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SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Lun 26 Juin 2017 - 19:01
In darkness we are revealed
You will need to know the difference between Friday and a fried egg. It's quite a simple difference, but an important one.
J'avais cherché d'où pouvait venir mes petites crises insomniaques. Pendant des années, j'avais essayé de trouver une réponse. Pourquoi je ne m'endormais pas comme tout le monde, pourquoi fallait-il toujours que je passe des nuits sans sommeil, Moprhée était-il secrètement amoureux de moi et préférait donc ne pas me voir pour ne pas attiser son désir ... trop perché. Et puis j'avais compris, ça allait trop vite dans le citron. Mon cerveau carburait et dans ces moments-là, dans ces moments de surrégime, inutile d'essayer de s'endormir, rien n'y ferait. Dans ces moments-là, je m'occupais en écrivant, en peignant, en dessinant, en jouant de la guitare, mais ce que je préférais, c'était explorer les couloirs vides et silencieux d'Hungcalf.
Comme toutes les écoles du monde, une fois la nuit tombée Hungcalf était vide, en sommeil, attendant patiemment de se remplir à nouveau du bruit des milliers d'élèves qui arpentaient ses couloirs toute la journée. La nuit, on se serait cru n'importe où sauf à Hungcalf : dans une maison hantée, un manoir abandonnée ; un lieu plein de nouvelles possibilités et d'aventures en devenir.
Je m'étais emparé de ma baguette, et de mon habituel manteau noir pour me protéger des nuits encore fraîches de l'Ecosse, pour me glisser telle une ombre dans les couloirs vides. Ombre parmi les ombres, je n'allumais ma baguette que pour me repérer plus facilement. Je n'avais aucun but précis, aucune destination, je prenais parfois un tournant et parfois je marchais tout droit pendant plusieurs minutes. Se faisant, j'observais les tableaux et je redécouvrais les détails architecturaux du château baigné d'un halo bleu pâle quand la lune venait les frapper de sa douce lumière.
Je me faisais la réflexion que les pierres semblaient moins ternes à la lumière de la lune quand je rencontrais un obstacle non déterminée qui eu pour conséquence de me faire tomber sur mon beau séant - je sais que vous avez regardé, et nous savons que mon séant est beau - non sans lâcher un juron bien sentie. « Nom d'une couille de dragon ! ». Un tableau commença à m'engueuler de l'avoir réveillé, mais je le fis taire d'un coup de baguette magique pour pouvoir inspecter tranquillement l'outrecuidant obstacle qui m'avait fait choir. Il s'agissait d'une porte ! Mais pas n'importe quelle porte : la porte des cuisines !
J'entrais et fus assailli immédiatement par un millier d'odeurs différentes. La cuisine était suffisamment bien éclairée pour que je n'ai plus besoin de ma baguette, je la rangeais donc et repérant une tasse de thé toute chaude, à peine servie, attendant gentiment qu'on la boive sur l'une des tables, je ne me fis pas prier et la prit. Buvant une gorgée salvatrice de ce breuvage divin, je cru reconnaître dans la préparation particulière de cette tasse, la marque de fabrique d'un certain individu. « Augurus ? », tentais-je, m'adressant aux coins d'ombre de la pièce. « Soit c'est ta tasse, soit quelqu'un a percé le secret de ton thé ! »
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Jeu 29 Juin 2017 - 12:53
Shoeburyness
AuguNian
Je connaissais chaque placard de la cuisine comme ma poche, pour en avoir fait le tour toutes les nuits depuis mon arrivée au château. A cette heure-ci, il régnait dans cette immense pièce une étrange atmosphère d'immobilité éphémère qui, dans quelques tours de cadrans, dans un fracas de bruits métalliques en tous genres, laisserait à quiconque l'impression que cette tranquillité n'eut été qu'une hallucination ou, au mieux, un lointain souvenir aux pourtours mal définis. Et tandis que j'allais récolter une gourmandise dans un coin de la pièce, j'entendis une voix familière s'élever, hésitante, près de l'entrée.
« Augurus ? Soit c'est ta tasse, soit quelqu'un a percé le secret de ton thé ! »
Je me révélais, m'extirpant des ombres, armé de deux pains au chocolat, seulement pour voir ce vieux filou de Ninain tremper ses lèvres dans ma tasse de thé. Non mais quel sans gêne ! Quel sacrilège ! me dis-je, intérieurement, amusé. Je lui envoyais un sourire gentiment moqueur. Tu crois que quelqu'un a trouvé, dans le troisième placard, ma réserve de sang humain qui donne ce goût si délicat à toutes mes préparations ? lui demandais-je, faussement inquiet en lui lançant un pain au chocolat pour combler son appétit en plus de la soif. J'avais compris le message. Fort heureusement, le château comptait un nombre incalculable de tasses et, à côté de moi, sur un égouttoir démesuré, une cinquantaine de tasses, à vue de nez, avaient déjà eu le loisir de sécher et n'attendaient plus qu'à être réutilisées. J'en saisis une qui ne tarda pas à se retrouver à nouveau remplie de ce breuvage miraculeux, qui dégageait des volutes vaporeuses assorties d'un délicat parfum fruité. Je faisais toujours un peu de thé en trop. une habitude qui me venait de ma mère, elle qui prévoyait toujours la venue d'un éventuel invité, à l'improviste.
La tasse remplie, dans une main ; un pain au chocolat dans l'autre, je vins me planter devant Ninian, face au gigantesque foyer où était accrochée une marmite dans laquelle on aurait pu faire bouillir deux ou trois personnes de ma taille. Je portais à mes lèvres cette boisson, non sans la porter d'abord devant moi, trinquant à nos rencontres nocturnes habituelles.
Alors, qu'est ce que c'est, cette nuit ? demandais-je en me léchant les lèvres, après avoir déglutit. Insomnies ? Cauchemars ? Ou peut-être est-ce une crise de somnambulisme qui t'a mis le nez dans la porte ? demandais-je avec malice avant d'engloutir une généreuse portion de pain au chocolat, sous entendant que j'avais entendu le bruit sourd à la porte ainsi que l'abominable juron qui avait naturellement suivi. Je devinais à ses yeux cernés, à sa mine grisâtre et tirée, ainsi qu'à nos précédentes rencontres, que le sommeil lui faisait encore défaut.
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Lun 3 Juil 2017 - 1:02
In darkness we are revealed
You will need to know the difference between Friday and a fried egg. It's quite a simple difference, but an important one.
J'observais le professeur de divination d'Hungcalf s'extirper de l'ombre et je ne pouvais m'empêcher de revoir une scène d'un vieux film moldu : Nosferatu. La similitude entre Augurus et lui s'arrêtait à cette fâcheuse tendance de sortir de l'ombre car Augurus n'avait pas au bout des doigts de longues griffes qui feraient pâlir d'envie certaines étudiantes fans de nail art, mais des pains au chocolat au creux des mains. Cet homme savait parler à mon estomac et si mon estomac était content, le reste du bonhomme aussi. Je riais à sa remarque caustique en attrapant ma pitance. J'oubliais souvent qu'Augurus était un demi-vampire. En même temps, il ne le portait pas sur lui, les indices étaient plus subtils que cela, mais j'arrivais à imaginer que ce genre de remarque n'était pas anodine : il avait dû subir la méfiance, la bêtise même de certains de ses camarades. Peu de gens connaissaient la différence entre un vampire et un demi-vampire ; un bon sujet de DCFM je suppose. Je commençais à mâcher mon pain au chocolat en trinquant avec Augurus qui s'était choisi une nouvelle tasse, me rendant compte que j'avais, par la même, piqué la sienne sans le vouloir ... enfin, sans le vouloir.
« Alors qu'est-ce que c'est cette nuit ? ». Ce n'était pas la première fois qu'on se voyait à l'improviste pendant une nuit sans sommeil. Au vu de sa condition, Augurus dormait peu - un doux euphémisme pour dire qu'il ne dormait pas du tout. Quant à moi, l'insomnie me gagnait un soir sur deux. Pendant mes insomnies, je jouais aux échecs contre moi-même, récitais du Shakespeare ou faisais les cent pas dans mon bureau avec un bouquin sur les effets secondaires des sortilèges d'allégresse. Bref, tout pour enfin trouver le sommeil. Mais je ne vais pas me plaindre, pendant mes études, c'est mon incapacité à dormir qui m'a permis d'exceller dans la plupart des matières et contrairement à Augurus, j'étais capable de dormir parfois, je n'étais pas obligé de rester éveillé contre ma volonté. Contrairement à Augurus, j'étais capable de rêver. « Insomnies ? Cauchemars ? Ou peut-être est-ce une crise de somnambulisme qui t'a mis le nez dans la porte ? ». Fichue porte ! Elle ne perdait rien pour attendre. Je souriais à l'évocation de la porte, mais ne relevais pas ; moi qui avais voulu être discret.
« Inchofnie ! ». Répondis-je la bouche pleine avant de me rendre compte que la présence de pâte feuilleté, levée et cuite au four, et de chocolat noir pâtissier m'empêchait de prononcer les consonnes de façon satisfaisante. J'avalais donc ma bouchée de pain au chocolat pour reprendre. « Insomnie. Cette fois, je n'arrivais pas à me rappeler les douze usages du sang de dragon et ça m'a empêché de m'endormir ». J'en oubliais toujours un. Madame Jenkins, une de mes professeurs du temps de Poudlard, avait ensorcellé une règle pour que celle-ci nous frappe à chaque qu'on ne pouvait pas réciter la liste sans se tromper. C'était sans compter pour ma prédisposition pour les sorts qui m'avaient permis de retourner son arme contre elle. Ah souvenirs, souvenirs... j'étais un sacré thug comme disent les jeunes. « En revanche, j'ai fait un rêve assez bizarre l'autre nuit, je sais qu'en divination, on interprète parfois les rêves ». J'essayais de me rappeler des détails exacts de mon rêve avant de poursuivre. « Je me rappelle pas de tout, tu excuseras le manque de détails. Je me souviens que j'étais dans une grande plaine désertique, du sable à perte de vue, tellement de sable que même l'air semblait teinté de jaune cuivré. Il y avait beaucoup de vent et j'avançais au milieu des tourbillons de sable comme s'ils m'invitaient à aller de l'avant ». Tout en parlant, je mimais mon récit en faisant des grands gestes avec les mains. « J'arrivais à une grande cité faites de verre ou de cristal, au milieu un dôme immense sur lequel les rayons du soleil venait mourir pour renaître sous la forme d'arc-en-ciel qui illuminait la cité en contrebas. Mais, je ne saurais pas te dire pourquoi, les proportions de cette cité merveilleuse semblaient complètement erronées, fausses : trop petites par endroit, trop grandes ailleurs et curieusement déformées ». Mon regard s'était perdu dans les flammes qui dansaient derrière Augurus pendant quelques secondes, mais je revins à moi comme si je me réveillais d'une transe et je lui souris. « Qu'est-ce que tu penses de ça, hum ? ».
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Sam 8 Juil 2017 - 15:44
Shoeburyness
AuguNian
« Inchofnie ! » répondit, Ninian, la bouche pleine, avant de finir de se débattre avec le feuilletage. « Insomnie. Cette fois, je n'arrivais pas à me rappeler les douze usages du sang de dragon et ça m'a empêché de m'endormir ». Je haussais les sourcils, surpris que les humains soient des créatures si fragiles qu'une simple question puisse les maintenir en éveil toute une nuit durant. D'un autre côté, je ne jugeais pas mon collègue, car j'aurais été tout bonnement incapable de citer ne serait-ce que cinq propriétés du sang de dragon. La seule chose que j'espérais, c'était qu'il s'abstienne de me demander de les réciter pour compléter les éléments manquants de sa liste. S'il comptait sur moi pour l'aider, le pauvre n'était pas près de vaincre l'insomnie, à moins que je ne tarde trop à les réciter, l'assommant d'ennui, au passage.
Fort heureusement pour moi, il n'en fut rien, l'honneur était sauf. « En revanche, j'ai fait un rêve assez bizarre l'autre nuit, je sais qu'en divination, on interprète parfois les rêves », avança Ninian, n'attendant pas mon approbation pour enchaîner sur le récit de ses fascinantes péripéties oniriques, retranscrites avec un ton et une gestuelle très théâtrale qui me transportait directement dans ce décor de l'esprit. « Je me rappelle pas de tout, tu excuseras le manque de détails. Je me souviens que j'étais dans une grande plaine désertique, du sable à perte de vue, tellement de sable que même l'air semblait teinté de jaune cuivré. Il y avait beaucoup de vent et j'avançais au milieu des tourbillons de sable comme s'ils m'invitaient à aller de l'avant... J'arrivais à une grande cité faites de verre ou de cristal, au milieu un dôme immense sur lequel les rayons du soleil venait mourir pour renaître sous la forme d'arc-en-ciel qui illuminait la cité en contrebas. Mais, je ne saurais pas te dire pourquoi, les proportions de cette cité merveilleuse semblaient complètement erronées, fausses : trop petites par endroit, trop grandes ailleurs et curieusement déformées » sembla-t-il conclure, les yeux dans le vague. J'avais avidement écouté chaque détail du récit et je m'étais attardé à me représenter la scène de la manière la plus vivante possible dans mon esprit, ce qui était relativement simple grâce aux talents de conteur de Ninian, qui me fixa comme s'il sortit d'un moment de flottement. « Qu'est-ce que tu penses de ça, hum ? »
J'arborais une mine franchement impressionnée, autant par la qualité de son récit que par la vivacité de ces fulgurances dont je ne ferai manifestement jamais l'expérience. J'avalais une gorgée de thé avant de lui répondre. « Hum, c'est véritablement incroyable...», dis-je, un peu envieux, avant de réaliser que c'était probablement déplacé d'envier un insomniaque qui souffrait du manque de sommeil. « Effectivement, Ninian, de nombreux collègues et voyants se sont penchés sur l'interprétation des rêves et il existe un important débat de fond à ce sujet...» entamais-je sur le ton de l'enseignant, comme si j'étais sur le point de donner un cours, au beau milieu de la nuit et des cuisines. « Je ne suis sans doute pas bien "équipé" pour débattre des rêves, mais ce débat oppose deux types de conceptions. D'un côté, tu as ceux qui considèrent que la symbolique des objets et des sujets abordés dans les rêves est rigoureusement identique à la symbolique des objets et des sujets tels qu'ils existent dans la vie réelle. Après tout, pourquoi pas? Ce n'est pas absurde de penser que du sable a le même sens symbolique dans un rêve que dans la réalité... De l'autre, tu as ceux qui considèrent que la symbolique des objets et des sujets évoqués dans les rêves est tributaire des croyances et des représentations de la personne qui rêve... Que chaque élément qui se manifeste à toi en rêve recèle un sens symbolique qui t'est propre selon ton histoire et tes conceptions de la vie et qu'il n'appartient qu'à toi de les décoder et d'en comprendre le sens...» dis-je avec un sourire bienveillant, avant de reprendre une gorgée. « Personnellement, la seconde option me semble plus plausible. Alors, je te retourne la question, tu en penses quoi, de ta ville en cristal aux proportions inégales, surmontée d'arcs en ciel par delà les tornades de sable ?» conclus-je avec un regard malicieux et complice. C'était le genre de débat ou de question qui pouvait faire dire à n'importe quelle personne qu'il était toujours impossible - ou très chiant - de parler avec un adepte de la divination...
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Dim 9 Juil 2017 - 19:55
In darkness we are revealed
You will need to know the difference between Friday and a fried egg. It's quite a simple difference, but an important one.
C'était à mon tour d'écouter le récit d'Augurus ou plutôt son cours. Je n'avais jamais été très appliqué ou impliqué en divination. Malheureusement, je n'avais aucun donc pour cette matière et je n'avais jamais réussi à me passionner pour elle : je n'ai jamais aimé l'échec encore moins quand je faisais des efforts pour réussir. Mais contrairement à d'autres de mes camarades de l'époque, je n'avais aucune aigreur pour la matière ; j'avais simplement fait le constat de mon incapacité à l'aborder et à l'exercer. Au contraire, la perspective d'en apprendre d'avantage sur le sujet me ravissait. J'avais donc sorti un carnet et un crayon à papier à la mine grasse que j'étais obligé d'humidifier du bout de la langue pour prendre des notes en l'écoutant.
J'avais donc écouté et noté les deux différentes façons d'interpréter les rêves en hochant la tête. Augurus était proprement captivant et j'imaginais sans peine à quoi ses cours pouvaient ressembler et pourquoi les élèves les appréciaient tant. Qui sait, si j'avais eu un professeur comme Augurus, j'aurais peut-être mieux réussi en divination. En l'écoutant parler, je me rendais compte que la divination avait ce je-ne-sais-quoi philosophique que je n'avais jamais perçu auparavant et qui pourtant m'aurait plu. Ou bien je l'avais déjà remarqué à l'époque, mais je n'étais pas aussi porté sur la philosophie qu'aujourd'hui : l'adolescent rebelle que j'étais préféré les Sex Pistols à Nietzsche. Les Bizzar' Sisters à la divination ; dirait-on pour nos amis sorciers les moins au fait de la culture moldue.
Quand il me retourna ma propre question, je ne pus m'empêcher de laisser échapper un rire tonitruant. Bien joué, Augurus, bien joué. Je voyais bien où il voulait en venir, mais il était difficile d'ignorer les stéréotypes en vigueur concernant les devins en entendant une telle phrase. « On dirait une technique de prof pour éviter de répondre à la question d'un élève », dis-je en lui adressant un clin d’œil complice. Nous l'avions tous déjà fait avec un élève ça. Mais il n'avait pas tort : qu'est-ce que ça pouvait bien représenter tout ça, pour moi. Mon regard se perdit dans le vague tandis que mon cerveau se mettait en marche. Les tourbillons de sable, des figures fantomatiques peut-être : des gens que j'avais connu et qui n'était plus là. Des gens qui m'invitaient à les rejoindre maintenant que j'étais au crépuscule de ma vie. Je préférais chasser cette idée de mon esprit, personne n'avait besoin de savoir que la vieillesse me faisait peur. « Va savoir ce que tout ça veut dire et ce que lui serait capable d'inventer », fis-je avec un sourire en pointant du doigt mon front. Je pris une petite gorgée de thé avant de reprendre. « Je sais que tu ne peux pas, mais tu crois que tu rêverais de quoi si tu le pouvais ? ».
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Sam 15 Juil 2017 - 11:00
Shoeburyness
AuguNian
Mon estimé collègue écouta religieusement ma conférence improvisée sur l'interprétation des rêves, au point de dégainer un carnet et un crayon de bois pour prendre des notes. S'il en fallait plus pour me déstabiliser, j'étais au moins surpris de sa rapidité à suivre le flot continu de mes paroles et flatté, quelque part, d'être, pour une fois, le mentor dans notre relation. Lorsque j'eus fini mon exposé et que je lui retournais sa propre question, Ninian s'esclaffa. « On dirait une technique de prof pour éviter de répondre à la question d'un élève » lança-t-il, assorti d'un clin d'oeil complice. Je haussais, de concert, les épaules et les sourcils, une expression mi coupable, mi amusée sur le visage. Effectivement, cela ressemblait à s'y méprendre à un stratagème de prof à court de réponse intelligente à une question dérangeante. Si j'avais moult fois eus recourt à ce genre de techniques, pour une fois, il n'en était rien : c'était une vraie question. Je le regardais alors repartir, en esprit, dans un monde lointain... Sans doute était-il retourné dans son palais de diamants dans son désert onirique pour y chercher une signification ? Je l'observais, curieux et avide de nouveaux récits, en descendant un peu plus le niveau de thé de ma tasse, qui pleurerait bientôt son vide intérieur, afin que je la remplisse à nouveau. « Va savoir ce que tout ça veut dire et ce que lui serait capable d'inventer »dit-il en pointant son crâne du doigt, avant de vider à son tour le contenu de sa tasse. Je soupirai discrètement : manifestement, je n'aurais pas droit au récit de son interprétation personnelle. J'en étais presque déçu, comme un enfant qui s'était convaincu lui-même qu'il aurait droit à une petite histoire du soir avant de s'endormir, juste pour réaliser que papa n'était pas là. « Je sais que tu ne peux pas, mais tu crois que tu rêverais de quoi si tu le pouvais ? ».
Mes sourcils se soulevèrent tandis que mes yeux cherchaient, dans le vide de la cuisine, une réponse appropriée à cette question. A vrai dire, c'était une véritable colle. Mes lèvres retroussées furent bien incapables de s'entrouvrir afin de lui donner une réponse avant une trentaine de secondes de silence qui devaient lui sembler aussi interminables qu'à moi. « Je...», hésitais-je, sans vraiment avoir une idée de la manière dont poursuivre cette phrase.
Je secouais la tête en souriant, comme pour me mettre dans un autre état d'esprit intérieur. Ninian avait raison, il le savait depuis longtemps : ma condition de semi-vampire faisait que je n'éprouvais aucun besoin de dormir et que, par conséquent, j'étais incapable de rêver. Bien entendu, je pouvais fermer les yeux et imaginer des choses, mais je supputais que ce n'était là qu'un petit jeu de l'esprit, loin, bien loin de la sensation véritable du rêve que j'enviais tant aux humains. « A vrai dire... Je n'en sais rien » admis-je en tordant ma bouche dans une moue fataliste. « C'est un peu comme demander à un sourd quel genre de musique il préférerait écouter... On lui aura sans doute décrit l'effet que ça fait, en long en large et en travers, l'impression que cela laisse lorsque la musique s'arrête et, pourtant, toute la puissance de son imagination ne suffira jamais à lui faire expérimenter un dixième de cette expérience... merveilleuse » dis-je, résigné. Je fis un court silence, le temps de constater avec détresse que je ne voyais que trop bien le fond de ma tasse vide, qui ne demandait plus qu'à être remplie. Je regardais Ninian dans ses yeux fatigués avec un léger sourire de circonstance.
« Et puis, peut-on vraiment choisir ses rêves ? » lui demandais-je, interrogateur et, pour le coup, rêveur. Si l'on pouvait voir un sens philosophique à cette question, il n'en était rien. Elle était à prendre au premier degré : un être humain pouvait il vraiment avoir une influence sur la sélection du rêve et sur la manière dont il se déroulait dans son esprit, de bout en bout ? Bien que j'étais incapable de rêver, j'aimais croire que j'en comprenais le fonctionnement, certainement comme un sourd se rassure quant au fonctionnement de la musique. « Je crois que ma curiosité est telle que n'importe quelle expérience me remplirait d'une joie incomparable. Rêve d'allégresse ou pire cauchemar de ma vie : je prendrais sans hésiter » affirmais-je sais vraiment savoir ce que l'on pouvait ressentir lors d'un pire cauchemar. Une déclaration à laquelle Ninian apportera sans doute plus de justesse et de sagesse au fil de notre discussion.
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Mer 19 Juil 2017 - 0:38
In darkness we are revealed
You will need to know the difference between Friday and a fried egg. It's quite a simple difference, but an important one.
Ce simple "je" un peu hésitant. Ce simple mot, ce pronom sujet résumait tout. C'est vrai qu'Augurus était incapable de savoir ce qu'était un rêve, encore moins ce à quoi il rêverait s'il le pouvait. Ma question n'avait pas beaucoup de sens ou en tout cas ne semblait pas vraiment en avoir. Pourquoi demander à un aveugle quel serait sa couleur préférée s'il n'a jamais vu ces couleurs. Je lui avais posé cette question parce qu'en mon for intérieur j'étais persuadé qu'on pouvait en apprendre autant voire plus par l'absence. Sans les ténèbres de l'univers, on ne pourrait pas voir les étoiles. Et quoi de plus beau que de lever les yeux vers les cieux pour regarder ses astres merveilleux. Peut-être qu'en comprenant mieux sa condition, il serait possible de trouver, sinon un remède, une parade à son incapacité à rêver. Malgré les cauchemars qui vous saisissent et vous réveillent en pleine nuit, quelle plus douce sensation que de se perdre dans ce royaume de l'esprit que seul les rêves savent créer. Peut-être qu'il était possible de faire rêver Augurus et quelle victoire ce serait contre la fatalité !
J'écoutais pensif, mais attentif sa réponse. Oui, on ne pouvait pas espérer qu'un sourd comprenne la sensation merveilleuse d'écouter une symphonie ou un air de piano mélancolique jouait lascivement par quelques jazzmans au fond d'un bar crasseux. On ne pouvait pas et pourtant. « Tu sais, les moldus ont été capable de redonner l'audition ou un semblant d'audition à des mal-entendants comme seul savent le faire les moldus ». Dis-je avant de me perdre dans mes pensées en laissant le silence s'installait entre nous. J'étais tiré de ma rêverie par la question d'Augurus. « Et puis, peut-on vraiment choisir ses rêves ». Plus qu'une question rhétorique, c'était une véritable question comme celle d'un enfant qui demanderait pourquoi le ciel est bleu. « Parfois, oui ». Je bus une gorgée de thé, le temps de rassembler mes esprits et de trouver une réponse satisfaisante à cette question. « Certaines personnes sont capables de faire des rêves lucides. Dali, par exemple, un artiste moldu, s'inspirait de ce qu'il voyait dans ces rêves pour peindre des œuvres surréalistes ». Je marquais une pause avant d'ajouter. « Enfin, je suppose qu'il s'agissait plutôt d'hallucinations que de rêves vu la dose de psychotropes qu'il avalait ». J'accompagnais cette dernière phrase d'un léger sourire. Les années 70 pour qui ne les avait pas vécu était une époque qui ne se vivait que sous influence.
« Je crois que ma curiosité est telle que n'importe quelle expérience me remplirait d'une joie incomparable. Rêve d'allégresse ou pire cauchemar de ma vie : je prendrais sans hésiter ». J'imaginais sans mal toute la portée de cette déclaration. Il fallait une curiosité sans bornes pour être prêt à accepter même les pires côtés d'une expérience. « Une des théories les plus largement admises c'est que les rêves sont en fait le moyen d'expression de l'inconscient ». J'avais repris, sans m'en rendre compte, mes attitudes de professeur délivrant son cours magistral. « Une façon de traiter les informations d'une journée ou de traduire sous forme d'images parfois décousues des choses que notre inconscient aurait emmagasiner ». Je m'étais mis par habitude à gribouiller des dessins autour des notes que j'avais prises dans mon carnet ; faisant travailler en quelque sorte mon inconscient pendant que mon conscient était occupé à répondre à Augurus. « Et parfois, il y a dans la vie d'un homme ou d'une femme des choses si horribles qu'elles ne se traduisent qu'au travers de ses cauchemars ». Je ne pus m'empêcher de repenser à l'accident au ministère qui m'avait conduit à le quitter et à ce cauchemar récurrent qui me réveillait une nuit sur deux et dans lequel je revoyais le corps calciné de ma collègue, dans lequel je sentais encore l'odeur de chair brûlée. Mon crayon dérapa sur le carnet, déchirant légèrement une page et me sortit de ce souvenir nauséabond. Mes yeux s'illuminèrent d'une petite lueur folle quand je les posais à nouveau sur ceux d'Augurus. « Imagine qu'on puisse te faire rêver et par "on" je veux dire moi ». Mes mains s'agitèrent pendant que je parlais. « A l'époque où j'étais encore un scientifique respectable du ministère, on travaillait sur les rêves, on pourrait essayer toi et moi ? »
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Re: SHOEBURYNESS, the vague uncomfortable feeling you get when sitting on a seat which is still warm from somebody else's bottom (Augunian)
Ven 21 Juil 2017 - 17:30
Shoeburyness
AuguNian
« Tu sais, les moldus ont été capable de redonner l'audition ou un semblant d'audition à des mal-entendants comme seul savent le faire les moldus » lança Ninian entre deux silences. Ces moldus... Je ne les connaissais pas beaucoup, mais leurs prouesses m'impressionnaient franchement. Rendre l'audition aux sourds, voilà une merveilleuse promesse d'espoir, bien que mon esprit qui ne connaissait que les arts sorciers se demandait par quel miracle une telle machinerie pouvait fonctionner. J'eus à peine le temps d'imaginer une série de cornes d'écoute de plus en plus grandes, portées sur un chariot à roulette, un appareillage alambiqué et encombrant, que Ninian répondait déjà à mon autre question. « Parfois, oui. Certaines personnes sont capables de faire des rêves lucides. Dali, par exemple, un artiste moldu, s'inspirait de ce qu'il voyait dans ces rêves pour peindre des œuvres surréalistes... Enfin, je suppose qu'il s'agissait plutôt d'hallucinations que de rêves vu la dose de psychotropes qu'il avalait ». Je secouais la tête, d'un air distant. J'avais déjà entendu parler de ces rêves lucides, car, bien que ma condition faisait que je ne pouvais pas rêver, elle avait l'avantage de m'octroyer un temps fou pour me documenter sur des centaines de sujets. Je crus même me souvenir que la tribu des Senoïs s'articulait autour des rêves lucides, un accomplissement qui marquait l'entrée des jeunes au sein de cette communauté de rêveurs. Cependant, Dali, j'ignorais tout bonnement qui était ce bonhomme et en quoi consistaient ses oeuvres. Cela me semblait plutôt malsain... Et un peu idiot.
« Une des théories les plus largement admises c'est que les rêves sont en fait le moyen d'expression de l'inconscient », enchaîna Ninian sur le ton du maître de conférence. « Une façon de traiter les informations d'une journée ou de traduire sous forme d'images parfois décousues des choses que notre inconscient aurait emmagasiner... Et parfois, il y a dans la vie d'un homme ou d'une femme des choses si horribles qu'elles ne se traduisent qu'au travers de ses cauchemars » dit-il avant que son crayon, qui dansait habilement sur le papier ne déchire une page maladroitement. Je fronçais les sourcils, pensif. Tout cela, je l'avais déjà lu, parce que je m'intéressais énormément à l'Oniromancie, la divination par l’interprétation des rêves et des cauchemars, un sujet que nous venions d'aborder quelques instants plus tôt. Ce qui me chiffonnait le plus, c'était le léger sursaut incontrôlé de Ninian et l'air subtil d'une profonde nostalgie qui trahissait l'étincelle enjouée de ses yeux. Etait-ce justement son inconscient qui s'était exprimé une seconde avant d'être de nouveau soumis au contrôle de son esprit conscient, ganté de fer ?
« Imagine qu'on puisse te faire rêver et par "on" je veux dire moi ». Je haussais les sourcils, intrigué et un peu méfiant. « A l'époque où j'étais encore un scientifique respectable du ministère, on travaillait sur les rêves, on pourrait essayer toi et moi ? »
Je bafouillais, à demi-convaincu par cette proposition inattendue, d'un côté, manifestement enthousiaste de participer à une expérience qui pourrait potentiellement déboucher sur un véritable rêve et, de l'autre, plutôt réticent à l'idée de servir de cobaye, sans compter que j'ignorais les effets secondaires possibles d'une telle expérience... « Je dois bien t'avouer que je suis partagé... » répondis-je calmement, avec une grande diplomatie. « Et je ne mets pas en doute tes capacités ou ton savoir que je trouve volontiers empirique si je te dis que cette idée m'effraie. » Je me levais et marchais lentement vers un évier, dans lequel je déposais ma tasse vide. Cette précieuse poignée de seconde me permit de rassembler mes esprits et d'évaluer calmement ce que pouvait impliquer une telle expérience. Mon cerveau, prompt à l'imagination la plus morbide, me faisait me voir, allongé sur une table en ferraille, avec un étrange cercle de métal au sommet du crane et des aiguilles plantées dans tout mon corps, lui-même sanglé aux poignets et aux chevilles, comme un fou. Je chassais d'un soupir ces images absurdes : il était évident que Ninian n'était pas un de ces savants fous de fiction - même s'il en avait l'apparence et que le ton de sa voix me le laissait parfois penser - et qu'il ne m'imposerai pas un tel traitement... Enfin, c'était, en tout cas, peu rationnel de le penser.
Je revins vers lui lentement, l'écho de mes pas sur les dalles de pierre du sous-sol était le seul son qui remplissait l'atmosphère pensive des cuisines. Les bras croisés, je vins me planter devant lui, bancal. « Imaginons... » lançais-je, méthodique, « Imaginons que j'accepte de tenter l'expérience. Qu'est ce que cela implique ? Comment est-ce que tu t'y prendrais ? As-tu déjà une idée pour me faire rêver ?» demandais-je en le fixant et en mordillant ma lèvre inférieur, curieux et anxieux à la fois. J'ignorais s'il allait me proposer un remède sorcier ou un remède moldu et je souhaitais ardemment que mon esprit ne se lance pas à nouveau sur le chemin de l'invention d'objets de torture alambiqués, tandis que j'attendais religieusement la marche à suivre.
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