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bien mal acquis ne profite qu'après ›› BAVBOULEURS
Mer 31 Jan 2018 - 0:10
we’ll live in legend
le cercle des bavbouleurs
Il s’agissait d’une énorme pièce, habillées de grandes fenêtres en verre qui laissaient passer toute la lumière du jour et qui donnaient une ambiance très chaleureuse à l’endroit. De grandes tables en bois arrondies siégeaient au beau milieu, les murs étaient couverts d’affiches en tout genre, colorés des différents blasons de l’école. Des bibliothèques étaient également disposées ici et là. Un escalier en marbre donnait également sur un étage, plus petit et dont la hauteur sous plafond, de toute évidence, était bien moindre qu’au rez-de-chaussée. Ici, ils avaient imaginé un endroit plus cocooning : de grands tapis jonchaient au sol, sur lesquels trônaient de longs canapés en velours ou en cuir. On pouvait également venir essayer les différents hamacs colorés, accrochés un peu partout, de façon toujours plus audacieuse. Qu’il se sentait bien ici… Cette pièce leur avait été attribuée, six mois auparavant, pour répondre à leur besoin d’un local, pour le club qu’il avait alors fraîchement érigé : le club de bavboule. L’idée avait d’abord provoqué l’hilarité chez ses camarades mais ils ne mirent pas longtemps à être convaincus quand Tobias leur avait raconté le but de la manœuvre. Qui se résumait, entre autres, à ce coin d’Hungcalf rien qu’à eux, ou du moins à l’abri des regards.
C’était l’âme en fête que Tobias retira sa veste, qu’il déposa au portemanteau de l’entrée. Tout avait été soigneusement aménagé. Un énorme sourire traversait son visage, d’une oreille à l’autre. Une nouvelle était à célébrer, et il espérait bien que ses compères répondraient au plus vite à l’invitation que celui-ci leur avait donné quelques heures plus tôt. Il avait rencontré le directeur dans l’après-midi, et trépignait d’impatience de leur raconter leur entretien. Alors qu’il était en train d’imaginer un effet de surprise pour le moment où, un à un, ils finiraient par le rejoindre, il s’approcha du grand tableau noir qui était installé contre le mur du fond et qui séparaient les deux escaliers qui menaient à l’étage. Il cherchait une place pour écrire le mot qu’il souhaitait et finit par voir l’espace nécessaire – entre les blagues et autres commentaires désobligeants qui ornaient le tableau et qui ne cessaient de les amuser. A l’aide de sa baguette toujours en main, il commença à écrire, en lettres capitales : B, plus loin, R, plus loin, É, quand à ce moment-là un résonnement sourd vint percuter ses oreilles. Un objet venait de tomber au sol, ou était-ce juste une porte qui claque ? Il s’arrêta immédiatement d’écrire et, en une fraction de seconde, dirigea sa baguette vers le focifère empaillé qui scrutait toute la scène, perché en hauteur sur la rembarde de l’escalier, et donna une impulsion. Une lumière jaunâtre jaillit et perça l’oiseau en plein cœur. Tout aussi subitement, et presque sans un bruit, ou du moins aussi silencieusement qu’un courant d’air, d’énormes pancartes, de très fins pans de tissus et différentes affiches en l’honneur du bavboule ou bien à l’effigie des vedettes de ce sport – Tobias lui-même rirait en voyant ce qualificatif – vinrent se glisser un peu partout, redécorant la pièce comme de vrais adeptes l’auraient fait, ou du moins comme Tobias pensait que de vrais fans l’auraient fait. Seuls les quelques cadavres de bouteilles qui traînaient, aspirés comme par magie en dessous des meubles qui les dissimulaient désormais, émirent des sons qui pourraient être suspects. Il finit enfin par se retourner vers l’intrus, le cœur battant la chamade même s’il n’était pas peur fier du sortilège qu’il avait installé à leur arrivé pour convaincre quiconque de l’extérieur de leur cercle de leur bonne foi, et dit, soulagé : « Ah ! C’est toi. Tu m’as fait peur… » Un léger sourire retrouva sa place. Ils avaient vraiment pensé à tout. Leur manigance n’avait pas de failles.