- InvitéInvité
everleigh ㄨ the sun, the moon, the truth
Jeu 13 Avr 2017 - 0:04
everleigh & gideon
the sun, the moon, the truth
Articulations lourdes, cernes sous les yeux, les nerfs à vif. La pleine lune approche et chaque mois te met dans un état léthargique. Après la pire nuit du mois, la situation est encore plus exécrable. Tu as appris à faire avec depuis les années, Gideon. À appréhender la fatigue, les douleurs; à apprivoiser ton tempérament et ta patience qui se fait discrète face à ton irritabilité. Depuis le temps, effectivement, tout cela fait partie de ton quotidien. Rien n'en est plus facile, cependant. Chaque mois, c'est le même combat. Le même rituel. Pour te cacher. Pour éviter qu'on découvre ce que tu es en réalité. Pour éviter que tu fasses du mal à qui que ce soit, aussi. Surtout. Pourtant, après ton... Accident, tu n'as jamais ressenti ce que cela faisait d'être un véritable loup-garou. Non, jamais. Tes parents ont pris les choses en main, une main de chef, tu dois le reconnaître. Tu as eu droit, depuis presque sept ans, à une potion tue-loup qui empêche que tu te transformes en monstre sanguinaire dénué d'humanité. Tu leur en es reconnaissant, Gid. Cette situation est déjà assez atroce comme ça, tu n'oses pas imaginer ce que cela aurait pu donner si tu perdais total contrôle de toi.
Depuis l'époque de Poudlard, encore maintenant à Hungcalf, c'est le professeur de potions qui s'occupe de toi. Évidemment. Toi, tu n'as pas ce cours en options (d'ailleurs, tu n'es absolument pas doué avec un chaudron), alors tu t'en remets aux compétences du professeur en question. Ils sont presque tous au courant, dans le corps professoral, de toute façon. Cela fait deux ans que c'est Calgarry qui s'occupe de toi. Tu ne la connais pas beaucoup, puisque tu ne suis pas son cours. De ce que tu la fréquentes, elle n'a pas l'air antipathique. Tu ne la connais pas, mais tu l'apprécies. Contrairement aux autres enseignants que tu as pu fréquenter, elle ne te pose pas de questions déplacées. Elle se contente de te donner ta potion, la Calgarry, d'échanger une parole ou l'autre si tu en ressens le besoin. Mais elle ne te presse pas, elle ne t'embête pas. Il y a du respect entre vous et c'est revigorant.
D'ailleurs, tu t'apprêtes à aller la voir. La potion, tu dois la prendre une semaine avant la pleine lune sinon... Enfin, tu n'as même pas envie de penser à ce qu'il arriverait, si tu ne la prenais pas. Tu étais dans ton lit en attendant que la nuit soit avancée, puis tu te relèves en tentant de ne pas faire trop de bruit. Ce n'est pas que tu n'as pas envie que tes compagnons de dortoir ne te voient pas t'éclipser : tu t'en fiches. Tu as vingt-trois ans et si tu veux quitter ton lit en pleine nuit, tu n'as de compte à rendre à personne. Ils pensent sûrement, de toute façon, que tu vas rejoindre ta copine ou que tu as encore préparé un coup fourré avec ta bande. Ils ne sont pas chiants, ils ne vont pas te poser de questions. Tu caches un ricanement sous ta barbe. Si seulement ils savaient.
Non, tu te soustrais discrètement à la chambre par souci de ne pas les réveiller, tout simplement. Tu chausses tout de même tes chaussures et passes un pull sur tes épaules avant de descendre. C'est que là où se trouve le bureau de Calgarry, ce sont les anciennes caves de l'université. Il y fait un froid de canard et tu détestes y descendre. Il fait sombre et l'odeur de l'humidité est un souvenir indissociable du goût de la potion, alors ça te fait toujours bizarre de t'y rendre.
Tu t'avances dans le couloir à peine éclairé, jusqu'à la salle de cours en question. Tu y pénètres comme à l'accoutumée, cependant, Calgarry ne s'y trouve pas. Ça te fait froncer les sourcils, car elle est d'habitude plutôt ponctuelle et qu'elle se trouve déjà là, quand tu débarques. Ou bien... Aurait-elle oublié votre rendez-vous mensuel ? Tu espères que non.
- Miss Calgarry ?, tu lances à l'aveugle, comme une question posée à la pièce vide. Tu fais une moue, mais t'avances tout de même à l'intérieur. Peut-être va-t-elle finir par arriver. C'est à ce moment-là que tes yeux remarquent un filet de lumière, filtrant sous une porte à l'autre bout de la classe. Sûrement son bureau. Tu t'y diriges, tu entends un peu d'agitation derrière la porte, Gideon, elle doit sans aucun doute être là.
Tu passes un œil par l’entrebâillement de la porte, juste pour t'assurer que tu n'interromps rien. Elle est là, la prof de potions, à s'affairer devant un chaudron. Tu reconnais la mixture qu'elle contient, les petits bouillonnements familiers. Chouette, elle ne t'a pas oublié. T'en soupirerais presque de soulagement. Tu t'apprêtes à frapper à la porte pour marquer ta présence, mais suspends ton geste en pleine action. Calgarry plonge une fiole à l'intérieur, la ressort, l'observe un instant avant de l'ingurgiter. Tu en restes sans voix, pour le coup. Impossible qu'il s'agisse d'une autre potion : tu ne la connais que trop bien et sais parfaitement la reconnaître, même si ce n'est pas ta matière de prédilection. Ce qui veut dire que... Elle aussi, c'en est une. Sinon pourquoi en aurait-elle pris ? Malgré toi, tu serres les dents. Tu ne saurais expliquer pourquoi, mais ce détail - qui est loin d'en être est - ne te ravit absolument pas. Tu as besoin d'explications. Sans plus t'effacer, tu fais grincer la porte sur ses gonds alors que tu la pousses de ta paume pour l'ouvrir, attirant l'attention du professeur. Elle sait que tu sais. Et un silence lourd de sens s'installe entre vous.