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homesick (evalice xiv)
Sam 18 Sep 2021 - 13:22
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(homesick) Était-ce possible, de connaître les lignes d’un corps par cœur? En deviner tout à fait les courbes et la texture, l’endroit où une éraflure de jeunesse venait faire mentir le satin d’un épiderme intouché par ailleurs, les défauts quasi-imperceptibles qui n’en étaient pas, révélés à force de toucher et de caresses, la chair qui se faisait plus dense par endroits, qui invitait à être empoignée à pleines mains. Impossible, peut-être, de cartographier tout l’être de la saurienne, mais il était convaincu de n’avoir jamais vu cette vertèbre avant. Elle se manifestait, sournoise, dans les moments les plus incongrus. Lorsque Alice se penchait sur un papier, installée à la table du salon qu’ils partageaient désormais.
L’invitation avait été naturelle, mais dénaturée par le contexte. Evan l’avait imaginée, s’était déjà vu dissimuler la clef supplémentaire, convenant qu’il s’agissait d’un accessoire un peu idiot, le mécanisme de verrou étant suppléé par des enchantements, mais à un ex-disciple de Thespis, il fallait un outillage digne de soutenir la performance théâtrale. Fantasmée, donc, la demande – la clef déposée avec une fausse nonchalance dans la tasse qu’Alice utilisait généralement pour le café du matin. Placer une main sur le cœur, l’air étonné rapidement remplacé par un sourire confiant et chaleureux. Plaider qu’il s’agissait d’une décision purement rationnelle, puisque l’amphisbène avait souvent à faire à Londres, et que de toute manière, ici, ils ne risqueraient pas d’être surpris par un Jake goguenard, lorsque Aedan aurait quitté leur colocation pour filer son doux bonheur en compagnie de sa piquante médicomage. Admettre du même souffle qu’il aimait l’avoir avec lui, ici.
Il y avait eu le Styx, depuis, la découverte des occupations nocturnes de sa fiancée. Le décès de Pearl Hangbé, surtout, la perte de repères si évidente à lire dans les prunelles d’ordinaire si prestes de la vipérine demoiselle. Tout s’était enchaîné, trop rapidement pour que les crimes perçus reçoivent les reproches qu’Evan avait ressenti le besoin de formuler. Encore, la traîtrise, que le crotale ne percevait visiblement pas comme un accroc – car passé l’émotion du moment, l’auror était convaincu qu’Alice n’avait pas tout à fait intentionnellement caché ses vices, n’y voyant pour sa part que des occupations ordinaires et ne méritant pas la mention que le Calédonien aurait pour sa part requis. Serait-ce l’avenir de leur relation, alors? Un fiancé soupçonneux non pas de l’honnêteté de l’Américaine, mais d’un système de valeurs opposé? Mais Pearl Hangbé reposait en terre, et il avait tout gardé pour lui, enfermant dans le coffre de son large poitrail les reproches, soupçons et questions qu’il aurait souhaité formuler pour comprendre – et restreindre. Le musicien s’était contenté d’ouvrir les bras, d’envelopper Alice autant qu’elle le souhaiterait, de créer autour d’elle un cocon charnel qui ne s’embarrassait pas de mots. Trop hébétée pour les formuler, la nymphe s’y était réfugiée sans grande résistance. Un mois, qu’ils vivaient ainsi, enlisés dans le creux des mains de l’autre, cherchant une connexion que les mots ne savaient pas former. Les corps, eux, avaient toujours su s’accorder là où les âmes n’étaient pas disposées, ou prêtes à le faire. En attendant qu’ils se retrouvent, ils se rejoindraient sous le toucher tantôt doux, souvent possessif, parfois mû par l’énergie désespérée de ceux qui se savaient perdus mais n’osaient pas encore le formuler.
Le Calédonien avait embrassé chaque once disponible de sa peau, effleuré chaque surface offerte, dévoré la jeune femme avec patience, l’enroulant dans des étreintes protectrices. Vouloir la soigner, sans conceptualiser comment – parce qu’il connaissait le poids de perdre sa mère, et partageait celui du secret d’Alice, qui avait dû faire le choix déchirant entre son cœur et ses poumons. Ouverte, la cage thoracique rompue et rougie de souffrance, il avait voulu en baiser chaque os brisé, avait accepté de repousser les reproches, d’oublier les remontrances et le choc que lui avait provoqué la vision d’Alice en sirène dans les bras de client.es au toucher trop familier. Battre en retraite le temps qu’il faudrait, mais certainement profiter de leur cohabitation pour surveiller. Hélas, ils n’étaient pas toujours ensemble, les occupations professionnelles sonnant le glas d’un plan qui s’était ressenti plutôt que réfléchi, les buts tenant non pas du stratège mais du besoin de connexion de l’Écossais. Il la voulait avec lui, Alice, sans savoir s’il pourrait un jour véritablement lui faire confiance. Était-ce ce que l’on devait accepter, le myocarde battant au rythme d’une féline tout aussi crotale que cœur de lion? Evan avait une faculté toute spéciale pour le déni, lorsqu’il s’agissait de ses propres problèmes et défis – mais la voilà qui le narguait à nouveau.
Était-ce la C3 ou la C4? Il croyait revoir les croquis anatomiques d’Aedan et de Darius, mais n’aurait su le dire – c’était une vertèbre, ça, au moins, l’auror le savait – et elle n’avait rien à faire là, à se profiler sous la peau fine d’une Alice penchée sur sa tasse fumante de café. Tellement quelconque, c’était stupide, même, de s’y attarder – mais la trace était là : amaigrie, fatiguée, avec dans les yeux une lueur hagarde qui se transformait en passion énergique lorsque leurs corps s’élançaient l’un contre l’autre, comme si son fiancé pouvait lui servir d’ancre dans la tempête. Il s’était dit qu’il exagérait, qu’il n’avait jamais tout à fait eu l’œil pour ces choses, de toute manière – quelques kilos en plus ou en moins, la belle affaire, il n’y avait que bien peu d’impact sur les surfaces à toucher. Et tant mieux, s’il y en avait davantage à aimer, disait-il jadis à sa ballerine d’épouse qui avait développé des troubles alimentaires, comme tant de danseuses.
La C4. Ce devait être la C4, qui semblait vouloir percer la peau de l’amphisbène, narguer son fiancé en crevant la confortable certitude de son déni. Comment en vouloir à une innocente vertèbre? Et pourtant. Elle lui rappelait que malgré tout ce qu’il se disait, qu’il faudrait du temps à Alice, qu’il était normal et compréhensible de se lancer dans l’autodestruction … qu’un cœur ne peut s’empêcher de se serrer en constatant les dégâts. Il ferait usage du prétexte de Garrett Malkov en guise d’introduction, mais lui, saurait – qu’à la genèse de ce qu’il s’apprêtait enfin à ouvrir entre eux, il n’y avait qu’un os fragile et nécessaire, qui avait osé lui rappeler qu’Alice dépérissait sous ses yeux, et contre ses soins.
« Lass », souffla-t-il, avant de déposer un baiser doux sur la tempe d’Alice, se posant sur une chaise près d’elle, mais à distance suffisante pour l’observer correctement. « I saw Garrett, yesterday. » Depuis la rotation que l’auror avait faite l’été precedent, il connaissait quelques chasseurs de lycans – en respectait certains plus que d’autres, n’en déplaise à @Asher Moore. « He told me you’d been put on the bench for future full moons, because of recklessness. » Le Calédonien laissa planer un silence léger, incertain de la marche à suivre – lui demander si elle avait eu l’intention de lui en parler? Comment elle se sentait? Si elle aurait envie de se mettre en danger encore longtemps? Face à la myriade de possibilités, entre les reproches, les soupçons et une franche inquiétude, Evan ne savait pas tout à fait sur quel pied danser, alors il choisit de tout laisser aller. « I’m worried about you, lass. I … know what grief does. I’m not blaming you. But … we can’t go on like this. Pretending everything will be okay, as long as we can kiss each other goodnight. You’re not fine. I’m not, either. We’re not okay. » Partager le blâme fictif, pour qu'elle ne se sente pas acculée dans un coin par son fiancé aux allures de caractériel chevalier servant.
- trad:
[color=#ff3300]« Lass »#ff3300]« J'ai vu Garrett, hier. Il m'a dit que tu as été privée de pleines lunes pour imprudence. »
« Je suis inquiet pour toi, lass. Je ... sais ce que le deuil fait. Je ne te blâme pas. Mais ... on ne peut pas continuer comme ça. À faire semblant que tout ira bien, tant et aussi longtemps qu'on peut s'embrasser le soir. Tu n'es pas intacte. Je ne le suis pas, non plus. Nous ... ne sommes pas intacts. »
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Re: homesick (evalice xiv)
Sam 2 Oct 2021 - 15:30
Homesick
Evan Wakefield
That's why we're insane. We take mud to escape. 'Cause life's hard to take. (Loïc Nottet)
Un mois. Un peu plus d’une révolution lunaire qu’Elle n’était plus là. Que sa fille la cherchait, partout, ne la trouvait nul part. Elle avait fouillé pourtant, dans les couloirs de leur pied à terre londonien, dans le creux du cou de son père où elle avait guetté un reliquat de son parfum en vain. Dans le miroir, aussi, mais Alice ne trouvait plus sa mère dans ses traits fins que le chagrin dévastait et affamait, draguant les eaux troubles et vives de son regard pour les réduire à un marais de boue meuble et sale.
L’invitation avait été naturelle, la réponse tout aussi spontanée, bien que les circonstances aient teintés celles-ci d’ombres discrètes, mais présentes. Si elle n’avait pas été si déconnectée du monde extérieur, surement se serait elle rendue compte du soulagement manifeste de ses frères, de son père quand elle leur avait annoncé qu’elle partait vivre auprès de son fiancé, au moins pour un certain temps. Ils ne s’étaient pas donnés de date butoir, elle n’avait pas vraiment cherché à savoir si Evan s’attendait à ce qu’elle retourne dans ses pénates écossais quand sonnerait l’heure de la rentrée scolaire, s’en fichait un peu. Son esprit s’était recroquevillé au fond de son cerveau reptilien, abandonnant les nuances et la subtilité pour des réflexes de survie binaire. Le jour, elle travaillait. Beaucoup, sans relâche, parlait peu, le nez dans la paperasse qui s’était amoncelée sur son bureau et celui de Garret ces dernières semaines, trop occupée par ses examens universitaires pour s’y atteler. Sans un mot, elle avait regroupé les piles autour d’elle comme autant de murs de protection contre le monde extérieur, et elle s’était enfoncée dans ses tâches laborieuses. Le reste de la brigade l’avait laissé tranquille, manifestant leur sympathie par quelques actes de bonté gratuite et une attention redoublée pour leur petite cadette endeuillée. Asher avait bien essayé de la faire parler, un peu, sortir, aussi, mais elle l’avait repoussé sans méchanceté, avec un sourire vaguement désolé et un regard absent. Il n’y avait bien que les mots froids et les chiffres cliniques pour la consoler, les drames des autres, les blessures, les morsures, les hurlements sur papier qui occultaient la peau froide de la gorge de sa mère alors qu’elle s’était jeté à ses flancs une dernière fois. Elle arrivait tôt, rentrait tard, souvent poussée vers la sortie par le grognement autoritaire de Garret et sa main trop chaude sur sa nuque. Quand elle passait le pas de la porte de l’ancienne garçonnière, Evan était le plus souvent déjà là, chassant le vide, emplissant son environnement, saturant ses sens pour qu’elle n’ait plus une seconde à elle pour penser à autre chose que lui. Quand il n’était pas là, et c’était arrivé une, deux fois, elle s’était enfermée dans la salle de bain, avait fait coulé l’eau brûlante dans la baignoire pour s’y plonger toute entière, niant les alertes épidermiques et la morsure du liquide bouillonnant. Elle aurait voulu cuire entièrement, que sa peau se décolle de la chair à l’étouffée. Devenir autre chose, ne plus avoir mal, fermer les yeux et passer à autre chose. Et puis l’eau finissait par tiédir, et elle était toujours là, alors que sa mère était toujours morte. Alors elle s’extirpait du linceul liquide, du sarcophage d’émail, effaçait la buée sur le miroir et la cherchait encore dans le reflet, guettant le pli volontaire de son front, un rictus moqueur qui chasserait la culpabilité ou la bête qui sommeillait dans son ventre. Mais elle ne voyait rien d’autre que son reflet, et inlassablement il la décevait de n’être qu’elle-même, Alice Hangbé. Sorcière, fiancée, orpheline.
- Hmm ?
Elle n’avait pas levé les yeux des lettres d’un paragraphe qu’elle lisait pour la troisième fois sans que le sens ne s’imprime dans son esprit, les doigts enroulés autour de l’imposant mug de café chaud aux arômes puissants dans lequel elle n’avait pas encore daigné tremper les lèvres, bien que le ténébreux liquide soit l’une des seules choses qu’elle puisse ingérer sans avoir envie immédiatement de le rendre . Elle s’était encore une fois perdue dans ses pensées, et dut même se faire violence pour accrocher la voix douce et mélodieuse du géant qui s’asseyait non loin d’elle.
- Yeah … He said recklessness, I would rather say that I did what has to be done, and I was the only one in the right place to stop the threat.
Elle n’avait pas été imprudente, elle n’en avait pas eu l’impression, et pourtant elle avait vu l’air horrifié d’Asher une demi seconde avant qu’elle ne disparaisse dans un tourbillon de plumes et de poils canins, les mâchoires enclenchées d’Ivan quand elle n’était réapparue qu’une bonne minute plus tard entre les pattes de l’animal inconscient, minuscule oiseau fragile, mais presque intact, miraculeusement. Garret n’avait rien dit avant la fin de la mission. L’avait suspendu immédiatement après, entre quatre yeux, dans son bureau, la condamnant à gratter plus de papiers, interdisant à qui que ce soit de lui proposer la moindre sortie sportive, le moindre entrainement au corps à corps. Alice leva les yeux vers son fiancé, d’abord sans le voir. Ça lui arrivait, souvent, la vue était trouble avant que ses yeux ne s’ajustent à la luminosité de la réalité, loin de ses soleils noirs intérieurs. Battements de cils, plissement de nez, alors que les mots d’Evan infusaient lentement, sans qu’elle n’en saisisse vraiment le sens.
- … You don’t have too worry, I’m just exhausted, with the exams, the squad and, well you know . I guess it’ll get better when we’ll find a couple days off.
Elle lui offrit un sourire de ses lèvres closes, qui ne remontait pas tout à fait de ses yeux constamment brillants, alors qu’elle prenait, enfin, une gorgée de café, et une nouvelle inspiration alors qu’elle tendait la main pour toucher le genou du sorcier. Elle n'avait aucune envie qu'Evan la regarde avec cette pitié qui lui donnait envie d'arracher leurs yeux à ceux qui lui présentaient des condoléances plates et de circonstances. Elle n'allait pas bien, ne lui ferait pas l'affront de prétendre le contraire, mais elle n'avait pas vraiment envie d'être regardée comme une petite chose fragile et sans défense.
- Unless you want to talk about more … specific issues. Are you afraid I won’t honor my duty ? I know we are a little behind schedule, but nothing irreversible…
Made by Neon Demon
- traduction:
"Il a dit imprudente, je dirais que j'ai fait que ce qui devait être fait, et j'étais la seule au bon endroit pour stopper la menace."
" Tu n'as pas à t'inquiéter, je suis juste épuisée, avec les examens, la brigade et, et bien, tu sais. Je suppose que ça ira mieux avec quelques jours de repos"
"... A moins que tu veuilles parler de sujets plus précis. As tu peur que je n'honore pas mes engagements. Je sais que nous sommes un peu en retard, mais rien d'irréversible ...
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Re: homesick (evalice xiv)
Dim 17 Oct 2021 - 20:57
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
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still, nothing means nothing without you.
(homesick) Le deuil. Accidentel, imprévisible, et aux visages aussi changeants que les humeurs habitant l’endeuillée. Le Calédonien le savait – chez les Wakefield, la perte de la mère avait été une tragédie interprétée en trois temps par les hommes laissés derrière par Liese. Le patriarche s’était emmuré dans une férocité politique comme on l’avait encore rarement vu chez lui, la peine transformée en colère calme et conquérante. L’aîné s’était enfermé dans sa glaciale tour de solitude, celle qu’il habiterait des décennies durant, le cœur protégé de toute attaque extérieure par les prunelles plus polaires encore que celles du père. Le cadet, lui, s’était déchaîné – la vie elle-même en guise de proie, intensité consommée de membres endoloris à la fin des pratiques de quidditch, multipliant les cours séchés et même quelques occasions de vandalisme qu’on avait aisément mis sur le dos d’un tempérament trop volontaire et oppositionnel.
La souffrance, le deuil – ses multiples visages. Ses réactions qui prenaient de nombreux corps, aussi – il ne savait jamais exactement à quelle Alice il ferait face, le soir venu. La nymphe pleine d’appétit, l’intensité brûlant au fond de ses prunelles aigue-marine menaçant de lui incendier l’âme au passage, pourvu que ça chauffe. La fiancée qui ne voulait que quémander quelques parcelles de chaleur, les doigts accrochés à ses épaules et la tête nichée dans les creux de ses vêtements, le souffle se régularisant uniquement lorsqu’il lui massait doucement les cheveux. La femme indépendante qui, parfois, redressait la tête et faisait mine de lui reprocher de la regarder comme si elle s’apprêtait à éclater – et le Calédonien niait, bien sûr, mais ses entrailles se tordaient d’inquiétude, parce qu’il savait, ce que ça faisait, de perdre sa mère. Sauf ce que ça faisait, de se blâmer pour son décès. De savoir d’avance, et d’être incapable de lutter. En cela, peut-être aurait-elle trouvé une meilleure oreille en la personne de Nathaniel – mais qui voyait en l’austère et sérieux juge un interlocuteur naturel pour épancher ses souvenirs les plus secrets et douloureux?
« Yeah … He said recklessness, I would rather say that I did what has to be done, and I was the only one in the right place to stop the threat. » Alice la rationnelle, Alice la pragmatique, Alice la distante, donc. Evan ne releva pas le commentaire – argumenter sur le sujet de son retrait n’était pas le véritable sujet, tout juste une porte d’entrée qu’il se ferait un plaisir de revisiter avec elle si la jeune femme en ressentait éventuellement le besoin, mettre les mots sur ce qui avait relevé de l’imprudence et de la bravoure. Malgré tous leurs défauts, les traqueurs de loups-garous étaient des professionnels, et si Garret Malkov avait choisi de la retirer de l’action agressive des pleines lunes, le Calédonien avait entièrement confiance en son jugement. Evan se contenta de se poser près d’elle, car malgré toute sa prosodie maîtrisée, elle avait généralement envie de contacts, son amphisbène. Même avec ce regard absent qui lui pinçait le cœur, et la mine fatiguée – et toujours, cette vertèbre qui se glissa sous ses doigts alors qu’il posait la main sur sa nuque, doucement. « … You don’t have too worry, I’m just exhausted, with the exams, the squad and, well you know . I guess it’ll get better when we’ll find a couple days off. » Son sourire semblait filé d’argent, celui dont on tisse les linceuls lors de funérailles princières. Scintillant, pour servir de trompe-l’œil à qui ne savait pas chercher les vrais maux, mais Evan le voyait. Malgré la dissonance, malgré le Styx, malgré la distance, il l’avait dans les os, la Hangbé. Sous la peau. Et pourtant, ce sourire avait quelque chose d’agaçant. Parce qu’il l’avait sous la peau, la Hangbé. Elle avait un talent tout spécial pour se glisser sous ses défenses et choquer son perpétuel amusement en guise de bouclier face au monde. Alice refusait l’indifférence par sa seule présence, peu importe les habits que celle-ci prenait. Au carnaval qui ornait la psyché de son fiancé, elle imposait d’en être la reine, le cœur. Ce serait avec elle, ou pas du tout, et elle n’avait pas même réellement besoin de poser les mots dessus – ça se sentait, comme la vertèbre sous ses doigts. Sous la peau.
Lentement, il se contenta de faire non de la tête. Encore, elle tentait de contourner le problème. « Unless you want to talk about more … specific issues. Are you afraid I won’t honor my duty ? I know we are a little behind schedule, but nothing irreversible… » Lourdement, il expira. Avec un grain d’impatience, peut-être, mais de désarroi, surtout. Lui qui avait eu à faire face au deuil, il n’avait aucune expérience pour accompagner quelqu’un d’autre en la matière. Alors il se permit tout le contraire de l’affectueuse déférence dont il avait enveloppé la vipère depuis un mois. « Bloody hell woman, blast the marriage. It’s a parade and all good and fine, but I don’t care about it! » et le ton avait monté, légèrement. Sans aggression, mais avec une intensité perceptible, celle de se savoir démuni face à la profondeur de la peine d’Alice. « It’ll be a parade and we both know it. If it was just me we’d elope and get it over with. I don’t care about the others, the lists and all that. I want you. I want you, and you won’t talk to me. I tell you we can’t go on like this, and you think about the wedding. Blast the bloody wedding! », répéta-t-il, convaincu. « I can’t do anything about your … » et les mots lui manquèrent. Sa perte? Quel euphémisme. Sa mère? C’était trop peu. « what you’re going through. I’m trying to be supportive, Alice, I really am. But you’re not there. You’re not there, and I miss you. You’re not there, and I’m worried every time I know you’ve been to that place. » Cet endroit sordide où il l’avait trouvée. Merlin I hate that place.
- trad:
« Bordel de merde, on s'en fout du mariage. C'est une parade et c'est très bien, mais je m'en balance! » e
« Ce sera une parade, et on le sait tous deux. Si ça ne dépendait que de moi, on s'enfuirait à deux pour se marier. Je m'en moque, des autres, des listes et tout le bataclan. Je te veux, toi. Je te veux, toi, et tu ne me parles pas. Je te dis qu'on ne peut pas continuer comme ça, et tu parles du mariage. On s'en fout du putain de mariage! »
« Je ne peux rien faire à propos de ... ce que tu traverses. J'essaie de t'appuyer, Alice, j'essaie vraiment. Mais tu n'es pas là. Tu n'es pas là, et tu me manques. Tu n'es pas là, et je m'inquiète chaque fois que tu visites cet endroit. »
Merlin, je hais cet endroit.
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Mer 20 Oct 2021 - 17:18
Homesick
Evan Wakefield
That's why we're insane. We take mud to escape. 'Cause life's hard to take. (Loïc Nottet)
- Please don’t yell at me.
Elle avait retiré sa main du genou du sorcier, pour envelopper le mug de café, presque entièrement. Le geste n’avait pas été spécialement vif, ni piqué, mais trop rapide pour être parfaitement innocent. Plus encore qu’auparavant, l’écorchée pesait ses mots, comme autant de petits fardeaux qu’elle se refusait à transmettre à qui que ce soit, pénitence volontaire et largement auto infligée, et pourtant. Son langage corporel, en images et fragments épidermiques, valaient mille mots. Sa voix, dont elle faisait jouer les octaves dans la séduction et la persuasion, d’ordinaire, s’était enrouée de rester silencieuse, une partie du jour, presque toute la nuit.
Elle n’avait pas envie qu’il lui crie dessus, aucune résilience face à ce haussement de ton. Pourtant, des éclats, il y en avait déjà eu entre eux, plus d’une fois, et elle n’avait jamais eu peur de confronter les décibels, de donner de la voix dans le meilleur comme le pire. Elle n’avait pas envie car il était encore tôt, dans la matinée, et qu’elle avait trop dormi, cette nuit, la faute à cette décoction un peu trop puissante conseillée (imposée) par sa grand-mère, potionniste chamane qui s’était bien gardée de la prévenir qu’elle serait visitée par des rêves inconfortables toute la nuit, jouant avec ses nerfs sans que jamais Elle ne se montre. Elle commençait tout juste à détacher un à un les doigts raides d’Hypnos et Oneiros qui lui labouraient l’estomac, et voilà qu’Evan décidait qu’il s’agissait du meilleur moment pour avoir une conversation. Cette conversation. Merveilleux, vraiment.
Elle n’avait pas envie qu’il lui crie dessus, parce qu’elle luttait, déjà, trop, avec les hurlements dans sa tête, dans ses rêves, sa propre voix, ses propre sanglots, ceux des pleureuses de l’enterrement à qui elle avait eu envie d’arracher les cordes vocales. Alors elle préférait louvoyer. Tant pis pour la fierté, tant pis pour l’air crâne qu’elle affichait d’ordinaire pour assumer ses positions, fautives ou non. Tondue, la crinière, et sous la pelade, la peau encore trop fine et les nouvelles écailles, si molles, inutiles.
- I think about the wedding because that’s all it has been about for months, for everyone around us. Sorry if I’m not smart enough this time to catch all the undertones … And I feel like I talk to you, if not, I’m sorry about that. I do my very best, and I’m sorry if, again, this is not enough…
Déjà, elle avait l’impression d’être à court de mots, l’esprit vide de cette défiance infusée par la liberté de ton maternelle. Son modèle n’était plus là, et c’était comme si un bout de son âme était parti avec elle, arraché par le poison (et sa propre incompétence). Si cela ne tenait qu’à elle, la conversation s’arrêterait là. Elle l’aurait congédié d’un mouvement de main, et Evan se serait évaporé dans un silence assourdissant, parfait, et elle serait restée là, enfoncée entre les coussins moelleux du canapé, à écluser son café pour ne pas se laisser tenter par d’autres liqueurs traitresses. Mais le Calédonien n’était pas de ceux que l’on envoyait au diable Vauvert sans prendre le risque qu’il nous y traine avec lui, et l’on ne ressort d’un tel périple que couvert de suie et de chaux, mais rarement plus avancer. Avancer, toujours, aller de l’avant, à la force de la rage, du poignet, de l’inconscience, poursuivre sur cette ligne de crête toujours plus fine, dans l’espoir qu’elle en finisse un jour. Alice se sentait dahut du corps et du cœur : privée d’un de ses membres, elle ne pouvait faire demi tour, ni virer de bord, sans risquer de perdre cet équilibre précaire dont elle n’osait prédire si elle le conserverait encore longtemps.
- What are you worrying about ? Come on, tell me, no shenanigan, no BS, speak your minds.
Elle tira un peu sur la commissure de sa paupière, chassant au passage un peu d’eau ensommeillée pour plonger à nouveau son regard dans celui du sorcier. Lui parler, très bien, mais qu’il montre donc l’exemple. Lui non plus n’avait pas été un modèle de communication ces derniers temps. Etait-ce pour le mieux, avait-il bien fait ? Probablement, à coup sûr, même, elle ne le lui avait pas demandé, se plongeant avec ce qui ressemblait presque à de l’abrutissement dans leurs étreintes, les collisions charnelles qui court circuitaient le cerveau, qui mettait la conscience en veille au rythme des assauts partagés, qui encourageaient la venue du sommeil à grand taquet d’endorphines. Il s’était montré complaisant avec elle, à n’en pas douter une seule seconde. Elle aurait pu en convenir sans difficulté, si il lui avait demandé, mais ce n’était pas l’effort qu’il attendait, son Oiseau Rare, cortiqué Philomèle. A la place, il voulait qu’elle parle, soit. Mais elle allait avoir besoin d’élan, la mécanique diurne était cassée, pour la promise duveteuse que la nuit appelait tant est plus…
Made by Neon Demon
- traduction:
"S'il te plait ne me crie pas dessus."
"Je pense au mariage parce que c'est tout ce dont il s'agit en ce moment, autour de nous. Désolée si je ne suis pas assez maline cette fois ci pour comprendre tous les sous entendus. Et j'ai l'impression de te parler, si ce n'est pas le cas, j'en suis navrée. Je fais de mon mieux et, à nouveau, je suis désolée si ce n'est pas Assez..."
"Qu'est ce qui t'inquiète ? Allez, pas de manigances, pas de bobards, donne le fond de ta pensée".
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Dim 24 Oct 2021 - 14:31
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(homesick) Vivement, l’intensité du Calédonien s’était embrasée – sa crainte face à Alice faisant feu de tout bois, et quel charnier à partir duquel faire jaillir la première étincelle. Le sentiment de traîtrise ressenti en juillet, largement calmé par les discussions avec une certaine germanophone aux palabres lourdes face à sa fiancée mais à la justesse indéniable. Son exclamation tonna, dénuée d’agression, mais il fallait céder au coffre du géant ce qui lui appartenait : sa voix de stentor avait de quoi impressionner même les pires hooligans des iles britanniques, lorsqu’il y mettait du sien. « Please don’t yell at me. » C’était la demande, mais surtout la main retirée – la duelliste et lui se touchaient toujours un peu, l’intensité du geste variant selon la situation. Une cheville entrée en contact d’une jambe avec nonchalance, une main posée sans arrière-pensée sur un genou, tout était prétexte à ce que les épidermes se lient. « I’m sorry », souffla Evan, adressant un regard coupable à la sorcière, se taisant à son tour dans l’espoir que quelque chose vienne – qu’elle se redresse, choisisse de l’envoyer bouler comme elle le faisait si souvent lorsque ses propres besoins entraient en conflit avec ceux de son fiancé aussi têtu qu’un troupeau de mules. Le prendre à part, avec sa voix sifflante de crotale qui lui disait d’aller se faire voir de façon toujours plus imagée, le culot en guise d’accroche et la suffisance comme tremplin.
How the mighty have fallen.
La vipérine américaine se justifiait, expliquait, avec une voix désincarnée qu’il reconnaissait désormais trop bien. Sorry, et les excuses qui s’additionnaient, I’m sorry about that et encore une fois, se justifier, accepter tous les reproches comme une masochiste en quête de sens, qui ne demandait rien de mieux que d’attraper les mots du Calédonien pour mieux se lacérer l’échine avec. I do my very best, and I’m sorry … Les prunelles céruléennes de l’auror s’écarquillèrent, désarçonné par sa fiancée. Devait-il seulement être surpris, de la voir ainsi? Ne se montrait-elle pas fragile et minuscule depuis la soirée fatidique? Oui, face à sa douceur, face à l’affection et à la tendresse dont il s’évertuait de l’entourer, la protéger le plus possible, se faire immense pour cacher la laideur du monde, derrière – mais l’avait-il déjà vue courber ainsi la tête face à l’affrontement? Jamais.
Creuse, une version chimérique et étrange d’Alice – son Alice, qu’il ne reconnaissait pas. Les pardons de l’Américaine étaient aussi rares que la miséricorde dans les prunelles d’un bourreau, plus encore lorsqu’on écartait ceux que la sirène présentait avec son air mutin rempli d’une telle autosatisfaction que rien ne bernait leur destinataire. Une guerrière ceinte de la cuirasse fine de ses écailles, son amphisbène, capable de faire passer la plus cruelle des attaques pour un compliment d’intérêt accordé à sa proie. Un baiser, un seul, déposé doucement sur des lèvres à empoisonner, mais jamais ce genre de pardon demandé comme une pensée seconde, celle à laquelle on n’accordait aucune attention, un automatisme. Rien n’allait de soi, ici, et il aurait voulu la secouer et la chérir à la fois, l’envelopper de ses bras et l’agiter comme on réveillerait quelqu’un d’un cauchemar. Profondément démuni là où le Calédonien était un être d’action, il se contenta de joindre les doigts contre sa bouche en un signe de prière qui ne s’adressait à personne, personne d’autre que ses démons personnels et moqueurs. Ceux-là même qui le punissaient de son arrogance, de croire que lorsqu’on connait l’expérience de deuils aussi lancinants que les siens, on peut transposer l’expérience –
mais la douleur ne se soustrait pas, pauvre fou.
vois comme elle peut se multiplier.
« What are you worrying about ? Come on, tell me, no shenanigan, no BS, speak your mind. » Devant l’air fatigué de l’amphisbène, il fit presque non de la tête, pour promettre qu’il prendrait sur lui, enterrerait (encore) son ressenti pour mieux la protéger elle, elle et son fragile équilibre. Evan se passa une main sur le visage, épuisé de garder ses propres incertitudes dans son cœur pour mieux l’appuyer, elle. « I’m the one who’s sorry, lass », lâcha l’Écossais. « I thought … because of the deaths I carry with me, I’d be able to help. I’m useless, and I hate it. » L’admission d’ineptie, la pire – car il n’y était pas habitué, l’animal. Lourdement, il souffla par la bouche, les lèvres plissées pour ne laisser qu’un interstice par lequel toute sa frustration ceinte de tristesse passa. Doucement, il remplaça le lien charnel brisé, posa sa main sur la jambe d’Alice. Fit une caresse. Lente, tendre. Patiente. « I’m trying to guess what you need, what might feel good to you, but I don’t have all the keys. I don’t understand all the comforts you seek, and I haven’t said sorry for that night, at the Styx. » La nuit, teintée d’optimisme malgré tout : il avait cru qu’ils auraient bien le temps de régler la situation quelques jours plus tard, car ils avaient le temps, n’est-ce pas? Toute la vie, même. « I acted like an arse. I thought you had hidden it from me with malicious intent, but I’d like to understand. If you’ll tell me. I’ve tried to wrap my head around it, how it might not be as bad as I thought, but … seeing you with the customers made my skin crawl. I hated seeing you that way, that version of you I didn’t recognize, with the fluorescent eyes and the straight hair. With them. » L’impression d’avoir été trahi malgré la beauté de leur relation qui s’était solidifiée, malgré tous les secrets échangés – et quelque part, ça l’avait blessé bien davantage que le dossier, que les mensonges ibériques. Car désormais, il était attaché. Irrémédiablement, à son serpent et aux anneaux qu’elle était parvenue à enserrer autour de son myocarde. « So I suppose … first, I’d like to know what you seek there. »
- trad:
« Pardon »
« C'est moi qui suis désolé, lass. »
« Je croyais ... que parce que j'ai vécu de lourds deuils, que je pourrais t'aider. Je suis inutile, et je déteste ça. »
« J'essaie de deviner ce dont tu as besoin, ce qui te fait du bien, mais je n'ai pas toutes les clefs de lecture. Je ne comprends pas tous les exutoires que tu cherches, et je ne t'ai pas encore demandé pardon, pour la soirée au Styx. »
« J'ai agi comme un connard. Je pensais que tu m'avais caché son existence avec des intentions mesquines, mais j'aimerais comprendre. Si tu veux bien me le dire. J'ai essayé de comprendre, de me dire que ce n'est pas aussi terrible que je l'ai perçu, mais ... te voir ainsi, avec les clients, m'a bouleversé. J'ai détesté te voir ainsi, cette version de toi que je ne reconnaissais pas, avec tes yeux fluorescents et tes cheveux raides. Avec eux. »
« Donc j'imagine ... que d'abord, j'aimerais savoir ce que tu cherches, là-bas. »
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Lun 25 Oct 2021 - 14:15
Homesick
Evan Wakefield
That's why we're insane. We take mud to escape. 'Cause life's hard to take. (Loïc Nottet)
A bien y regarder, il ne semblait pas vraiment en mener large non plus, son bel écossais. Les cernes n’étaient peut-être pas aussi bleus que les siennes, mais il lui semblait bien que la ride du lion était plus profonde entre ses sourcils, que les mâchoires étaient plus serrées quand il n’articulait pas. Elle n’en était pas sure, la réalité se distordant trop souvent pour se fondre dans ses pensées, déréalisation salvatrice quand le coeur ne la supportait plus, mais qui la faisait douter de ses propres intuitions. Alors elle était prudente, dans ses mots, dans ses assomptions, dans ses gestes aussi. Elle baissa les yeux sur la main d’Evan sur son genou, sans trop savoir quoi en faire. Elle aurait aimé pourtant, elle aurait tellement aimé. Ne pas hésiter, ne plus douter, jamais, cela ne lui allait pas au teint, et pourtant … Elle avait toujours cette impression de s’enliser, lentement mais surement, et de ne savoir ce qui, entre l’inertie et le mouvement rageur, serait sa porte de salut.
- You’re not useless, you’re just …
(not the one I really need by my side.) Quelle conclusion cruelle. Elle n’avait pas besoin de l’amour passionnel de son Presque-Tout, à cet instant. Elle avait besoin de sa mère. La petite Alice réclamait sa maman, à cor et à cri, des cris qu’elle étouffait sous des couches d’insomnie, des litres de café pour brûler sa gorge et griller ses neurones. Pourtant, il fallait qu’elle fasse un effort. Elle se le Devait, et le lui devait aussi. Mais par Merlin, ce que cela pouvait être dur …
Heureusement pour elle (pour lui, pour eux?) il ne lui avait pas laissé l’occasion de se risquer sur les dangereux rivages de la première partie de la conversation, bifurquant rapidement sur un sujet inédit, qui eut au moins la qualité de la décontenancer, lui faisant arquer un sourcil surpris. Cet épisode, elle l’avait presque oublié, relégué bien naturellement à son rang de détail de l’histoire, de faux pas à peine perceptible. C’était loin, dans sa tête, tellement loin … et en même temps, pas tant que cela. Elle n’était pas rentrée tôt, ce soir là, avait roulé des yeux quand il avait révélé son vrai visage à son suspect stupéfait, avant de disparaître dans le craquement peu discret d’un transplanage bien peu discret, pour un professionnel. Elle avait du faire preuve d’une décontraction toute calculée pour apaiser les angoisses paranoïaques de Leonardo, d’une patience d’ange pour affronter la jalousie imbécile de cette Vonnie qui ne comprenait pas pourquoi son roulé à la cannelle s’était tiré sans la féliciter pour son numéro de cabaret. Au final, elle n’était pas parvenue à se détendre jusqu’à ce que sonne l’heure de battre en retraite, l’oreille constamment tendue pour ne pas risquer d’omettre le moindre murmure, la moindre rumeur trahissant le passage de l’auror dans les couloirs de l’enfer fantasmé. Elle avait fini par rentrer chez elle en ronchonnant, se démaquillant rapidement avant de s’effondrer dans son lit après avoir croisé un Jacob en caleçon à l’heure de son premier petit déjeuner de la matinée, qui s’était au passage bien payé sa tête, avec les frisottis qui faisaient regonfler sa chevelure comme autant de déclaration d’indépendance, et ses yeux qui clignotaient comme des lucioles en fin de vie. Elle se souvenait d’un majeur fièrement brandit, et puis le noir. Elle avait encore des absences, parfois, la mémoire du court et moyen long terme manquait de fiabilité, et il n’y avait plus que le compliment poli du Calédonien ce soir là, en la récupérant dans sa tenue de soirée, les conversations, les rires … La mort qui frappe. Deux fois.
- … Hmm ?
Le Styx. Il parlait du Styx. Il fallait qu’elle se concentre, l’Américaine, qu’elle reprenne les rennes de ses pensées erratiques (et pourtant, tout me ramène à toi, tout le temps, maman). Nouvelle gorgée de café, mais ses lèvres pressent le vide, il n’y a plus rien au fond de la tasse. Lle ne tente pas d’attirer quoi que ce soit à elle, préfère se lever et reprendre un lampé de liquide noir, le temps de chasser les fourmis dans ses jambes et les traines fumeuses dans son esprit.
- How can I explain it …
Elle reprit sa place sur le canapé, peut être un tout petit peu plus proche de l’accoudoir, barrière symbolique et physique entre elle et le sorcier, et pourtant, plus proche de lui quand même. Récupéra sa main dans la sienne, libre de la tasse qu’elle avait posé sur la table basse.
- At the very beginning, it was more like a game. The styx was some kind of speakeasy , and I was one of the first guests invited by Tiki, with some of your younger cousins. Because we were rich, bored young pure-boods, with daddy’s money to spend and a certain attraction for the forbidden, but with not so much danger. And then …
Elle fit une pause, laissant les mots rouler entre ses dents et ses lèvres au passage de sa langue, avant de reprendre.
- Then Trixie appeared. This is not dissociative, it’s … cathartic. I always have been related to someone. My parents’ daughter. My siblings’ sister. Evan Wakefield’s fiancée. I have a situation. I have duties. She doesn’t. She is no one, to no one. She is just part of the mythology of this place, but she is not real, nobody asks her to. She can be anything she wants, she can dance if she wants to, she both can rise and fall, if she wants to. She can be nice or terrible, and if she decides to leave, she can disappear for days, for weeks, then reappeare without having to answer any question. And I … can’t run away. Even if I feel this urgent need to. I won’t leave my family, nor my job, nor you … I must be standing…
Pourtant, elle l’avait envisagé, plus d’une fois. Faire son sac, n’embarquer que le strict nécessaire, peut être même rien du tout. De nuit, recouvrir sa peau de plumes, s’enfoncer dans l’obscurité lumineuse sans véritable but, juste pour ne plus avoir mal (je ne m’enfuis pas, je vole, comprenez bien je vole.). Mais il y avait l’éducation, le sens du devoir, et surtout, cette foutue loyauté qui lui était chevillé à l’être, à l’essence même. Elle avait déjà failli sa mère, qui serait-elle si elle abandonnait les autres membres de sa famille dans la foulée, pour un caprice égoïste ? Qui serait elle si elle n’était plus une sœur, ni une fiancée ? Quel serait le prix à payer ? Pour sa sanité, en tout cas, il se comptait en jetons qu’elle offrait à Charon à chaque fois qu’elle le pouvait.
- I don’t know if it makes any sense for you, but the Styx is a safe place for broken people and lost souls. I guess i’m one of these now, and I’m quite okay with this … When I dance, I’m not a Hangbé, I’ m just Trixie. And she is enough, just as a decent dancer.
Made by Neon Demon
- traduction:
"tu n'es pas inutile, tu es juste..."
"Comment puis je l'expliquer..."
"Au tout début, c'était plus comme un jeu. Le styx était une sorte de bar clandestin, et j'étais une des toutes premières personnes invitées par Tiki, avec certains de tes cousins. Parce que nous étions de jeunes sangs purs, riches, qui s'ennuyaient, avec de l'argent de Papa à dépenser et une certaine attirance pour l'interdit, mais sans trop de danger. Et puis... "
"Et puis Trixie est apparue. Ce n'est pas dissociatif, plutot... Cathartique. J'ai toujours été "reliée" à quelqu'un. La fille de mes parents. La soeur de mes frères. La fiancée d'Evan Wakefield. J'ai une situation, j'ai des devoirs. Elle, non. Elle n'est personne, pour personne. Elle est juste une pièce de la mythologie du lieu, mais elle n'est pas réelle, personne ne lui demande. Elle peut être ce qu'elle veux, elle peut danser si elle veut, elle peut s'élever et tomber, si elle le veut. Elle peut être gentille ou horrible, et si elle décide de partir, elle peut disparaitre pendant des jours, des mois, puis réapparaitre sans avoir à répondre à la moindre question. Et moi ... je ne peux pas m'enfuir. Même si j'en ressens le besoin urgent. Je ne lacherai pas ma famille, ni mon travail, ni toi... Je me dois de tenir.
"je ne sais pas si c'est entendable pour toi, mais le styx est un refuge pour les gens brisés et les âmes perdu. Je suppose que je suis l'une d'elles maintenant, et je suis plutôt d'accord avec ça.Quand je danse, je ne suis pas une Hangbé, je suis just Trixie. Et est suffisante, juste comme une danseuse."
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Dim 7 Nov 2021 - 22:07
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(homesick) La jeune femme lui paraissait tellement loin, se pressant sur le canapé pour éviter le contact, mais elle n’avait pas repoussé sa main – est-ce ainsi qu’on devait se contenter, alors? Lorsque les doigts de l’amphisbène lui attrapèrent les phalanges, le musicien ne sut où regarder, tant sa poitrine se pétrit d’un étrange soulagement au contact qu’elle recherchait. Evan s’était à peine habitué au crotale, que déjà, les marqueurs communs semblaient s’effacer. Alice, si tactile, Alice, qui ne demandait jamais pardon, Alice qui voyait les accusations comme des attaques à recracher aux cendres de ses ennemis. Lorsque la tapisserie des confessions se déroula, le Calédonien hocha gravement la tête. Le désir de fuite, il le comprenait mieux que quiconque, ou tout autant, peut-être, mais c’est qu’il était véritablement parti, lui, avant de revenir – le plus difficile, avait-il affirmé à Awa en décembre. They say it’s difficult to leave, but they don’t realize staying is harder. Evan lui embrassa les doigts, couvrant ses mains qu’elle avait si froides de son souffle chaud, lui protéger l’épiderme là où il était si maladroit avec son cœur, impuissant face à sa souffrance coupable.
« Aye lass, I understand that bit. Every pureblood who isn’t entirely in love with their position must get it. » et Evan adressa un sourire compatissant et rempli de compréhension à la jeune femme – il n’aurait jamais pu affirmer le contraire. Le fils lâche, celui qui était parti, celui qui était revenu. Celui qui était resté, depuis près de deux ans désormais. Pourtant, peut-être avait-elle trop bien joué son rôle, l’amphisbène, avec sa fierté féline de lui montrer qu’elle avait participé au stratagème de leurs fiançailles depuis le début, avec sa foutue volonté de tout contrôler tellement aiguisée qu’elle avait fini par le convaincre d’être la parfaite héritière de sang pur. Celle qui avait le culot d’accepter son destin, de l’aimer, même, et de faire de toute situation son affaire. « You, however … you seem so perfectly at ease with your obligations, lass. Smugly, sometimes, even. I suppose it’s on me, then. I thought … well, blimey, I thought you were young and perfectly latched onto your family and what they wanted for you. Serves me right, then. » Le violoniste admettait ce tort sans ego, peut-être car il était aisé de mieux cacher le second.
Le Wakefield laissa planer un léger silence, tentant de composer ses pensées sans faire prendre un ton trop accusatoire à ses mots. « But … the medium you chose … Merlin, lass, did you ever think I might not be at ease with it? Surely you must have thought of it at some point, no? You’re many things but not naïve, you might have thought I might have something to say about it … no? In the beginning, fine, we were barely on speaking terms at first, but … I mean … Merlin. I asked you to marry me because I wanted to do it, to show you and everybody else I actually wanted this, and … you never thought it might be an issue? Or did you know I might mind, and purposely hide it? Or … I don’t know, Alice, did you think I had no business even having an opinion about it? » Et dans ses questions, les aveux s’étalaient – de ses doutes, à lui, de s’être chevillé le cœur à une curieuse chimère capable de tendresse et de cruauté à la fois. Il garda ses doigts entre les siens, mais soupira lentement. « I’m trying to wrap my head around it, Alice, I really am. But it feels as if I’ve only got two options in front of me : either you knew it would hurt me and chose not to tell, robbing me of any opinion in the matter … or you never thought it might be an issue. Are we this different in that regard? I’m trying to understand lass, I swear. » et il répétait son désir de compréhension à l’agonie, presque, pour montrer patte blanche à sa vipérine fiancée, la laisser enrouler ses anneaux autour de son cou jusqu’à l’asphyxie, mais au moins, son dernier souffle serait rempli de bonne foi – car il n’avait pas menti, en lui disant qu’il la voulait, elle. Elle, rien qu’à lui, et le diable emporte ses habitué.es et leurs regards félins, leurs réflexes d’interaction avec sa peau tellement visibles.
C’était différent, nécessairement, n’est-ce pas? Elle était tactile, l’amphisbène, l’auror le savait très bien, la voyait interagir avec ses connaissances rapprochées ou pas, et toujours les doigts qui se liaient à une main, un bras, une taille, et faire la bise le sourire large … avait-elle réellement été plus proche des âmes perdues du styx, sous ses yeux, ou lui avait-il apposé son propre cadre de référence, en l’observant? Non, c’était différent. Bien sûr, que c’était différent, et terriblement transactionnel, n’est-ce pas? Était-ce cela qui lui avait donné la nausée, de la voir entretenir des liens par séduction pure, ou parce que la séduction était vile, pour des buts … lesquels, encore? Il n’en savait rien, mais l’idée de l’y revoir, avec sa crinière de lionne lissée en une rivière coulante, les yeux visqueux et fluorescents … ce n’était pas Alice, elle l’avait dit elle-même, c’était Trixie, et elle était libre, mais alors, alors, ne lui faudrait-il pas expliquer, lui aussi, si elle ne comprenait pas? Et s’il expliquait le fond de sa pensée, saurait-elle entendre, ou leurs conceptions de leur relation étaient-elles si éloignées qu’ils avaient condamné d’avance l’alliance, non pas par querelle comme on l’aurait cru à son inception, mais par des valeurs diamétralement opposées? Alors il essayait de comprendre, de poser des questions, encore, pour ne pas avoir à exposer son entière pensée – parce qu’elle était une accusée pratique, Alice, il le savait. L’Américaine acceptait les accusations le menton relevé et le sourire aux lèvres, s’en moquait éperdument et ne demandait jamais pardon – mais peut-être cette version-ci, chimérique et affaiblie, accepterait-elle l’opprobre ou les confessions de faiblesse de son promis? ((peut-être, peut-être, peut-être, écoute-moi, Alice, entends-moi sans te moquer, sans me dire que je suis terriblement puritain, de ne pas souffrir de te voir avec d’autres.)) You’re mine, so all the others can fuck off.
- trad:
Ils disent que c'est difficile, de partir, sans réaliser que rester, c'est pire.
« Aye lass, je comprends cette partie-là. Tous les sang purs qui ne sont pas entièrement entichés de leur position comprennent. »
« Toi, toutefois ... tu sembles tellement à l'aise avec tes obligations, lass. Avec suffisance, parfois, même. Je suppose que c'est moi qui suis coupable, alors. Je pensais ... eh bien je croyais que tu étais jeune et parfaitement attachée à ta famille et ce à quoi ils s'attendaient de ta part. Ça m'apprendra. »
« Mais ... le moyen que tu as choisi ... Merlin, lass, n'as-tu jamais pensé que je serais mal à l'aise? Tu dois certainement y avoir pensé à un certain point, non? Tu es bien des choses, mais pas naïve, tu as dû penser que j'aurais quelque chose à redire ... non? Au début, d'accord, on se parlait à peine, mais ... je veux dire ... Merlin. Je t'ai demandé de m'épouser parce que je le voulais, pour te montrer à toi et à tout le monde que je le souhaitais réellement, et ... tu n'as jamais pensé que ce serait un problème? Ou tu savais que ça me chagrinerait, et tu as intentionnellement caché l'information? Ou ... je ne sais pas, Alice, peut-être pensais-tu que je n'avais rien à faire à avoir une opinion à ce sujet? »
« J'essaie de comprendre, Alice, j'essaie réellement. Mais on croirait que je n'ai que deux options : soit tu savais que ça me blesserait et as choisi de me le cacher, me privant de la possibilité d'une opinion en la matière ... ou tu ne croyais pas que ce serait problématique. Sommes-nous si différents à cet égard? J'essaie de comprendre, lass, je le jure. »
T'es à moi, alors tous les autres peuvent aller se faire foutre.
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Sam 13 Nov 2021 - 21:42
Homesick
Evan Wakefield
Let's go back to bed until we break it
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
En d’autres circonstances, peut-être aurait-elle pris les premiers aveux du Calédonien comme un compliment, aurait incliné la tête sur le côté avec une petite moue satisfaite : l’hoirie des Hangbé qu’elle porte en capeline de plumes, de poils et d’écailles la plupart du temps, est une part non négligeable de son identité, elle serait bien malaisée de le renier. Ses parents avaient été des orfèvres de la psyché de chacun de leurs rejetons, façonnant à même le matériau sans chercher à en changer la nature, mais en le sublimant pour en faire une arme à la hauteur de leurs exigences et de leurs ambitions. Ekwensu n’était pas fait du métal des lames, ils en avaient fait une plume sombre et acérée. Oscar quant à lui était un composite si changeant qu’ils lui avaient laissé le loisir d’être un couteau suisse redoutable, là où Jacob était de ces onguents qui adoucissent, qui cajolent et, au final, dans l’excès peuvent vous étourdir. Et Alice, alors ? Elle ne savait pas. Elle ne savait plus, vraiment, ce que l’on attendait d’elle, si ce n’était d’aller jusqu’au bout de ce mariage, de cette alliance qui était la dernière mission que lui avait confié la matriarche, d’abord en pure stratégie, et dans une lucidité maternelle qui dépassait l’entendement de l’héritière.
- … I guess it’s easier to seem smugly, as you said, as long as you don’t feel miserable with you conditions. I was not considered Irrelevant, as countless of other pure blood girls, and I allways was my brothers’equal. I think. But it’s not because I am not harshly fighting against our rules and traditions that I’m okay with them, unconditionnaly …
Pensait-il sincèrement qu’elle manquait tant que cela d’épaisseur ? Etait-ce justement que les couches superposées de sa personnalité étaient trop nombreuses pour qu’il puisse les appréhender toutes dans leur complexité et leurs contradictions, qui amenaient le Wakefield à faire des raccourcis malheureux ? Là encore, elle n’avait pas de réponse, uniquement une volonté diffuse, peut être encore trop optimiste, de vouloir croire que le musicien n’était pas versé dans le manichéisme facile. l’Optimisme était une force mentale comme les autres, chez les Hangbé, quand elle ne se troublait pas de naiveté ou d’angélisme. Pearl s'en était toujours assurée.
Quand la question de ses activités stygiennes revint sur la table, elle dut faire un effort notable pour ne pas se renfrogner, froncer ses sourcils et plisser le nez dans un masque d’onyx impassible. Sous le couvert de la mélodie de ses mots soigneusement choisis d’orant au supplice, revenait toujours cette litanie, la même depuis le début, leur tout début : Il doutait. La foi du Wakefield vacillait comme une flamiche mal alimentée, et le Styx n’était pas le lieu des feux d’âtre rassurants, des cheminées de maisonnées familiales. Elle aurait voulu l’interrompre, mais il avait serré une peu plus ses doigts froids dans les siens, si chaud, chandelier d’or et de vermeille, alors elle se laissa réduire au silence encore un peu, le laissant finir de dérouler ses pensées tourmentées. Alice se laissait bercer par la voix grave qui essaimait ses mots comme ses inconforts. Les confidences étaient comme un chemin de pensées qui, par arborescence, en faisaient naitre d’autres sous le crâne orfévri de la cadette : Avait il déjà attrapé au vol le surnom létal de sa fiancée, dans les bouches pourtant affectueuses de ses non moins dangereux ainés ? Famine. Celle qui laisse les ventres creux, la couleur sombre du manque. La balance dans la main, qui ne commerce que pour les trésors les plus précieux, les secrets les mieux enfouis. A l’humour caustique de la fratrie soudée comme les facettes du même diamant, elle doutait fortement qu’Evan puisse gouter sans un arrière gout amer au fond de la gorge. Si elle n’avait jamais parlé à Evan du Styx, c’était parce qu’elle avait probablement un peu trop facilement distingué le fond et la forme, considérant que puisqu’elle ne rompait aucun de leurs engagements réciproques tout ce temps, ses activités de noctambule ne concernaient qu’elle-même, a fortiori quand ces dernières servaient si bien les intérêts familiaux.
Puis, elle comprit. Enfin. Au détour d’un des silences. Elle qui avait hourdi à la hâte des murs sombres autour de son cœur, autour de ses os, pour que sa carcasse reste bien droite face aux intempéries. Mais le matériau n’avait pas supporté le chaud, le froid, et les veines blanches à travers le plâtre de son opiniâtreté laissaient passer à présent la peine, la détresse, les vents mauvais qui soufflaient les regrets et le manque de la présence maternelle. Les siennes. Celles d’Evan. Les leurs.
- … Come here.
Elle tira sur leurs doigts liés. Sans bander les muscles, rien qu’une attraction douce, comme si elle tirait sur un fil fragile, alors que de l’autre main, elle tapotait sur le bout de canapé à ses cotés, pour qu’il s’installe contre les coussins. Les gestes étaient lents, mais fluides, alors qu’à l’instant même où le sorcier s’était assis, elle était montée à califourchon sur lui, les jambes de part et d’autres des hanches d’Evan. Une position qu’ils connaissaient bien, tous les deux, sauf que cette fois-ci, les vêtements n’avaient pas vocation à finir à même le parquet, c’était l’âme qui s’effeuillait, et le palpitant comme lithophanique. Elle caressa la lisière de sa chevelure du bout des doigts, descendit jusqu’à sa mâchoire. Ne l’embrassa pas. A la place, elle se resserra contre lui, enfouit son visage dans le creux de son cou musculeux, laissant la jungle de ses boucles brunes lui brouiller la vue. Elle inspira son odeur boisée. Resta là un moment, une dizaine de secondes, avant d’à son tour prendre la parole, avec moins de précaution, mais elle savait que ce n’était pas là ce qu’Evan attendait, à ce moment précis, alors qu’elle le serrait aussi fort que son corps mal alimenté le permettait.
- First I just did not care. Then I guess that I never found the right moment to do so. Since the beginning of the year, I was not that much there actually, a dilettante entertainer, as touchy this tittle could be… I could give you millions of excuses and explainations and reasons why. But It won’t answer your question, because it’s neither your first or second option. I thought that as long as I respected all our terms and conditions, I just could go on with my… dark bubble of freedom. I guess I just made excuses to myself in order to be remorseless… For what it worth Evan, nobody touched me like you do, ever, since we are together.
Elle soupira contre sa peau, guettant les variations du pouls du tout-contre-elle.
- I never meant to hurt you, Styx was never about you, it was all about me, myself and I. Hearing you talking about it like that kinda remind me that I can’t be that … self-centered, anymore. Because I love me better when I’m with you. Even if I hardly can stand myself, currently.
Elle hesita un instant à se redresser un peu pour croiser le regard azuré du sorcier. Préféra fermer ses yeux, alors qu’en sur impression de ses paupières closes, elle choisit de l’imaginer lui sourire, plutôt que d’affronter une autre expression qu’elle ne saurait encaisser décemment. Dans un dernier élan de courage mâtiné de confusion, elle souffla contre son oreille, tempe contre tempe.
- You are the very best part of me right now. And I want to put you first ... Us, above all, whatever it takes.
My family is broken, My daughter nature is crumbling, would you fix it by turning me into something different ? try me, you’re good at metamorphosis, and I’m such a good shape-shifter…
Made by Neon Demon
- traduction:
UC
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Sam 13 Nov 2021 - 23:12
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(you are the reason) it’s easier to seem smug – mais il lui manquait des références, au Calédonien. À défaut d’être le fils aîné, il demeurait un fils, relativement libre de ses mouvements et porteur du nom pour lequel ses aïeux avaient été fiancés comme lui, comme son frère avant lui, comme son père – comme eux tous. Lorsqu’elle parla des femmes de sang pur, il la fixa intensément, attendant une suite qui ne viendrait pas tout à fait, car l’exercice n’était pas celui de la pédagogie mais de l’empathie. Profonde et maladroite, qui ne se vêtait au mieux que de la bonne foi des cœurs qui veulent protéger leurs ventricules fatigués. Au mieux, Evan se contenta de hocher la tête sobrement, avec dans l’esprit une parcelle de compréhension tout juste assez acquise pour être réactivée, mais pas assez pour qu’il n’ait pas eu besoin que la vipérine demoiselle doive la formuler à voix haute. Et pourtant, c’était si clair, presque trop, pour qu’on ne lui assène pas une claque derrière la tête d’un air suffisant. Esprit vif-argent, my ass.
La réplique facile, le verbe haut, on le disait à Devon Wakefield depuis l’enfance de son dernier-né – avec, en général, un roulement d’yeux vers le ciel indiquant exactement à qui ils avaient à faire. Le Wakefield effronté, dont l’insolente désinvolture provoquait les rencontres, forçait les amitiés. Pourtant, le musicien avait l’âme lourde des confessions qui s’étaient égrenées avec tant de difficulté le long de ses phrases saccadées, le verbe trébuchant et les mots maladroits en guise de confession matrimoniale de salon. La faille profonde de sa possessivité et de son incompréhension tissée de doutes. « Come here. » Le géant se laissa attirer à elle, avec dans les muscles une raideur qui ne savait pas comment être exprimée – douceur, ou piège? Lorsque l’amphisbène s’installa contre ses cuisses, ses mains se posèrent sur sa taille par habitude, mais sans l’attirer à lui. Evan ne voulait pas de ces distractions, si tentantes puissent-elles être – utiles pour régler les peccadilles érigées en conflit, mais son cœur s’était trop égaré, déjà, pour supporter de crever l’abcès une seconde fois. Prêt à la repousser, l’auror se surprit de ne voir en elle aucune posture tentatrice, nulle concupiscence. Il n’y avait qu’elle et ses membres engourdis, qu’elle et ses doigts le long de sa mâchoire. Qu’elle et ses yeux aigue-marine, dans lesquels il ne perçut nulle traitrise, qu’une lente patience déroulée. Le contact de ses lèvres sur son cou se fit comme une arrière-pensée choquant l’esprit d’ordinaire calculé de la belle, et ses bras se refermèrent autour d’Alice. Lourdement, l’auror soupira, espérant libérer en l’air ses craintes, redevenir un être de raison capable de tracter avec son Américaine.
La pensée du crotale se déroula en l’air, ses mots chuchotés à l’oreille comme un secret ou un leurre, et, presque comme un souhait contradictoire, le sorcier serra les bras autour d’elle davantage encore, le souffle à peine soutenu dans sa poitrine en guise de filon. Lentement, Evan hocha la tête sans l’interrompre, bien que l’idée d’être une fois de plus jeté hors de l’équation le choquait dans ce qu’il avait imaginé être leur relation depuis janvier. Plus jeune, il aurait réagi différemment, le Calédonien – mais il avait un minimum de sagesse chèrement acquise à l’aune de relations qui n’avaient pas toutes fonctionné, dans lesquelles des onces de liberté avaient été acquises ou sacrifiées. Surtout, l’Écossais avait durement conscience de s’être lui-même enveloppé de la prestance de son ego sous couvert de valeurs et de destinées – car il était si pratique, si facile, d’user de son bon nom pour tout justifier plutôt que d’admettre ce qu’il désirait véritablement. Ses mots à elle se tissaient, encore – il y perçut sa surprise et un relent d’orgueil mis de côté, sacrifié au nom de meilleurs augures. Sourit, en l’entendant. Glissa ses doigts dans ses cheveux, pour la sentir davantage contre sa peau. Curieuse crotale, récalcitrante lionne, mystérieuse chimère. La sienne.
Ses cérulés l’accueillirent, l’air paisible, et il hocha simplement la tête pour accepter ses confessions, ses excuses qui n’en étaient pas – son allégeance dans laquelle il ne perçut nul sacrifice, aucune résignation. Symétrie des corps. Ses propres doigts se glissèrent sous la lisière de la crinière de la belle, et le cadet inspira longuement avant de se risquer à parler à nouveau. Lentement, il l’attira à lui, appuyant son front contre le sien. « I don’t want you to sacrifice whatever bits of freedom you have », murmura-t-il. « I know what it is, having nothing or so little that was only mine. If this is truly important to you. If you need it. I don’t think I’ll ever approve, but I can try to accept it nonetheless. If … you promise you’ll respect the spirit of our agreement, not just the text. » L’amphisbène n’avait rien d’une jeunette écervelée, elle comprendrait que son malaise reposait dans sa séduction d’autrui alors qu’ils s’étaient promis des choses, tant de choses, mais ils n’avaient rien –
Ce n’était rien, n’est-ce pas? Leur entente. À si peu de choses près, une extension de l’alliance décidée par leurs parents plus d’un an auparavant, rien de plus qu’une broderie le long de la corde qui avait été passée autour de leurs deux cous, consentants ou pas. Evan expira lentement, avec ce qui lui parut être une vie entière de tensions à exprimer. « You know, lass … that agreement was hard-won, as my chin bruises and your back will recall. But … it wasn’t about controlling you. I knew myself enough to know if I had other physical options, I wouldn’t make the effort towards you. Now don’t go and twist my words, hm? You are extraordinary, but even you must know you were a hard pill to swallow, back in April. And I wanted to protect my family from the deep desire I had to run away. » La fuite éternelle du Calédonien, la donnée la plus constante de son existence – mais il n’avait pas envie de fuir Alice, que le désir de l’emmener avec lui pour mieux s’évanouir en plein ciel. « Yet I chose to accept an arranged marriage, asking only that I might choose who I’d marry. And that choice was taken away from me. And since then … we’ve done nothing for ourselves, in this. Truly for ourselves, I mean. » Ils avaient accepté leurs fiançailles, s’étaient présentés comme de dignes héritiers, couple princier en devenir. Avaient entretenu leurs rendez-vous bimensuels forcés par le même arrangement qui avait chevillé la fidélité à Alice comme un boulet. S’étaient comportés en parfaits enfants de sang pur. « You’ve been your parents’ daughter all your life, and I’ve tried with all my might to be a son, even when I was failing miserably at it. Let’s do something for ourselves. Because I do choose you, Alice. » et sa poigne se raffermit sur elle, tandis que son sourire creusait enfin ses pattes d’oie dans son visage pour la première fois de l’échange. « Marry me today, love. »
- trad:
[UC BÉBÉ]
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Dim 14 Nov 2021 - 12:50
Homesick
Evan Wakefield
Let's go back to bed until we break it
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
Des promesses, toujours. Des vœux pieux pour pécheresse, et pourtant, après autant d’aveux dans le confessionnal qu’était le cou du Wakefield, elle n’était plus à ça près. Pire encore, elle croyait, sincèrement.
- I promise. Cross my heart and hope to die.
Et c’était tout. Pour le moment, à tout le moins, la parenthèse infernale était close, jusqu’à la prochaine fois. Elle profita du toucher caresse, de ses longs doigts de pianiste qui appuyaient par touche sur sa nuque, faisant relever son visage d’une bousculade du nez. Le soleil à travers la grand fenêtre traversait ses iris d’aigue-marine en catadioptre, alors qu’elle guettait la suite, qui venait en bribes, sans qu’elle ne comprenne où il voulait en venir. Il refaisait l’histoire, leur histoire, avec des commentaires qui ne tenaient qu’à lui. Elle n’était pas d’accord avec tout, mais la curiosité était telle qu’elle ne l’interrompait pas. Elle aurait voulu objecter qu’il y avait eu Nola, petite pépite de vulnérabilité cachée dans la moiteur de février et les volutes des bougies de cire noire. Mais là n’était pas le sujet, elle le pressentait, il y avait autre chose. Alors elle ne cilla pas pendue à ses lèvres, en sus de l’être à son cou, jusqu’à ce frisson qui parcoura son échine, jusqu’à venir agiter les papillons dans son ventre ( I do choose you, Alice). Un sourire s’était étendu en miroir sur son visage, effaçant partiellement les traces de fatigue, jusqu’à la chute finale. (marry me today, Love). C’était la première fois qu’il l’appelait Amour, et c’était pour l’entrainer dans une folie pure. Elle gloussa. Nerveusement.
- Ah ah. We can’t do that.
Elle s’était redressée, un peu, posant les mains sur le torse du Wakefield en le regardant un peu de biais, cherchant à flairer la malice dans l’œillade du Calédonien. N’en trouva aucune. Il était parfaitement sérieux, et elle avait envie de lui arracher son sourire avec les dents. Il ne s’en départissait pas, alors qu’elle s’agitait, toujours sur lui, en proie à une nervosité inédite.
- Our fathers would kill us. Our brothers too.
Mauvaise excuse, elle le lisait dans le petit rictus dont il ne se départissait pas. Elle réagissait en Fille De, comme un réflexe pavlovien.
- My dress is not ready. Our rings are still at the jeweller shop. We just … For fuck sakes Evan I’m a mess, my mom died a month ago and you want to marry me Today ?
Désarçonnée. Elle le jaugeait encore, mais la résolution dans les yeux d’Evan ne flanchait pas. Il semblait attendre tranquillement qu’elle épuise tous ses arguments fallacieux. Elle qui ne ressentait plus rien depuis des semaines, tout se mélangeait dans son corps, dans sa tête, dans sa poitrine. C’était beaucoup, trop, d’un seul coup, et son cœur s’emballait pour cogner contre sa cage thoracique. C’était ridicule, c’était insensé, c’était … une folie. Probablement une énorme bêtise. De celles que ne font que les personnes qui s’aiment, et n’ont besoin de rien d’autres que de cette certitude pour plonger, pieds joints et mains liées, dans l’abime.
- We can’t do that … Can we ?
Du doute, encore, mais les intonations avaient changé. Techniquement, rien ne les empêchait de se marier, aujourd’hui. Aujourd’hui, le six aout, une petite semaine avant qu’il ne fête ses trente quatre ans. Près de huit ans après la disparition d’Elena, il voulait quitter son veuvage, pour elle. (He choses you, Alice. Will you do the same ? ).
Elle gloussa. Nerveusement. Encore. Elle n’avait pas bougé des genoux de l’auror, et ses tergiversations avaient duré bien plus longtemps dans son esprit que dans la réalité. C’était complètement fou, potentiellement stupide, évidemment inconscient. Et pourtant … Timide, le sourire finit par poindre à la commissure de ses lèvres, alors qu’elle se frottait le bout du nez, la voix plus basse, comme si elle craignait que quelqu’un puisse l’entendre.
- … And How… Where… ? We at least need wedding witnesses, an officer who will accept to do this just like that. *elle claqua des doigts* Is that that simple ? … Don’t look at me like that, or I bite you. I’m serious.
Elle n’avait pas dit oui, pas tout à fait, mais ses yeux brillaient, fort, et sa lippe tremblait, un peu. Elle en avait envie, à contre courant de tout ce qu’elle avait pu apprendre, tout au long de sa vie. Un égoisme à deux, un nouveau départ, un nouveau chapitre qu’ils écriraient à quatre mains.
- … Cordoba ?
Made by Neon Demon
- traduction:
UC
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Dim 19 Déc 2021 - 11:31
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(you are the reason) Marry me today, love. Alice ne faisait que refuser, énumérant ce qui leur manquait. Le Calédonien attendait l’ensemble des parades qu’elle pourrait lui lancer – leurs familles? Elles n’avaient pas à le savoir, pourvu qu’ils en gardent le secret et livrent au monde une véritable cérémonie d’apparat digne de leur rang. Patiemment, il se tut, ne prenant même pas le temps de répondre à toutes ses rétorques, attendant que l’Américaine constate l’évidence. Un mélange d’amusement et de certitude dansait dans son regard. Celui qu’il lançait depuis l’adolescence lorsqu’il se composait une excellente mauvaise idée, celui qu’il désignait à l’univers avec un petit air de just watch me.
Us. Just watch us.
Ses excuses étaient d’une terrible faiblesse, pour une bretteuse aussi habile que la sorcière, qui semblait éviter – ou entièrement ignorer – la seule qui aurait pu valoir un recul. Lorsqu’elle évoqua sa robe et leurs alliances, il éclata de rire, avant de reprendre son sérieux à la mention de Pearl. « We can’t do that … Can we ? » Enfin, la resolution faiblissait. Un sourire, encore, un énième, qui ne lui était réservé qu’à elle – son amphisbène et ses doutes. « It’s you and me, love. » It’s all that matters. D’un léger mouvement de bassin, l’auror la fit tout juste assez tanguer pour rapprocher leurs torses, sentir son corps tout contre le sien. « you, and me. » L’air qui disait tant pis pour les robes, et les fleurs, et les fichus napperons – et qu’on n’entretienne même pas l’idée de lui parler de nuanciers chromatiques.
Lorsqu’enfin, l’amphisbène cessa de glousser au profit d’un sourire, Evan sut qu’ils avaient gagné. À ses considérations résolument pratiques, il éclata de rire à nouveau, hoquetant de protestation lorsqu’elle lui mordit l’épaule en guise de représailles – et rigola de plus belle, comme il n’avait pas ri avec elle depuis plus d’un mois. « … Cordoba? » L’Écossais attira son front contre le sien, l’enlaça le temps de lui sourire sans l’embrasser. « Yes. Yes, yes, yes, yes, yes », répéta-t-il comme une litanie enthousiaste, laissant les mots dégouliner de ses lèvres alors qu’il agitait légèrement les hanches de gauche à droite pour la faire basculer en douceur. « I’ll call Aedan, and surely Rose will say yes to this as well. And as for the officer, I know a wizard in Madrid who owes me a favor. I introduced him to his own wife, and he’s got three children to show for it. He’ll do, in a pinch. » L’esprit en liesse – car si elle réfléchissait aux aspects pratiques de leur escapade, c’était aussi beau qu’un oui véritable. Evan se redressa, la taille ceinte des jambes de l’Américaine, pour l’emmener vers leur chambre.
« Now you’ll excuse me, I’ll carry you as a bride properly later, milady », annonça-t-il à sa fiancée, qu’il laissa choir sans cérémonie sur leur lit. Face à la mine d’Alice, il y plongea à sa suite, riant de bon cœur à l’idée qu’elle les choisisse, eux, et Merlin emporte les vœux de leurs familles pour ce qui tenait de la bienséance. « I’ll just have to pack my favorite tie and a good shirt », remarqua Evan en se redressant, ses doigts farfouillant dans les profondeurs d’un tiroir pour en tirer l’accessoire de wax que l’Américaine lui avait offert plus d’un an auparavant. « This is the best terrible decision we’ll ever make. You ready? », adressa-t-il à l’Américaine. Son Américaine.
- trad:
Épouse-moi aujourd'hui, love.
« On ne peut pas faire ça ... non? »
« C'est toi et moi, love. » c'est tout ce qui importe.
« toi, et moi. »
« … Cordoba? »
« Oui. oui, oui, oui, oui »
« Je vais appeler Aedan, et Rose dira certainement oui également. Et pour le célébrant, je connais un sorcier à Madrid qui me doit un service. Je lui ai présenté son épouse, et ils ont trois enfants à présent. Il fera l'affaire. »
« Pardonne-moi, je te transporterai comme une épouse correctement plus tard, milady »
« Je dois juste prendre ma cravate préférée et une chemise »
« C'est la meilleure terrible décision que nous prendrons. Tu es prête? »
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Mer 22 Déc 2021 - 14:16
Homesick
Evan Wakefield
Let's go back to bed until we break it
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
C’était Elle et Lui, juste toutes les deux, contre le reste du monde. Elle qui manquait de souffle alors qu’il la serrait fort, Lui qui exhalait sa respiration à même ses lèvres pour lui éviter de perdre pied. Il se répétait, dans une litanie promesse (et pauvre de moi j’y crois.). Il riait, et à chaque éclat il y avait une fissure de colmatée dans son coeur de vitraux morcelés. Ils iraient à Cordoue, parce que c’était là que tout avait commencé. Ils iraient à Cordoue, parce que l’heure n’était plus à la raison, mais bel et bien à l’exact inverse, à tout ce que la vie se devait être, quand le désespoir creusait son trou : turbulente, bruyante, opiniâtre. Alice s’était laissée embrasser, encore un peu groggy de sa décision, lâchant un petit cri de surprise alors que son assise se redressait, lui faisant perdre la sensation d’un sol palpable, resserrant un peu plus ses cuisses autour de ses hanches. Déjà il était parti. En Irlande pour alerter leurs complices du jour, en Espagne pour convoquer le prêtre… dans leur chambre, pour la déposer sur le lit comme en avant noce. Ça allait vite très vite, et la tête lui tournait un peu, et elle s’accrocha au col du Calédonien un instant, avant de le laisser s’enfuir, voletant d’un bout à l’autre de la chambre sans même avoir besoin de sa parure de plumes. Son regard rivé sur le plafond, et le luminaire au dessus de sa tête, elle avait glissé une main contre sa poitrine, pour sentir son coeur qui n’en finissait plus de s’affoler dans sa cage thoracique menaçant de remonter par sa gorge et de s’enfuir, retourner se lover contre celui d’Evan qui ne semblait s’émouvoir que pour le meilleur.
- Wait. What ready ? You mean we are going Right now ?
Elle s’était redressée juste sur un coude, un peu dépeignée, dans son déshabillé de nuit froissé. Avait il décidé qu’ils se marieraient avant midi ? Est ce que cela se faisait, d’ailleurs, de convoler avant le déjeuner ? Il lui fallait tout de même prendre une douche, et une autre tasse de café, et se maquiller, au moins un peu, et puis, et puis …
- … I need a moment.
Marlin soit loué, le dressing était suffisamment grand pour qu’elle s’y enferme, entre les rayonnages de chaussures, les uniformes professionnels et les robes de bal. En face d’elle, son reflet dans le grand miroir à pied la narguait, avec ses jambes nues flottant dans la soie, ses orteils au vernis écalé, sa chevelure en chignon approximatif. On l’avait vu plus flamboyant, le bijou de la famille Hangbé, qui s’était adossée à la porte close, pour passer ses mains sur son visage. De la folie, de la pure folie. Du bonheur, sur le visage d’Evan. Alors, de quoi avait elle peur ? A cet instant, elle ne voulait que lui, il était tout ce dont elle avait besoin, alors pourquoi la panique ne cédait elle pas le pas à l’euphorie. Il manquait quelque chose, un tout petit quelque chose, pour que cela aille mieux. Il lui fallait une robe. Il lui fallait la bonne robe. Une robe qu’elle n’aurait pas porté encore, de celles qui dormaient encore tranquillement dans leur fourreau, il y en avait une dizaine que sa mère lui avait fait parvenir avant les premiers essayages avec Awa. Elle en effleura les pochettes, ferma les yeux. S’arrêta sur une robe, une seule, presque au hasard : ce n’était pas la plus belle, bien que toutes les robes de Pearl fussent remarquables, d’une manière ou d’une autre. Elle se souvenait de l’avoir déjà vu sur sa mère, en photo, cette robe de lin blanc à l’égyptienne, avec sa ceinture dorée, la fente sur la cuisse qui dévoilait ses chevilles qu’elle ornait souvent de bracelets dorés. Une robe de reine, avec une toute petite broche qui fermait le décolleté, un fruit rouge aux grains vermeils, une grenade de rubis tout droit venu d’outre tombe. Message reçu.
- Promise me you won’t regret it.
Elle était sortie du dressing presque dans un bon, regard étincelant. Prête à en découdre.
- Promise me it’s not an attempt to save me from whatever it is. Because I want you, and I want to be able to love you so much that you would probably think it’s too much. So it can’t be out of pity.
Made by Neon Demon
- traduction:
- Quoi, "quel prêt ?" tu veux dire MAINTENANT ?
- ... J'ai besoin d'un moment.
- Promets moi que tu ne le regretteras pas.
- Promets moi que ce n'est pas une tentative de sauvetage de je ne sais quoi. Parce que je te veux, et je veux être capable de t'aimer tellement fort que tu penseras que c'est trop fort. Alors ça ne peut pas être un acte de pitié.
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Mer 22 Déc 2021 - 15:50
homesick,
06.08.2021.
when I'm walking on water
all my dreams have come true
still, nothing means nothing without you.
(you are the reason) L’estomac noué, Evan l’observa se diriger vers la porte de la garde-robe, et s’y enfermer. À sa frénésie enthousiaste de quelques secondes plus tôt, s’opposa son immobilisme. Sans geste, sans bruit, il se contenta de regarder l’espace clos, et de regretter. Too much. Il avait l’habitude, n’est-ce pas? D’un éclat qui brillait trop fort, trop vite, et qui emportait tout sur son passage, au diable les conséquences – mais si elle savait, Alice, que ça n’avait rien d’impulsif, malgré les apparences, qu’il était déjà à elle, de toute manière, mais qu’il avait envie de le lui jurer de façon solennelle et devant témoins. Une fois, rien que pour eux, en secret, car ils méritaient leur espace où les autres ne sauraient pénétrer – pas leurs familles ambitieuses, pas leurs amis curieux ou autrement intéressés, pas les intrigants de cour qui se régalaient d’événements mondains mais n’avaient que faire de l’honnêteté des sentiments. Immobile. Dégrisé. Bloody fool, you scared her with your blinding faith. Can’t you ever calm down? Trop, depuis l’enfance, un explosif carnaval, une capacité à aimer qui se rebutait au prosaïsme et à la pudeur des autres. Il se sentit idiot, soudain, avec son sac de voyage et ses plans improvisés. Tellement sincères, pourtant.
Lorsqu’enfin, l’amphisbène quitta le confinement de la pièce de mode, il la regarda comme un limier à l’affut de la moindre trace de doutes sur son visage – en trouva trop, un piège d’hésitations dans lequel marcher tout droit. « Promise me you won’t regret it. » La vit lionne, à nouveau, et n’osa espérer. « Promise me it’s not an attempt to save me from whatever it is. Because I want you, and I want to be able to love you so much that you would probably think it’s too much. So it can’t be out of pity. »
Un nouveau fantôme s’accrochait à leurs pas, et pouvait-on en faire abstraction, trancher les impulsions en parts égales et en discerner les propres tiers, quarts et autres dixièmes pour y voir quelles parcelles étaient tellement impulsives qu’elles en deviendraient presque fausses, et lesquelles s’étaient tissées, doucement, dans son cœur? Les mots avaient été gardés derrière la geôle de ses lèvres, si longtemps qu’ils lui en brûlaient la bouche de besoin d’être dits. « Lass », souffla-t-il, par habitude. Lass, l’avait-il appelée, charmé par sa séduction sous un ciel ibérique. Woman, s’était-il agacé, tant de fois, face à ses allures de vipère qui cherchait toujours à se montrer en maîtresse d’échiquier, face à ses constantes envies de contrôle. Alice, le prénom, la soie, pour les aveux, le sérieux, la tendresse. Love. Love, non pas pour la réclamer comme cœur conquis, mais pour se marquer, lui – qu’il était à elle.
Le Calédonien ne lui ferait pas l’affront de s’exclamer immédiatement que non, bien sûr que non. En silence, il s’installa face à elle, mettant un genou en terre. Au diable la symbolique, il ne voulait pas forcer son regard à se lever, à l’apprécier dans sa carrure comme elle pouvait le faire si souvent. Les phalanges posées contre sa bouche en un signe de prière silencieuse, l’auror se posa la question. Était-il lui-même assez désemparé d’elle, de leur relation, pour forcer la main du destin et imaginer de nouvelles dimensions au sein desquelles leur agentivité à eux aurait été restaurée, sous prétexte de faire de leurs cœurs le nouveau réceptacle de leurs vies, si leurs familles parcellaires ne pouvaient plus tout à fait les accueillir? Pas tout à fait, pas alors que les dynamiques s’étaient fendues, alors ne faudrait-il pas se transformer, eux, et quelle meilleure façon de se constituer en nouvelle unité, et s’offrir aux morceaux brisés en guise de remède? Taiseux, il la regarda. Ses prunelles de mer, absorba les doutes et les peurs d’Alice, et ce qui avait résonné tout au fond de sa poitrine. I want to be able to love you so much that you would probably think it’s too much. « I can’t promise it has nothing to do with this, love », fit-il par lâcher, le regard honnête bercé de celui de la sorcière. « But I swear I have no pity for you. Only understanding. » Compréhension, car il fallait avoir perdu un parent pour l’entendre, savoir le manque des étapes à accomplir qui ne s’étaient jamais produites et qui ne pourraient être rejouées dans le palais des mémoires familiales. Les jalons gaspillés, affamés d’amour qui ne pouvait compenser par les cœurs des autres. Diminués.
L’auror cherchait ses mots, la voix plus rauque que de raison, avec d’autres visages attachés au cœur. Sa morte. Ses mortes. « I never thought I’d let anybody get close enough to love me, again », souffla Evan, avec le poids de son amour enterré sur la nuque. « I tried to convince myself it was possible to be your future husband, to have what so many of them have », car c’était si aisé, semblait-il, pour tant d’époux de grandes familles, de s’improviser amis, de devenir alliés sans qu’un amour exclusif et romantique les unisse. « And I can’t stay indifferent to you », en écho d’un mois de novembre, en écho à toutes ses provocations, à elle. « I never have. Alice Hangbé, you’re the most frustrating person I’ve ever met, and I’ve been holding the words in so much they seem to come out at the wrong moment, but they are honest. Even if I’m scaring you with my sodding enthusiasm, but bleeding hells woman, what did you expect from me? », fit-il, levant les bras en signe d’abandon. On ne le changerait pas, il était incapable de se limiter, l’expansif, même lorsqu’il effrayait les autres par l’intensité de ses certitudes ou la splendeur du carnaval logé dans ses méninges. « I want to be yours. Even if I already am. I want us to hold the bloody stamp together and smile at each other in secret when we pass each other in the corridors, and call you my wife when no one is around to catch us. »
- trad:
Crétin d'andouille, tu lui as fait peur. Ne peux-tu jamais te calmer?
« Jure-moi que tu ne regretteras pas. Jure-moi que ce n'est pas une tentative de me sauver de ça. Parce que je te veux, et je veux pouvoir t'aimer, t'aimer si fort que tu penserais probablement que ce serait trop. Donc ça ne peut pas être par pitié. »
« Je ne peux pas promettre que ça n'ait rien à voir avec ça, love. Mais je jure que je n'ai pas de pitié pour toi. Que de l'empathie. »
« Je ne pensais pas être capable de laisser qui que ce soit se rapprocher assez de moi pour m'aimer, à nouveau. J'ai tenté de me convaincre qu'il était possible d'être ton futur époux, d'avoir ce que tant d'entre eux ont. Et je ne peux pas demeurer indifférent, face à toi. »
« Je n'en ai jamais été capable. Alice Hangbé, tu es la personne la plus frustrante que j'ai rencontrée, et j'ai gardé les mots derrière mes dents si longtemps qu'ils semblent en sortir au mauvais moment, mais ils sont sincères. Même si je t'effraie avec mon putain d'enthousiasme, mais bordel, à quoi t'attendais-tu de ma part? »,
« Je veux être le tien. Même si je le suis déjà. Je veux qu'on estampille le stupide document ensemble, et qu'on se sourie en secret lorsqu'on se croise dans les corridors, et t'appeler ma femme lorsque personne ne nous entendra. »
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Mer 22 Déc 2021 - 17:38
Homesick
Evan Wakefield
Let's go back to bed until we break it
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
C’était Trop. Bien sur que c’était trop, toujours trop. Trop faible, trop fort, trop lent, trop rapide, trop direct, trop compliqué, trop simple. Parce qu’ils ne faisaient rien autrement qu’entièrement, la demi-mesure en injure à la plénitude des caractères. Elle l’avait dardé d’un regard droit, la lame dans les prunelles, le coeur au bord des crocs saillants. L’avait laissé se raprocher, eux qui ne se fuyaient plus, se mettre à genoux, géant qui ployait pour mieux lui appartenir, et pourtant, même là, il ne semblait pas diminué, plutôt l’inverse. Un colosse aux mains dorées, au coeur d’argile, poterie délicate malmenée si souvent sur son tour, et qui pourtant ne s’était jamais laissé aller au cynisme, à la fatalité. Elle avait baissé la tête, un peu, comme il le faisait la plupart du temps. Guettait la réponse, craignant l’aveu, redoutant le mensonge encore plus.
« I can’t promise it has nothing to do with it, Love ».
Elle aurait pu se fâcher. L’Alice d’avant l’aurait fait, surement, monstre d’orgueil, créature fière, chimère de prétention au paraître aussi lustré que ses écailles. Quoi, comment, osait-il seulement croire qu’il en aurait le pouvoir, que par la seule force de ses sentiments, il saurait faire renaître en elle ce que seule, elle ne savait plus convoquer ? Rire de hyène, mouvement de tête, moquerie pour avilir l’affront. Il y aurait eu de tout ça dans le fiel coulant de ses crochets, dans son regard de limon et son menton fat.
Mais ça, c’était avait qu’il y ait un Nous. Alors à la place, il n’y avait que le silence, la caresse des regards qui s’emmêlent, qui puisent en l’autre la force de continuer. Continuer de parler, continuer d’écouter. (Come on and open up, open up my love). Poursuivre même si ça fait mal, s’acharner parce que ça vaut la peine, cette peine qui étreint la gorge du Calédonien dans ses aveux, confesse dont l’église se faisait au coeur de l’Americaine. Immobile, ainsi penchée vers lui, elle était la statue virginale et consolante, autant qu’elle se faisait Marie-Madeleine en convertie à la religion du sorcier, pêcheuse puis repentie, la plus tendre de ses apôtres. Elle ne répondait pas à chacune des questions, souvent rhétoriques, lui laissait la place de s’exprimer, de déverser tout ce qui semblait être contraint depuis trop longtemps en son for intérieur. Lacher les vannes, laisser la vague tout emporter, voir ce qui reste ensuite et le chérir plus que tout. Quand il eut terminé, ils n’avaient pas bougé ni l’un, ni l’autre. Lui, les bras levés, Elle les paumes le long des cuisses, le regard assombri par les longs cils qui projetaient leurs ombres sur ses joues, à contre-jour. Ça gonfle, entre les côtes, côté gauche, mais ça tambourine moins fort, enfin.
- I am not scared. Not because of you, never.
Elle avait murmuré, c’était presque un souffle, et malgré tout le tourment des vents contraires qui battaient en tempête dans ses poumons, elle souriait. Parce que c’était Evan, son Evan. Celui qui était trop. Celui dont l’intensité ne pourrait jamais menacer que ceux qui se sentaient trop petits pour le suivre dans ses délires rutilants. Elle n’avait pas besoin qu’il se fasse plus petit pour elle, c’était parce qu’il était plus inflammable que l’amadou qu’elle voulait que le brasier lèche ses plaies, qu’il consume tout et ne laisse aux autres. Il lui fallait qu’il soit grand, qu’il soit immense, pour que Famine ne puisse jamais se repaître tout à fait, qu’il ne puisse rentrer dans sa gueule en un seul morceau. Elle s’était penchée un peu, pris son visage en coupe dans ses mains. Leurs nez se touchèrent, les ailes se frôlaient en douceur, presque au ralenti. Et ce besoin, toujours, de se toucher, de se fondre en l’autre, l’épiderme aimanté qui ne saurait faire autrement.
- I love you Evan Wakefield. I trust you, And I can’t wait to be your wife.
Il n’y avait pas beaucoup de mots, ils étaient aussi rares qu’ils avaient été fleuve sur la langue du sorcier. Dans le dressing, sa robe de mariée l’attendait, ce n’était pas celle de la grande cérémonie, mais elle volerait, légère, dans les vents désertiques du sud de l’Espagne. Elle porterait le parfum d’une morte qui avait imaginé leur union avant même qu’ils en aient vu les contours. Elle savait qu’il aurait ceint au coeur son alliance précédente, et pourtant, il avait de la place pour elle, malgré tout. Il avait poussé les murs pour qu’elle puisse s’y lover, à son feu, à son bois.
- Let’s go. I’m ready.
Plus prête qu’elle ne s’était jamais crue prête à l’être, envers et contre tout. Avec Lui, elle serait prête à tout.
Made by Neon Demon
- traduction:
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Sam 25 Déc 2021 - 16:50
you are the reason,
06.08.2021.
i'd climb every mountain and swim every ocean
just to be with you and fix what I've broken
'cause I need you to see that you are the reason.
(mood) I am not scared. Not because of you, never. Dans le murmure de l’amphisbène, le Rossignol lâcha un soupir – un souffle, un seul, dans lequel se glissa une plainte. Douce, un aveu sans nécessité de nomenclature. La tension d’une vie entière semblait s’y être glissée. Toujours se savoir trop, et s’en être revendiqué pour mieux se protéger de ne pas être assez. I love you Evan Wakefield. I trust you, And I can’t wait to be your wife. Let’s go. I’m ready. Il l’avait embrassée, un baiser de fin du monde qui n’attendait que d’en créer de nouveaux. « Let me make a couple of calls first, firecracker », murmura l’Écossais contre sa bouche.
Le musicien s’était dépêché d’appeler Aedan, sans un iota de considération pour l’horaire du médicomage. L’esprit en ébullition et la voix chargée de liesse, il avait fait les cent pas dans la cuisine de l’appartement pendant qu’Alice ficelait son baluchon, s’exclamant avec entrain et expliquant à l’Irlandais que oui, il faudrait réquisitionner Rose. Et qu’elle pourrait même l’engueuler dans son gaélique le moins approprié eut égard à son éducation, mais que le Calédonien avait besoin d’eux. Le portable coincé entre l’oreille et le cou en une posture qui n’était pas sans rappeler son passé de soliste, le violoniste avait ponctué ses phrases de grands gestes, comme si son public à convaincre était le pire des réceptacles à ses arguments qui, au final, n’avaient pas véritablement besoin d’être si aiguisés. Car l’amitié était ancienne et solide, malgré la distance, malgré les nouvelles qui ne se faisaient bien plus éparses que lorsqu’ils partageaient tous deux un quotidien chargé de ricanements et de petites remontrances aux allures de serviettes roulées correctement (ou pas). Surtout, le secret devait rester entier – et il eut une pensée pour @Rosemarie Kaiser et Awa, qui trouveraient certainement le moyen de leur arracher toutes leurs jolies plumes de volatiles lorsqu’elles apprendraient la supercherie de leur mariage public (bien, bien plus tard, et à un âge avancé, espéra-t-il).
Un rendez-vous fut donné, au Ministère – car les départs en portoloin entre les capitales étaient fréquents, heureusement : nulle suspicion pour les quatre drilles tout sourire qui se rejoignirent à Londres pour mettre la main sur un pot de céramique poussiéreux qui se fondrait tout à fait dans le paysage de Madrid. En attente du couple, le cadet des Wakefield avait poursuivi son démarchage, bénissant l’esprit moderne de l’ami avec lequel il avait partagé les bancs universitaires, désormais docteur en droit magique ibérique comparé et avocat. « Albano, amigo, necessito un servicio y – oh bloody hell I can’t say it. Listen I’m getting married, yes yes it’s fantastic and absolutely last minute. Cordoba. Can you make it? Aye don’t you serve that bloody excuse of work to me, I know you like to cut early on Fridays. Fine, fine, give the phone to Emily and I’ll tell her what it is you used to do in our third year to get girls – well, fantastic. You’re an excellent friend. We’ll be there in … » et l’auror avait jeté un œil à l’heure, calcul mental du temps qu’il faudrait à Aedan et Rose pour les rejoindre, et tenta de se rappeler des horaires des portoloins de Londres. « Two hours, and we can get to Cordoba together. We’ve got two other people coming with us – you’ll remember them », annonça-t-il, décidé à ce que l’univers se plie à son optimisme enthousiaste.* * *
Parallélismes. Les murs aux teintes de sable, les rues étroites murmurant leur retour – la fois dernière, jeux de séduction et de pièges sans s’appartenir. Cordoba, témoin discrète entre les interstices sinueux des ruelles de la cité de rois. Du califat abreuvé de soleil ne demeurait que les tons d’ocre et de tadrart. Mélodie chantante du souvenir, la dernière fois, une vie auparavant, semblait-il – courir à deux sur les toits à la recherche d’un musicien perdu et de la nuit qu’ils passeraient ensemble ensuite. Toujours, les olives de la juderia, les pierres sèches gorgées de lumière, et le but qui leur avait paru si évident : la tour de l’horloge. Le sablier jamais atteint, lorsque l’Américaine s’était pressée contre lui, avait envahi ses lèvres, présage de prédestination, et le sourire à la bouche en lui susurrant « i’m not sorry » contre les lèvres. « I doubt you ever are », avait répliqué le Calédonien. La tour de l’horloge, demeurée hors de portée aux futurs promis, partis à la conquête de plaisirs bien différents que celui de fixer la ville en contre-bas.
Les voici pourtant, les cinq. Alice, parée de simplicité, tout comme son promis – car ils n’avaient rien à prouver au monde, ici, aucune marque de statut à apposer à autrui. On aurait pu le dire, qu’il ne s’agissait parfois que de beauté et de plaisirs visuels plutôt que d’une armada couturière dont chaque détail avait été savamment étudié pour faire passer des allégories que seuls les esprits subtils sauraient déchiffrer. Albano s’exécutait, célébrant habitué aux rites, et Evan ne l’écoutait que distraitement. Les cérulés de l’Écossais l’enlacèrent – elle et sa silhouette, son air teinté de certitude et d’appréhension à la fois. Tendrement, il lui pressa les doigts, tout sourire, avec une nuance dans le regard qu’elle saurait reconnaître – peut-être. Sans la nommer – une émotion qui ne s’évoquait que dans les périphrases. Un mélange de nostalgie, de goût de grenade et la senteur d’arbres aux branches-ogives. Son union passée, mariée à celle de son avenir. Un arôme d’été alors même que les vents d’août avaient charrié les effluves herbacés des canaux londoniens, avec en sous-note le goudron de la ville et les fruits étalés sur les échoppes de Limehouse. Évocation d’impressions de jours de semaine incarnés en sentiments plutôt qu’en grains de sable écoulés.
Crépuscule hebdomadaire, lorsque les étoiles se lèvent paresseusement, et que la langueur des jours s’accroche aux os et à la peau, l’envie de quitter les habits prosaïques de la routine pour mieux épouser les contours sinueux de l’impulsion – l’excitation de se retrouver en communauté, proximité étrangère pour mieux partager les moments. Vendredi spontané, juste assez pour s’emporter et chanter, peut-être, ricaner, beaucoup, se sentir las mais vivant. Et le lendemain, aux allures de conquête. Stratégie du plaisir à maximiser, les tenues savamment planifiées et le rituel de préparation millimétré au geste près. Samedi victorieux, à dépenser (son temps, sa vie, ses rires, son attention, son argent) sans compter.
Aucun vendredi impulsif, le corps charpenté d’épuisement,
l’âme refusant de gaspiller le temps,
Ni samedi ceinturé de gloire, la victoire au bord des lippes peintes de rouge,
Avec elle, tout cela, oui – la conquête, l’impulsion, le plaisir,
la gueule de bois à s’en fendre le crâne, mais surtout –
Aucun temps mort pour penser correctement ses mots – mais l’animal en était un de théâtre. Expansif et généreux de ses impressions, capable de discours tout juste assez planifiés à l’échelle des sentiments mais au verbiage improvisé. Lorsque Albano conclut le cérémonial, leur indiquant qu’ils pouvaient s’échanger leurs vœux, le Calédonien avança vers elle. Primesautier. Un peu plus, davantage encore, pour lui presser les mains entre les siennes, et contre son Cœur. L’obliger, cette fois, à lever les yeux, recevoir ses mots qui lui plongeraient dans la poitrine. « after we’ve roared and shouted our existence to the world, after everything quiets down, after the party’s over, and we’ve laughed until our ribs hurt. After our lips tense from laughing, and after our faces are sore from small annoyances, I promise to be your eternal Sunday. »
- traduction:
Je n'ai pas peur. Pas à cause de toi, jamais.
Je t'aime Evan Wakefield. Je te fais confiance. Et j'ai hâte d'être ton épouse. Allons-y. Je suis prête.
« Laisse-moi faire deux-trois appels d'abord, feu follet. »
« Albano, amigo, necessito un servicio y – oh bordel, j'y arrive pas. Écoute je me marie, oui oui c'est fantastique et absolument à la dernière minute. Cordoue. Peux-tu m'y rejoindre? Aye ne me sors pas ton excuse bidon de travail, je sais que tu finis toujours plus tôt les vendredis. Ok si c'est comme ça, passe le combiné à Emily et je lui dirai ce que tu faisais en troisième année à la fac pour séduire de charmantes demoiselles - eh, fantastique. T'es un excellent ami. On devrait arriver dans ... »
« Two hours, and we can get to Cordoba together. We’ve got two other people coming with us – you’ll remember them »* * *
« je ne suis pas désolée »
« je doute qu'il t'arrive de l'être »
« après que nous ayons rugi notre existence au monde, après que tout se soit calmé, lorsque la fête sera terminée et que nous aurons ri jusqu'à en avoir mal aux côtes. Après que nos lèvres soient tendues d'avoir trop rigolé, et après que nos visages aient mal de petits agacements, je jure d'être ton dimanche éternel. »
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Mar 28 Déc 2021 - 14:15
Homesick
Evan Wakefield
Let's go back to bed until we break it
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
I'm gonna love you for the rest of my life
Ooh, if you wanted to. (James Arthur)
Firecracker. Ça crépite dans son coeur, dans ses entrailles, alors que fébrile, elle enfourne le strict minimum de ses affaires dans un sac de voyage. Par delà la porte de la chambre, elle entend la voix d’Evan tonner comme un orage d’été, son rire qui déchire l’air comme un éclair éblouissant. Alors elle s’exhorte à ne pas trop penser, s’accrochant à la certitude que la folie était la seule chose logique à cet instant précis. La seule chose qu’elle ne pourrait pas vraiment regretter, alors qu’elle croisait son propre regard dans le miroir, une silhouette concentrée, mais droite, le menton à la perpendiculaire de sa nuque, la chevelure en auréole sauvage autour de son visage. Lionne. Elle s’offrit un sourire, timide, premier acte de complaisance envers sa personne depuis longtemps, puis arracha le sac de voyage du sol pour le porter à son épaule. Prête.
Elle avait vu la petite famille Walsh-Coldridge arriver de loin, dans le couloir de l’étage de la direction des transports du ministère britannique des transports magiques. Enfin, vu, elle l’avait surtout entendu, au travers de la colère coruscante d’une superbe blonde qui était venue percuter le torse de son futur conjoint d’un index accusateur et de sa voix de stentor, tornade des Highlands comme on en observe qu’une fois pas décade. N’était-il pas fou, vociférait Rose, de les prévenir si tard ? Avait-il seulement songé à la logistique de ses amis, à la clinique qu’ils avaient dû fermer à la hâte, laissant un simple mot sur la porte close, aux mensonges éhontés qu’ils avaient du service à l’arrache au père de Malachi et sa tante pour qu’ils le prennent, en plein milieu de la semaine, sans plus de cérémonie ? Ah, oui, aussi, elle n’avait pas eu le temps de prendre ses vitamines aussi si l’enfant qu’elle portait dans son ventre grandissait mal, naissait rachitique, elle le tiendrait personnellement responsable.
Finalement, elle n’avait fini qu’une fois le souffle court et l’empreinte de l’ongle marqué sur le torse de l’auror qui n’avait pas pu en placer une, pas une seule syllabe, et avait enlacé avec chaleur l’américaine qu’elle ne connaissait pourtant que par leur accointance commune avec la Mac Leoid cousine d’Evan. Mais puisque les amies des amies sont des amies… Rose lui avait pris la main, et sur le moment, Alice se demanda si elle ne prenait pas ses constantes, avant que le fonctionnaire ne leur indique d’un coup de sifflet strident qu’il était grand temps de venir se positionner autour du portoloin préparé pour eux. En quelques secondes, ils traversèrent plusieurs centaines de kilomètres, quittant la terre insulaire pour le sud de l’Europe et ses promesses nuptiales.
***
Elle avait laissé l’écossaise s’occuper de ses cheveux, avec une délicatesse et une maestria insoupçonnée. Dans la chambre qu’elles avaient de réservée pour une minuscule heure, le temps que l’officiant ne termine ses quelques préparatifs, la Coldrigde avait passé ses doigts fins le long de son front, avait ordonné sa chevelure, l’avait ointe d’une lotion dont elle ne connaissait pas la composition, mais qui la berçait d’odeurs de fleurs d’ici et d’argan. Elle s’était étonnée de l’aisance de la blonde, qui lui confia dans un petit sourire qu’en tant qu’ainée d’une sororité de six frangines, ce n’était pas quelques frisottis qui allaient lui donner du fil à retordre. D’une main de m
Elle s’était avancée dans sa robe de lin blanc, à peine plus élaborée que celle qu’elle avait arboré lors de leurs rencontres, quelques rues plus loin (une ère plus tôt). Elle avait vu les mouvements de tête d’Aedan, de celui qu’elle devinait être Albano, puis d’Evan, rayonnant dans sa tenue de musicien en goguette. Elle le trouva beau. Même si il avait été en guenilles, elle l’aurait trouvé beau, de toute façon. Le communiant l’avait invité à se positionner à sa gauche, en face du Caledonien, et comme elle ne savait pas quoi faire de ses mains, elle les avait nouées entre elles, plongeant son regard aux nuances chartreuses dans les prunelles célestes de ce dernier. Contrairement à lui, elle écouta religieusement les mots d’Albano, gorge nouée, chaque virgule, chaque intonation en engramme dans chaque cellule de son corps. Vibrant. Les mains un peu tremblantes dans celles du Wakefield quand il s’en était saisi, le menton frémissant alors qu’il se lançait dans ses vœux comme il savait prendre son envol, physique comme métaphorique. C’était superbe, doux, chaud, précieux … Hors de sa portée, presque. Evidemment, elle n’avait pas eu le temps de préparer quoi que ce soit, même si dans un coin de sa tête, il y avait bien quelques mots, qu’elle avait fantasmé sans jamais les assumer. Appartenant à une autre, une reine dont la couronne avait chu, mais oserait-elle la ramasser, et prendre la responsabilité de promesses guerrières et amoureuses, quitte à endosser la malédiction familiale ? Albano avait tourné la tête vers elle, lui souriant brièvement pour l’encourager à poursuivre, alors qu’elle battait des cils. Vite. Très vite. (Please don’t cry. Please don’t cry.)
« Ahem … I Know I am not your first love, but I want to be your last. I want to be your wife, your friend, your conselor and your family... »
Elle reprit sa respiration et, pour une fois, sentit le rouge lui monter aux joues, à mesure que son coeur s’emballer dans sa poitrine. Parce que ça y était, c’était le moment. Elle coula un regard presque égaré vers leurs témoins, et Rose, cette presque inconnue, qui lui souriait paisiblement, les doigts noués à ceux de son propre mari tout beau, tout neuf. (Everything gonna be fine). Alors elle inspira longuement. Expira. Laissa sa mémoire faire le reste, réminiscences d’un discours qu’elle avait trouvé dans un tiroir du bureau de sa mère, adolescente, qu’elle avait volé pour le garder contre son coeur, quand il manquait de bravoure. Oeuvre de sa mère, prêche nuptiale murmurée avant la naissance du premier des héritiers. Elle répéta, d’une voix plus ferme cette fois ci.
« .. I Will be your wife, your friend, your conselor and your family.
To our friends, May they acknowledge our home as a warm heart.
May they be confident about our generosity an loyalty toward them.
May they know their cubs are ours, on our family made of chosen ones.
To our ennemies, May the envy us, for being strong together.
May they threaten us, and break their spears on our walls.
May they fight against us, and wither in th face of our fury and rage.
Because we are unbent, we are one, now and forever »
( Fierté de ta mère. Bijou de ton père. Et pour ton époux, toujours, caresse et bouclier.)
Made by Neon Demon
- traduction:
Je sais que je ne suis pas ton premier amour, mais je veux être le dernier. Je veux être ton épouse, ton amie, ta conseillère, ta famille ...
... Je SERAI ton épouse, ton amie, ta conseillère, ta famille.
Pour nos amis, qu'ils reconnaissent dans notre foyer un âtre chaleureux.
Qu'ils sachent notre générosité et notre loyauté à leur égard.
Qu'ils sachent que leurs petits seront les nôtres, que notre famille est celle que nous avons choisi.
A nos ennemis, Puissent ils nous envier d'être si forts ensemble.
Puissent ils nous menacer, et briser leurs lances sur nos murs.
Puissent ils nous combattre, et blémir face à notre fury et notre rage,
Parce que nous sommes libres, parce que nous sommes un, maintenant et à jamais.
- InvitéInvité
Re: homesick (evalice xiv)
Dim 23 Jan 2022 - 14:50
a beautiful mess,
06.08.2021.
you've got the best of both worlds
you're the kind of girl who can take down a man, and lift him back up again
you are strong but you're needy, humble but you're greedy.
(mood) Les mains entre les siennes, et l’obliger à lever les yeux pour que ses vœux lui plongent en plein cœur. Avait senti les tremblements pour mieux lui sourire avant de prononcer ses mots sincères, lui avait pressé les doigts avec tendresse pour la rassurer, elle. Vit les perles dans son regard, les accepta sans les souhaiter – dans toute la vulnérabilité amoureuse que la jeune femme fuyait depuis des années. La trouva belle, la trouvait toujours belle, Alice, mais dans ce courage fervent, la trouva plus belle encore. Lorsque sa voix hésita, chutant là où elle se faisait d’ordinaire si vive, il eut envie de l’attirer à lui, mais demeura statique, attendant le courage de son Américaine. You’ve got this, love. Ses mots le percutèrent comme une déclaration guerrière et amoureuse comme elle seule en avait le secret – il ne comprit pas, car comment aurait-il pu savoir qu’il s’agissait de son héritage, qu’elle lui offrait? Un jour, le Calédonien saurait, et le souvenir s’enrichirait de nouvelles teintes peintes d’or et des mystérieux secrets qu’avait emporté Pearl Hangbé dans la tombe. Honoré de se voir offrir les mots les plus précieux de la reine décédée, il embrasserait les doigts de la sienne, et comprendrait comme seuls peuvent l’entendre ceux qui avaient perdu une mère trop tôt.
Pour l’instant, il ne disposait que d’une part de l’équation, et elle lui suffisait. Tellement, que lorsque la chute des vœux de sa fiancée (de son épouse. La sienne. La sienne. La sienne.) se fondit dans l’air sec du sommet de la tour de l’horloge, il s’empressa de l’embrasser avant même que leur célébrant n’ait pu procéder à l’autorisation protocolaire – Albano rigola doucement alors qu’Evan la saisissait par la taille, et le diable emporte les protestations qu’elle lui adressait parfois lorsqu’il lui retirait son équilibre gravitationnel. Ici, ils étaient le satellite de l’autre, éternellement, et il la fit tournoyer en l’air, manquant de faucher Aedan au passage, qui recula de quelques pas pendant que Rose essuyait un regard humide en couvrant son émotion de quelques jurons en gaélique comme quoi il avait failli assassiner son enfant à naître. Peu importait, les mariés, eux, rigolaient comme deux intrépides n’ayant pas encore eu le temps de reposer les pieds sur terre, et se fixaient comme seuls les impulsifs le faisaient – avec un éclat dans le fond du regard, une émotion de joie partagée dans les prunelles, une promesse d’éternel.* * *
Il était de ces existences qu’on refusait aux enfants bien-nés qui acceptaient leur noble lignage. Douceur et joie n’en étaient jamais proscrites, mais l’impulsivité, elle, se devait d’être méticuleusement mesurée à l’échelle des vies que leurs parents rêvaient pour eux et leur nom – et se vidait alors de son essence, car qui souhaitait être spontané tout en calculant les risques? De l’extérieur, la scène paraissait presque banale, aurait-on dit : six jeunes adultes aux âges avoisinant les trente, installés comme joyeux lurons de connivences étroites mutualisées par l’événement qui avait eu lieu au sommet de la tour de l’horloge.
Installés dans l’un des multiples restaurants de la ville, les Britanniques avaient fait protester à grands coups de véhémence Albano, qui avait gémi que dix-huit heures, c’était à peine l’heure pour émerger de la sieste et non pas un temps approprié pour manger. Emily, elle, lui avait plutôt décerné un sourire triomphant – car les habitudes chronotypées des îles au nord de la Manche et des Américains étaient plutôt similaires en la matière. Le fonctionnaire avait jeté les bras en l’air, avant de faire jurer aux convives que lorsqu’ils sortiraient danser pour fêter l’union matrimoniale, ils le feraient à une heure décente, et qu’il n’entendrait rien d’autre. L’ambiance n’était pas exactement tranquille – ils avaient au moins l’avantage de quelques touristes n’abandonnant pas leurs propres habitudes circadiennes au profit des traditions ibériques.
Un restaurant de quartier, sans prétention. Le groupe avait été installé à une table au boisé sombre et légèrement éraflé par le temps, les assiettes et les couverts d’enfants peu scrupuleux. Des bancs plutôt que des chaises, et leurs jambes se collaient toutes légèrement, au point où Emily fit éclater de rire la tablée en faisant remarquer à l’Écossais que c’était à elle qu’il frottait la jambe, et pas à Alice. Les coussins étaient confortables, et les plats partagés sans velléités territoriales autour de la table une fois que Rose s’était assurée de l’absence de certains ingrédients pour sa grossesse, et Evan avait même répété les ingrédients derrière, pour les apprendre (au cas où, vous savez). Face à eux, un mur était orné de photos d’employés de l’établissement – les anciens, les nouveaux, ceux qui ne partiraient peut-être jamais, car dans ce genre d’endroit, on s’incrustait jusque dans les craques du plancher de céramique usé.
L’impulsivité qu’on savoure. C’était tellement banal, certainement, de se les imaginer ainsi, mais Evan ressentait une impression de plénitude qu’il ne voulait pas gâcher par les mots. Une main posée à l’intérieur de la cuisse d’Alice, il échangeait des regards avec elle, des sourires et des éclats de rire face à certains roulements d’yeux vers le ciel qu’elle lui adressait lorsqu’il disait une bêtise (souvent) – mais elle souriait, l’amphisbène, comme elle n’avait pas souri depuis longtemps, et son cœur s’étreignait de la voir ainsi, avec lui. Dans ce monde tellement simple, en cette soirée volée qu’ils avaient choisi de s’offrir – pour se rappeler que quelque part, avant d’être des héritiers, ils étaient des individus à qui on n’avait jamais parfaitement permis de choisir.
Le médicomage et l’auror racontaient une anecdote de quidditch avec des souvenirs vastement différents du match, que Rose s’empressait de corriger avec un air maintes fois réservé au Calédonien – « you’re exaggerating like a fourteen year-old Wakefield, that game wasn’t even close and you know it. » et l’auror ricanait en retour, une main posée sur le cœur avec un air outré qu’il ne feignait qu’à moitié. « Rose Coldridge, out of all the terrible friends out there, you’re the worst. Will you let me impress my new wife in peace, bloody hell? », s'était plaint le Rossignol d’un ton de lamentation qui cherchait visiblement des appuis parmi l’assemblée – il n’en trouva aucun. Albano et Aedan avait levé les mains, hilares et annonçant leurs couleurs, et Emily et Alice s’étaient contentées de rire avec une nouvelle complicité que seuls les événements du genre pouvaient accélérer. « Right, I’m such a terrible friend that you’re going to be the godfather of my second child. » Un sourcil impérialement haussé, elle lui avait adressé un de ces airs dont elle avait le secret, mi-courroucé mi-taquin, avec un fond de tendresse qui se cachait loin (bien loin.) dans le regard. « W- what? » Bouche-bée. « You heard that right Wakefield, and if you don’t put me in your orchestra for your real fake wedding, consider this honor revoked! » Ému, amusé – hilare, le coeur tendre d’être parmi des amis et d’exister simplement avec eux, Evan avait soupiré. « Good gods woman, don’t snap at the godfather of your child, would you? »
Les heures s’étaient égrenées, les conversations allant de souvenirs d’études des cinq à une curiosité sincère pour les expériences d’Alice, avec une Emily entreprenante demandant à l’Américaine si les rumeurs sur la puissance de certaines prêtresses vaudou de Louisiane étaient avérées. Car sa propre expérience en terres d’Albion était teintée de ce multiculturalisme qui n’en portait le nom que pour refuser les différences et jamais pour en accueillir les fardeaux. Une sororité discrète s’était tissée entre elles, le genre qui survivrait à la distance et au manque de nouvelles, le genre qui trouverait des échos lorsqu’elles se reverraient, dans le futur lointain … ou au mariage princier qui les attendait en décembre. Emily et Albano adresseraient des œillades discrètes aux mariés, air de compérage discret avec le couple Irlandais à l’appui. Couple qui refusa l’invitation d’aller danser, avec pour prétexte l’enfant à venir et une journée de labeur grossièrement interrompue, n’est-ce pas Evan?
Le Calédonien avait adressé un regard interrogateur à son amphisbène, qui s’était laissée entrainer par l’énergie des trois autres et s’était laissée aller à abandonner ses hanches au rythme de la musique avec eux. Les bassins en ondulations rythmées, les genoux fléchis de l’un pour mieux accueillir les lèvres de l’autre, et ils s’étaient retrouvés – encore, ici, sur la piste de danse, là-haut, plus tard, seuls. Se délester du poids des vêtements et des miettes de lourdes attentes, encore, n’être qu’eux, ne s’appartenir qu’à eux. Nulle famille, nulles obligations professionnelles, nuls soupirants éconduits, nuls amis à qui faire plaisir, nulles attentes de statut. Qu’eux deux. Forever thine. Forever mine. Forever ours.and through timeless words in priceless pictures
we'll fly like birds not of this earth
and tides they turn and hearts disfigure
but that's no concern when we're wounded together
and we tore our dresses and stained our shirts
but it's nice today, oh the wait was so worth it.
- trad:
« t'exagères comme un gamin de 14 ans Wakefield, ce match n'était pas du tout serré et tu le sais. »
« Rose Coldridge, de tous mes amis nuls, franchement t'es la pire. Me laisserais-tu impressionner mon épouse en paix, bloody hell? »
« C'est vrai, je suis une amie tellement nulle que tu vas être le parrain de mon enfant. »
« Q-quoi? »
« Tu m'as bien entendue Wakefield, et si tu ne me places pas dans ton orchestre pour ton vrai faux mariage, considère que cet honneur sera révoqué! »
« Okok, déjà, ne parle pas comme ça au parrain de ton enfant, veux-tu? »
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