La manipulation est un art dans lequel peu de personnes excellent ft. @Emmy Robinson | 30.08.22

L’art d’entretenir des relations ne m’est pas étranger mais malheureusement, il m’est difficile. Il y a un fait que même moi je ne peux nier : je n’aime pas les autres. Je ne les supporte pas, eux et leur médiocrité. Quant à ma famille, je suis bien forcé de les supporter vu qu’ils sont de mon sang et qu’en cas de coup dur, c’est eux qui viendront à ma rescousse. Mais même cela me coûte énormément. Les sourires de façade, les accords mensongers et autres manigances que je dois présenter au quotidien sont plus épuisants qu’il n’y paraît. C’est une des raisons pour laquelle j’aime être seul au Manoir Muller. Dans ces conditions, je suis libre d’être moi-même et de faire ce qui me plaît. Malheureusement, c’est un luxe à caractère non-permanent et je dois faire avec. Pour ce qui est de ma fratrie, j’ai la chance de ne pas les côtoyer très souvent (au diable les dîners familiaux, ils auront ma peau un de ces jours !). Force est de constater cependant que dernièrement, l’un d’eux a tout particulièrement attiré mon attention. Bien sûr, il ne s’agit pas de Caël. Jamais ce rat ne parviendra à susciter la moindre étincelle d’intérêt chez moi… Calliope, quant à elle, n’a pas besoin de mon soutien pour être ambitieuse et parvenir à ses fins. Séléné n’existe presque pas à mes yeux, sauf lorsque j’ai besoin d’un souffre-douleur. Non, il s’agit d’Hélios. La part sombre que j’ai vue en lui s’avère plus que prometteuse et je me suis promis de l’exploiter à mon avantage, avant que mon idiot d’aîné n’en fasse une serpillère à moldu (à son image, donc). Hélios a bien trop de potentiel pour qu’il soit gâché à faire plaisir à des êtres inférieurs ! C’est donc sans surprise que j’ai cherché à passer du temps avec lui et que je l’ai félicité pour ses fiançailles typiques d’une noblesse qu’on ne trouve que dans les grandes familles de sang-pur. Verena n’est pas le choix vers lequel je me serais porté pour mon jeune frère. Si j’en crois ce que j’ai pu voir et entendre, elle est bien trop vorace et indomptable pour un homme aussi timide que lui. J’ai bien peur qu’il se fasse dévorer tout cru dans ce mariage mais je ne peux décemment pas y apporter une quelconque opposition. Ce serait mal vu et je n’aurais pas les arguments pour. S’allier à une famille autre que britannique est déjà bien assez regrettable comme cela et dans leur cas, cela s’excuse par leurs affiliations et engagements pour Grindelwald, ce que je respecte.

Régulièrement, donc, je passe le voir dans son appartement (pour lequel il est m’est difficile de ne pas faire une moue dégoûtée) afin de, petit à petit, le rallier à ma cause. Le fait qu’il accepte si souvent de me voir alors qu’il m’a évité pendant si longtemps est une preuve que l’espoir n’est pas mort et mon ambition n’en fait que grandir. Mais qui dit appartement dit voisins et je tombe forcément nez à nez avec certains spécimens qui me font grimacer. A commencer par les semi-vélanes et autres sang-mêlés qui se trouvent derrière la porte, de l’autre côté du couloir. La simple idée de leur existence me fait frissonner de dégoût.

Je pars bien vite ce jour-là après m’être entretenu avec Hélios sur diverses expériences botaniques à tester ensemble. D’une façon ou d’une autre, il faut que je parvienne à éloigner mon frère de Caël et pour cela, je veux lui prouver que nos conversations peuvent être plus intéressantes et fructueuses. A ma sortie, je tombe sur celle que je désigne comme “la sorcière désespérée qui suit Sasha partout où il va”. Elle a de la chance d’avoir un frère intéressant et d’être de sang-pur, sinon j’en aurais bien fait de l’engrais tant elle traîne constamment dans nos pattes.

« Bonjour » La politesse avant tout, apparemment on n’apprend pas ça chez les dévergondées. « En quoi est-ce si surprenant ? Mon frère vit ici, il est donc tout naturel de venir le saluer. Et toi ? Tu en as eu assez de ne rien obtenir de Sasha donc tu t’en prends à plus jeune maintenant ? »

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J’ai un sourire narquois à sa réponse car la mienne est toute trouvée. Elle s’est abaissée là où il faut et suffisamment bas pour que je puisse lui porter un sacré coup. Pas mortel, néanmoins, ce qui me chagrine un peu. J’imagine déjà sa tête se détacher du reste de son corps et un frisson de plaisir me parcourt. Malheureusement, il y a bien trop de passage là où nous sommes et Emmy est bien trop proche des Muller pour que je m’en prenne à elle ainsi à découvert. Cela attendra. Le moment opportun finira éventuellement par se présenter, j’en suis persuadé.

« Le contraire m’étonnerait, quand on te connaît. » Une chaudasse, voilà ce qu’elle est. À sauter sur tout ce qui bouge… Je ne comprends pas ces femmes et leur comportement malsain. Pense-t-elle vraiment qu’ouvrir ses jambes à tous les hommes passant près d’elle lui accordera les faveurs de qui que ce soit ? Elle ne fait que se dévaloriser. Mais il faut dire qu’elle n’a pas vraiment de valeur pour commencer… Sa base est faible. Voire inexistante.

« Étant donné que tu mentionnes le sujet, tu devrais venir nous rendre visite au Manoir, tiens ! J’ai quelques petits endroits à te montrer que tu devrais apprécier… » Elle ne saura provoquer ma colère. À la limite, je peux aisément lui démontrer du dégoût et du mépris. J’en ai à revendre. Il est facile à ces êtres inférieurs de me critiquer sur mon statut social mais je n’en ai que faire de leurs avis : ma vie me convient. J’ai un Manoir presque rien qu’à moi une grande partie de l’année tant mes parents sont en déplacement et plusieurs pièces qui me sont entièrement dédiées. Que ce soit chambre, bureau, cuisine ou atelier, mon autonomie est parfaite. Et puis les elfes de maison sont là pour me servir car telle est leur place, alors pourquoi ne pas en profiter ? Il faut être complètement stupide pour faire le contraire. Se croire au-dessus de toutes les règles, comme cette allumeuse de poisson rouge.

« Tu as bien raison. Au moins, là-bas, ce n’est pas truffé de vermines. Tu sais, celles avec lesquelles tu adores tant te rouler dans la fange… Je savais bien que nous pouvions nous entendre sur le sujet, Robinson ! Et comment va ton frère ? » Elle ne parviendra pas à me faire sentir coupable de quoi que ce soit ni à regretter mon style de vie. Je ne sais pas ce qu’elle s’imagine mais j’ai sûrement bien plus d’autonomie qu’elle. Après tout, je m’occupe seul d’enterrer mes propres cadavres sans me faire attraper… Peut-elle en dire autant, avec ses mains ridiculement petites et ses dents de poney ? Et qui est encore roux de nos jours ?

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Je lève les yeux au ciel. Emmy est exactement comme toutes les autres femmes : incapable de témoigner du moindre signe d’originalité. Dès qu’elles ont leurs petites humeurs et qu’elles veulent critiquer le sexe supérieur, un seul sujet leur vient en tête : faire mention de leurs virilités. C’est déplorable. N’a-t-elle donc aucune vraie forme d’intelligence ? N’est-elle pas capable de se démarquer de ses semblables et de trouver une répartie différente d’elles ? Pauvre petit mouton égaré, incapable de penser par elle-même…

« Mon dieu Robinson, est-ce là tout ce dont tu es capable… » J’en ris presque tellement c’est pathétique mais je ne peux décemment attendre rien d’une prostituée qui ne pense qu’avec ce qu’elle a entre ses jambes. Elle aurait pu chercher à attaquer mon intelligence ou ma réussite scolaire, mais elle a préféré se rabaisser elle-même en mentionnant la supposée taille d’un sexe qui n’importe personne, pas même moi. La seule chose petite qui se trouve ici, c’est elle. Et je ne parle pas de sa taille, mais de sa présence. De sa prestance. Elle est pauvre, sèche et fade. Il suffit de la regarder pour s’en rendre compte. Juste quelques secondes suffisent à faire le tour de sa personnalité et de se rendre compte qu’à l’intérieur de la coquille ne se trouve qu’un vide sidéral. Je la plains. Elle doit vivre chaque jour dans cette condition… Même mon elfe de maison a meilleure répartie qu’elle.

« Andrew, ton frère. Le seul être à peu près acceptable possédant votre ADN. Que devient-il ? » Mais elle ne semble pas disposée à répondre à ma question. C’est ainsi quand on est une coquille vide : on n’a rien à offrir, pas même de la conversation, aussi futile soit-elle. Elle cherche sûrement le moyen le plus rapide de se défiler parce qu’elle sait tout cela, au fond d’elle. Qu’elle n’est rien, qu’elle n’a rien et que tout ce qu’elle obtient, c’est grâce aux faveurs qu’elle accorde à ma famille. Une mendiante, voilà ce qu’elle est.

« Comme quoi ? Éclaire donc ma lanterne, Robinson ! Mon frère peut bien attendre deux minutes que tu répondes à ma question de façon polie et respectable, comme n’importe qui d’autre le ferait à ta place. Au lieu de faire la difficile, tu ferais mieux de me donner l’information que je souhaite recevoir et tu t’en iras encore plus vite. »

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C’est qu’il s’énerve, le petit chihuahua de poche ! Je dois bien admettre que ça me plaît beaucoup de la voir s’énerver autant pour pas grand-chose. Elle a vraiment une susceptibilité très forte et une capacité de maîtrise de ses émotions proche de zéro. Je me demande si cela lui arrive souvent de se donner ainsi en spectacle en public… C’est sûrement ce que toutes les femmes de son acabit font pour espérer glaner de l’attention auprès des autres. Bien sûr, c’est pathétique mais je l’ai déjà trop dit pour me répéter une fois de plus. Je la soupçonne même de s’en rendre compte et d’agir volontairement comme ça. Comme un volcan continuellement en éruption. C’est fascinant au début mais à force, il n’y a plus rien de nouveau. C’est lassant.

« Je ne fais que la conversation, Robinson ! » dis-je dans un sourire à son attention. Cette question sur son frère n’existe que pour la faire enrager et c’est tellement facile de la mettre dans cet état que c’en est presque regrettable. J’arrive souvent rapidement à mes fins mais là, j’ai battu un nouveau record de vitesse ! Je sais bien que ses rapports avec son aîné sont loin d’être amicaux et c’est là que le bas blesse. C’est le bon endroit où appuyer pour qu’elle soit hors d’elle. En vérité, je suis sûr que je ne ferais pas toutes ces choses qu’elle parviendrait quand même à se mettre dans cet état !

« Pourquoi tant de colère ? Tu devrais souffler un peu, ça te ferait du bien. Je n’ai jamais vu quelqu’un s’emporter de la sorte pour si peu. Tu ne crois pas que tu as des problèmes d’agressivité ? Cela se guérit, tu sais. Je suis sûr que mon cousin serait ravi de t’aider ! » Mon dieu que c’est bon. Je vois déjà son cerveau exploser et éparpiller le mur à côté de nous. Trop facile, je dirais même. Elle me donne tous les éléments pour agir alors pourquoi je m’en priverai ? Elle n’a qu’à apprendre à se contrôler. À être une femme digne qui ne joue pas l’épouvantail en pleine rue, comme une folle hystérique. Un peu d’électrochocs ne lui feraient pas de mal… Pourquoi a-t-on abandonné cette pratique sur les femmes, déjà ? Parfois, je me demande s’il ne faudrait pas la remettre à l’ordre du jour. Cela ferait des merveilles sur Emmy !

« Je dis ça pour ton bien. Cela doit attrister ton entourage de te voir aussi tendue. D’ailleurs, éclaire-moi à ce sujet : que représente Hélios pour toi ? »

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Pourquoi tout le monde finit éventuellement par prononcer ce mot face à moi ? Ce n’est pas comme si ça allait me vexer. Au contraire, les psychopathes sont fascinants dans leur méthodologie et leurs idéaux. Je prends ça comme un compliment de la part d’Emmy. Et puis, qui dit que je ne ressens pas d’émotion ? Elle ne m’a visiblement jamais vue en colère et tant mieux pour elle. Elle ne serait plus présente pour en parler si tel était le cas. Elle a raison néanmoins : j’ai beaucoup mieux et intéressant à faire qu’à discuter avec elle, sauf que c’est assez amusant pour que je retarde mon programme de quelques minutes. Elle me force la main en continuant de surenchérir à tout ce que je dis, que ce soit par ses mots ou ses émotions. Dernièrement, je n’ai que rarement pris le temps de manipuler mon entourage ou m’adonner à un peu de torture psychologique et cela me manque affreusement. Je ne fais que rattraper le temps perdu. J’ai un sourire à son attention car je sais que, parfois, il ne suffit que de cela pour les mettre mal à l’aise. Pourquoi sourit-il ? Qu’est-ce qu’il cache ? Dois-je m’inquiéter ? Un tourbillon de questions dont la course est sans fin. Sans me répondre, elle me renvoie ma question et c’est bien le seul pouvoir des faibles d’esprits dans son genre. La pauvre, elle n’a décidément pas grand-chose pour elle… Pas étonnant qu’elle ne soit même pas fiancée. Serait-ce de la jalousie dans le ton de sa voix ?

« Je crois que tu fais erreur, Emma. Tu ne fais que projeter en moi tes propres craintes. Hélios est jeune et déjà fiancée, alors que les rides marquent déjà ton visage et que personne ne semble disposé à vouloir s’engager durablement avec toi. Mais sois sans crainte : il y a de la place même pour les vieilles filles désormais ! Tu y trouveras ton compte. » C’est la société dans laquelle nous vivons désormais et je le déplore. Passées quarante ans sans mari ni famille de son cru, une femme devrait être tout simplement placée dans une maison avec ses semblables et ne plus se montrer en public. Quelle honte ! Je sais déjà que ces propos vont pousser sa colère à un tout autre niveau et qu’elle va défendre les droits de son sexe corps et âme. Elles le font de plus en plus, malheureusement. Cela ne m’inquiète pas, il faudra des millénaires avant que les femmes ne prennent une quelconque place dans notre société.

« Et pour ta gouverne, je ne peux pas être jaloux du statut de mon frère étant donné que je le partage. Je suis moi-même fiancé, donc pourquoi en ferais-je tout un drame ? Je viens simplement voir comment il se porte et s’il a avancé dans son travail botanique, ce que je faisais déjà bien avant qu’il ne soit fiancé. En pincerais-tu pour lui, à tout hasard ? » L’échange d’épouses peut encore se produire, même si leur père ne voit peut-être pas en Emmy la femme adéquate pour notre famille. Il y a bien une raison pour laquelle il est allé piocher parmi les familles d’Europe plutôt que d’aller voir chez les Robinson…

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La voilà, la petite histoire qu’elle se raconte pour se donner un genre dans son cercle social. Si je le pouvais, je ressentirais de la pitié pour Emma mais c’est loin d’être le cas. Son comportement est symptomatique de tout ce qui ne va pas dans notre société actuelle et à cause de qui ? Je vous le donne en mille : les moldus. Ils infectent tout par leur présence, par leur sang. Ils contaminent même sans avoir à toucher. Il leur suffit d’ouvrir la bouche pour que des idiotes et faibles d’esprit tels que la Robinson se fassent embrigader. Elle tente un nouveau tour de passe-passe en usant de mensonge mais on n’apprend pas au vieux singe à faire la grimace. Elle ne parvient même pas à être crédible. Tout est surjoué, surfait avec elle. Elle me donne envie de vomir.

« C’est bien aimable à toi de t’être dévouée ! Je savais qu’on pouvait compter sur les traînées pour s’atteler à la tâche. » Il ne cache même plus l’intitulé qu’il lui réserve vu que, de toute évidence, elle est fière de le porter. Elle ne vaut pas mieux que Verena, qui ne pense qu’à offrir son sexe qu’au plus offrant. Même pas au plus méritant, non. Juste celui qui aura eu le malheur de la regarder un peu trop longtemps. Je me demande ce qu’elles retirent d’un tel comportement. Si elles se sentent réellement libres de leurs actions ou si, au contraire, elles ne sont que les esclaves de leur physionomie, de leurs instincts. Elles n’ont pas de contrôle.

« Tu m’en vois sincèrement ravi, Emma. » C’est probablement la seule chose de vraie que je puisse lui dire : je n’ai aucun intérêt ni vocation à avoir une quelconque relation amoureuse. C’est d’un ennui total et surcoté, en plus de cela. Le simple fait qu’elle puisse penser que ça m’intéresse me fait ricaner car cela montre les limites de son esprit et de son ambition.

« Mais la prochaine fois, essaye au moins de paraître sensée. Surtout vu la situation dans laquelle sera bientôt ta famille… » C’est avec grande peine qu’il se retient de lui attraper la main pour la faire pourrir d’un sort informulé. Mais elle sait qu’en plus de ne pas mentir, j’ai mis le doigt sur quelque chose. Le vieux Robinson arrive à la fin du temps qui lui est imparti sur Terre. J’ai hâte de connaître le testament du vieux bougre concernant sa libertine de fille ! Cela promet d’être particulièrement amusant et je sais que je pourrais en rire avec son frère plutôt que les miens.

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Je la tiens. Il y a quelque chose de satisfaisant dans cette pensée, que je n’explique pas. Je la tiens. Elle se retourne et il ne suffit que de cela pour que je comprenne que j’ai gagné. Peu importe le jeu auquel nous jouons, les règles et les interdictions : à partir du moment où elle a exprimé une espèce d’intérêt, elle a perdu contre elle-même, contre sa volonté de me faire un pied-de-nez, de me faire croire que je ne suis qu’un moins que rien. Belle tentative mais avouons-le, cela ne marche pas souvent. Je garde le silence quelques instants, des secondes que je savoure en sachant que je connais une vérité qu’elle ignore encore. L’envie de la lui lancer à la figure sans plus de cérémonie dans le simple but de lui faire du mal, m’embrase et je dois me contenir pour en faire autrement.

« Voilà ce que l’on récolte à ignorer sa propre famille : l’incertitude. » Je ne suis pas un grand fan de certains membres de la mienne, mais dans le but de préserver les intérêts et les valeurs des Muller, il est essentiel que je me tienne au courant de la vie des uns et des autres, quand bien même cela m’horripile. Je sais où en est Caël dans sa vie de “couple”, Caliban et ses expérimentations, Calliope et son travail, Hélios et son ambition… Cela me coûte du temps qui ne sera jamais rattrapé, mais cet effort est essentiel. Emma, qui se pense meilleure que tout le monde, meilleure que moi, en est encore à faire la gamine pourrie gâtée qui boude dans son coin.

Je lie mes mains entre elles et la regarde patiemment, avec un brin de mépris que je ne sais effacer lorsque je porte les yeux sur un être inférieur. « Ton frère sera bientôt en charge des intérêts de la famille Robinson et c’est à lui que tu devras rendre des comptes. » Une façon détournée de lui annoncer que son paternel ne fera pas long feu. En tout cas, il ne passera sûrement pas le prochain hiver. La mort ne m’attriste pas, je la trouve même délectable dans sa beauté. Je sais parfaitement que ce n’est pas un avis partagé par la masse et si cela ne me gêne pas, je reste néanmoins prudent quant à ma façon de m’exprimer sur le sujet. Face à des personnes comme Emma ou Niamh, je n’ai aucun mal à dire que leurs corps est plus intéressant froid que chaud à mes yeux.

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Sa réaction est incroyablement fidèle à son niveau intellectuel, je me régale. Je vois dans ses yeux l’incertitude faire une longue chevauchée sauvage et la marteler de part en part. Je n’avais pas prévu d’être celui qui lui annoncerait la nouvelle. Je ne devrais même peut-être pas, pour ne pas déjouer les plans de mon ami. Cependant, il est bien trop satisfaisant de la voir gesticuler au bout de ma toile. À ses deux interrogations, je réponds par un silence plein de sous-entendus. Peut-être que oui, peut-être que non. Vivant ou mort, vrai ou faux… Elle ne peut pas le savoir. Je pourrais très bien lui mentir et c’est ce qu’elle se dit. Je la laisse gamberger suffisamment longtemps pour qu’elle change à nouveau d’avis. Et puis, finalement, je souris.

« Failli, tu es certaine ? Je crois plutôt que tu y crois. Pas parce que tu es stupide - ce qui est indéniable - mais parce que tu sais, au fond de toi, que c’est la vérité. » Je ne dis pas par là que son père est mort. Elle l’aurait su avant, j’imagine. Non, je parle de mon allégation précédente, selon laquelle son frère prendra tôt ou tard les rênes de l’entreprise ET de la famille Robinson, ce qui n’est pas trop tôt. Nous sommes plus d’un à le penser.

« S’il n’est pas mort, il ne tardera pas à l’être. Et de ce que j’en ai compris, tu es loin d’être dans ses petits papiers. Il est trop tard pour toi. » Même en y allant aujourd’hui, elle ne résoudra pas des mois, voire des années de coupure relationnelle avec les membres de sa famille. Andrew est le favori et c’est très bien ainsi. Il le sait, elle le sait et même moi, je le sais. Sa vie prendra bientôt un tout nouveau tournant et en tant que spectateur, j’ai hâte de voir cette représentation.

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Je lui fais savoir la vérité. Pure et dure, à laquelle elle ne croit pas, bien évidemment. J’aime tellement manipuler mon entourage qu’il devient difficile de me croire sur parole et Emma fait partie de ceux qui ne parviennent pas à donner du crédit à mes propos. Ce qui m’arrange. Cela crée ce genre de situation où je dis la vérité et qu’elle passe à côté, trop bête comme elle est. Entêtée et stupide, ce que je souligne à voix haute. L’adjectif n’a pas l’air de la gêner, peut-être parce que ce n’est pas la première fois qu’on lui fait la remarque ou qu’elle est assez lucide pour s’en rendre compte d’elle-même et qu’elle a embrassé cette facette de sa personnalité. Un trait typiquement féminin, si vous voulez mon avis. Mais là n’est pas le débat. Il est trop tard pour elle, c’est un fait. Je ricane car bourrée d’illusions comme elle est, elle ne se rend pas compte de ce qu’elle dit. De la réalité de la santé de son propre père.

« Depuis quand ne l’as-tu pas vu, au juste ? As-tu pris des nouvelles ? Qu’est-ce qui te permet de dire, aujourd’hui, avec cette certitude inébranlable, que ton père n’est pas malade ? Cette maladie ne date pas d’hier, Emma. Tu n’as juste pas fait attention à ce qui se passait sous ton nez, voilà tout. Il est mourant et tu ne peux rien y faire, ma pauvre. Ouvre les yeux, accepte la vérité pour ce qu’elle est. » Tu es foutue. Tu vas enfin rentrer dans les rangs. Quelqu’un de plus fort et ambitieux que ton papounet va prendre les rênes de la famille et te dresser comme tu aurais dû l’être depuis le début. Tous ces mots se lisent dans mon regard sans que je n’ai à les prononcer, ce qui n’est pas plus mal. Il n’y a pas toujours besoin de dire les choses pour qu’elles soient comprises. Mais faisant face à une cervelle de moineau, je ne peux rien garantir.

« Sasha ? Tu crois vraiment que Sasha t’aidera à te sortir de là ? Arrête tes illusions tout de suite. Tes si et tes peut-être. Tout cela est déjà en train d’arriver, tu as un train de retard ma pauvre. Andrew est prêt, la succession tout autant. Voilà des semaines qu’il se prépare alors que toi, tu ne penses qu’à te prostituer. On verra bien qui aura la meilleure stratégie au final. » Je ricane de nouveau face à elle, d’un air mauvais. « Et cesse de croire que toutes les lois vont dans ton sens car quand il s’agit des familles de sang pur, c’est loin d’être le cas. Mais j’imagine que le droit n’est pas ton point fort… Dommage pour toi que ton frère y accorde plus d’attention. Oh, oui, il m’a raconté la façon dont il allait te gérer. Tu vas t’éclater, je te le promets ! »

La manipulation est un art dans lequel peu de personnes excellent ft. @Emmy Robinson | 30.08.22

« Mes fantasmes ont au moins l’avantage d’être proches de la réalité, contrairement à d’autres… » Et je la regarde bien dans les yeux pour lui faire comprendre que les autres, c’est elle. Elle peut se bercer d’illusions tant qu’elle le souhaite, cela ne change en rien la réalité de la situation de sa famille. Son père est mourant, Andrew a pris toutes les dispositions nécessaires pour s’assurer une direction confortable et Emma, quant à elle, n’a rien prévu. Absolument rien. Elle erre comme une vulgaire catin et même en s’y prenant aujourd’hui, elle ne parviendra pas à changer le cours des choses. Donc qui se berce réellement d’illusions à cet instant ? Qui s’accroche à ses fantasmes ? Certainement pas moi.

« Oh, il viendra. Et cela risque d’être très divertissant. » Mais je n’en dis pas plus, pour ne pas révéler les plans de mon ami. Je ne lui ferai pas ce plaisir. Elle risque de vite déchanter, ma foi. À se prendre pour la Reine d’Angleterre, elle va vite se rendre compte qu’elle n’est pas grand chose, surtout dans cette famille. « Très mature » je réponds dans un sourire à son majeur tendu. On ne voit ça que dans les cours de récréation de primaire mais doit-on vraiment s’attendre à mieux de la part d’une femme comme elle ? Sûrement pas. Sur ce, je hausse les épaules et continue mon chemin. Je ne peux cacher un sourire satisfait. Mes journées deviennent plus radieuses lorsque j’ai l’opportunité de manipuler et martyriser un peu les autres, je ne peux le cacher. Concernant cet échange, je me sens à la fois victorieux et revigoré. Qui l’aurait cru ?