortir. Je me contentai de le scruter avec douleur. Mon doux Lust, je t’en prie, parle moi…
- InvitéInvité
Re: A la mémoire de Whitaker père. [LUST]
Sam 4 Sep 2010 - 18:44
La terre tournait rond. Sacrilège. En fait, elle pouvait très bien tourner sans moi : je l'avais toujours ignoré. Et je me sentais aspiré par un gouffre sans fin qui m'attirait vers les géhennes et ses douleurs, plombant mon corps d'un vide qui ne m'avait jamais habité. Et autour de moi la vie : pathétique, grossière, soit disant dynamique mais pourtant inerte : ils dansaient tous avec leurs clopes à la main, dans cette impression étrange de ne faire qu'un, malgré la masse agglutinée : les enfants de la génération chimique sont une unicité lorsqu'ils sont sous drogues, dure ou douce, peu importe. Cette fête donnée dans les locaux de l'université ne faisait pas frémir mes sens, comme à l'accoutumée ; j'étais spectre parmi les spectres : sans éclats, sans envie, sans but. Seule la passion hargneuse étreignait mon coeur meurtri et endormait les brumes de mon cerveau qui ne réfléchissait plus : je n'étais pas saoul, j'étais pire. Et ma tête brune vint se poser contre le sofa sur lequel je trônais, princier et perdu : je donnais l'effet d'être un noble chevalier dont le château n'était plus fait que de ronces, l'air ténébreux et grave, la haine en étendard. J'écoutais, j'entendais, j'aspirais encore à exister mais j'ignorais où je me situais : entre la réalité et l'illusion, quelque part entre le sommeil et le réveil, quelque part dans un monde qu'ils ne connaissaient pas. J'avais sans doute ingéré déjà de nombreux petits cachets également, à sentir ma gorge sèche et ma langue pâteuse malgré la vodka coulant à flot dans mon oesophage et le goulot de cette bouteille semblant ne plus quitter mes lèvres. Je ne craignais pas l'overdose, je ne craignais pas de mourir, je craignais simplement de vivre. Certes, je n'avais jamais porté mon paternel dans mon coeur, mais à présent, qu'adviendrait-il de moi ? J'avais la solitude pour compagne et le charisme comme allié, mais je me sentais abandonné d'un monde qui ne voulait plus de moi. Parfait donc, je ne voudrais plus de lui, puisque c'était ainsi. Et paradoxalement je voulais vivre, encore, toujours, avec excès, je voulais sentir et souffrir, je voulais abattre et détruire, j'avais le démon de l'annihilation dans mes veines. Le génocide du bien-être, c'était ça, mon objectif : je voulais qu'ils souffrent tous avec moi... Non. En fait je voulais gueuler ma haine à la face du monde, exorciser ma putain de souffrance qui me prenait les tripes à chaque respiration, et partir. Les abandonner. Oh oui, les abandonner avant qu'ils ne le fassent, mais jamais sans leur avoir enfoui la tête sous l'eau.
Pour l'heure, mes ambitions sournoises étaient loin d'être réalisables, car l'alcool engourdissait tant mon esprit, et la drogue plombait tant chaque membre de mon corps, que j'étais dans l'incapacité totale de faire quoique ce soit. Même clore mes lourdes paupières devenait une épreuve, et sitôt fait, je pouvais entendre le bruit sourd d'une musique qui se faisait écho. J'avais cette étrange impression de me noyer, et dieu que c'était stupidement agréable : les sons vous parviennent seulement lointains et déformés, la sérénité vous assaille la poitrine qui vous ordonne de ne plus respirer, et vous n'aspirez plus rien. Plus d'oxygène, plus de dioxyde de carbone, plus d'odorat, plus rien. Une main fraiche glissant sous ma chemise vint me sortir de ma léthargie, et ce fut avec peine que je rouvris mes yeux ambrés sur la jolie blonde qui me souriait alors. Incapable de réagir, j'eus un bref soupir las, non sans tenter de redresser la tête avec difficulté. La belle se mit à rire, mais le timbre de sa voix fluette m'arracha un froncement de sourcils : « shhht », implorait mon cerveau qui semblait abriter tout un orchestre symphonique. Les minutes passèrent, ou les heures peut-être qu'en savais-je, sans que je ne comprenne ce qui ne m'arrive. On me traîna sur la piste de danse, je me souviens avoir bu, ri, chanté, flirté, engueulé, froissé, blessé, allumé, provoqué, envoûté... Puis une autre main m'attrape et me tire hors de la masse ; c'est un Grymm qui se tient face à moi, et sa mine inquiète me fait rire. Son angoisse provoque en moi une hilarité fourbe glissée en un sourire obscur qui s'efface aussitôt. Visiblement je suis...
« … bien raide. » scande mon interlocuteur par-delà la musique sourde. Mais franchement, est-ce vraiment la première fois ? « J'ai cru que la blonde là-bas allait te violer. »
« Je la prends au viol quand je veux. » soufflais-je dans des mots complètement décousus et illogiques, portant ma précieuse bouteille aux lèvres.
« On s'inquiète tu sais. » Je fronce alors les sourcils : c'est idiot. Car il m'a toujours connu ainsi, fêtard et débauché, ai-je vraiment l'attitude qui ait tant changée pour qu'on me prenne en pitié ? « Lust je sais pas ce que t'as, mais depuis la rentrée t'es bizarre... Viens je te raccompagne chez toi. »
« Va te faire voir. »
« Allez déconne pas, mec, viens ! » fit-il non sans me tirer par le bras de force, d'un geste amical que mon esprit alcoolisé accueillit comme un acte d'agression. Sentant la haine venir bouillir en mes veines, je poussais alors mon interlocuteur dans une force brusque et des plus violentes. Un loup blessé est un loup sanguinaire. Par ailleurs, un rictus sournois se dessinait sur mes lèvres désirables.
« Quoi, tu veux te battre c'est ça. Tu veux que je t'explose la tête contre le mur ? Viens ! »
Et j'avançais non sans le pousser encore et encore, avec brutalité, d'une force brutale et animale, le sang piqué d'une envie de violence, de sang et de souffrance, quand moins mon interlocuteur tentait de se défendre, abasourdi, et plus je me montrais dangereux. Mes poings se serrèrent avec virulence tandis que mon regard assassin dardait l'émeraude de ses yeux lorsqu'il tenta quelques mots qui, loin de me calmer, attisèrent mes palpitations sanguinaires.
« Calme-toi, t'es pas dans ton état normal... »
« Ah non ? Næsti ! Eins og ég þú mölbrotna hann höfuðkúpa ! »
Je sens ma propre voix suave qui se fait meurtrière, sanguine, impressionnante, mauvaise. Je sens le regard des autres horrifiés sur nous, et je sens surtout ses mots qui me heurtent et me blessent... Car je suis dans mon état normal, c'est à l'apogée de la vodka que j'expose mes plaies qui m'offrent des spasmes d'agonie sublime. D'une envie carnassière, j'allais pour me jeter sur mon ami, prêt à l'abattre de mes poings, de ma hargne, de ma rage : ma souffrance à son paroxysme se mue en une haine physique, j'ai besoin de faire du mal. Concrètement. J'ai besoin d'entendre ses gémissements de douleur, j'ai besoin de détruire, j'ai besoin d'expier, j'ai besoin qu'on m'abatte, moi aussi... Et de ma langue natale qui ne s'échappe de mes lèvres que lorsque mon mépris est au plus haut point, lorsque ma colère atteint son paroxysme, lorsque mon coeur chante des mélopées d'amoureux transi, en somme lorsque mes sentiments semblent exacerbés, je le menace avec hargne lorsqu'une main amie vint m'arrêter. Un peu plus, et je l'aurais fracassé le crâne contre le mur... Me sentant contenu par une silhouette familière, je serre la mâchoire malgré cette haine qui me hante avec force, quand enfin je tourne mon regard d'ambre vers Elia. C'est lui qui m'a retenu, qui m'a empêché de faire une connerie, qui me toise avec inquiétude. Mais sans un mot, je me dégage de son étreinte d'un coup d'épaule et tourne les talons non sans un regard mauvais. Reprenant ma précieuse bouteille au passage, je quitte les lieux pour mieux m'oxygéner. Il me semble que cela fait des semaines, que je vis en apnée.
La brise fraîche sur mon visage vint m'éclaircir quelque peu l'esprit, mais mon coeur de marbre demeurait le même. J'avais beau être entouré, je sentais la solitude me peser d'une sournoise perversion ; ils ne pouvaient pas comprendre. Comment pouvais-je décrire ce vide qui m'habitait, puisqu'à proprement parler je n'étais plus que rempli d'un 'rien'. Je tâtonne, je tombe, j'attrape le drap d'un mort pour qu'il me recouvre tout en voulant vivre. Je suis ivre et pourtant si lucide, je vomis le monde et ses outrances à la con, je ne veux plus rien, si ce n'est qu'on me foute la paix. Et le rire stupide de ces demoiselles au loin ne me fait plus rien, car pour quelques semaines, quelques mois, quelques années, je suis mort : mon palpitant est décédé, mon cerveau ne répond plus de rien, j'ai décidé que je ne vivrais plus, jusqu'à ce que je n'ai pas trouvé la sérénité. Mais que me manque-t-il, pour que je me sente mieux ? Il me semble que j'ai tout, pourtant ; l'argent, les demoiselles, la popularité, le soutien des amis... Mais il me semble aussi qu'il me manque la certitude qu'on ne m'abandonnera pas de nouveau. En toute probabilité, je ne suis ni peiné ni au bord du gouffre, je suis en colère contre le monde grondant. Et j'ai beau lui cracher mon cynisme à la figure, il ne s'ébranle pas. Habituellement, ils courbent tous l'échine face à mes talents d'orateur. Mais pas lui. Ca me tue.
Une main frêle vint se poser sur mon bras puissant, mais statique, je ne cillais guère et gardais l'ambre de mes rétine sur ce point invisible à l'horizon. La brume de mon esprit m'empêchait de penser correctement, je me sentais ici et ailleurs, mort et vif, puissant et faible, hargneux et las... Je ne savais plus rien, et ne cherchais pas à comprendre. Et cette voix familière qui me paraissait sortie d'un rêve résonna jusqu'à mes tympans : je l'entendais sans l'écouter, peut-être était-ce un mirage, bien que je pouvais percevoir physiquement sa présence. Peut-être aussi, que je n'avais pas envie de la savoir à mes côtés. Car j'avais enduré seul, la mort de mon père et la folie de ma génitrice, pourquoi revenait-elle aujourd'hui, par pitié ? Cette pensée qui me paraissait une vérité universelle, acheva d'embraser ma colère pour elle. Mon regard fauve se durcit, ma mâchoire se serra, mais mes doigts fins lui laissèrent cette bouteille qu'elle désirait tant. Puis, se redressant de nouveau, elle se tourna vers moi, sa voix se faisant si douce qu'elle m'en donnait des nausées. Je n'en avais pas besoin, de leur pathétique tendresse. J'aimais le roc de la méchanceté, la glace de l'indifférence, le feu de ma passion et le poison de mon cynisme, mais je détestais la chaleur de leur douceur pathétique. « Parle moi… je suis là. » Un rire jaune et mauvais s'échappa de mes lèvres en un souffle discret mais blessant, quand l'ombre de mes yeux demeurait fixé droit devant moi. Foutaises. Elle n'avait pas été là, lorsque moi j'en avais eu besoin. Tandis que moi, je l'avais eue dans mes bras, je l'avais portée à l'infirmerie, j'avais veillé sur elle toutes les nuits suivant son geste désespéré. Et qu'avais-je eu en retour ? … Bon baisers de Tokyo. « Va te faire voir ». soufflais-je d'un murmure venimeux alors que d'un geste vif, j'ôtais ma joue de sa main caressante. Enfin, je tournais l'ambre de mon regard sur sa mine inquiète. « Pourquoi t'es là, on t'a dit de venir pas vrai ? Un gentil camarade s'est inquiété à ta place et est venu te chercher. Mais tu serais pas venue de toi même, hmm... ? » Un silence court mais suffisamment explicite pour m'apporter une réponse, et j'eus un rictus carnassier. « Je t'ai dit de foutre le camp. » Et cette fois, plus qu'un conseil désagréable, c'était un ordre scandé avec haine et souffrance.
Pour l'heure, mes ambitions sournoises étaient loin d'être réalisables, car l'alcool engourdissait tant mon esprit, et la drogue plombait tant chaque membre de mon corps, que j'étais dans l'incapacité totale de faire quoique ce soit. Même clore mes lourdes paupières devenait une épreuve, et sitôt fait, je pouvais entendre le bruit sourd d'une musique qui se faisait écho. J'avais cette étrange impression de me noyer, et dieu que c'était stupidement agréable : les sons vous parviennent seulement lointains et déformés, la sérénité vous assaille la poitrine qui vous ordonne de ne plus respirer, et vous n'aspirez plus rien. Plus d'oxygène, plus de dioxyde de carbone, plus d'odorat, plus rien. Une main fraiche glissant sous ma chemise vint me sortir de ma léthargie, et ce fut avec peine que je rouvris mes yeux ambrés sur la jolie blonde qui me souriait alors. Incapable de réagir, j'eus un bref soupir las, non sans tenter de redresser la tête avec difficulté. La belle se mit à rire, mais le timbre de sa voix fluette m'arracha un froncement de sourcils : « shhht », implorait mon cerveau qui semblait abriter tout un orchestre symphonique. Les minutes passèrent, ou les heures peut-être qu'en savais-je, sans que je ne comprenne ce qui ne m'arrive. On me traîna sur la piste de danse, je me souviens avoir bu, ri, chanté, flirté, engueulé, froissé, blessé, allumé, provoqué, envoûté... Puis une autre main m'attrape et me tire hors de la masse ; c'est un Grymm qui se tient face à moi, et sa mine inquiète me fait rire. Son angoisse provoque en moi une hilarité fourbe glissée en un sourire obscur qui s'efface aussitôt. Visiblement je suis...
« … bien raide. » scande mon interlocuteur par-delà la musique sourde. Mais franchement, est-ce vraiment la première fois ? « J'ai cru que la blonde là-bas allait te violer. »
« Je la prends au viol quand je veux. » soufflais-je dans des mots complètement décousus et illogiques, portant ma précieuse bouteille aux lèvres.
« On s'inquiète tu sais. » Je fronce alors les sourcils : c'est idiot. Car il m'a toujours connu ainsi, fêtard et débauché, ai-je vraiment l'attitude qui ait tant changée pour qu'on me prenne en pitié ? « Lust je sais pas ce que t'as, mais depuis la rentrée t'es bizarre... Viens je te raccompagne chez toi. »
« Va te faire voir. »
« Allez déconne pas, mec, viens ! » fit-il non sans me tirer par le bras de force, d'un geste amical que mon esprit alcoolisé accueillit comme un acte d'agression. Sentant la haine venir bouillir en mes veines, je poussais alors mon interlocuteur dans une force brusque et des plus violentes. Un loup blessé est un loup sanguinaire. Par ailleurs, un rictus sournois se dessinait sur mes lèvres désirables.
« Quoi, tu veux te battre c'est ça. Tu veux que je t'explose la tête contre le mur ? Viens ! »
Et j'avançais non sans le pousser encore et encore, avec brutalité, d'une force brutale et animale, le sang piqué d'une envie de violence, de sang et de souffrance, quand moins mon interlocuteur tentait de se défendre, abasourdi, et plus je me montrais dangereux. Mes poings se serrèrent avec virulence tandis que mon regard assassin dardait l'émeraude de ses yeux lorsqu'il tenta quelques mots qui, loin de me calmer, attisèrent mes palpitations sanguinaires.
« Calme-toi, t'es pas dans ton état normal... »
« Ah non ? Næsti ! Eins og ég þú mölbrotna hann höfuðkúpa ! »
Je sens ma propre voix suave qui se fait meurtrière, sanguine, impressionnante, mauvaise. Je sens le regard des autres horrifiés sur nous, et je sens surtout ses mots qui me heurtent et me blessent... Car je suis dans mon état normal, c'est à l'apogée de la vodka que j'expose mes plaies qui m'offrent des spasmes d'agonie sublime. D'une envie carnassière, j'allais pour me jeter sur mon ami, prêt à l'abattre de mes poings, de ma hargne, de ma rage : ma souffrance à son paroxysme se mue en une haine physique, j'ai besoin de faire du mal. Concrètement. J'ai besoin d'entendre ses gémissements de douleur, j'ai besoin de détruire, j'ai besoin d'expier, j'ai besoin qu'on m'abatte, moi aussi... Et de ma langue natale qui ne s'échappe de mes lèvres que lorsque mon mépris est au plus haut point, lorsque ma colère atteint son paroxysme, lorsque mon coeur chante des mélopées d'amoureux transi, en somme lorsque mes sentiments semblent exacerbés, je le menace avec hargne lorsqu'une main amie vint m'arrêter. Un peu plus, et je l'aurais fracassé le crâne contre le mur... Me sentant contenu par une silhouette familière, je serre la mâchoire malgré cette haine qui me hante avec force, quand enfin je tourne mon regard d'ambre vers Elia. C'est lui qui m'a retenu, qui m'a empêché de faire une connerie, qui me toise avec inquiétude. Mais sans un mot, je me dégage de son étreinte d'un coup d'épaule et tourne les talons non sans un regard mauvais. Reprenant ma précieuse bouteille au passage, je quitte les lieux pour mieux m'oxygéner. Il me semble que cela fait des semaines, que je vis en apnée.
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La brise fraîche sur mon visage vint m'éclaircir quelque peu l'esprit, mais mon coeur de marbre demeurait le même. J'avais beau être entouré, je sentais la solitude me peser d'une sournoise perversion ; ils ne pouvaient pas comprendre. Comment pouvais-je décrire ce vide qui m'habitait, puisqu'à proprement parler je n'étais plus que rempli d'un 'rien'. Je tâtonne, je tombe, j'attrape le drap d'un mort pour qu'il me recouvre tout en voulant vivre. Je suis ivre et pourtant si lucide, je vomis le monde et ses outrances à la con, je ne veux plus rien, si ce n'est qu'on me foute la paix. Et le rire stupide de ces demoiselles au loin ne me fait plus rien, car pour quelques semaines, quelques mois, quelques années, je suis mort : mon palpitant est décédé, mon cerveau ne répond plus de rien, j'ai décidé que je ne vivrais plus, jusqu'à ce que je n'ai pas trouvé la sérénité. Mais que me manque-t-il, pour que je me sente mieux ? Il me semble que j'ai tout, pourtant ; l'argent, les demoiselles, la popularité, le soutien des amis... Mais il me semble aussi qu'il me manque la certitude qu'on ne m'abandonnera pas de nouveau. En toute probabilité, je ne suis ni peiné ni au bord du gouffre, je suis en colère contre le monde grondant. Et j'ai beau lui cracher mon cynisme à la figure, il ne s'ébranle pas. Habituellement, ils courbent tous l'échine face à mes talents d'orateur. Mais pas lui. Ca me tue.
Une main frêle vint se poser sur mon bras puissant, mais statique, je ne cillais guère et gardais l'ambre de mes rétine sur ce point invisible à l'horizon. La brume de mon esprit m'empêchait de penser correctement, je me sentais ici et ailleurs, mort et vif, puissant et faible, hargneux et las... Je ne savais plus rien, et ne cherchais pas à comprendre. Et cette voix familière qui me paraissait sortie d'un rêve résonna jusqu'à mes tympans : je l'entendais sans l'écouter, peut-être était-ce un mirage, bien que je pouvais percevoir physiquement sa présence. Peut-être aussi, que je n'avais pas envie de la savoir à mes côtés. Car j'avais enduré seul, la mort de mon père et la folie de ma génitrice, pourquoi revenait-elle aujourd'hui, par pitié ? Cette pensée qui me paraissait une vérité universelle, acheva d'embraser ma colère pour elle. Mon regard fauve se durcit, ma mâchoire se serra, mais mes doigts fins lui laissèrent cette bouteille qu'elle désirait tant. Puis, se redressant de nouveau, elle se tourna vers moi, sa voix se faisant si douce qu'elle m'en donnait des nausées. Je n'en avais pas besoin, de leur pathétique tendresse. J'aimais le roc de la méchanceté, la glace de l'indifférence, le feu de ma passion et le poison de mon cynisme, mais je détestais la chaleur de leur douceur pathétique. « Parle moi… je suis là. » Un rire jaune et mauvais s'échappa de mes lèvres en un souffle discret mais blessant, quand l'ombre de mes yeux demeurait fixé droit devant moi. Foutaises. Elle n'avait pas été là, lorsque moi j'en avais eu besoin. Tandis que moi, je l'avais eue dans mes bras, je l'avais portée à l'infirmerie, j'avais veillé sur elle toutes les nuits suivant son geste désespéré. Et qu'avais-je eu en retour ? … Bon baisers de Tokyo. « Va te faire voir ». soufflais-je d'un murmure venimeux alors que d'un geste vif, j'ôtais ma joue de sa main caressante. Enfin, je tournais l'ambre de mon regard sur sa mine inquiète. « Pourquoi t'es là, on t'a dit de venir pas vrai ? Un gentil camarade s'est inquiété à ta place et est venu te chercher. Mais tu serais pas venue de toi même, hmm... ? » Un silence court mais suffisamment explicite pour m'apporter une réponse, et j'eus un rictus carnassier. « Je t'ai dit de foutre le camp. » Et cette fois, plus qu'un conseil désagréable, c'était un ordre scandé avec haine et souffrance.
- InvitéInvité
Re: A la mémoire de Whitaker père. [LUST]
Mer 13 Oct 2010 - 23:00
« Va te faire voir… » Une phrase, une douleur qui lacérait ma cage thoracique encombrée. Ce dernier mot glissant de sa bouche avec tant de facilité vint se planter dans mon âme avec une brutalité si effrayante que je ne pu me retenir de fermer les yeux un instant pour mieux la ressentir. Etrangement, cette affliction acerbe m’apportait une saveur extrême de vie intense. Je n’étais pas désireuse de répondre à cette phrase qui venait de m’écorchée vive, du moins pas tout de suite. Mes yeux se plantèrent pourtant avec trop de tendresse dans les pupilles assombries du garçon. Ce visage me semblait encore plus beau qu’à son ordinaire. Je préférai finalement glisser mes iris azurés sur ce mur de brique qui s‘étendait devant nous, m’évitant ainsi la douleur que ce visage dur et violent faisait naître en moi. Un flot continu de questions s’emparait avec force de mon esprit habité alors par la substantifique poudre blanche, véritable reine de Tokyo. Mais mon attention elle, se portait sur tout autre chose. Le combat incohérent que mes yeux, toujours posés sur la brique, livraient à ma raison m’épuisait, je laissai finalement les premiers gagner, guidés par le besoin physique de se poser sur les traits fins et marmoréens du jeune homme. La lumière astrale de la lune caressait sa peau avec tant de beauté que j’en avais le souffle coupé. Une fantaisie intense prit possession de mon esprit, un besoin intense me criait de prendre ce corps magistral dans mes bras frêles, de le serrer avec tant de convoitise et d’avidité que nos os se briseraient les uns contre les autres, que nos peaux se heurteraient avec souffrance, que nos cœurs, par confusion, battraient à un même rythme cardiaque régulier et magnifié. Je possédais ce besoin d’arrêter la course fatidique du temps par le simple pouvoir de notre étreindre. Je voulais être bercée par son odeur aigre et sucrée. Je voulais le rassurer, lui parler, l’épauler. Aux milieu de cette cohue d'émotions, je percevais la voix lointaine de Lust résonner.
« Pourquoi t'es là, on t'a dit de venir pas vrai ? Un gentil camarade s'est inquiété à ta place et est venu te chercher. Mais tu serais pas venue de toi même, hmm... ? » Son maintien était grave et sa voix altière, ses mots jetés dans l’air glacial de cette fin de soirée, résonnait en moi avec douleur et violence, incorporant dans mon coeur gelé un acre goût d’amer fatalité. Nous étions tout les deux statiques, dans cette posture grotesque, presque irréelle. Je fixai les fissures qui parcouraient la pierre des remparts, imaginant des motifs qui n'existaient pas. La pénombre nous englobait avec tant de force que je ne pouvais distinguer les traits séraphiques de Lust. Je grimaçai, juste une petite altération au coin de ma bouche. Rien qui n'attirerait l'attention de ce prince égaré dans la douleur, rien qui ne pouvait trahir la terrible souffrance qui perçait mon cœur lorsque les mots qu‘il m‘adressait étaient si violents. Pourquoi avais-je donc cet affreux sentiment d‘anéantissement, était-ce à cause de ce sentiment qui m’écrasait ainsi le coeur avec véhémence qu’il me semblait défaillir? Un air absent grave et infiniment plus froid m’habitait à présent. Toujours avec grandeur et décadence. Ma fierté voulait lui répondre, cependant ce soir j’engloutissais orgueil et amour-propre au nom de ma dévotion pour cet être aux ailes brisées. Je posai mon regard froid sur son profil. Sa peau était si translucide qu'il était difficile de croire que ça lui offrait une quelconque défense contre le monde extérieur. On pouvait voir le pouls cadencé de son sang à travers ses veines sous la pâle et claire membrane. C’était peut-être la raison qui me poussait à le protéger de la sorte ce soir. Je ne pu détacher mes iris perçantes de sa silhouette. Je remarquai avec étonnement que sa beauté avait pris quelque chose de languissant, que ses traits s'atténuaient en délicatesses morbides, que les veines de son cou oblongue étaient plus bleues qu'il ne le fallait, que son souffle heurté émettait des sons d'une vibration inquiétante et d'un charme douloureux. Je laissai échapper un soupire, unique témoin de mon inquiétude mais je décidai de garder ma carapace de dureté. Je ne devais pas enfilé les gants de la douceur mielleuse que j’avais emprunté à mon arrivée à ses côtés. Je me contentai de le toiser d’un air impassible et distant. Finalement, sa voix retentit, elle se fit haute et magistrale. Il me semblait qu’elle venait de fendre l’air avec la puissance du tonnerre. Je me sentis un instant défaillir sous le poids de ces mots acerbes qui une nouvelle fois m’étaient adressés. « Je t'ai dit de foutre le camp. » Mon cœur manqua un battement, une nausée violente me saisit un cour instant. Je sentais mon cœur se gonfler, imbibé de sang, il tentait de pomper toute la douleur de mon âme. Je souffrais, pourtant je ne prêtais pas attention à cette peine, ce qui comptait ce soir, c’était cette colère, cette violence que Lust me témoignait, cette meurtrissure, ce feu ardent qui parcourait ses veines. Cette gifle de la vie qui le faisait froid et dure. Il était pierre parmi les pierres ce soir, et j’étais inquiète, comme le vent et ce vertige devant le vide qui m‘attirait, le vide qui m’attirait vers la forêt dont je fixais l’alcôve de branches et de feuillages. Les yeux dans le vague, le vague à l’âme, je regardais depuis la pierre des remparts, je regardais sans vraiment regarder la forêt qui s’étendait devant moi, pleine d’une étrange tristesse. « Je n’irai nulle part Lust… » Ma voix se fit grave et magistrale. Je pouvais sentir cette colère l’habiter et glissant mes yeux sur sa peau de velours, je pouvais pratiquement voir l’électricité de sa rage l’envelopper. Je déglutis faiblement, et une nouvelle fois je me sentais défaillir devant le gouffre qui nous séparait pour le toute première fois de notre vie. Je succombai devant le totem sombre de ma solitude soudaine, il n‘était plus à mes côtés et dans ses yeux, plus une once d‘amour et de fierté, mais du dégout, de la colère, du mépris à mon égard. Et son regard croisa enfin le mien, et je me noyai brutalement dans l’emblème ombreux de ce qui devenait tout d’un coup insupportable et vaguement dangereux.
« Je ne vais pas partir. Hurle, insulte, brutalise, frappe moi, je n’en ai rien a faire, je ne partirai pas… Tu aurais agi de cette façon pour moi.. » Je le fixai avec gravité et sincérité, sans une once de tendresse pourtant. J’étais prête à subir toutes les horreurs du monde si ça pouvait lui être bénéfique. Je compris avec gravité que l’étendue de mon amour pour lui était sans bornes. Je ne détachai plus mes yeux des siens. Je tenais bon, pourtant, avançant avec précaution, je retenais l’angoisse au creux de ma poitrine pour l’éviter de déborder, la retenant au centre de mon corps comme ultime repère, comme ultime assurance de ma consistance de femme. Par soucis de sureté j’aurais pu et certainement du faire demi-tour aussitôt, mais quelque chose en moi m’attachait à lui et désirait peut-être même jouer sur ce fil tendu au-dessus de l’abîme, funambule grisé par son vertige, telle une femme vibrante de sentir la fragilité de son existence une fois arrivée aux portes d’un royaume de folle lumière où toute silhouette n’est plus qu’un spectre diaphane et irréel. J’étais loin de tomber, mais je pouvais sentir la corde sous mes pieds, tendue, oscillante, fine tranche de solide sur laquelle ma vie tenait en équilibre, ligne de survie sans filet de secours, marchant avec la perche de mon amour pour lui entre les mains pour maintenir mon équilibre dans cette situation périlleuse.
« Pourquoi t'es là, on t'a dit de venir pas vrai ? Un gentil camarade s'est inquiété à ta place et est venu te chercher. Mais tu serais pas venue de toi même, hmm... ? » Son maintien était grave et sa voix altière, ses mots jetés dans l’air glacial de cette fin de soirée, résonnait en moi avec douleur et violence, incorporant dans mon coeur gelé un acre goût d’amer fatalité. Nous étions tout les deux statiques, dans cette posture grotesque, presque irréelle. Je fixai les fissures qui parcouraient la pierre des remparts, imaginant des motifs qui n'existaient pas. La pénombre nous englobait avec tant de force que je ne pouvais distinguer les traits séraphiques de Lust. Je grimaçai, juste une petite altération au coin de ma bouche. Rien qui n'attirerait l'attention de ce prince égaré dans la douleur, rien qui ne pouvait trahir la terrible souffrance qui perçait mon cœur lorsque les mots qu‘il m‘adressait étaient si violents. Pourquoi avais-je donc cet affreux sentiment d‘anéantissement, était-ce à cause de ce sentiment qui m’écrasait ainsi le coeur avec véhémence qu’il me semblait défaillir? Un air absent grave et infiniment plus froid m’habitait à présent. Toujours avec grandeur et décadence. Ma fierté voulait lui répondre, cependant ce soir j’engloutissais orgueil et amour-propre au nom de ma dévotion pour cet être aux ailes brisées. Je posai mon regard froid sur son profil. Sa peau était si translucide qu'il était difficile de croire que ça lui offrait une quelconque défense contre le monde extérieur. On pouvait voir le pouls cadencé de son sang à travers ses veines sous la pâle et claire membrane. C’était peut-être la raison qui me poussait à le protéger de la sorte ce soir. Je ne pu détacher mes iris perçantes de sa silhouette. Je remarquai avec étonnement que sa beauté avait pris quelque chose de languissant, que ses traits s'atténuaient en délicatesses morbides, que les veines de son cou oblongue étaient plus bleues qu'il ne le fallait, que son souffle heurté émettait des sons d'une vibration inquiétante et d'un charme douloureux. Je laissai échapper un soupire, unique témoin de mon inquiétude mais je décidai de garder ma carapace de dureté. Je ne devais pas enfilé les gants de la douceur mielleuse que j’avais emprunté à mon arrivée à ses côtés. Je me contentai de le toiser d’un air impassible et distant. Finalement, sa voix retentit, elle se fit haute et magistrale. Il me semblait qu’elle venait de fendre l’air avec la puissance du tonnerre. Je me sentis un instant défaillir sous le poids de ces mots acerbes qui une nouvelle fois m’étaient adressés. « Je t'ai dit de foutre le camp. » Mon cœur manqua un battement, une nausée violente me saisit un cour instant. Je sentais mon cœur se gonfler, imbibé de sang, il tentait de pomper toute la douleur de mon âme. Je souffrais, pourtant je ne prêtais pas attention à cette peine, ce qui comptait ce soir, c’était cette colère, cette violence que Lust me témoignait, cette meurtrissure, ce feu ardent qui parcourait ses veines. Cette gifle de la vie qui le faisait froid et dure. Il était pierre parmi les pierres ce soir, et j’étais inquiète, comme le vent et ce vertige devant le vide qui m‘attirait, le vide qui m’attirait vers la forêt dont je fixais l’alcôve de branches et de feuillages. Les yeux dans le vague, le vague à l’âme, je regardais depuis la pierre des remparts, je regardais sans vraiment regarder la forêt qui s’étendait devant moi, pleine d’une étrange tristesse. « Je n’irai nulle part Lust… » Ma voix se fit grave et magistrale. Je pouvais sentir cette colère l’habiter et glissant mes yeux sur sa peau de velours, je pouvais pratiquement voir l’électricité de sa rage l’envelopper. Je déglutis faiblement, et une nouvelle fois je me sentais défaillir devant le gouffre qui nous séparait pour le toute première fois de notre vie. Je succombai devant le totem sombre de ma solitude soudaine, il n‘était plus à mes côtés et dans ses yeux, plus une once d‘amour et de fierté, mais du dégout, de la colère, du mépris à mon égard. Et son regard croisa enfin le mien, et je me noyai brutalement dans l’emblème ombreux de ce qui devenait tout d’un coup insupportable et vaguement dangereux.
« Je ne vais pas partir. Hurle, insulte, brutalise, frappe moi, je n’en ai rien a faire, je ne partirai pas… Tu aurais agi de cette façon pour moi.. » Je le fixai avec gravité et sincérité, sans une once de tendresse pourtant. J’étais prête à subir toutes les horreurs du monde si ça pouvait lui être bénéfique. Je compris avec gravité que l’étendue de mon amour pour lui était sans bornes. Je ne détachai plus mes yeux des siens. Je tenais bon, pourtant, avançant avec précaution, je retenais l’angoisse au creux de ma poitrine pour l’éviter de déborder, la retenant au centre de mon corps comme ultime repère, comme ultime assurance de ma consistance de femme. Par soucis de sureté j’aurais pu et certainement du faire demi-tour aussitôt, mais quelque chose en moi m’attachait à lui et désirait peut-être même jouer sur ce fil tendu au-dessus de l’abîme, funambule grisé par son vertige, telle une femme vibrante de sentir la fragilité de son existence une fois arrivée aux portes d’un royaume de folle lumière où toute silhouette n’est plus qu’un spectre diaphane et irréel. J’étais loin de tomber, mais je pouvais sentir la corde sous mes pieds, tendue, oscillante, fine tranche de solide sur laquelle ma vie tenait en équilibre, ligne de survie sans filet de secours, marchant avec la perche de mon amour pour lui entre les mains pour maintenir mon équilibre dans cette situation périlleuse.