06 novembre 2003 ━ Naissance. Ma naissance, et l'année qui a suivi est peut être la période la plus longue que j’ai passé avec mes parents. Ils m’ont gardé une année entière avant de me poser sur le paillasson de Cressida -façon de parler, toutes les histoires ne commencent pas comme ça je vous rassure, d’ailleurs y’avait pas de lettre dans ma couverture. En fait ils sont venus déjeuner, et ont simplement oublié de me prendre en partant. J’ai conscience que vous êtes en train de vous demander ce qui les a motivé à m’abandonner ? Peut être des cornes qui avaient commencé à pousser sur mon front ? Non rien de tout ça… La réalité est toujours moins fun que la fiction hélas. Ils se veulent des esprits libres, sans attaches, sans maison, vivant de squat en squat. Sans parler sans doute des substances illicites… En réalité, je ne suis pas sûre que ça soit eux qui m’aient laissé là, c'est peut être Cressida qui leur a forcer la main. Une chose est sûre c’est un sujet qu’on aborde pas. Mais je ne les ai jamais réclamés non plus.

Pour le reste mon enfance s’est principalement déroulée dans la ménagerie. Une ménagerie en ruine, maintenue principalement par la magie, quelques rares donateurs, des amis de Cressida, et moi. C’était mon grand père qui en avait hérité et Cressida ne s’est jamais résolue à la vendre après sa mort. On a jamais eu d’argent, je n’ai jamais eu faim non plus, mais le peu qu’on avait il allait directement pour les animaux. Je ne lui en ai jamais voulu, j’ai toujours été plus heureuse avec eux, et avec Cressida qu’avec le reste du monde. Autant vous dire que mes vêtements étaient loin d'être neufs, tout comme mes livres d'écoles, mais par chance j'avais ceux de mes parents et les programmes scolaires n'ont pas tant évolué que ça...

Mes pouvoirs magiques se sont révélés un jour malheureux où je me suis fait attaquée dans la ménagerie par le crabe de feu de ma grand mère sur lequel j'ai déversé des litres d'eau sorti de la mate directement sur lui, il n'a jamais plus voulu m'approcher. Autant vous dire que ça m'a fait beaucoup rire mais moins ma grand mère qui m'a mise de corvée pour avoir failli noyer son bébé.

2013 ━ Entrée à Ilvermorny. Partir pour Ilvermorny a été difficile. Je n’ai pas pleuré, je suis simplement devenue exécrable. J’ai mis beaucoup de temps avant de me faire une place, avant de sortir de mes retranchements, et m’ouvrir à la possibilité d’avoir des amis, de faire partie d’un groupe. Heureusement le concept de meute ne m’était pas tout à fait inconnu. J’ai donc rejoint les oiseau-tonnerres et à l’instar de ses animaux, j’ai fait du bruit, de la lumière et des tempêtes.

A l’adolescence je n’étais pas des plus subtiles mais les choses ont fini par évoluer quand je me suis rendue compte que ce n’était pas la façon la plus maligne de parvenir à mes fins.  
Malgré la nécessité de ne pas rester seule, on ne peut pas dire que je sois devenue la personne la plus populaire, encore moins la plus aimée, mais j’ai rencontré quelques personnes importantes pour moi encore aujourd’hui. Pas forcément de manière positives vous me direz, mais ce n’est pas le cas de tous ceux qu’on rencontre, pas vrai ?

Dans ma tête les personnes faisant parties de mon entourage proche font parties d’une meute. Le principe est simple, personne ne peut toucher à ses gens-là, mais entre nous… ? Autorisation de se tirer dans les pattes si nécessaires. Après tout, tout le monde doit manger à sa faim, pas vrai ? Dans le tas de ceux qui en font parti à Ilvermorny, ils ne sont pas si nombreux, mais une personne sort du lot. Une personne qui m’est chère, et qui a fini par s’en aller à son tour, me laissant seule avec les affres de l’abandon à nouveau, des sentiments contradictoires à son égard, dont la colère. Elle est partie à Hungcalf m’offrant une ouverture pour la suivre, mais j’ai décidé de passer mon chemin. Les autres n’ont pas tarder à partir à la fin de leurs études pour voler de leurs propres ailes aussi.

2021 ━ Sortie d’Ilvermorny 8 années sont passées. Malgré les mauvais coups, les embrouilles dans lesquelles je me suis fourrée la plupart du temps seule, j’ai fini par passer sous l’aile de la professeure de soin aux créatures magiques. C’est elle qui m’a sauvée de plusieurs galères, et qui a fait en sorte que je ne m’enfonce pas totalement dans les méandres de mes mauvais travers, autrement dit la solitude et peut être un peu la paresse. Peut-être une des rares personnes que je ne voulais pas quitter, et qui a motivé mon désir de rester pour lui servir d’assistante au-delà de mes années d’étude. Là encore un petit problème d’ambition, de chercher à voir plus loin que ce qui est juste sous mon nez et facile à avoir. Il ne m'est pas arrivée de jouer les profs, mais mes activités principales quand j'étais étudiante consistait à préparer les activités en classe, notamment avec le matériel. Quand j'ai été engagée comme assistante, une grande partie de mon travail étais en plus de préparer les cours de nourrir les animaux et nettoyer les enclos, les commandes et livraison de nourrir et parfois même de capturer les créatures dans les plaines.

Toujours est-il que j’étais une bonne élève, le comportement n’était pas toujours digne d’un 5 étoiles, rarement en réalité, même si ma grand-mère m’a inculqué les bonnes manières, je n’ai pas toujours fait preuve de bonne volonté de ce côté-là. Je suis parvenue au bout de mes 8 années d’étude, allant par-delà les espérances de mes autres professeurs sans doute, des miennes aussi. Le fait est que je ne savais pas quoi faire d’autre que de continuer mes études alors que j’aurais pu tout stopper pour rentrer à Chicago et reprendre ma vie avec Cressida. Mais à Ilvermony j’avais plus de possibilités, davantage de liberté, ne pas simplement être cantonnée à la ménagerie. Comme quoi même l’oursonne mal débourrée pourrait finir par avoir quelques ambitions pour elle-même.

Un rebondissement auquel je ne m’étais pas attendue est venu chambouler tout mes plans. Ma chère bienfaitrice depuis toutes ses années prenant aussi ses valises pour partir ailleurs. Une autre école, pour suivre son mari en Asie et me laissant seule derrière avec un nouveau professeur. L’entente n’y étant pas, et le fait qu’il ne tienne pas compte de mes maigres qualifications pour accepter de travailler ensemble, je n’ai tenu que quelques mois avant de rentrer à Chicago.
Qu’elles étaient donc mes options à partir de ce moment-là ? Cressida voulait que je reste à la maison pour la ménagerie, pour la développer et peut être en faire quelque chose de bien, et de l’autre côté Fabiola m’avait toujours encouragée à continuer mes études. C’est elle qui a fini par envoyer des demandes pour moi devant mon incapacité à le faire seule à la suite des échanges qu’on a eu sur mon futur. Ne serait-ce pour qu’un jour je puisse suivre son exemple ? Pas sûre que je sois très bonne en prof. Mais au moins, elle pensait que grâce à ce que je pourrais apprendre ailleurs, je pourrais réellement m’occuper de la ménagerie. Ma confiance en moi pourrait m’étouffer quand il s’agit de tout sauf de prendre des décisions importantes pour lesquelles je suis souvent poussée ou quand je me retrouve acculée.

J’ai tergiversé. Longtemps. J’ai été acceptée à Hungcalf, la seule université qui avait un sens réel pour moi ayant tant entendu des personnes importantes pour moi y aller, avec un géant « oui mais ». Ne serait-ce que le manque de fond, l’attribution d’une bourse, la nécessité de travailler. Autant dire que le oui mais ne venait pas de l’académie mais de moi seule et d’une capacité de self-sabotage que je ne me connaissais pas jusqu’à lors. Beaucoup trop d’éléments qui pourraient rapidement faire que la balance penche du mauvais côté. Je vous l’ai déjà dit, l’ambition n’a jamais été une de mes plus grandes qualités, sauf que j’étais arrivée au bout du cycle, au bout de mes options, et rentrer à chicago n’était pas celle qui me bottait le plus en attendant de trouver mieux. La peur peut être une grande source de motivation, celle de finir comme ma grand-mère. Risible ? Peut-être. Toujours est-il que j’avais fini par comprendre que ce n’était pas ça que je voulais pour moi, je voulais plus, être capable de vivre pour moi, pas complètement seule et isolée dans cette maison, aller plus loin qu’elle ne l’avait jamais été dans une passion qu’elle m’a elle-même transmise. Après réflexion ce n’était peut être pas tout à fait stupide de vouloir reprendre le flambeau, mais avec des clefs en main, des connaissances plus précises que celles acquises jusqu’à lors. J’ai mis à profit le temps qu’il me restait à Ilvermony pour me renseigner, chercher et arriver à détailler pour moi un plan réalisable sur les 3 prochaines années permettant d’avoir un bagage utile.

2024 ━ Arrivée à Inverness
Du coup c’est en toute conscience que les cartes sont dans ma main que je finis par débarquer, une petite valise en main, le contact de l’ami de ma prof pour essayer d’avoir du travail dans sa boutique, et une chambre à Hungcalf.