- InvitéInvité
this is your song + ariadne (terminé)
Dim 14 Avr 2019 - 23:10
M O U L I N x R O U G E
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Love is a many splendored thing
Love lifts us up where we belong
All you need is love
Love lifts us up where we belong
Where the eagles fly
On a mountain high
Presque un mois, depuis la Tanzanie. Depuis que le fil écarlate grandissait en lui, doucement, sentiment étrange lui semblant à la fois si naturel et si étranger à la fois. L'impression de découvrir une part de lui qui avait toujours existé, enfouie, réconfortante et troublante - n'osant pas poser de gestes, ni de mots pour définir ce hameçon fiché dans ses entrailles, troublant et tranquille. Depuis un mois, depuis la crevaison du dernier abcès, le plus douloureux d'entre eux, mais le plus nécessaire, ils apprenaient à se réapprivoiser, doucement, comme on s'éveille d'un songe. N'osant jamais poser de gestes brusques, Evan se faisait plus solaire, taquin, attachant - fidèle à lui-même, soleil brillant de mille feux pour mieux éclairer sa moitiépastendre. Papillonnant entre deux stations à Sainte-Marie, adressant oeillades et taquineries à Alexander en le croisant, il devenait un habitué des urgences - et pas par blessures. Le professeur de musique avait pris l'habitude de déposer un café à la station de la médicomage, s'assurant entre deux quarts de travail qu'elle se nourrissait adéquatement. Evan découvrait avec un entrain touchant qu'il appréciait donner ces petites attentions, lui qui avait toujours été trop dissipé et insaisissable pour s'astreindre à quelque routine que ce soit, si douce soit-elle.
« Il y a un festival de films moldus à Inverness, cette semaine », lui avait-il dit, le matin même, large sourire aux lèvres, s'essayant à un ton nonchalant et tranquille alors que son coeur battait la chamade avec violence dans sa poitrine. « Il y en a un, Moulin Rouge ... à propos d'un charmant musicien sans le sou et une rouquine cynique ». Goguenard, il s'était lui-même désigné en parlant du musicien, et pointait désormais la belle rousse en parlant du cynisme de l'autre personnage. Air encourageant et de défi à la fois au fond du visage, Evan l'avait invitée, lui glissant une photo moldue trouvée sur internet avec l'aide d'une étudiante pour lui donner une idée des costumes. « Je m'habillerai comme ça », avait-il indiqué en pointant le smoking du personnage masculin, invitant sa partenaire à se déguiser elle aussi. C'était donc avec un brin de nervosité qu'il attendait la médicomage devant l'un des cabanons projetant les films, heureux qu'ils puissent partager ce moment de solitude à deux, vêtu d'un élégant smoking, ayant délaissé ses cravates criardes le temps d'une soirée. Impatient, nerveux, enthousiaste, il trépignait dans son attente de la jeune femme. Une soirée cinéma, comme des adolescents - pourquoi toute cette nervosité? Combien de soirées avaient-ils passées ensemble, jadis? Jamais comme ça. Et certainement pas depuis cet après-midi en Tanzanie, chaleur des corps qui n'avaient pas uniquement rougi à cause de la température étouffante. Pitié, que ce fil carmin ne soit pas relié à des chimères créées par son imagination trop vivace, qu'il ne se soit pas imaginé le regard que lui avait jeté Ariadne lorsqu'elle lui avait dit que l'essentiel, c'était que lui l'ait trouvée. Pitié, qu'il ne s'empêtre pas dans le fil d'Ariadne au point de s'y étrangler.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mar 16 Avr 2019 - 14:00
M O U L I N x R O U G E
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Love is a many splendored thing
Love lifts us up where we belong
All you need is love
Love lifts us up where we belong
Where the eagles fly
On a mountain high
C'est que je m'y habituerai presque, à ce qu'il soit aux petits soins pour moi le rouquin. Et même si dans un sens je me sentais redevable, je trouvais étrange ce soudain changement de comportement envers ma personne.
Quelle mouche l'avait piquée en Tanzanie pour qu'il se mette soudainement à vouloir m'apporter le café tous les matins aux urgences ? Moyen de se faire pardonner ou avait-il brusquement des élans d'attention envers son entourage ? Ce serait véritablement une première. Le pire, c'est que je lui découvrais et ressentais un entrain plutôt neuf, comme si finalement il prenait goût à s'occuper d'autrui que de lui-même. C'était davantage suspect, et limite, il me faisait presque peur… Car oui depuis quand surveillait-il mon alimentation ? Je n'étais pas enceinte, déjà d'une, et de deux, je m'étais toujours très bien nourrie, ou tout le monde, de manière équilibrée. Même si je travaillais d'arrache-pied à Sainte-Marie, ça ne m'empêchait pas de m'alimenter correctement. Au fond, j'avais l'habitude puisque j'avais toujours été quelqu'un d'incroyablement concentré et professionnel dans ses études ou son métier. Ma place fraichement occupée comme responsable des urgences n'allait pas y changer grand-chose.
Alors, lorsqu'il pénétra dans mon bureau tandis que je me tenais debout au centre de la pièce, entourée par des dossiers volant, je terminais détournais mon regard métallique sur lui. Le fixant poser un café sur mon bureau, je croisais les bras après avoir chassé un papier qui nous séparait, lui et moi.
- Tu plaisantes, c'est ça ?
Dubitative, je m'avançais vers lui, toujours les bras croisés alors qu'il en venait à me parler de ce festival qui avait lieux au cœur d'Inverness en ce moment. Jusqu'alors, j'avais bien pris soin de le fuir, non pas que le septième art me posait un quelconque problème, mais parce que j'avais d'autres priorités.
Mais c'était sans compter l'esprit volatil de mon âme sœur, et de ses élucubrations et soudaines idées farfelues. Attrapant la photo qu'il me désignait, je ne pouvais m'empêcher de hausser un sourcil significatif. Pour une fois qu'il allait laisser tomber ses cravates immondes, ce n'était pas pour me déplaire. Et le smocking lui allait très bien, je n'avais jamais eu aucun doute là-dessus. Une vague presque nostalgique traversa mon regard alors que je me remémorais nos jeunes années à Poudlard et Hungcalf. Les soirées dansantes et les bals qui avaient été organisés. Nous étions toujours tous les deux très demandés par bien des cavaliers et cavalières, sans pour autant que nous apprécions leurs compagnies. C'était comme si aucun d'eux n'étaient dignes de nous.
Il n'y avait toujours eu que nous. Encline alors à accepter, simplement pour le défi de remettre une robe sur mes épaules, je le laissais ensuite rejoindre l'université et moi, je retournais à mes dossiers.
Depuis combien de temps au juste n'avais-je plus vêtu une tenue de la sorte ? Sans doute bien trop longtemps, car bien trop préoccupée par ma vie professionnelle, par l'envie d'oublier qu'il n'était plus là. Je n'avais personne à attirer, car il n'y avait toujours eu que lui. Malgré les rencontres que j'avais pu lui présenter. Malgré nos tirades. Malgré mes mots déplacés. Il n'y avait toujours eu que lui.
Et alors que je réalisais cela, je déambulais dans les rues d'Inverness pour rejoindre notre point de rendez-vous, vêtue d'une longue robe blanche aux motifs floraux et abstrait. Le cœur légèrement serré par une certaine appréhension, je m'avançais vers lui alors que je le voyais, comme il l'avait dit, dans sa tenue noire et blanche.
Quel âge avions-nous ?
C'était la question que je me posais alors que je m'arrêtais à sa hauteur, l'air assuré, alors qu'à l'intérieur, j'aurai préféré une bonne soirée cinéma en pyjama. Petit air narquois sur le visage pour ne pas me trahir, je m'adressais à lui en attrapant son bras.
- Un pingouin sans cravate verte à points roses. Ça te va si bien.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mar 16 Avr 2019 - 16:54
M O U L I N x R O U G E
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There was a boy
A very strange, enchanted boy
They say he wandered very far, very far
Over land and sea
Dominant les passants de sa haute stature - n'était-il pas aisé à reconnaître dans une foule, le géant roux? Evan attendait son amie (?) avec une impatience teintée d'appréhension et d'enthousiasme, se retournant en entendant sa voix, sourire étirant déjà ses lèvres. « Un pingouin sans cravate verte à points roses. Ça te va si bien ». Figé l'espace d'un instant en voyant la tenue d'Ariadne, n'eut-il pas un air ahuri, si près de perdre ses moyens? Pourtant, le musicien était vif, et se rattrapa presque instantanément, un rire d'auto-dérision lui échappant alors qu'il faisait mine d'ajuster son nœud papillon. « Je me sens nu comme un ver, si tu savais », soupira-t-il avec une pointe rieuse. Faisant tournoyer Ariadne sur elle-même, les volants de sa robe blanche prenant un semblant d'envol en un tourbillon évanescent, il la siffla légèrement, pour dissimuler l'émoi qui l'avait envahi. « Tu es ... » Perdant ses mots, le professeur de musique se contenta de sourire, avant de choisir l'avenue d'une plaisanterie. « Toi aussi, ça te va bien, être débarrassée de ta blouse d'hôpital ». Autour d'eux, les passants avalaient du popcorn sucré, se bousculant les uns les autres pour mieux se presser vers les salles de spectacle - n'étaient-ils pas seuls au monde, pourtant, alors que la lumière tamisée des réverbères les entourait d'un halo léger? Monarques à leur façon, isolés dans leur propre royaume comme ils l'avaient toujours été, à deux. Seuls au monde, malgré la foule.
Lui proposant son bras avec galanterie, ponctué d'un très sérieux « Madame », Evan avança avec la médicomage à ses côtés. Quelle étrange impression. Fier, l'Écossais l'avait toujours été, à sa façon, connaissant le pouvoir de sa stature, de son allure, mais ainsi, avec la jeune femme à son bras, il se sentait le besoin de rugir, de montrer Ariadne au monde avec possessivité. Se penchant vers elle d'un ton de confidence, sa voix résonna, grave, douce. « On m'a expliqué le concept - il y a les grandes salles de projection pour tout un public, mais nous méritons mieux que ça, surtout quand nous sommes si agréables à regarder », termina-t-il d'un ton légèrement crâneur, qui ne le quittait pas depuis l'adolescence. Avisant l'un des petits habitacles qui, lui avait-on expliqué, abritaient un dispositif permettant une expérience plus complète des œuvres cinématographiques, Evan le désigna. « Viens, c'est par ici - as-tu eu l'occasion de regarder beaucoup de films moldus, dis-moi? Apparemment, Moulin Rouge a été encensé par les critiques ». Ouvrant galamment la porte à la médicomage afin qu'elle puisse s'installer en premier, Evan pénétra à son tour dans le petit cabanon, son regard forêt se promenant sur le mobilier relativement sobre de l'endroit, avisant les fauteuils de velours et ce qui ressemblait à un lecteur DVD amélioré par des soins magiques. L'Écossais, que ses professeurs de métamorphose avaient considéré comme un virtuose dans cette discipline, se pencha sur l'objet, fasciné.
Sourcils froncés, il marmonnait pour lui-même, manipulant l'instrument avec précaution. « Ça doit être ça, forcément », dit-il en appuyant sur un bouton, concentré. Relevant la tête, il se retourna vers Ariadne, disant « bon ce n'était pas ---- Ariadne? » Disparue. La pièce avait entièrement changé, également. L'Écossais se trouvait dans un étrange bazar d'artiste - son genre d'habitat, certes, mais que faisait-il ici? Sourcils froncés, il se releva, ajustant son costume, jetant un regard à la pièce, où trônaient instruments, décors ... une scène. Des chandelles illuminaient la scène, et Evan sourit. « Vivre le film autrement, tu parles ... » Jubilant, il se posa au piano à queue qui trônait sur la scène, attendant que quelqu'un le découvre - éternellement avide d'aventures. Un habile trémolo remplit l'espace. « Ah parfait, c'est toi le nouveau pianiste de répétition? On t'attendait! » Evan se retourna pour faire face à deux hommes habillés en gentleman, mais dont l'accoutrement traduisait clairement qu'il s'agissait pour eux d'un déguisement - ils arboraient un maquillage de scène reconnaissable. Le pianiste se releva et exécuta une révérence gracieuse, heureux de se retrouver parmi des gens de théâtre.
Quelle excellente idée, ce film.
« Messieurs! Justement, je vous attendais. Quel morceau, pour commencer? » Les deux inconnus le jaugeaient pourtant du regard, s'étant arrêtés nettement dans leur lancée. Ils se parlaient désormais entre eux, ignorant Evan, qui ne pouvait entendre que des bribes de leur conversation.
« il a l'air d'un duc »
« tu penses à ce que je pense? »
« ... mieux l'affaire que l'Italien »
« ... et plus beau, en plus »
« parfait, on fait comme ça alors »
Expression languide et amusée au visage, le pianiste attendait patiemment que les inconnus s'intéressent à lui à nouveau. « Monsieur l'inconnu! », dit le plus grand des deux, triturant sa moustache. L'Écossais inclina gracieusement la tête, se présentant « Evan Wakefield, à votre service ». Retirant son haut de forme, le plus petit le regarda avec un air de conspirateur, auquel Evan répondit immédiatement en prenant le même air, jubilant comme un adolescent auquel on offrait une aventure. « Evan, que dirais-tu d'être un duc, ce soir? » Prenant un air emporté, il se mit immédiatement dans le personnage, comédien. « Je suis un duc tous les soirs, mais ce soir je peux l'être particulièrement, pour votre bon plaisir, messieurs », dit l'Écossais, sourire enjôleur au visage. Les deux comparses se tournèrent immédiatement l'un vers l'autre, air de triomphe partagé. « Ha! Il parle même comme un noble. Parfait Evan, viens avec nous », dit le plus grand, se présentant comme Julio, le prenant par le bras pour l'entraîner vers la sortie. « Où allons-nous, messieurs? », s'enquérit le musicien. « L'endroit le plus débauché et plaisant de Paris, bien entendu - le Moulin Rouge! »
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mer 17 Avr 2019 - 20:18
Bien que vif, l'air d'ahuri qu'il lança à mon encontre lorsqu'il me vit ne m'échappa pas. Comme d'habitude, il essayait de se cacher derrière des tournures de phrases, chanteur et danseur habile qui pense pouvoir tout balayer d'un crescendo ou d'un changement de rythme. Sauf qu'avec moi ça ne fonctionnait pas toujours. Aujourd'hui je m'abstenais de tout commentaire, car je devais bien le reconnaître, j'étais flattée par sa réaction, et par ce compliment muet qu'il n'avait pas réussi à formuler. Depuis combien de temps ne m'avait-il pas vue en tenue de soirée ? Et surtout, si mon souvenir était exact, nous étions que des adolescents, à peine adultes.
Tout était différent maintenant.
D'un sourire et d'un regard flamboyant qui ne cachait pas l'ironie de la situation, je lui prenais le bras tout en le laissant me guider jusqu'au cabanon qu'il voulait visiter depuis le début. Curieuse, je me laissais entraîner, et surtout, si c'était le moyen pour moi de passer du temps avec Wakefield, d'être proche de lui, de pouvoir nous donner une chance de nous retrouver, alors j'aurai été bien sotte de refuser.
Ainsi accrochée à son bras, j'avais envie de fusiller du regard toutes les femmes qui pouvaient m'observer avec envie, s'imaginant elles aussi auprès de l'écossais. Ah non ! Je l'avais perdu pendant assez longtemps, maintenant je ne le prêtais plus ! Il était à moi et à personne d'autre.
Aux risques et périls pour celles, et même ceux, qui s'en approcherait de trop prêt à mon goût. Ils tâteront de ma colère de fauve enragée.
Adoptant alors un air fier, je fixais Evan avec un grand sourire approbateur tandis qu'il parlait des salles pouvant être complètes. Non, nous avions besoin d'un public bien spécifique après tout. Deux étoiles filantes qui étaient entrées en collision après une longue orbite semblant infinie. Nous avions donc besoin de quelque chose à la mesure des astres que nous étions.
Entrant la première dans le cabanon, je fixais le lieu avec une certaine curiosité dans le regard avant de prendre place et de laisser mon ami d'enfance tripoter la machine. Il avait toujours ce goût de l'étrange, à observer presque de manière malsaine ce qu'il ne comprenait pas. J'avais toujours trouvé cela fascinant, mais je n'avais jamais osé le lui avouer. J'aurai aimé pouvoir faire une thèse là-dessus, mais peut-être n'était-il pas trop tard. Cela dit, je m'autorisais une pause avec les études. Je continuais de lire des ouvrages tous les jours pour mon travail et j'en apprenais à chaque instant en pratiquant. Les dossiers et les examens c'était fini pour le moment. Pour une fois dans ma vie, je m'autorisais à souffler.
- Non tu sais bien que me planter devant une télévision moldu n'est pas ma principale occupation. Mais si tu dis qu'il mérite son visionnage, alors soit, je te fais confiance.
Et bien oui à trop travailler pour mon métier, j'en avais perdu des habitudes simples, comme tout simplement se poser sur un canapé et ne rien faire. Car regarder un film revenait à ne rien faire pour moi.
Détournant un instant le regard, distraite par une affiche du film en question, j'observais les deux personnages principaux, y trouvant une ressemblance presque troublante entre eux et nous. Les yeux plissés, je me permettais d'aller de mon petit commentaire.
- Dis donc tu as fait exprès de choisir ce film parce qu'ils nous ressemblent ? Sans réponse, je tournais la tête pour revenir sur le sorcier. Evan ?
Voilà que le paysage avait changé. Le sombre cabanon avait laissé place à une pièce rougeoyante et encombrée d'objets divers en tout genre, principalement des habits très imposants. Tenues typiques des soirées à thème ou de théâtre. Je me retrouvais assise sur un petit tabouret, toujours vêtue de ma longue robe blanche, face à un miroir au cadre éclairé par un bon nombre de lumière, sans doute pour faciliter un certain maquillage.
Fronçant les sourcils sur ma neuve situation, j'allais me relever lorsqu'une femme, petite et ventripotente s'en vint trottiner dans ma direction en agitant son ample robe à froufrous rouges.
- Olala nous ne sommes pas en avance, allez, tourne toi vers moi pour que je puisse te maquiller.
Ouvrant des yeux surpris, je reculais le visage alors qu'elle approchait ses doigts bouffis vers moi.
- Mais, qui êtes-vous ?
- Ho ma chérie, tu as encore mal dormi cette nuit ? As-tu pris ton médicament ? C'est moi, Sally.
Alors là c'était la meilleure. Prendre des médicaments ? Moi ? J'en donnais, je n'en prenais pas. Elle avança à nouveaux ses mains vers moi avec le maquillage, geste que j'interrompais par une nouvelle question.
- Et qu'est-ce que tu veux faire avec ça ?
- Te préparer pour ton entrée bien sûr ! Tu te souviens au moins des paroles et des pas de danse ?
Quoi ? Me donner en spectacle ? Évidemment que je ne connaissais rien et que je n'avais souvenir de rien. Le musicien et le danseur, c'était Evan, pas moi. Bigre, Evan, dans quoi m'as-tu encore entraînée ? Si je t'attrape je te tue.
- Mais, où sommes-nous ?
- Au Moulin Rouge ma chérie. Allons, laisse toi faire nous devons nous hâter.
Par Merlin… me voilà coincée en danseuse étoile d'un cabaret alors que je ne connaissais rien au spectacle.
Evan m'en devait une. Et une belle.
Tout était différent maintenant.
D'un sourire et d'un regard flamboyant qui ne cachait pas l'ironie de la situation, je lui prenais le bras tout en le laissant me guider jusqu'au cabanon qu'il voulait visiter depuis le début. Curieuse, je me laissais entraîner, et surtout, si c'était le moyen pour moi de passer du temps avec Wakefield, d'être proche de lui, de pouvoir nous donner une chance de nous retrouver, alors j'aurai été bien sotte de refuser.
Ainsi accrochée à son bras, j'avais envie de fusiller du regard toutes les femmes qui pouvaient m'observer avec envie, s'imaginant elles aussi auprès de l'écossais. Ah non ! Je l'avais perdu pendant assez longtemps, maintenant je ne le prêtais plus ! Il était à moi et à personne d'autre.
Aux risques et périls pour celles, et même ceux, qui s'en approcherait de trop prêt à mon goût. Ils tâteront de ma colère de fauve enragée.
Adoptant alors un air fier, je fixais Evan avec un grand sourire approbateur tandis qu'il parlait des salles pouvant être complètes. Non, nous avions besoin d'un public bien spécifique après tout. Deux étoiles filantes qui étaient entrées en collision après une longue orbite semblant infinie. Nous avions donc besoin de quelque chose à la mesure des astres que nous étions.
Entrant la première dans le cabanon, je fixais le lieu avec une certaine curiosité dans le regard avant de prendre place et de laisser mon ami d'enfance tripoter la machine. Il avait toujours ce goût de l'étrange, à observer presque de manière malsaine ce qu'il ne comprenait pas. J'avais toujours trouvé cela fascinant, mais je n'avais jamais osé le lui avouer. J'aurai aimé pouvoir faire une thèse là-dessus, mais peut-être n'était-il pas trop tard. Cela dit, je m'autorisais une pause avec les études. Je continuais de lire des ouvrages tous les jours pour mon travail et j'en apprenais à chaque instant en pratiquant. Les dossiers et les examens c'était fini pour le moment. Pour une fois dans ma vie, je m'autorisais à souffler.
- Non tu sais bien que me planter devant une télévision moldu n'est pas ma principale occupation. Mais si tu dis qu'il mérite son visionnage, alors soit, je te fais confiance.
Et bien oui à trop travailler pour mon métier, j'en avais perdu des habitudes simples, comme tout simplement se poser sur un canapé et ne rien faire. Car regarder un film revenait à ne rien faire pour moi.
Détournant un instant le regard, distraite par une affiche du film en question, j'observais les deux personnages principaux, y trouvant une ressemblance presque troublante entre eux et nous. Les yeux plissés, je me permettais d'aller de mon petit commentaire.
- Dis donc tu as fait exprès de choisir ce film parce qu'ils nous ressemblent ? Sans réponse, je tournais la tête pour revenir sur le sorcier. Evan ?
Voilà que le paysage avait changé. Le sombre cabanon avait laissé place à une pièce rougeoyante et encombrée d'objets divers en tout genre, principalement des habits très imposants. Tenues typiques des soirées à thème ou de théâtre. Je me retrouvais assise sur un petit tabouret, toujours vêtue de ma longue robe blanche, face à un miroir au cadre éclairé par un bon nombre de lumière, sans doute pour faciliter un certain maquillage.
Fronçant les sourcils sur ma neuve situation, j'allais me relever lorsqu'une femme, petite et ventripotente s'en vint trottiner dans ma direction en agitant son ample robe à froufrous rouges.
- Olala nous ne sommes pas en avance, allez, tourne toi vers moi pour que je puisse te maquiller.
Ouvrant des yeux surpris, je reculais le visage alors qu'elle approchait ses doigts bouffis vers moi.
- Mais, qui êtes-vous ?
- Ho ma chérie, tu as encore mal dormi cette nuit ? As-tu pris ton médicament ? C'est moi, Sally.
Alors là c'était la meilleure. Prendre des médicaments ? Moi ? J'en donnais, je n'en prenais pas. Elle avança à nouveaux ses mains vers moi avec le maquillage, geste que j'interrompais par une nouvelle question.
- Et qu'est-ce que tu veux faire avec ça ?
- Te préparer pour ton entrée bien sûr ! Tu te souviens au moins des paroles et des pas de danse ?
Quoi ? Me donner en spectacle ? Évidemment que je ne connaissais rien et que je n'avais souvenir de rien. Le musicien et le danseur, c'était Evan, pas moi. Bigre, Evan, dans quoi m'as-tu encore entraînée ? Si je t'attrape je te tue.
- Mais, où sommes-nous ?
- Au Moulin Rouge ma chérie. Allons, laisse toi faire nous devons nous hâter.
Par Merlin… me voilà coincée en danseuse étoile d'un cabaret alors que je ne connaissais rien au spectacle.
Evan m'en devait une. Et une belle.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Sam 20 Avr 2019 - 13:56
M O U L I N x R O U G E
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All the shine of a thousand spotlights
All the stars we steal from the nightsky
Will never be enough
Ses deux comparses papillonaient à droite et à gauche, saluant l'un, donnant une claque dans le dos de l'autre, hochant la tête vers une serveuse pour lui commander une bouteille et lui pointer la table vers laquelle ils se dirigeaient. L'esprit d'Evan était en ébullition - l'Écossais trépignait d'impatience et d'une attente enthousiaste, convaincu qu'Ariadne avait pris la place de la chanteuse principale du cabaret, et qu'il l'entendrait donc chanter pour la première fois en ... il n'aurait su dire combien d'années. Quinze ans, au moins? Le sorcier se souvenait pourtant de séances au piano pendant lesquelles la sorcière avait fini par développer un certain goût pour le chant - tant qu'à rester à rien faire, aussi bien faire quelque chose d'utile. L'utilité, toujours - comment était-il possible que son esprit clinique ait même pu rendre l'art utile? Et pourtant, peu importe comment l'Allemande avait perçu le chant, elle avait été assez douée, il s'en souvenait. Faisant signe à Evan, le moustachu désigna une table. « Venez, on va se placer ici. Donc, ta mission ce soir est simple, Evan », lui signifia-t-il alors qu'ils s'installaient. La serveuse leur apporta une bouteille et, alors que le premier la débouchait, le second prit le relais des explications. « Tu dois convaincre la chanteuse préférée du patron que notre pièce est celle qu'il doit produire ». Hochant la tête, l'Écossais sourit - la tâche ne semblait pas trop difficile. « Je vois. Quel est le sujet de cette pièce? » Regard de côté entre les comparses, toussotement. « Pas encore écrite ».
Evan ricana - bien sûr qu'elle n'était pas écrite, le scénario ne l'avait-il pas mentionné? « Manque de temps? », questionna-t-il, doublement amusé. « Manque de fonds », dit le plus petit des deux, levant les bras vers le ciel en un geste de quasi-supplication. « et de bol, clairement », compléta le musicien. Sourcils froncés de la part de ses comparses, regard confus. « Hein? Non non, des bols on en a ». Faisant un signe leur demandant d'oublier, Evan tourna plutôt son attention vers la scène, présentement occupée par des danseuses secondaires. Because we can-can-can. « Oubliez. Donc, comment vais-je lui parler? Est-elle dans sa loge? » Il se voyait déjà s'introduire dans la loge pour surprendre une Ariadne furieuse d'avoir été plongée dans un univers d'artiste - peut-être se prendrait-il des objets décoratifs en pleine tête, cette fois-ci? Le moustachu ricana, faisant non de la tête. « Nous ne sommes pas des animaux, Evan - nous allons te laisser profiter du spectacle d'abord ». Un gentleman et un homme de lettres, celui-là, se dit l'Écossais, une moue approbatrice au visage. Il mourait d'envie de voir Ariadne en action sur une scène - se laisserait-elle convaincre par les gens du théâtre de monter dessus? Evan se permettait d'en douter - mais il ne fallait pas sous-estimer la nature joueuse de la sorcière, après tout. « Tu feras les négociations ensuite - mais avec ton joli minois, elles risquent d'être courtes ». Les trois acolytes trinquèrent à cette idée. « Si la pièce n'est pas encore écrite, j'espère b --- » Interrompu sur le vif. Une voix douce, qui chantait, alors que la scène demeurait vide, obscure. Où était-elle? Evan aurait pu fermer les yeux, en cet instant. Il se laissa guider par la voix, n'apercevant toujours pas sa meilleure amie - mais il aurait reconnu cette vibration entre mille.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mar 23 Avr 2019 - 17:09
M O U L I N x R O U G E
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All the shine of a thousand spotlights
All the stars we steal from the nightsky
Will never be enough
Plus ou moins docile, je laissais la petite comédienne me maquiller avec la précision d'un peintre. Il ne faisait aucun doute de la qualité de ses dessins mais aussi du nombre de fois par semaine qu'elle effectuait cet exercice tant ses gestes étaient sûrs.
Laissant alors mon esprit s'évader, je me laissais distraire par la musique entraînante et les chanteurs que j'entendais passer sur scène. Le rythme des pas frappant le bois de l'endroit m'indiquait à quel point ils mettaient du cœur à l'ouvrage et les applaudissements endiablés du publique démontraient le succès du spectacle.
Pourtant il me semblait, déjà dans ma loge, que tout n'était que suspension. Pour faire mieux patienter un événement tout particulier. Et aux vues de l'attention que me portait présentement la femme qui me préparait, je n'y étais pas étrangère.
Fort bien.
Evan voulait jouer.
Alors nous allions jouer.
Espérait- il me tourner en ridicule ou était-ce un test ?
Dans tous les cas, j'allais répondre. Comme je l'avais toujours fait. Et j'avais la prétention de croire que je le ferai de manière inattendue. Comme toujours. Si je devais passer par là pour le conquérir encore une fois, alors soit.
- Te voilà fin prête ! Vas-y, c'est bientôt à toi ! Et n'oublie pas, respire profondément.
Le sourire sur ce visage presque difforme m'attendrit. Elle semblait si gentille et dévouée cette petite comédienne. Répondant avec douceur, je hochais la tête.
- Je n'oublierai pas, merci Sally.
Curieuse, je me rendais jusqu'à un emplacement discret derrière la scène, permettant d'observer le publique. Là, j'y retrouvais sans trop de mal Evan accompagné par deux hommes qui m'étaient alors totalement inconnus. Je n’étais pourtant pas surprise. La propension qu'avait l'écossais pour se faire des amis sortait presque de l’indécence. Son caractère solaire sans doute.
Au creux de ma gorge je sentis alors un feu s'embraser. Cette motivation et cette hâte de lui clouer la langue sur la table, par simple plaisir de relever ce défi qu'il m'avait lancé. Il devait pourtant savoir que je lui répondrai toujours et sûrement était-il en train de s'en amuser, même si cela signifiait de jouer avec sa vie. Car mettre sa vie en péril, ça aussi il s'en aurait bien souvent.
Un homme dont les joues étaient couvertes de far à tel point que j'aurai pu en hurler de dégoût trottina vers moi, faisant à chaque pas remuer sa longue et fine moustache.
- C'est à toi d'entrer en scène ma Satine ! Nous devons faire impression pour le Sultan. Il est déjà conquis, mais c'est toi qu'il veut entendre par-dessus tout !
Homme pourtant inconnu au bataillon de ma mémoire, je lui souriais, confiante et résignée, et lui permettais de me prendre la main pour m'emmener jusque derrière le rideau encore abaissé.
Là, nerveux et comme en proie a de vieilles habitudes, il épousseta ma robe déjà impeccable.
La mélodie entamée par le piano retentit alors. L'homme s'enfuit, me laissant plantée là comme une mauvaise herbe. Une magnifique mauvaise herbe cela dit.
Douces notes s'élevant dans les airs, elles emportèrent avec elle brouhaha des invités et rideau qui s'envola au plafond.
D'abord éblouie par les spots éclairant mon visage, je ne perdais toutefois pas mes moyens. En bonne médicomage urgentiste, il m'en fallait beaucoup plus. Petit sourire énigmatique et fier affiché aux lèvres, j'entamais les paroles de la chanson que je connaissais alors par cœur, par la magie du sortilège dans lequel j'étais prise. Voix de rossignol que je n'utilisais jamais, j'en usais mais n'en abusais pas ce soir. Laissant mes cordes vocales, sans doute aussi enchantées pour la fidélité au film, je sentais le publique happé par ma performance.
Pour ne pas perdre pied, ou tomber dans les poubelles ébahies de mon ami d'enfance, je jetais des œillades complices à l'orchestre se trouvant devant la scène, me permettant alors de comprendre certains signaux et de nous coordonner.
Bientôt, je vis l’homme au far à joue et à la moustache s'approcher d'un jeune homme noiraud au teint légèrement bronzé. Il me faisait furieusement penser à Selim. Quel hasard ironique.
Bientôt la musique et mon chant prirent fin, accueillant alors un tonnerre d'applaudissements et de sifflements admiratifs.
Ramassant une rose rouge alors lancée à mes pieds, je posais mon regard métallique et fier sur Evan.
Alors, c'est tout ce que tu es capable de me lancer comme mise à l'épreuve ? N'as-tu pas mieux ?
Mais tu as épuisé ta première carte. À mon tour de te mettre au défi.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Jeu 25 Avr 2019 - 1:44
M O U L I N x R O U G E
►
Towers of gold are still too little
These hands could hold the world but it'll
Never be enough
Évanescente silhouette aux couleurs pâles, sauf la chevelure, éternelle flamme sachant attirer tous les regards - et tous la regardaient, à présent, médusés. Surpris, une fois de plus, par une étrange sensation, Evan eut envie de jeter un sort aux autres pour les priver de leur vue le temps d'une chanson, profiter, seul, de l'apparition aux cheveux d'ambre qui occupait la scène, seule. À la tension qui était montée dans toute l'assemblée, le pianiste comprit immédiatement que cette chanson était le clou du spectacle - oh, des danseuses de cancan viendraient bien amuser les badauds par la suite, Evan s'en doutait, mais c'était elle que les spectateurs étaient venus voir. « C'est elle. Satine », lui glissa le moustachu mais, irrité, le professeur de musique leva une main agacée lui signifiant qu'il voulait écouter le fascinant spectacle sans que l'on interrompe sa concentration. Homme de musique, être d'art, l'Écossais savait reconnaître une performance de qualité quand il en entendait une. La voix était superbe, malgré quelques défauts de forme qu'on n'aurait su reprocher à la chanteuse, davantage habituée à faire chanter des patients que des partitions, mais c'était sa présence. Était-il le seul à la remarquer, ainsi, présence à la fois gracieuse et terrible, sur scène, les joues qui se creusaient sur son visage aiguisé comme une lame alors qu'elle chantait une chanson qui n'aurait pu mieux lui coller à la peau? N'était-ce pas ce qu'ils avaient été, plus jeunes, ce qu'ils étaient toujours, Evan l'espérait, adultes? Affamés, rêvant de plus. Never enough. Un tonnerre d'applaudissements retentit, et, sans même en avoir conscience, le rouquin se retrouva sur ses pieds, applaudissant à tout rompre, enthousiaste, heureux - possessif. Il voulait leur dire, à eux - elle est mienne, mais il savait que c'était faux. Ariadne ne serait jamais à personne. Obstinément, pourtant, il s'y refusait. Si quelqu'un était digne d'elle, c'était lui. Si elle devait être à quelqu'un, elle serait sienne, autant que lui était le sien, l'avait toujours été, sans comprendre.
« Evan, voici le plan », lui dit le plus grand des deux, air de conspirateur au visage. Se prenant aisément au jeu, Evan adopta le même air et une posture similaire. « On t'arrange une visite dans sa loge - discret, subtil, efficace », affirma le moustachu en leur servant un nouveau verre. « Sourire enjôleur, puis c'est réglé, elle adore notre pièce, et on est sauvés », s'exclama le premier, trinquant avec les deux autres. « Simple comme bonjour ». Evan trinqua avec eux, répétant la dernière phrase. « Simple comme bonjour ». Simple? Si Ariadne était en forme (et ne l'était-elle pas toujours, lorsque venait le temps de punir son meilleur ami?), rien ne serait simple.
On lui avait indiqué le chemin vers les appartements de l'artiste, mais Evan s'était fait rembarrer par un colosse à l'air peu fréquentable. Tenace, s'il voulait éviter une confrontation inutile avec les jointures du mastodonte davantage par économie de temps que par couardise, le géant roux avait plutôt escaladé la façade ouest du cabaret pour parvenir à la fenêtre visée. Se hissant de façon habile, le professeur pénétra dans les appartements, silencieux comme un félin, découvrant un univers de velours rouge. Les rideaux, coussins, fauteuils, tout était capitonné, pointait vers un univers de luxure et de tentation. Tentant de ne pas s'y embourber si aisément, sachant fort bien quel genre de formidable adversaire l'y rejoindrait, Evan s'était installé, languide, sur l'un des sofas, attendant la venue de l'étoile de la soirée, qui fit son apparition à nouveau, débarrassée de sa robe blanche, désormais vêtue d'un peignoir soyeux. « Mademoiselle Satine, je présume? », demanda le professeur, se levant avec précipitation de son fauteuil improvisé. Sourire insupportable aux lèvres, terriblement amusé, il tira un brin de lavande cueilli à l'extérieur de sa manche, la tendant à la chanteuse improvisée. « Les roses n'ont jamais été tes préférées », fit-il simplement, éclat admiratif dans le regard qu'il ne cherchait pas à cacher, coeur qui battait la chamade sans qu'il ne puisse se l'expliquer.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Jeu 25 Avr 2019 - 15:51
M O U L I N x R O U G E
►
Love is a many splendored thing
Love lifts us up where we belong
All you need is love
Love lifts us up where we belong
Where the eagles fly
On a mountain high
Je réussissais à me retirer après l'ovation que je venais d'enflammer dans la salle. Derrière la scène, sous les rideaux baissés, tous mes collègues du théâtre vinrent me féliciter. Malgré la fierté que je pouvais ressentir, j'avais l'étrange sensation que l'avenir de toutes ses personnes pesait sur mes épaules. Les responsabilités ne m'avaient jamais dérangées, la preuve que sinon, je ne serai jamais cheffe du service des urgences en dehors de ce film étrange. Cependant, je tenais entre mes mains leurs manières de travailler, un avenir meilleur, des salaires, de la reconnaissance mais aussi la responsabilité de devoir les écouter et les corriger. Je ne tenais pas leurs richesses, la possibilité de les envoyer à la rue.
Alors je leur en étais à tous reconnaissance, humblement. Après tout, je n'étais pas un monstre similaire à ce qu'avaient été mes parents. Au hasard, je donnais ma rose à l'une des danseuses avant de saluer tout le monde et de me retirer. Étrange sensation que de ne pas se souvenir des lieux, mais de savoir comment s'y repérer. Juste avant que je ne puisse fermer mes doigts sur la porte de la poignée de ma loge, l'homme à la moustache me sauta dessus pour me prendre dans ses bras et me serrer si fort que je cru en mourir étouffée.
- Bravooooooooooo Satine !! Le sultan est totalement tombé sous ton charme il veut absolument te voir et te rencontrer ! Si tu lui plais, il pourra offrir au cabaret une situation bien plus stable, nous pourrons tous vivre tranquillement jusqu'à notre retraite ! Tu imagines ?
- J'ai du mal à réaliser, mais je suis heureuse de pouvoir contribuer à tout cela. Je lui souriais avec tendresse, comme si cet homme était le père que je n'avais jamais eu. Ce dernier vint entourer mon visage de ses doigts imposants de travailleur forcené.
- Je compte sur toi. Il doit venir dans ta chambre d'une minute à l'autre. Sors-lui le grand jeu !
Même si je gardais mon sourire, je ne pouvais m'empêcher de froncer les sourcils, craignant d'avoir mal compris. Le moustachu ricana alors, heureux de voir un avenir meilleur pour lui et pour toute la troupe se profiler, avant qu'il ne me tourne le dos et disparaisse derrière les nombreux cordages.
Sortir le grand jeu ? Avais-je mal compris ? Ou peut-être avais-je l'esprit mal tourné à cause de la tendance de l'endroit ? Après tout, je me trouvais dans un cabaret, et il y avait sans doute des passe-droits pour des gens haut placés… comme un sultan.
C'est songeuse, redoutant le reste de ma soirée que je pénétrais dans ma loge pour y retrouver un Evan déjà installé. Avec tout ce qui venait d'arriver, j'en avais presque oublié que je n'étais pas dans la réalité, et surtout, j'en avais presque oublié la présence de mon alter égo à mes côtés. Bien que soulagée, je sursautais comme jamais, tout en refermant la porte avec précipitation, ignorant les railleries de l'écossais.
Courant presque dans sa direction, j'attrapais sa main qui me tendait la lavande avant de plonger mon regard d'acier dans le sien, toujours si vert, si jovial, si tendre.
- Evan ?! Qu'est-ce que tu fabriques ici par tous les Saints ? Je vais avoir une visite d'une minute à l'autre, tu ne peux pas rester.
À peine avais-je eu le temps de prononcer ces mots que déjà on frappait à la porte.
- Ma chère, ouvre, notre invité est arrivé.
Serrant la mâchoire en manquant de laisser échapper un juron, j'entrainais le rouquin avec moi pour le cacher derrière les nombreux tissus, à l'instar de rideaux, qui décoraient ma chambre pour rendre l'endroit d'autant plus chaleureux et chaud.
- Satine ?
- Une minute, je me change !
Fusillant Evan du regard, je déboutonnais ma robe pour la lui lancer en plein visage avant d'en attraper une nouvelle pour l'enfiler en vitesse.
- Si tu fais un bruit, je te tue. Je ne veux pas entendre le pet d'une mouche. Autoritaire, mon index était pointé dans sa direction comme si je grondais un petit garçon. Mais en une seconde, je réussissais à me radoucir, et sans trop savoir pourquoi, comme je l'avais fait déjà des milliers de fois, réflexe d'une enfance retrouvée, comme si je m'autorisais à caresser un rêve, je venais lui embrasser la joue. Sois sage !
Me redressant, fermant un tissu sur lui pour m'assurer de le camoufler convenablement une dernière fois, je me dirigeais vers la porte pour l'ouvrir sur l'homme moustachu et le sultan. Ce clone de Selim que je reluquais avec autant de respect simulé que de malaise.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Sam 27 Avr 2019 - 19:41
Sourire languide aux lèvres, fleur tendue avecpresquebonne foi, Evan s'attendait à une remarque légèrement sarcastique, mais certainement à revoir l'éclat étrange au fond des prunelles d'acier d'Ariadne, le même qui s'y était logé en Tanzanie, en lui offrant l'aubépine. Pourtant, la jeune femme se précipita dans sa direction, l'informant qu'elle attendait quelqu'un. « Oui! Moi! » Le bruit à la porte le fit mentir - qui d'autre pouvait-elle bien attendre? Sourcils froncés, il entendit une voix masculine annoncer un autre invité - qui donc? Evan aurait probablement mieux dû lire le résumé de l'oeuvre, ne s'attardant qu'au contexte et aux personnages qui semblaient leur ressembler un peu. Se maudissant pour son manque d'organisation (c'est Chaffinch qui rirait bien ...), le pianiste obtempéra lorsque la médicomage devenue chanteuse lui intima de se cacher, dissimulé sagement derrière un rideau, ne se permettant pas même un commentaire lorsqu'elle lui lança sa robe en plein visage. Petit sourire stupide aux lèvres au contact de son baiser innocent sur la joue, Evan se mit au garde à vous, hochant la tête lorsqu'elle lui intima d'être sage. Sage, il l'était rarement, mais pour l'histoire, le sorcier voulait bien jouer le jeu. À travers une fente du rideau derrière lequel il était dissimulé, le musicien vit la scène en entier, incapable de réagir parce qu'il l'avait promis, et parce qu'il s'était juré que désormais, il tiendrait toujours parole avec elle - même dans ce cadre loufoque de film. Ariadne, vêtue d'une robe écarlate, accueillant un homme aux traits vraisemblablement hérités de l'Orient, qui s'attendait visiblement à davantage que de le simple compagnie de sa part, le manipulant d'une main experte pour qu'il tombe dans le panneau, lui laissant miroiter monts et merveilles pour qu'il accepte de financer le prochain spectacle produit au Moulin Rouge.
Lorsque, enfin, la sorcière le mit à la porte, promettant d'accepter de le revoir, Evan sortit de sa cachette, hilare, cachant la hargne qui l'avait saisi lorsque le sultan s'était un peu trop approché de la jeune femme, humant son parfum à son cou. Appuyé contre une colonne drapée de rouge comme l'essentiel de la pièce, il jeta un regard aux alentours. « Je me demande si cette pièce a été conçue pour tomber follement amoureux », questionna le sorcier à voix haute, n'osant pas regarder la médicomage dans les yeux sans en avoir conscience. Faisant mine d'inspecter ses ongles, il adressa ensuite un sourire radieux à la jeune femme sans lui laisser en placer une - tant pis pour son courroux, qu'il imaginait bouillir en elle depuis qu'elle était atterrie dans sa loge. Attrapant ses mains, il la fit tournoyer sur elle-même, sifflant. « Tu chantes magnifiquement. J'espère avoir le plaisir de t'entendre à nouveau », dit-il, avant de se rappeler qu'on lui avait donné une mission. L'avenir de la vie bohème de ses comparses et de leur troupe en dépendait, après tout. « Cette fameuse pièce dont tu parlais - l'avez-vous déjà choisie? » Le ton était tranquille, mais le sorcier était distrait. Par l'atmosphère, par la robe de la sorcière, par Paris, par les airs qu'il avait en tête. Il libéra les mains de l'Allemande, se dirigeant vers la fenêtre, qui donnait accès à une terrasse à partir de laquelle une splendide vue de la capitale se déroulait. « J'en ai une à te proposer », fit le musicien, réfléchissant à toute vitesse, sourire s'élargissant alors qu'il parlait. « Une pièce de danger, de trahison et ... d'amour ». L'hésitation, minime mais perceptible, de parler du mot défendu.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Sam 27 Avr 2019 - 22:33
La porte enfin refermée, je posais mon front sur le bois en soupirant longuement. Prise d'un soudaine vertige, je toussotais jusqu'à ce que la voix de mon âme sœur retenti dans mon dos. Je ne l'avais certes pas oublié, mais le temps d'un battement de cils, j'avais eu espoir d'être seule, pour me remettre de mes émotions de la journée. Farandole d'imprévus et d'improvisations, je n'étais pas faite pour ce genre de carrière sur scène. Je préférais largement inventer aux urgences pour sauver des vies, que pour agiter des paillettes sous des projecteurs.
Pourtant, s'est troublée que je faisais à présent face à mon ami, le fixant avec des yeux arrondis. Que venait-il de dire ? Ou plutôt, que venait-il de sous-entendre ? Le trouble que je percevais chez lui par le simple fait qu'il ne m'avait pas regardé, me perturba d'autant plus.
Néanmoins, je n'eus pas vraiment eu le temps d'y réfléchir puisqu'il revenait vers moi en attrapant mes mains pour me faire tournoyer.
Effet d'un rembobinage, impression de remonter le temps, je nous revoyais, jeunes adultes, à glisser sous le vent de la même manière que maintenant. Pansement sur les cicatrices du cœur qui semblent petit à petit disparaître. Ou alors n'était-ce encore qu'une illusion ? Un fin sourire malicieux étira mes lèvres.
- Un jour lointain peut-être. Tu sais bien qu'il ne faut pas abuser des bonnes choses.
Je plantais mon regard dans le sien, bravant le risque, souhaitant me persuader que non, je ne ressentais rien d'inhabituel. Que rien n'avait changé. Alors pourquoi est-ce que je sentais mon pouls s'accélérer sensiblement ?
Tandis que je plongeais dans l'émeraude de son regard et que j'avais le profond désir de vouloir m'y perdre, il me ramena pourtant dans cet endroit étrange, cette loge rouge qui ne pouvait inviter qu'au pêché. Sourire fondant et disparaissant, je regardais le jeune homme se diriger vers la terrasse. Joignant mes mains devant moi, je le suivais à distance raisonnable, le laissant admirer la superbe vue que je connaissais par cœur alors que je ne l'avais jamais contemplée.
Quelle sensation étrange que d'incarner des personnages et d'hériter de leurs souvenirs…
Constatant que la jovialité du musicien revenait, je haussais un sourcil, intriguée, penchant légèrement la tête.
- Non rien n'est décidé… mais je crains la finalité avec ce sultan. J'espère qu'on sortira du film avant cela sinon…
Je ne terminais pas ma phrase, je ne voulais pas en arriver là. Je savais me défendre, et s'il fallait je briserai le sortilège dans lequel nous étions emprisonnés pour ne pas me laisser faire. Je ne m'étais jamais laissé faire, ça n'allait pas changer aujourd'hui. Encore moins dans une fiction. Après tout, aucun n'était digne de moi. Aucun.
Arrivant à la hauteur d'Evan, je reprenais ses mains, sans trop savoir pourquoi, appréciant la chaleur qu'elles dégageaient dans mes paumes. Les fixant un instant, songeuse, je relevais mes prunelles métalliques sur lui. Je l'admirais alors d'autant plus précisément que les milliards de fois précédentes qui m'avait été donné de le faire. Touchée droit au cœur par le dernier mot, captant une nouvelle fois l'hésitation du pianiste, je murmurais.
- Dis-m'en plus.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mer 1 Mai 2019 - 2:53
we should be lovers,
and that's a fact.
Retrouvailles étranges, sous le regard des ornements et voilures teintés de rouge, pièce étrange dont il ne put s'empêcher de soulever le caractère charnel, avant de questionner la jeune femme au sujet d'une reproduction de sa performance. « Un jour lointain peut-être. Tu sais bien qu'il ne faut pas abuser des bonnes choses. » L'éternel bon sens, même dans cet univers fantastique et étrange de poésie, de débauche si spécifique à l'endroit et de musique. Que faudrait-il pour faire perdre un peu de contrôle à la médicomage? Incorrigible, Evan poursuivait tout de même sur sa lancée, répliquant du tac au tac à la trop sérieuse Allemande. « Vous avez dû chuter et vous cogner le crâne, madame, je crois que vous avez mal prononcé qu'il faut toujours abuser des bonnes choses », fit le professeur en affrontant le regard qu'elle plantait dans le sien, forêt dans laquelle l'acier se perdait et se retrouvait. Tout changeait entre eux, semblait-il. Était-il le seul à le constater, ou même vouloir l'admettre? Evan n'avait jamais été particulièrement friand de continuité, cherchant toujours ce qui pourrait constituer ... Davantage. Si leur relation devait être transformée, il l'accueillerait à bras ouverts, prêt à affronter les nouveaux défis constitués. Pas de danse légers, avant de se retrouver face à la fenêtre, absorbant une vue à la fois nouvelle et ancienne, faite de souvenirs et de nouveauté superposés. Légèrement, Evan la questionna au sujet du prochain spectacle. « Non rien n'est décidé… mais je crains la finalité avec ce sultan. J'espère qu'on sortira du film avant cela sinon… » Le professeur ne dit rien, trop conscient de la fin de la phrase qu'Ariadne n'osait pas prononcer, et un nouveau noeud sembla se former dans ses entrailles, jaloux et possessif. S'il devait bannir le sultan, l'enfermer dans un coffre et le renvoyer en train d'où il était apparu, le musicien le ferait. Il y a des limites à suivre un scénario fictif...
Le contact des doigts froids de la chanteuse lui arracha un frisson léger et, sourcils froncés, l'Écossais prit ses mains entre ses propres longs doigts, tentant de leur transférer un peu de chaleur. « Dis-m'en plus », murmura-t-elle, et l'âme de conteur du musicien s'éveilla, sachant qu'il devait à présent improviser le synopsis d'une pièce qui n'était pas encore écrite. Rester assez vague pour laisser une certaine liberté artistique à ses comparses improvisés, mais créer des images assez précises pour donner envie à Ariadne de collaborer et de plaider leur cause auprès de son patron. « Notre histoire se déroule vers l'Est, en Inde », commença le sorcier, enroulant un de ses bras autour des épaules de la médicomage comme s'il souhaitait l'emmener voyager avec lui - et dans un sens, c'était le cas. Un autre bras étiré devant lui, Evan peignait un portrait avec les mots, désignant un ailleurs qui n'existait que dans son esprit. « Imagine : la première scène s'ouvre, nous sommes dans une salle capitonnée, mais lumineuse, des voiles sont suspendus du plafond, on devine des silhouettes derrière ». La voix était douce, mystérieuse, élaborée : celle d'un conteur, mais surtout d'un homme d'histoires qui inventait la sienne alors qu'elle se déroulait sur sa langue, improvisation extrême dont dépendaient ses nouveaux amis. « Nous sommes dans le palais d'un maharaja cruel qui tente de séduire une courtisane », fit le professeur en se tournant vers l'Allemande, air d'expectative dans le regard, improvisant la trame d'une phrase à l'autre. Plaçant le dos de sa main contre front, Evan se fit dramatique. « mais, hélas! La courtisane en aime un autre ... », murmura-t-il sans pouvoir s'empêcher de jeter un bref coup d'oeil à la chanteuse d'un soir. « un joueur de cithare sans le sou ». Se détournant un peu de sa spectatrice, le conteur se recueillit l'espace d'un instant, complétant son histoire au moment même où il devait la prononcer. « La tentation de dire oui au maharaja est forte - il peut s'occuper d'elle, représente la sécurité pour notre courtisane, qui n'aurait plus jamais à s'inquiéter », dit-il avec un trait d'urgence dans la voix. S'exclamant, désormais, il s'agenouilla face à Ariadne, prenant ses mains jointes. « mais elle aime le joueur de cithare, qui, lui, représente tout ce qui la terrifie : l'instabilité et la perte de contrôle ». Situation la plus terrifiante qui soit pour la sorcière, non? La perte de contrôle. « Lors de notre dernière scène, notre courtisane choisit l'amour, contre toutes les attentes, et dit adieu au maharaja », conclut le sorcier, toujours à genoux dans son étrange position de proposition, lueur étrange mais désormais récurrente dans le regard.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Ven 3 Mai 2019 - 22:16
Tourbillon bouillonnant d'idées et d'extravagance, j'observais cet Evan soudainement emporté par sa propre créativité. Je le connaissais assez pour deviner qu'il improvisait l'histoire qu'il était en train de me soumettre, pourtant, je contemplais chacune de ses facéties avec délectation. Le voilà, cet ami qui m'avait tant et si bien manqué. Le voilà dans toute sa splendeur originale, lumineux, inspiré, dans son élément. Pour sûr, j'aurais pu l'abandonner dans cet univers sans lui revenir en mémoire un seul instant. Au fond, n'était-ce pas déjà ce qui était arrivé dans notre monde ?
Néanmoins présentement j'étais confiante. Son histoire avait des résonances qui ne m'étaient pas inconnues. Miroir de la vérité, de ce que nous vivions ensemble, ou de ce qu'il aimerait traverser ? Ce dernier détail m'intriguait et me forçait à rester non loin du grand écossais alors que j'attendais sa conclusion. Je le fixais comme s'il avait un savoir absolu, comme s'il détenait la clé d'une porte que je voulais ouvrir depuis bien trop d'années. Une fois à genoux devant moi, mes mains dans les siennes, je plongeais dans cette forêt verdoyante qu'étaient ses yeux, suspendue à ses lèvres, lueur étrange dans mon propre regard. Écho au sien.
Le silence revenu entre nous, je réalisais à quel point j'avais le souffle court et la vitesse des battements de mon cœur, emballé. Déglutissant pour essayer de garder contenance, je réussissais à parler après une longue hésitation.
- C'est un scénario intéressant, je dois le reconnaître. Clignant des yeux, j'arrivais à reprendre pleine possession de mes moyens, prenant conscience que j'avais été hypnotisée par le jeune homme. Tirant légèrement sur nos mains jointes, je raffermissais ma prise sur lui, l'invitant à se relever. Je ne le lâchais pas pour autant. Tout proche de lui, j'aurais pu poser mon front contre le sien. J'aurais pu le saisir dans mes bras comme je l'avais fait maintes fois avant ce soir. Mais tout était bien plus magnétique à présent. Phénomène que je ne m'expliquais pas. Murmurant, reflet d'argent dans les prunelles, je pouvais sentir son souffle contre ma joue. Si je dois soumettre ce projet aux autres, donne-moi une idée de la distribution des rôles.
Ne perdant pas une miette de malice, je reculais enfin d'un pas. Catch me if you can. Menaçant presque de rompre le lien entre nos doigts joints, je libérais une main pour l'étendre derrière moi comme une danseuse aurait pu le faire. Geste que j'avais tant de fois vécu et répété avec Selim, avec qui il m'était impossible de converser sans gigoter un minimum.
Sourire taquin sur les lèvres, reprenant mon véritable rôle, mon moi, je semblais oser faire l'effort de ma vie. Perdre le contrôle. J'acceptais de me jeter, sauter pour le plaisir du grand écossais devant moi. Car il valait tous les sacrifices, je le lui avais déjà prouvé.
- Est-ce que ton envie de spectacle t'es venue toute seule ? Non… tu as des comparses, je me trompe ? Et ils ne sont pas loin.
N'avait-ce pas été des murmures que j'avais entendus sous mon balcon alors qu'il m'exposait son idée de représentation ? Serait-on espionné ?
Evan… petit fanfaron.
Néanmoins présentement j'étais confiante. Son histoire avait des résonances qui ne m'étaient pas inconnues. Miroir de la vérité, de ce que nous vivions ensemble, ou de ce qu'il aimerait traverser ? Ce dernier détail m'intriguait et me forçait à rester non loin du grand écossais alors que j'attendais sa conclusion. Je le fixais comme s'il avait un savoir absolu, comme s'il détenait la clé d'une porte que je voulais ouvrir depuis bien trop d'années. Une fois à genoux devant moi, mes mains dans les siennes, je plongeais dans cette forêt verdoyante qu'étaient ses yeux, suspendue à ses lèvres, lueur étrange dans mon propre regard. Écho au sien.
Le silence revenu entre nous, je réalisais à quel point j'avais le souffle court et la vitesse des battements de mon cœur, emballé. Déglutissant pour essayer de garder contenance, je réussissais à parler après une longue hésitation.
- C'est un scénario intéressant, je dois le reconnaître. Clignant des yeux, j'arrivais à reprendre pleine possession de mes moyens, prenant conscience que j'avais été hypnotisée par le jeune homme. Tirant légèrement sur nos mains jointes, je raffermissais ma prise sur lui, l'invitant à se relever. Je ne le lâchais pas pour autant. Tout proche de lui, j'aurais pu poser mon front contre le sien. J'aurais pu le saisir dans mes bras comme je l'avais fait maintes fois avant ce soir. Mais tout était bien plus magnétique à présent. Phénomène que je ne m'expliquais pas. Murmurant, reflet d'argent dans les prunelles, je pouvais sentir son souffle contre ma joue. Si je dois soumettre ce projet aux autres, donne-moi une idée de la distribution des rôles.
Ne perdant pas une miette de malice, je reculais enfin d'un pas. Catch me if you can. Menaçant presque de rompre le lien entre nos doigts joints, je libérais une main pour l'étendre derrière moi comme une danseuse aurait pu le faire. Geste que j'avais tant de fois vécu et répété avec Selim, avec qui il m'était impossible de converser sans gigoter un minimum.
Sourire taquin sur les lèvres, reprenant mon véritable rôle, mon moi, je semblais oser faire l'effort de ma vie. Perdre le contrôle. J'acceptais de me jeter, sauter pour le plaisir du grand écossais devant moi. Car il valait tous les sacrifices, je le lui avais déjà prouvé.
- Est-ce que ton envie de spectacle t'es venue toute seule ? Non… tu as des comparses, je me trompe ? Et ils ne sont pas loin.
N'avait-ce pas été des murmures que j'avais entendus sous mon balcon alors qu'il m'exposait son idée de représentation ? Serait-on espionné ?
Evan… petit fanfaron.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Sam 18 Mai 2019 - 7:08
towers of gold are still too little.
N'était-ce pas en quelque sorte le signe de leur amitié, de ce lien qui n'avait jamais été réellement rompu malgré la menace et les absences, qu'une fois de plus, Ariadne l'écoute dérouler ses tapisseries, inventées cette fois? Evan choisissait les fils les plus magnifiques pour les tisser, argent et or entrelacés, parce qu'elle ne méritait que le meilleur, cette femme capricieuse qui, pourtant, supportait avec grâce ses propres caprices. Fils vert forêt et d'acier valsant ensemble alors que les doigts du tisserands se faisaient hésitants, dans cette nouvelle danse, cette mosaïque qu'il découvrait à présent. Sous l'impulsion des doigts d'Ariadne, Evan se releva, stature de géant dominant la sorcière comme il l'avait toujours fait, plus jeune, et attendit le verdict. Une bouffée d'angoisse lui monta au cœur - attente du verdict ou réaction au souffle de la jeune femme, qu'il sentait sur lui? Leur proximité était trop grande pour qu'il parvienne à se concentrer, semblait-il, surtout en cet endroit, cette nuit ... « Donne-moi une idée de la distribution des rôles. » Un filon carmin ne s'était-il pas glissé entre ses doigts sans même qu'il le réalise? Presque surpris de l'y retrouver, fixant le trait d'un air abasourdi, le musicien fit plutôt face à la médicomage devenue chanteuse le temps d'une soirée. Il la regarda s'écarter avec une pointe de regret au visage que la sorcière ne put voir, détournée qu'elle était. L'expression qu'il lui présenta lorsqu'elle pivota à nouveau vers lui était mesurée, égale, traversée de l'éternel pétillement au fond du regard rieur qui le caractérisait depuis l'enfance. « Ce serait insulter cette noble institution que de ne pas donner le rôle titre à sa plus belle fleur », fit prudemment le sorcier, ses pas prenant la mesure imposée par Ariadne - malgré les apparences, c'était bien elle qui menait, sorcière menue face au géant.
« Est-ce que ton envie de spectacle t'es venue toute seule ? Non… tu as des comparses, je me trompe ? Et ils ne sont pas loin. » Lèvres pincées en un sourire qu'il retenait, Evan acquiesça, hochant la tête avant de présenter un air à demi penaud et, faisant signe à Ariadne d'attendre un instant, se pencha par la fenêtre, la moitié du corps suspendue dans le vide, retenu par un bras accroché à la balustrade. En dessous, les deux acolytes lui souriaient comme des enfants pris à faire un mauvais coup. « Tout va pour le mieux messieurs, la demoiselle est intéressée. Nous n'aurons pas besoin de votre aide, votre pièce est entre de bonnes mains », fit-il en leur adressant un clin d'oeil. Le moustachu hocha la tête, lui signalant en silence qu'il aimait l'idée de pièce. « Je vais aller écrire le scénario! » Riant, Evan les observa redescendre et se fondre dans la nuit, discutant en faisant de grands gestes. Clairement, l'inspiration insufflée par l'Écossais avait été le coup de pouce manquant aux deux gens de théâtre, qui transformeraient les traits grossièrement tirés par Evan en véritable oeuvre. « Semblerait-il que j'ai pris le rôle de leur pianiste de répétition », expliqua-t-il à la jeune femme, sourire aux lèvres, reprenant sa place près d'elle, petits pas de danse. Evan était loin d'avoir le même genre d'habileté que d'autres en la matière, mais une certaine grâce puissante se dégageait du rouquin, qui avait bien appris un ou deux pas en grandissant dans un environnement de sang pur et, surtout, en côtoyant des danseurs pendant près de dix ans. « Qu'en penses-tu? Jouer le rôle d'une jeune femme éprise d'un musicien ... T'en sens-tu capable? » La demande, anodine. L'espoir, qui n'osait pas se manifester.
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Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mar 21 Mai 2019 - 12:13
Will you still love me when I got nothing but my aching soul ?
Même après toutes ces années, même en le connaissant par cœur, il y avait chez Evan des mystères qui réussissaient toujours à me surprendre, à m'intriguer. Que je sois cette plus belle fleur en question me flattait, évidemment, je n'étais pas sans savoir le charme que je dégageais. Fatal et épineux. Néanmoins il m'était difficile de distinguer s'il me narguait, ou s'il le pensait véritablement, homme roux si théâtral qu'il était. Jouait-il un rôle comme il semblait toujours le faire, ou alors celui d'être lui-même, avec tous les sous-entendus que cela impliquait ? Sentait-il lui aussi ce fil rouge tissé depuis tout ce temps par les Nornes mythologiques ou étais-je la seule à le désirer à ce point que j'en venais à imaginer quelque chose qui n'existait pas ?
Nervosité malhabile, situation qui m'échappait lentement mais sûrement, chose que je n'appréciais guère, je préférais enfouir tout ce ressenti dans les pas de danse que je menais. Depuis quand un homme, ou une femme pouvaient me commander ? Ce n'était qu'illusion de penser pouvoir le faire, ou je laissais croire, ce qui m'amusait davantage.
Mais maintenant.
En ce moment précis.
J'étais toute entière devant Evan, peut-être comme jamais auparavant, car je voulais vivre une authenticité. Tant d'années d'images fardées, de non-dits et de secrets. N'était-il pas temps que cela cesse ?
Miroir de l'âme, éternelle jumelle renvoyant son propre reflet, c'est prudente que je rétorquais.
- La fleur ne peut être belle sans sa dose de soleil.
Je ne croyais pas si bien dire. Les longs mois de séparation m'avaient fané. Pâli. Grisée. Vieillie peut-être même. Mais tout ça, je le lui avais déjà dit, reproché, accusé. J'aimais toutefois à le rappeler, pour rapprocher davantage nos cœurs meurtris qui ne demandaient que réparation. Le mien hurlait une plus grande étroitesse, pour mieux guérir. Être soulagé. Allégé de ce poids qui le faisait battre si douloureusement dans ma poitrine.
C'était à regret que je le regardais s'éloigner de moi, doigts glissants sur les siens pour les laisser s'échapper. Éternelle eau que je ne pouvais capturer malgré tous mes efforts. Amusée toutefois, je lui autorisais à discuter avec ses mystérieux comparses, le voilà là, penché en avant à mon balcon. Si je n'avais pas connu la vue qui se présentait à moi par cœur, sans doute aurais-je eu une remarque déplacée. Je la gardais pour moi, non sans me rincer les yeux.
Il n'y avait pas de mal à se faire du bien, oui ?
Trop désireuse de retrouver contact avec lui tandis qu'il s'adressait à moi, je tendais ma main dans sa direction alors qu'il revint contre moi pour reprendre notre danse entêtante. Sourire malicieux figé sur les lèvres.
- Semblerait-il que tu aies pris le rôle de pianiste pour bien des artistes.
Amertume de ce qui fut, mais légèreté de ce qui sera. Allait-il être capable de composer les notes de notre avenir commun ? Ou allait-il à nouveau fuir devant la page blanche ? J'aimais à croire qu'il y avait de l'espoir. Que je pouvais me raccrocher à cette infime partie de lui. Qu'il restera près de moi. Séduite par la puissance de ses muscles suivant les pas distraits de notre ronde, je me laissais aller à un léger gloussement taquin à sa demande.
Devais-je y entrevoir une attente ? Un désir ? Une espérance ?
Pourtant, mon propre être n'osait pas en recevoir autant. Mais pourquoi ne pas défoncer cette porte entrouverte ? Depuis quand étais-je délicate ?
Tirant Evan contre moi, je reculais avant de bondir comme une panthère sur mon lit, improvisant alors une petite scène. L'invitant à me rejoindre, l'acier brûlant de mon regard se fit conquérant.
- Je m'en sens capable évidemment ! Douterais-tu de mes talents innés en comédie ?
Nous étions tous les deux des acteurs, des artistes. Mais ce soir était le rôle de notre vie. Réunissant à nouveau nos mains, j'unissais nos deux corps en une étreinte qui avait été mille fois vue et répétée. Il y avait seulement un petit quelque chose en plus. Mais quoi ? Prunelles métalliques radoucies, elles trainaient sur le visage du grand sorcier. Battements du cœur bien trop puissants, je le laissais s'exprimer à travers mes lèvres, en un murmure qui chuchotait un espoir inavoué.
- N'est-ce pas ce qui m'anime déjà depuis toutes ces années ?
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Re: this is your song + ariadne (terminé)
Ven 7 Juin 2019 - 16:23
I'll be with you from dusk til dawn.
Comparant Ariadne à la plus belle fleur du moulin rouge - et la plus vénéneuse, probablement, Evan souriait, bien qu'un trac indicible le gagnait. « La fleur ne peut être belle sans sa dose de soleil. » Acquiesçant, le professeur hochait la tête. « et le soleil n'a aucune raison d'exister, si ce n'est de caresser ses pétales », répliqua le pianiste, sourire ironique aux lèvres. Même ici, même en cet instant chargé, l'ex-griffondor ne pouvait s'empêcher d'avoir le dernier mot. Vif comme l'eau qui s'échappait par tous les moyens, il s'agissait de sa nature la plus profonde - vivacité et parades, par les mots, la musique, un sourire désarmant ou un rire bien placé. Il avait fait partie du club de duels, plus jeune, en faisait encore partie aujourd'hui et, s'il savait fort bien se défendre au combat (ne se destinait-il pas à devenir auror, à l'époque?), Evan avait toujours eu une certaine propension au débat davantage qu'au duel. La preuve - par les mots, il congédia les deux scénaristes comme s'il n'était pas leur pianiste, leur employé, avant de se retourner vers la jeune femme.
Reprenant leur danse légère, aussi lente que les aveux qui n'attendaient rien de mieux que leur courage, les sorciers se laissaient entrainer par la douceur de la nuit, les possibles de cet étrange univers où tout semblait permis. « Semblerait-il que tu aies pris le rôle de pianiste pour bien des artistes. » Evan entendait l'amertume, mais aussi le sourire ; n'y avait-il pas les mêmes échos dans son propre cœur? Elle ne le quitterait jamais entièrement, sa ballerine, mais le professeur savait, comprenait désormais que d'aimer à nouveau, ce n'était pas trahir sa mémoire. Au contraire. La dernière chose qu'une âme aussi douce que celle d'Elena aurait voulu, c'était que son mari laissé derrière, dans le monde des vivants, laisse dépérir son coeur tout en continuant d'exister. Ne souhaitant pas répondre à la bravade, malgré tout (c'était la sagesse de la quarantaine qui approchait àgrandspetits pas), Evan dévia plutôt le fil de la conversation en faisant allusion à la possibilité qu'elle sache incarner une actrice éprise d'un musicien. Désormais, c'était au tour d'Ariadne de s'échapper, moqueuse, félinement installée sur les draps du lit auquel Evan s'astreignait à ne pas penser. « Je m'en sens capable évidemment ! Douterais-tu de mes talents innés en comédie ? » Evan ne répliqua pas qu'au contraire, c'était ce qu'il craignait le plus - ses talents d'actrice. La jeune femme pouvait se montrer manipulatrice et roublarde, comme la plupart des anciens verts, mais c'était ainsi qu'il la préférait, étrangement. La crainte qu'à son tour, elle l'abandonne alors que ses propres espoirs se construisaient doucement s'empara de lui, surtout au jugé de l'attitude présente d'Ariadne. Se prêtant pourtant au jeu, Evan s'installa sur le lit à sa suite, sobrement assis pour sa part.
L'attirant à elle, Ariadne murmura. « N'est-ce pas ce qui m'anime déjà depuis toutes ces années ? » La silhouette gracieuse du géant se figea une fraction de secondes à peine, probablement trop rapidement pour être perceptible à l'oeil nu - mais Ariadne avait toujours eu cette faculté aussi émerveillante qu'agaçante de deviner ses humeurs. Le pouvait-elle encore? Evan glissa un regard d'une prudence extrême vers la sorcière, sourcils légèrement froncés comme s'il ne savait pas s'il pouvait réellement croire ce qu'elle venait de lui affirmer, ou si, vraiment, il pouvait l'interpréter de la façon qu'un espoir secret lui hurlait d'emprunter. Yeux d'émeraude plissés en sa direction, expression prudente au visage. Le professeur de musique savait la médicomage rancunière, capricieuse et imprévisible - et aucune âme ne dansait aussi bien avec la sienne que celle de l'Allemande. Serait-elle capable d'affirmer une aussi grande énormité dans un désir de vengeance? Peut-être. Pourtant, Evan voulait y croire, une partie secrète de son être ne demandait rien de mieux qu'un tel aveu. Le silence n'avait duré qu'une fraction de secondes, mais il lui semblait que l'univers avait cessé de se mouvoir, les dieux eux-mêmes s'arrêtant sur le métier à tisser cosmique pour voir s'ils auraient enfin à choisir un fil rouge afin de poursuivre l'histoire des deux enfants terribles. Deux âmes qui s'étaient trouvées et qui, malgré l'absence de l'une, malgré les silences de l'autre, avaient obstinément refusé de se lâcher. Evan laça ses doigts entre ceux d'Ariadne, l'approchant de lui avec une ferme douceur. « Répète-le », murmura-t-il, le coeur battant la chamade d'un fol espoir mais demandant tout de même une confirmation. « Dis-le moi ... Vraiment. » Égoïste enfant, trop craintif pour se mouiller d'abord, maintenant que la possibilité d'un bonheur complexe se profilait à l'horizon. Ses yeux étaient craintifs et émerveillés à la fois, éclatant soleil qui n'avait voulu que chanter toute sa vie, pour égayer les autres et affirmer son existence à un univers trop froid, trop sombre, pour comprendre son éclat. Qui n'avait jamais demandé autre chose que de l'aimer, elle, même s'il n'avait jamais su comment.
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Re: this is your song + ariadne (terminé)
Jeu 13 Juin 2019 - 20:34
Can't breathe without you
Le temps s'était suspendu. Arrêté. À ce point qu'il m'était extrêmement difficile et pénible de respirer. Là, si proche de lui, j'aurais aimé pouvoir faire davantage que de simplement me plonger dans son regard et d'y rester prostrée.
Incapable de bouger.
Incapable de sentir mon cœur battre alors que le sang fouettait mes tempes.
Il n'y avait que l'espoir. Fin, aussi imperceptible qu'une note de musique. Aussi mince qu'une goutte d'eau filtrée.
Pourtant à une telle proximité, je pouvais mieux le voir, mieux le contempler, mieux le comprendre, mieux l'observer. Serait-ce de la prudence ? Extrême et même injustifiée ? Ou alors avait-il peur ? Comme moi, de ce qui pourrait nous arriver ? D'ailleurs, qu'est-ce qui pourrait nous arriver ? Et si rien n'arrivait ?
Ma gorge se nouait douloureusement alors que cet instant de flottement nous entourait et nous transportait. J'en oubliais le contexte du film. J'en oubliais la pièce dans laquelle nous nous trouvions. J'en oubliais que j'étais assise. Tout s'évaporait, tel un écran de fumée.
Il n'y avait plus que lui.
Il n'y avait toujours eu que lui.
La lueur satinée dans mes yeux n'était pourtant pas fausse, et peut-être même était-ce la première fois qu'Evan pouvait la voir, à ce point flagrant et sincère. Il était le seul capable de me radoucir et de me rendre meilleure. Rancunière et calculatrice lorsque je le voulais, cette fois, je m'étais révélée comme jamais auparavant. Était-ce si extraordinaire qu'il s'en méfiait à ce point ?
Une lance vint me transpercer le cœur, me faisant légèrement vaciller, mes paupières battant presque imperceptiblement. Pouvait-il autant me soupçonner de félonie ? N'avais-je donc plus sa pleine confiance ? Qu'y avait-il d'autre de brisé entre nous après toutes ces années et après tous ce qui était arrivé ?
Les deux enfants et adolescents en haut de leur sommet, à se moquer du monde, étaient à présent bien désarçonnés de se retrouver là. En bas, en proie aux événements du commun des mortels. Ils n'étaient plus intouchables et même s'ils avaient toujours leurs places sur ce nuage, dans cet univers qui n'appartenait qu'à eux, en cet instant, il n'y avait plus rien. Les entités avaient décidé de les désarmés totalement, pour que ne puisse survivre que la vérité. La nue. La vraie.
Mais est-ce que vraiment tout cela en valait il la peine ? Est-ce que c'était sincère ? Est-ce que réellement c'était une bonne idée ? Est-ce que véritablement il pouvait y avoir un espoir, un quelconque dénouement heureux ? Est-ce que cette éventualité entre nous valait vraiment le coup de tout sacrifié ? Notre stabilité actuelle (laquelle ?), notre amitié, nos récentes retrouvailles. Fallait-il vraiment jouer avec le feu ?
Il y eut pourtant se réveil, alors qu'il entrelaçait nos mains ensemble pour m'attirer non loin de lui. Sentant à présent son souffle contre moi, ses battements de cœur si puissants m'étaient presque perceptibles. À moins que ce ne soit les miens ? L'envie de m'abandonner me traversa l'esprit. De me suspendre à ses lèvres et de m'y loger à tout jamais. Sa voix, dans ce murmure, celle que je connaissais à ce point sur le bout des doigts me fit frémir.
Alors j'eus peur. Si peur.
À moi de lui montrer, de lui prouver ? Fallait-il donc que je prenne toutes les décisions pour nous ? Que je le laisse revenir à moi après des années ? Que j'aille le retrouver, car il ne le faisait pas ? Et que je fasse le premier pas dans événement mis en pause ?
Sans le soleil, j'étais plongée dans le noir total alors que j'avais à ce point besoin de sa lumière pour m'épanouir. Pour vivre.
Mais, comme des scintillements malgré l'obscurité qui m'envahissait, les papillons envolés dans mon ventre voletaient frénétiquement.
Dis-le. Ce n'était pourtant pas si difficile. Un mot après l'autre. Comme pour tout le reste. Je ne prenais pas de détour ni de gant. La peur enchaînait les mots. La gorge était nouée par l'émotion et la perspective de ce changement d'avenir que je voulais frôler du bout des doigts. Que je voulais saisir et auquel m'agripper.
- Éprise du musicien solaire, il lui permet de respirer et de continuer à avancer. Elle craint la prochaine éclipse.
Fuir. Ou faire face.
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Re: this is your song + ariadne (terminé)
Ven 28 Juin 2019 - 13:06
►
But if you send for me, you know I'll come
And if you call for me, you know I'll run
I'll run to you, I'll run to you.
Evan fuyait, passait par quatre chemins plutôt que de lui dire avec sincérité les craintes et les espoirs logés dans ses entrailles. Le sorcier voyait la déception naître dans le visage de la sorcière. Il se détestait un peu, de ne pas savoir comment lui dire. « Éprise du musicien solaire, il lui permet de respirer et de continuer à avancer. Elle craint la prochaine éclipse. » Il cherchait son regard, pourtant si près, souhaitant si chèrement y trouver un éclat familier, cet éclat qu'il savait danser dans ses propres prunelles. Étrange espoir que le pianiste tentait de taire de peine et de misère. « Tu es la seule personne au monde qui puisse me faire sentir idiot, tu le sais, ça? », dit-il avec un petit rire ironique au creux de la voix, avant de se reprendre. Aucune tentative d'évasion ne lui était possible, au risque de se perdre à jamais, de perdre le fil qui le guidait depuis toutes ces années. « Je me suis perdu en route, Ariadne ... J'ai cru - » J'ai cru te perdre. Puis je me suis perdu, mais le fil qui m'a permis de retrouver la lumière a pris une teinte inconnue lorsque j'ai enfin quitté le labyrinthe ... Thésée terrassant enfin le minotaure, deuil laissé derrière après des années de perdition dans les méandres de sa douleur cachée, le sorcier était désorienté face à tant de lumière, lui qui avait pourtant l'habitude d'en être la source. Sa seule certitude était le lien entre ses doigts, cordage aux brins entrelacés depuis des années. Ici, un nœud d'amitié, là, un accroc d'engueulade, mais le corps était devenu écarlate, entier, ne demandait qu'à se glisser sous les rayons du soleil pour faire comprendre au sorcier ... L'Écossais avait été trop perdu dans la noirceur du labyrinthe, terrassant ses monstres, lien à la main, pour en distinguer les nuances dans l'obscurité.
Le fil d'Aria(d)ne avait toujours été rouge.
Comment lui expliquer? Ariadne l'avait toujours compris sans mots. Pouvait-il se permettre cette ultime esquive, ici, alors qu'il était si près d'un but vers lequel il n'avait pas su tendre? Non. Pas avec l'éclat dans les yeux de la jeune femme, l'émotion transmise par ses mots allégoriques qui, eux aussi, répugnaient à se mouiller les premiers. Ses mots le quittèrent, sans fioritures, sans accents mélodieux dont il avait le secret, seul un trémolo d'honnêteté touchée se glissant dans sa voix rendue rauque par l'émotion. « La pensée me terrifie », avoua-t-il avec sincérité, ses prunelles vertes cherchant l'approbation, mais surtout, un éclat de compréhension dans les iris métalliques de l'Allemande. Evan glissa une main sur la taille de la sorcière, ses doigts de pianiste glissant sur la robe satinée que le contexte du film lui avait imposé. Un frisson gagna son échine - il ne l'avait jamais touchée ainsi, pas avec autant d’intentionnalité. Ses yeux ne quittaient pas les siens, guettant un signe de refus pour s'arrêter, préserver in extremis leur amitié, mais le musicien n'en trouvait pas. Aucune négation, que la même crainte émerveillée qui teintait ses propres prunelles. After all this time? D'un geste, sa main libre cueillit l'épaule de la sorcière et, électrisé, Evan posa ses lèvres contre les siennes. Étrange baiser, goût à la fois familier et si différent de ce qu'il avait connu. Trop blessé par l'expérience pour croire au destin, l'Écossais avait pourtant le sentiment d'être enfin là où il avait toujours dû être. Thésée s'éloignait définitivement du labyrinthe et, posant enfin les yeux sur le lien qui l'avait guidé, toutes ces années, ne voyait qu'une rivière de satin carmin.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Mar 2 Juil 2019 - 20:25
Never again without you
Décontenancer Evan, voilà ce que j’appréciais le plus faire dans ma vie, dans ma relation avec lui. Exercice pourtant difficile s’il en est, c’était un défi à ma taille, car aucun autre n’était à la hauteur de mon amusement. Le musicien avait toujours su réponde avec brio, être ce partenaire inégalé et jamais retrouvé ailleurs, qu’importe les expériences que j’avais pu avoir avec d’autres hommes.
Mais mes pensées ne sont-elles pas présentement trop ambiguës ?
Cachant mon trouble derrière un masque amusé et de sourire, c’était ma simple réponse en voyant l’air pantelant de mon ami. Lui faire admettre une telle situation était d’autant plus un exploit, et j’aurais pu me contenter de ça. Crier victoire, me lever et me pavaner, comme je l’avais déjà tant et si bien fait durant notre jeunesse. Ce passé si étroit entre nous, perdu mais jamais vraiment retrouvé depuis le début de l’année, depuis nos retrouvailles. Même si tout avait été pardonné, rien n’avait été oublié.
Saleté Ariadne, tu es vraiment une tronche tu sais ça ?
Aux confessions de l’écossais, je ne pouvais m’empêcher d’avoir ce regard doux et compréhensif, celui que je n’accordais quasiment qu’à lui, ou de temps à autre à mes patients.
Ne nous étions pas perdus en route ensemble ? Ne nous étions pas perdus l’un l’autre alors que le départ de Thésée dans son labyrinthe d’aventures perdait Ariane qui priait les cieux pour pouvoir retrouver cet être si cher ?
Il était toujours difficile de se rendre compte de ce que nous perdions avant que ce ne soit le cas. Lorsque nous avons tout en main, nous n’en mesurons pas forcément leurs valeurs. Avant de le voir disparaître, je savais qu’Evan était important pour moi, évidemment, il était mon seul ami, mon seul confident, le seul qui pouvait me tirer de mes livres d’études et me faire changer d’avis là où les miens étaient tranchés. Mais voilà, je ne m’attendais pas à ce qu’il soit si important. Si particulier. Si… à part. Ne m’étais-je pas targuée durant toutes ces années d’être fièrement indomptable ? N’était-ce pas là une image fardée ? Une illusion que j’essayais de maintenir depuis tout ce temps ?
Il y avait peut-être un seul individu qui fut capable de me passer la bride, tel pégase qui refuse tout cavalier sans ce harnachement doré offert par Athéna.
Dans un sens, même si nous avions eu des chemins de vie différents, moi à l’attendre, lui à essayer de revenir, n’avions-nous pas vécu des événements similaires ? Angoisses, craintes, événements feints, fuites, et j’en passe ?
Enfin, après tout ce temps, j’avais l’impression qu’Evan et moi nous nous retrouvions enfin, sur la même longueur d’onde, à nouveau accordés en un unisson parfait, sur la même vibration, tandis que nos mains étaient emmêlées dans ce fil rouge grâce auquel nous ne nous étions jamais vraiment quittés.
Sentant la perte de contrôle, extérieure à mon propre corps, je m’entendais murmurer à sa confidence.
- Moi aussi.
Oui, moi aussi j’étais terrifiée. Espoir jamais caressé, jamais envisagé, jamais osé, tout simplement parce que ça avait été inacceptable. Idiot. Impensable. Franchement, pourquoi cela devrait-il changer ? Pourtant, les forts battements de mon cœur n’étaient-ils pas en train de hurler le contraire ? Que si, voilà enfin le moment venu, qu’enfin il fallait faire face. Face à une situation qui semblait écrite noir sur blanc depuis bien trop longtemps. Encre presque effacée, les traces subsistaient encore.
Il ne tenait qu’à nous de continuer à écrire notre récit, n’est-ce pas ?
J’en frissonnais tandis que les longs doigts du pianiste vinrent longer ma hanche, sous ce touché de robe satiné. Habituée du contact physique avec lui, je le retrouvais toujours avec une certaine pudeur et une certaine appréhension. Mais aujourd’hui c’était différent. Aujourd’hui, en cet instant, il allait se passer quelque chose qui allait bouleverser définitivement nos vies. Et je n’avais aucune envie que cela ne change, aucune volonté de toute interrompre.
Pour l’une des rares fois de ma vie, il m’était difficile de garder contenance, de cacher ce qui se tramait au plus profond de mon être. Nier l’évidence n’était pas possible.
Ce fut peut-être Zeus qui vint nous foudroyer, je l’ignorais. Tout ce dont j’avais envie, c’était que cet instant ne cesse jamais. Contact au fond tant espérer mais jamais avoué, je pouvais enfin goûter cette saveur que j’avais imaginée des milliers de fois durant des années. Toucher que j’avais accordé à de nombreuses amies que j’avais poussé dans les bras du rouquin, je me rendais compte maintenant que c’était peut-être moi que je voulais pousser dans ses bras. N’ayant jamais eu le courage de le faire, je me calquais sur les autres.
Maintenant que mes lèvres étaient contre les siennes, je refusais de m’y décoller tout de suite. Posant à mon tour mes mains sur lui, l’une vint trouver refuge sur son torse. Non pas ce lien amical que j’avais maintes fois répété. Celui-ci était bien plus étroit, à proximité, mes doigts s’enfonçant même dans le costume que revêtait l’homme pour les biens faits du film dans lequel nous étions. Doigts jumeaux, ils se posèrent sur l’épaule large du musicien, non loin de ses boucles et de sa nuque. Impérieuse, territoriale, je me permettais sans gêne à prolonger cet instant qui m’appartenait depuis ce jour, dans le train, en direction de Poudlard lors de ma première année. Fondant contre lui, je savourais davantage chaque instant de ce rêve que je n’avais jamais osé espérer. Je craignais de me réveiller et que cela ne soit qu’illusion.
C’était à moi. À moi. Personne d’autre.
Pourtant vint le temps où le pragmatisme fut plus fort et plus puissant. Alors je rouvrais lentement mes paupières, révélant ce regard métallique et confus, tandis que nos lèvres se quittèrent sans pour autant vraiment se séparer. Reculer était trop difficile, impensable. Ce n’était pas moi qui fuyais les situations, c’était lui.
Néanmoins décontenancée, je plongeais mes prunelles dans ce vert printanier et si festif.
- Excuse-moi, je …
Je quoi ? Je ne voulais pas en arriver là ? Mais bon sang bien sûr que oui j’en avais envie. Alors j’y retournais. Retrouver ses lèvres savoureuses dont je ne voulais plus me passer dès à présent.
- InvitéInvité
Re: this is your song + ariadne (terminé)
Jeu 4 Juil 2019 - 12:30
►
time has brought your heart to me.
La douceur de son regard l'enveloppait, cette douceur tendre, cachée, dont ne bénéficiaient que de rares gens dans l'entourage de la capricieuse médicomage, dont les mains étaient sur lui, simultanément pour la centième et la première fois. Prise plus ferme, elle le réclamait, affirmait que le pianiste était sien - et il l'avait toujours été. « Sie auch », murmura-t-il contre ses lèvres, assoiffé goûtant à sa première goutte d'eau alors qu'il s'apprêtait à être englouti par les cruels rayons du soleil. Pris de l'envie de recommencer, il s'y abandonna à nouveau, parce qu'il s'agissait désormais d'une possibilité à renouveler, et la pensée était en soi la plus belle qui se soit logée dans son esprit de mirages et de mondes à construire. Yeux fermés, les doigts lacés, l'un derrière son cou, l'autre à sa taille, Evan découvrait cette sensation de possessivité qui l'avait toujours lié à la jeune femme, une facette nouvelle se révélant au soleil. Le musicien l'avait toujours un peu su - le tisserand à son métier ne s'était-il pas arrêté, un peu, lorsque les deux gamins s'étaient rencontrés dans le train vers Poudlard, afin de tirer un fil écarlate à ajouter à sa tapisserie? Toi aussi, avait-il dit. Elle aussi, et peut-être depuis plus longtemps - Ariadne avait toujours été moins évasive que lui, plus prompte à faire face aux situations et les foudroyer du regard pour les faire plier. Alchimie de l'eau et du métal, que la logique n'aurait jamais osé associer ... sauf ici. À regret, ses doigts quittèrent la peau de la sorcière pour cueillir ses mains, enserrées et minuscules dans les siennes, lueur émerveillée au creux du regard. « Tu as toujours su me foudroyer sur place », fit le sorcier, sourire au visage touché d'une teinte nouvelle qui ne le quitterait plus, amenant les doigts de l'Allemande à ses lèvres avec tendresse. Il y avait autre chose, cette envie réelle, impérieuse, et la conscience aigüe d'être sur un lit vaste au coeur d'une chambre clairement dédiée à l'amour charnel, dans un univers fictif où ils pourraient faire ce qu'ils souhaitaient sans que qui que ce soit l'apprenne.
Mais il y avait eu l'incendie, dont il n'avait pas encore parlé à la médicomage, parce que l'Écossais savait qu'elle trouverait le moyen de prendre une dose de culpabilité en la matière, de ne pas avoir été présente. Surtout, parce qu'elle était la seule à avoir vu son dos, avant - ne connaissait-elle pas les moindres muscles par coeur, pour les avoir dessinés des dizaines de fois? Loin derrière, celui qui avait servi de modèle anatomique - repoussant, désormais. Quelle étrange sensation, de se savoir beau (il n'avait jamais souffert de fausse modestie) et secrètement si laid à la fois. Surtout, le sorcier ne voulait pas être disséqué comme un sujet médicomagique. Il ne doutait pas de la compassion d'Ariadne, ni de sa capacité à séparer l'ami (l'amant?) du patient, mais Evan ne souhaitait pas gâcher le moment. Pas aujourd'hui, bien qu'il se souvienne de ce que sa sauveuse lui avait dit, à l'hôpital : peut-être serait-il possible d'effacer ces cicatrices qui lui déformaient le dos, noeuds de douleurs anciennes et traces physiques de la terreur pour le feu qui était désormais son épouvantard. Faisant taire ses envies, Evan jeta un regard à la pièce qui les entourait, tentant d'en imprimer les moindres détails dans sa mémoire, convaincu qu'un jour, il raconterait cette histoireà leurs enfants. C'était lui tout craché - évasif jusqu'au dernier moment mais, le moment venu, prêt à sauter à pieds joints dans n'importe quelle situation, se sachant capable de s'adapter à tout ... et quelle belle aventure ce serait, en vérité. « Allons mettre le bazar à la maison, plutôt », fit-il, le ton à la fois taquin et suggestif même s'il se promit de lui parler avant de se dévoiler entièrement.RP terminé.