Ce n'était guère la première fois que Juliet quittait la moufette enchantée en étant passablement... contrariée. En réalité, le mot était faible, mais elle avait passer plus d'une heure à jouer poker face avec @Cataleya Blackthorn et elle avait du mal à laisser ses émotions remonter à la surface. Parce que si on y réfléchissait bien, Juliet était fu-rieuse. Et c'était bien rare pour celle qu'on appelait la douce Blackthorn.

Les nouvelles n'avaient pas été bonnes à entendre, encore moins quand c'était Quarta qui prenait pour le Chineur. Si elle pouvait en vouloir à sa presque soeur sur la forme -leurs capacités de communication s'étant étiolées avec les années- elle ne pouvait lui en vouloir sur le fond. Parce que même si c'était fort peu agréable, elle devait savoir.

Elle a transplané alors qu'elle deteste ça. Et quand elle pousse la porte de l'appartement qu'elle partage avec ses co-interne et un stupide loup, elle est bien contente de le voir avachi dans le canapé, un paquet de bonbons à la main. Mauvaise, comme elle peut rarement l'être, elle se fiche devant l'amérindien et lui donne un coup bien placé dans les côtes.

- T'es vraiment un énorme crétin, Wauters. T'attendais que je l'apprenne par le chineur ? Désolé pour toi, mais les nouvelles ont été plus rapides que prévu.

Les poings sur les hanches, les yeux habituellement azurés de la Blackthorn semblent plus foncés.

- Et n'essaye pas de faire de l'humour. Sinon je fais en sorte que ces côtes restent fracturés à jamais.

Je me sentais bof, pour changer. Comme à chaque fois, avant la pleine lune. Même si cette dernière n'était pas des plus facile pour ce mois. Je passais définitivement par toutes les émotions, de la rage à l'amour, de la crainte à la confiance. Et en cette veille de nuit merdique, j'étais pas au top de ma forme, force était de le reconnaitre. Même les bonbecs ne me permettaient pas d'éluder. Et face à la réalité de la situation, au désordre qu'était ma vie et au fait que depuis plusieurs mois, je pouvais oublier la Potion Tue-loup, je savais que ma nuit serait des plus chaotique.

Ce que je n'avais par contre pas prévu, c'est cette inhabituelle presque furie qui rentre dans la pièce. Sous les traits de mon amie. Qui êtes vous mademoiselle et qu'avez-vous fait de Juliet Blackthorn ? La question aurait été légitime, si à défaut d'être semi fiévreux, je comprenais de quoi elle me parlait.

Mais rien. Je ne comprenais rien. Comment aurais-je pu comprendre ? Quand je ne savais même pas de quoi elle parlait. Et qu'est-ce que le Chineur avait à voir avec tout ça ? Il y a un silence qui s'installe, alors que je réfléchis quoi dire pour le coup. Je n'avais, selon ses règles, pas le droit à l'humour si je ne voulais pas que mes cotes souffrent encore. Mais en même temps, je souffrais quand même en ce moment. Pouvait-on me faire subir plus ? J'en doutais. Mais coté humour, en réalité j'étais autant bloqué, puisque sans savoir le vrai sujet au fond, c'était compliqué.

Ju... J'sais pas... c'que tu racontes mais s'teup... pas les cotes.

Il est bien rare de voir la douce Blackthorn aussi en colère. La fureur se lit sur son visage, d'ailleurs. Ses sourcils se froncent sur son front trop lisse, son nez est marqué et ses yeux se sont assombris. Elle n'est pourtant pas de ceux qui pensent que la violence peut résoudre quoi que ce soit, mais sachant que le Wauters ne s'est pas empêché de l'être en rouant de coups son ex-petit-ami, elle ne retient pas sa fureur, allant même jusqu'à lui donner un coup là où elle savait que ça ferait mal.

"Ju... J'sais pas... c'que tu racontes mais s'teup... pas les cotes." Elle sait que la période du mois n'est pas celle préférée par l'Amérindien mais elle ne croit en rien sa plainte. Sa supplique par contre, celle d'épargner ses côtes, elle veut bien y croire. Il a vraiment l'air douloureux depuis qu'elle a balancé son petit poing sur le thorax de son ami.

- Tu te fous de moi ? Tu ne sais pas ce que je raconte ? Vraiment ?

D'une main blanchie, elle active sa manumagie et pose sa main sur son front pour en extraire un filament argenté. Elle visualise ce que Quarta lui a montré quelques heures plus tôt. Sur le souvenir, Jolan et Elio sont entrain de se battre et ils n'en sont pas qu'au début de leur altercation. Ils saignent tout les deux et ce n'est pas joli à voir.

Sans la moindre douceur, elle transfère le filament argenté contre le front du Cheyenne, lui occasionnant peut être un mal de crâne mais elle ne s'en formalisera pas. La culpabilité n'est pas dans son camps pour une fois.

- Je peux savoir pourquoi tu te bats avec mon ex ?

Dans le fond, elle sait. Mais elle veut l'entendre dire.

Finalement, t'aurais préféré qu'elle tape dans tes cotes. Parce que quelque part entre la fin de cette soirée, et ton retour à l'appartement, t'avais réussi à faire abstraction du qui, et du pourquoi. Faute à l'alcool ? Aux pseudos soin que tu avais pris dans l'une de tes planques de sdf ? Ce détail était quelque part, dans les tréfonds de ta mémoire. Mais t'avais réussi à l'oublier. Et alors qu'elle te le montre, que tu te vois toi et l'espagnol vous battre, tu l'entends se réveiller. Tu sens ton coeur s'accélérer comme si il savait.

ARRETES ! A mi-chemin entre la supplique et une autre forme de terreur, tu tentes de rompre le contact avec ce souvenir et ce qu'il réveille chez toi.

- Je peux savoir pourquoi tu te bats avec mon ex ? J'en sais rien Juliet... Tes mains se portent à ta tête à cause de la migraine qui s'annonce compliquée à gérer. Je te jure que c'est la vérité mais... Pourquoi ? Pourquoi t'étais-tu battu ? L'impression était à la fois horrible et dérangeante. Mais plus que tout, tu te demandais pourquoi tu ne t'en rappelais pas jusque maintenant. Pourquoi tu savais que tu t'étais battu, et pas avec qui.

Juliet, je savais même pas avec qui je me suis battu. Cette nuit là, je me rappelle surtout de... la suite. Les deux mots tombent, sans pour autant apporter de réponses. Ca n'a... aucun sens. Ton regard revient sur la blonde. Ju... Si je m'étais battu avec Elio, il... serait mort... Les mots sont passablement difficiles à prononcer, et pourtant t'en es persuadés. Le Cooper avait du finir très mal en point si tu t'étais battu avec, parce qu'autant que tu le connaisses, c'était pas un bagarreur. Juliet, il est où Elio ?

C'était à n'y rien comprendre. Cet air abruti que Jolan affiche sur son visage ne fait qu'attiser la colère de la Blackthorn dont les points se serrent toujours alors qu'il visualise le souvenir qu'elle lui impose. Et soudain, la souffrance et la supplique. Celle d'arrêter. Bien que furieuse, l'épine noire n'est pas cruelle. D'un geste brusque de la main, elle cesse le souvenir et l'assaille de questions.

Elle veut comprendre pourquoi ces abrutis se sont battus. Oui, parce qu'évidemment elle met Elio dans le même panier. Deux crétins. Qui avaient apparement évoqué son nom avant d'en arriver aux coups. De ça, elle n'avait guère de souvenirs puisque Cataleya n'avait pas entendu ce qui s'était dit. Juliet essayait encore qui s'agisse de racontards ni plus ni moins mais il fallait reconnaitre que cette hypothèse n'était pas à éliminer... Après tout, Elio était son ex-petit copain et Jolan était... Jolan.

"J'en sais rien Juliet...". Voila une réponse qui ne plu pas du tout à l'interne de médicomagie qui fronça les sourcils de plus belle. Il begaye vaguement quelques paroles mais rien de franchement cohérent et surtout rien qui ne vienne apaiser l'agressivité de la Blackthorn. Elle ne comprends même pas ce qu'il dit.

- De la suite !?

Parce qu'il y avait une suite ? C'était pas suffisant de rouer de coup Elio ? Ses poings se placent sur ses hanches alors qu'elle répond.

- Merci de t'inquiétier pour lui près de 48 heures plus tard... Comment veux tu que je saches où est-ce qu'il est ? Chez lui j'imagine ? Il va bien mais tu l'as salement amoché.

Jolan était le premier qu'elle attrapait, mais croyez le, elle va aussi finir par débouler chez le Cooper pour lui dire à quel point il est stupide.

Avec toi. La réponse sort, instinctivement à sa question, alors que ton esprit cogite encore sur le reste. Tu le sais, ce qui t'effraie au fond. Tu sais que tu en es capable, et tu redoutes de poser plus de questions. Mais t'a aussi besoin de savoir. T'a besoin d'entendre que tu l'as pas, lui aussi, tuer.

Alors tu demandes. Tu t'informes pour savoir où il est. Et la réponse t'inquiète dans un premier temps, pour te rassurer quand tu entends que tu l'as juste amoché. Tu soupires, rassuré et ne peut réprimé un Tu m'as fait peur qui ne passera peut-être pas bien, mais qui est sincère pour le coup.

Mais la réalité te rattrape plus doucement. Tes yeux, tu les a vu. Et si réellement tu l'as amoché... Juliet, à mon avis, tu vas pas aimer la suite mais... Comment le dire ? Comment l'affirmer sans prendre un réel risque ? Elio ne doit pas sortir de chez lui ce soir. Il faut qu'il s'enferme. Dis-moi que tu sais comment le contacter. Ta voix était presque tremblante pour le coup. Ju, écoute moi. Je suis pas sur mais... Ces derniers temps Akhela est compliqué. Je... J'sais pas comment te l'expliquer mais... J'ai peur qu'il ait marqué Elio. Et si c'est le cas et que j'arrives pas à m'enfermer correctement... C'était trop souvent arrivé ces derniers mois. Tu te réveillais, mais tu n'étais pas au bon endroit. Tu n'étais pas là où t'avais enfermé le loup.

Si j'y arrives pas et qu'Akhela croise Elio, ce sera pas beau à voir.

Etait-ce seulement raisonnable d'agir ainsi ? Probablement pas assez. Faut que je me tire d'ici. Faut que je l'enferme. Tu joignais le geste à la parole, commençant à rassembler tes affaires dans un sac pour partir. Elio serait content de te voir ainsi, mais ça, tu ne t'en rappelais pas.

Elle a franchement du croire à comprendre ce qu'elle entend. Elle se souvient parfaitement de la dernière nuit qu'ils ont passé ensemble. Elle se souvient du sang sur ses mains, de la douleur quand il l'avait porté. Mais elle n'imaginait pas que ces blessures puissent résulter d'une bagarre avec Elio Cooper. Il avait donc roué de coup son ex avant de coucher avec elle.

Merveilleux. Vraiment, merveilleux.

La main de Juliet a quitté sa hanche pour que quelques uns de ses doigts viennent se poser sur son front. Elle est épuisée moralement par cette histoire. Elle ferme les yeux un instant pour ne pas laisser la colère l'envahir complètement. Et puis elle n'était pas toute blanche dans cette histoire. C'était clairement elle qui avait réclamé ces câlins, gracieusement offerts par le Wauters. Parce qu'elle se sentait terriblement seule. Et perdue.

Et voila qu'elle l'était encore plus. Perdue et en colère.

Et la situation du Wauters ne va pas pour s'arranger. Elle se laisse tomber dans le fauteuil face à lui alors qu'il émet à demi-mot, puis carrément franchement, qu'Elio est menacé. Elle ne discute pas, la blondinette, elle saisit son téléphone portable pour envoyer un message à Elio. Et même un patronus, parce qu'on était jamais trop prudente. Sans trahir le secret de Jolan, elle se fait particulièrement insistante.

Elle lève les yeux alors que Jolan se lève précipitamment et commence à mettre ses affaires en vrac dans son sac. "Faut que je me tire d'ici. Faut que je l'enferme. " Elle entends parfaitement la panique dans sa voix et elle se lève d'un bond. C'est sa première transformation depuis qu'il est chez elle et ça serait mentir de dire que le stress ne la saisit pas.

- Où tu vas ?

Elle se lève et attrape également son sac, plongeant l'entiereté de son bras dedans. Elle touche mille et uns choses avant que ses doigts se referment sur la fiole ronde remplie de potion tue-loup faite avec James. Elle se place entre lui et la porte et lui met sous le nez la-dite mixture :

- N'oublie pas ça.

- Où tu vas ?

Tu l'entends cette question, mais impossible de répondre. Tu l'ignores, fais mine d'avoir rien entendu, parce que tu veux qu'elle soit en sécurité. Tu refuses qu'à un moment, elle vienne s'inquiéter de ton sort et prenne un risque inconsidéré. Ce ne serait pas la première à venir faire face à Akhela avec pour seule arme l'inconscience.

Terminant de rassembler le plus gros de tes affaires, tu prends le chemin de la porte. Oui, sans un au revoir spécialement. Pas que tu te complaises dans l'impolitesse mais tu dois te dépécher. Chaque seconde de gagner et une de plus où tu pourras tenter de l'enfermer. De le cadenasser un peu plus pour éviter tout problème. Mais alors que tu veux franchir la porte, la blonde s'interpose, te tendant une fiole.

- Ce n'est pas celle de Fraser, mais c'est mieux que rien.

Comment lui dire ? Comment l'avouer ?

Juliet, je... J'en ai bu aucune. Voila plusieurs jours qu'elle te couvait, te procurait cette potion qui pouvait te permettre de bloquer le loup, et par Merlin ce que tu aurais aimé pouvoir revenir en arrière pour prendre les six autres.

Tu te doutes qu'elle va t'en vouloir encore plus maintenant. Mais tu ne pouvais pas faire comme si de rien n'était. Ju, cette potion... J'en ai tellement essayé que je... j'en peux plus. En plus, l'aconit... chez moi, c'est super douloureux. En même temps, fallait reconnaitre que le but de cette potion n'était pas d'être un simple tonic. Si je buvais que celle-là, ça changerait rien pour être honnête. Sans les autres avant, c'est comme... je sais pas... teindre un seul de ses cheveux.

Elle ne sait pas exactement pourquoi elle veut savoir mais... Elle veut savoir. Elle a l'impression que c'est important pour elle, pour lui, qu'elle ait cette information. Elle a besoin d'avoir un semblant de contrôle. Elle voudrait pouvoir être utile. Elle voudrait pouvoir l'aider. Elle voudrait même pouvoir lui faire un câlin mais l'Amerindien s'agite tellement que ce n'est pas vraiment envisageable.

Elle sait pourquoi il ne réponds pas. Il a peur qu'elle le suive. Pourtant il a tort. Juliet est plutôt du genre prudente et elle a beau aimer tendrement le Wauters, jamais elle n'irait se jeter dans la gueule de son loup. Elle n'est pas stupide à ce point... Elle ne peut pas l'obliger à parler mais pour l'aider, elle sort la derniere fiole de la potion ue-loup qu'elle lui met sous le nez.

"Juliet, je... J'en ai bu aucune." Elle pensait que sa colère était partie mais après une seconde qui lui laissa laisser d'une douche glacée pendant laquelle Jolan pu baragouiner quelques explications pathétiques, celle-ci ressurgit violemment. Il essaye de lui expliquer que ça ne servira a rien qu'il ne boive que celle-ci parce que cet imbécile n'en avait bu aucune.

- Je sais comment fonctionne cette potion, imbécile, puisque c'est moi qui ait passé des heures à te la préparer !

De rage, elle lui balance la fiole et est presque étonnée de toucher torse de Jolan. La petite fiole s'écrase et se brise au sol, répendant la potion à l'odeur nauséabonne.

- Dégage maintenant ! Je veux plus te voir !

De nombreuses fois Jolan lui avait donné des raisons d'être en colère, mais c'était bien la première fois que la douce Blackthorn l'exprimait ainsi.

Elle savait. Et je savais qu'elle savait. Mais savoir et expérimenter son deux choses différentes. Je ne lui souhaitais cependant pas d'expérimenter un jour. De comprendre ce que ça pouvait faire.

Son énervement claque, et la fiole me touche avant même que je n'ai le temps de réagir. Je n'avais pas l'habitude de la voir ainsi, de l'entendre s'énerver de la sorte. J'entendais sa colère, mais malheureusement aussi les mots. Si j'arriverais à me souvenir de ce que voulait Elio ce soir là, j'aurais pu affirmer qu'il avait gagné. Mais ma préoccupation n'était pas à ma mémoire.

Okay. J'y vais.

Ma main se resserant sur les bretelles de mon sac, je comprenais la portée des mots que j'employais. Autant que les siens. Elle n'avait pas simplement demandé que je partes, mais avait demandé que je dégages. Alors je dégagerais.

Passant la porte, l'entendant claquer derrière moi, je m'arretais apres quelques pas pour me retourner et dire simplement : Prend soin de toi, Juliet. Et sortant mon téléphone, je prenais la seule décision qui s'imposait :

Allo Vic... Je suis dans la merde pour cette nuit. Tu penses que toi et Cook, vous pouvez m'aider ?