Seed ━ pas si tendre enfance. En arrivant face à la grande propriété Muller, vous serez frappé par sa majestuosité, dès l'entrée les ornements des imposantes grilles en fer forgés, magiquement animés, rappellent l'importance de la famille au sein de la communauté magique. Les arbustes et les haies sont taillés et les parterres de fleurs toujours fleuris, même au plus froid de l'hiver, on ne lésine pas sur les dépenses pour impressionner, chez les Muller. Si vous entrez, l'ambiance est différente, les membres de cette famille gravitent les uns auprès des autres, ayant au final très peu d'interactions, les enfants sont éduquer par des nourrices qu'ils rendent chèvre, pour la majorité. Sélène est la petite dernière de la famille, avec son frère Hélios, les jumeaux sont arrivés à la traîne, difficile de savoir s'ils étaient désirés ou non, mais Sélène s'est toujours accrochée à son frère comme s'il était une partie d'elle-même, peut-être sa part la plus sociable ? Elle envie ses aînés, Caël et Scylla, Callie et Octave, mais aussi ses cousins, son parrain, Sasha, ils semblent tous trouver leur chemin dans cette vie, cette famille, certains s'éloignent du chemin, d'autre le respectent scrupuleusement, et Sélène, elle, cherche à suivre tout le monde. La petite fille aime l'ensemble de sa famille, même ses parents qu'elle ne voit qu'à de rares occasions; elle profite des soirées de gala pour observer sa mère se préparer longuement, revêtir de magnifiques robes cousues par les doigts les plus habiles, se parer de ses bijoux et parfois, si elle avait de la chance, elle pouvait aider sa mère pour une attache, une fermeture. Ces moments, insignifiants pour beaucoup, sont reliés à ses meilleurs souvenirs d'enfance. Une enfance stricte, enfermée dans une cage dorée, voilà comment Sélène décrirait ses premières années. La petite n'était pas malheureuse, pas heureuse non plus cela dit. La richesse n'achète pas l'amour, le sentiment de sécurité ou le réconfort, mais heureusement elle pouvait compter sur ses aîné.e.s et son jumeau pour les moments doutes ou de tristesses. C'est dans cette enfance dorée que ses premiers troubles sont apparus, elle aimait classer ses poupées, ses livres, ses jeux, dans un ordre bien précis, avec le recule, c'était sa manière à elle d'exercer un contrôle sur une vie trop bien organisée et qui lui échappait complètement, elle ne pouvait rien choisir, elle devait jouer du violon, apprendre la peinture et la bienséance, mais elle n'avait jamais rien choisi de tout ça. Sélène, enfant, elle aurait aimé danser comme une folle, hurler à s'époumoner, manger des biscuits et mettre des mies partout, elle avait l'âme sauvage, mais elle fut rapidement domptée. Tais-toi ! Deux mots qui auront fait naître ses troubles, inconsciemment et certainement que s'il le savait, peut-être qu'il s'en voudrait (un peu ?), mais Octave n'a jamais été tendre avec Sélie, la petite était installée dans le grand salon, une rangée de livres parfaitement ordonnée devant elle, la langue coincée entre les dents, elle s'applique, organise par couleur et ordre alphabétique chaque ouvrage quand son frère vient bousculer son travail en prenant l'ouvrage central, celui qui permettait de tenir l'équilibre. Bien entendu, la crise qui s'ensuivit valut à Sélène l'étiquette d'enfant capricieuse, de drama queen, mais en réalité, Octave venait de bousiller bien plus qu'une rangée de livres, il venait de déclencher la première crise de mal-être de sa petite sœur.

Bud ━ l'adolescence, la découverte de soi Être la dernière de la famille signifie forcément être repérée comme la sœur de, ce n'est pas simple d'avoir sa propre identité dans ce monde et c'est pour cela que lors de ses années à Poudlard, on ne peut pas dire qu'elle se soit épanouie. Toujours sous la coupe de ses ainés, de ses parents, il n'y a que son jumeau qui semble la comprendre et savoir apaiser ses angoisses. Il lui faut un exutoire, un moyen de contrôler sa vie ou tout du moins, d'avoir l'impression de la contrôler; c'est durant cette période qu'elle se découvre une passion pour le sport, les acrobaties en particulier. Sélène s'impose un régime drastique, elle ne déroge jamais a aucune règle, s'entraine tous les jours pour devenir meilleurs. Son obsession du contrôle ne la rend pas populaire, mais elle s'impose comme leader, les autres appréciant de pouvoir se reposer sur son organisation sans faille. Son corps change, de petite blonde potelée, elle devient une brune svelte et élancée, les regards commencent a se tourner sur son passage, mais elle n'y prête aucune forme d'attention. Les garçons sont une distraction qu'elle ne peut s'offrir, ils aiment mettre le bazar dans une vie qui a besoin d'ordre et si elle a déjà eu un petit ami, ou un cavalier lors d'un bal, jamais personne n'a réussi a lui faire tourner la tête. Le contrôle est bien trop important.

Flowering ━ l'acceptation, l'accomplissement. Ils ont osé. Alors qu'elle ne s'y attendait pas le moins du monde, ses parents l'ont vendue comme une simple jument. C'est l'impression qu'elle eut lorsqu'ils lui ont annoncé lors d'un cocktail qu'ils avaient "trouvé le garçon parfait pour elle". Elle n'a pas compris directement, c'est une réalité qui échappait totalement à son esprit et pourtant, elle venait d'être fiancée contre son avis à Victor De Launay. Certes, elle connaît le sorcier depuis un bout de temps et leurs rapports ont toujours été amicaux, mais de là à se voir mariée avec lui ? Fonder une famille avec lui ? Non. C'était impensable. Très bien. Elle ne reconnut pas sa propre voix, ni même ce sourire qui vint se poser au coin de ses lèvres, elle acceptait la sentence sans même tenter de braver la tempête, car elle le savait au plus profond d'elle : elle ne gagnerait pas cette bataille. Elle n'a pas la bravoure de Sasha ou le courage de Caël, elle n'est pas aussi intelligente que Callie ou discrète qu'Octave, non, elle n'a rien de tout ça, son talent consiste à obéir et à organiser. Quelle joie.

Le temps fait son affaire, elle se fait progressivement à l'idée d'épouser un homme qu'elle n'a pas choisi, après tout sa mère et ses tantes l'ont fait et elles ne sont pas malheureuses, d'apparence en tout cas. Victor reste fidèle à lui-même, un gentil garçon, doux et un peu rêveur, a des miles de sa famille. C'est peut-être pour ça qu'elle s'y attache peu à peu, que cela rend l'idée de moins en moins absurde ou difficile. Sélène aime bien le jeune héritier, elle l'estime et le considère comme son ami, complice de fortune dans une entreprise où ni lui ni elle n'avait d'importance ; un jour, pourtant, il l'a déçue, il est parti et n'est jamais revenu. Il devait s'absenter un peu, une histoire de funérailles, et il a rompu leurs fiançailles. L'outrage était inconsidéré, comment est-ce qu'un petit Français osait seulement renoncer à la fortune et la reconnaissance qu'une famille comme les Muller offrait ? C'est une chose que les parents ne comprenaient pas. Sélène comprenait, elle osait imaginer comprendre en tout cas, une jeune femme plus belle, plus intelligente, plus intéressante, moins névrosée, une histoire d'amour naissante ou du moins c'est ce qu'elle comprenait des lettres qu'il lui envoyait.

Sélie s'est renfermé sur elle-même, un peu plus encore. Elle s'est mise à développer encore plus de troubles, et ses crises de nerfs n'éclataient plus que dans l'intimité de son studio, mais bien partout et à n'importe quel moment. Pleurs, cris, colère, tristesse profonde, joie et rires, elle passait par tous les stades et si elle n'était pas si fermée, si persuadée que les problèmes se règlent seul, elle pourrait apprécié un peu d'aide, mais pour ça il faut être prête, et ce n'est pas encore le cas de la demoiselle.

Depuis cet épisode malheureux, douloureux, elle s'entraîne deux fois plus, s'impose une discipline quasi-militaire et ne s'autorise que peu de répit. Les seuls moments où règne le chaos, c'est quand elle s'occupe de ses neveux et nièces, les enfants sont une bouffée d'oxygène pour celle qui n'a pas eu d'enfance, elle joue avec eux, les gâtes probablement un peu trop et les laisse lui marcher sur la tête avec beaucoup de plaisir, voir Sélène avec les enfants, c'est voir la petite fille heureuse qu'elle aurait pu être et qui demeure encore aujourd'hui prisonnière de son esprit torturé.