Juliet avait le coeur au bord de lèvres depuis plusieurs jours. Chaque matin, au réveil, elle se rappelait et elle regrettait de ne pas pouvoir rester éternellement dans les bras de morphée. Endormie, elle ne souffrait plus, elle ne se souvenait plus, elle oubliait le fiasco total de ses fiançailles et elle oubliait la trahison de sa propre famille. Elle avait envie de disparaitre, de ne plus voir les regards désespérés qui se posaient sur elle, de ne plus voir les gens qui parlaient à voix basse en la regardant traverser les couloirs.

Juliet se réveillait souvent sans plus savoir quoi faire. Elle avait bien envie de se planquer ici éternellement. Elle appréhendait même de descendre à la salle commune et d’y croiser @Maximilien Leroy . Elle n’avait même pas l’excuse des examens pour se terrer quelque-part et réviser, les cours reprenaient avec une lenteur incroyable… Elle avait besoin de s’occuper l’esprit, ne plus penser à sa petite personne… Elle avait supplié le Docteur @Kashmiri Sanahuja de lui accorder quelques gardes le week-end…

Elle était de garde à Saint Mangoust quand @Grace de Launay l’avait appelée en larme pour lui dire que @Victor De Launay était hospitalisé quelques étages en dessous du sien. Son meilleur ami dans le coma, la jeune femme avait fait jouer sa blouse pour pouvoir aller le voir malgré le fait qu’il soit en unité de soins intensifs. Morte d’inquiétude, elle avait prit congés et avait passé le reste de la nuit à veiller son ami d’enfance…

Voila deux jours qu’il était réveillé. C’est Jennifer qui lui avait apprit la nouvelle, non sans oublier de préciser qu’il était partiellement atteint d’amnésie. Elle avait longtemps interrogé son mentor pour comprendre les raisons de cette affection et avait laissé la famille De Launay visiter Victor avant d’elle même le rejoindre sur sa pause du midi… Il semblait somnoler quand elle arriva. En temps normal, elle se serait sûrement assise sur le lit pour l’enlacer mais compte tenu des circonstances, elle préféra entrer doucement dans le chambre et l’interpeller :

- Victor ?

J'étais calmé, limite assommé. La dose de sédatif qu'ils m'avaient injecté cette fois était plus forte, en raison de ma crise. J'avais perdu, l'espace d'un instant, toute conscience. Et j'avais réagi semble-t-il. Comme si mon corps avait décidé de se défendre lui-même face à une agression, comme si il en avait ressenti le besoin. Et il n'y avait, je le savais, rien de pire qu'une magie incontrôlé. J'avais fait du mal autour de moi une nouvelle fois, et j'avais été maîtrisé.

Résultat : un magnifique bracelet de l’hôpital, un départ en chambre reporté et un sédatif pour me calmer, pour calmer les douleurs présentes dans mon corps, de nouvelles sangles pour me maintenir dans mon lit, docile. Mais mes rêves n'étaient pas plus serein à dire vrai. Lorsque je fermais les yeux, mon inconscient prenait le relais et m'effrayait. La première nuit, je m'étais revu nettement, à sept ans, alors que j'affrontais pour la première fois de ma vie un épouvantard. Mais maintenant, mes rêves étaient plus flous, plus fébriles. Il y avait ces images, ces flashs qui ne voulaient rien dire et dont je ne me rappelais jamais une fois réveiller. Il y avait ce noir omniprésent, néant qui m'entourait tout en se refermant. Et parfois cette chevelure, blonde, dorée, qui s'éloignait.

- Victor ?

Voix qui m'attire, tel un écho dans ce rêve, dans ces méandres de mes souvenirs, j'ouvre les yeux dans la pénombre de la pièce, les stores ayant été rabaissés. La vision encore trouble, ma tête pivote sur l'oreiller pour chercher l'origine du bruit, de l'appel de mon nom jusqu'à apercevoir une silhouette à la porte. Une ombre pour le moment, et cette chevelure blonde.

"Ho... Holly. C'est... C'est toi ?"

Le coeur de la jeune Blackthorn se serra tandis qu'elle revoyait son ami dans ce lit d'hôpital. Victor était aussi blanc que le linge de lit, ou presque... Il avait de terribles cernes sous les yeux et ses cheveux en bataille lui donnait l'air d'un marathonien en fin de course. Ses traits étaient tirés par la douleur et Juliet en aurait surement eut les larmes aux yeux si son stage à l'hôpital ne l'avait pas un petit peu endurcie... Oui, elle avait vu pire mais là c'était son ami et elle aurait tout donner pour que Victor guérisse à l'instant. Douce, la jeune femme l'appelle alors qu'elle est à peine rentrée dans la chambre, pour le prévenir, pour ne pas le surprendre...

Son visage se tourne vers elle, affichant plus évidemment encore les stigmates du sort qui l'a gravement blessé. La blonde se mord les lèvres tant le De Launay semble souffrir. Les yeux à peine ouvert, il semble pourtant se rendre compte de sa présence. Enfin... d'une présence plutôt... pas la sienne. Il appelle @Holly De Launay . La jeune femme est à deux doigts de prendre son téléphone pour appeler sa soeur puisque c'est elle qui semble attendre... Finalement, elle prend son courage à deux mains et s'approche de Victor.

- Ce n'est pas Holly, c'est Juliet. Est-ce que tu veux que j'appelle ta soeur ? Ou ta mère ?

Elle s'approche doucement de son ami et constate avec effroi qu'il est sanglé au lit. Travaillant depuis plusieurs semaine au sein du service de psychomagie, en secteur fermé, elle sait ce que cela signifie... Soit Victor a été considéré comme un danger pour lui même, soit il a été considéré comme un danger pour ceux qui le soignent ou lui rendent visite. Lentement, la jeune femme rejoint le lit et y pose une fesse, elle prend la main froide de son ami dans les siennes, douces et chaudes, attendant qu'il reprenne d'avantage ses esprit pour pouvoir lui répondre.

"Juliet..."

Je ne l'aurais pas reconnu ainsi, directement. "Attends..." Je voulais pas qu'elle parte. Mais ce disant, je tentais de relever une main, qui se retrouva bloquer par ces sangles. Ces fichus menottes de cuir, sur lesquelles mon esprit enragea un instant. "Approche, s'il te plait..." Que je te vois mieux, que je t'apercoives clairement, que je vois celle que tu es devenue. Mon amie de toujours, présente pour autant que je me souvienne dans les bons comme les mauvais moments. L'unique Blackthorn que je respectes pour sa gentillesse.

"T'a changé..."

Je dis ça, mais mon souvenir remontait à quatre ans. Peut-être que je l'avais vu changer, connu au cours de ce changement, et pourtant, rien ne restait présent dans mon esprit à ce sujet. Mais de si près, je savais, comprenais, pourquoi je l'avais confondu.

"T'es ravissante."

Compliment sincère, ce n'était pas pour rien que je l'avais cru Vélane il y a une seconde. On aurait clairement pu s'y méprendre. Mais peut-être au fond n'était-ce que moi, sous le coup de mon anesthésie. Désireux d'en savoir plus, je l'interrogeais alors : "Qu'est-ce que tu deviens ?" avant de remarquer sa blouse et de ponctuer : "Tu bosses ici ?"

Juliet s'était installée auprès de son ami alors que celui-ci le lui avait demandé avec une voix que la jeune femme ne reconnu pas. Victor c'était celui qui parfait fort, qui parlait avec entrain, qui avait la vie dans sa voix. La il parlait d'un voix faible, fatiguée... Son visage était marqué également et elle ne pouvait s'empêcher de jeter un œil malheureux sur les sangles qui le retenaient allongé sur le lit. Elle prit sa main aussitôt, comme pour lui dire qu'elle était là pour lui, qu'elle n'avait pas peur, qu'elle était en confiance à ses côtés.

Elle eut un pauvre sourire tandis qu'il lui disait qu'elle avait changé. Grace avait expliqué à la cadette Blackthorn que son jumeau avait oublié quatre années de sa vie. Amnésie rétrograde post traumatique... l'étudiante en médecine qu'était Juliet était inquiète mais pas tant que ça. La plus part des patients finissaient par retrouver la mémoire petit à petit. Mais cela voulait dire que le choc qui l'avait traversé était infiniment plus important que ce qu'elle avait pu penser.

Victor ne savait pas à quel point il avait raison... S'il ne souvenait que de la Juliet d'il y a quatre an, alors oui, elle avait changé... Elle avait prit quelques centimètres et son visage s'était encore affiné du à une croissance tardive. Elle se maquillait et avait legerement eclaircit ses cheveux. Elle n'était plus la collègienne quasi transparente mais une jeune future médecin qui avait connu quelques déboire amoureux recemment... Elle sourit plus sincèrement cette fois tandis qu'il lui disait qu'elle était ravissante, le compliment atteignant directement son petit cœur blessé.

- Tu as changé aussi...

Elle se pencha pour replacer quelques mèches de cheveux sur son front afin de dégager le regard du De Launey. Geste affectueux et naturel qu'elle avait fait si souvent, mais cette fois elle était la seule à pouvoir le faire, son ami étant entravé. Il avait changé... En quelques mois il avait le visage plus marqué et l'accident lui avait laissé de vilaines égratinures... Il était toujours beau, évidemment, mais elle n'eut pas le temps de lui répondre qu'il l'interrogea sur ce qu'elle devenait. Il n'était pas difficile de deviner qu'elle travaillait ici.

- J'ai eut mes ASPICS et j'ai été prise en médicomagie à Hungcalf. Je suis en troisième année et je suis en stage au sein du service de psychomagie de l'hopital, oui.

Elle sourit et demanda :

- Comment tu te sens ?

J'ai changé ? Peut-être. Surement. J'arrives à le croire parce que ça vient d'elle, amie précieuse que je n'ai pas oublié. Alors qu'elle s'installe, je la détaille un peu plus, affirmant qu'elle est radieuse. Et c'est le cas. Petite soeur de coeur que j'ai toujours appréciée, affectionné, pour sa générosité et sa joie de vivre, je me rends compte que je suis heureux qu'elle soit assise là, qu'elle soit la.

Elle a eu ses aspics. Je ne suis pas surpris. Pas plus que je ne le suis de son choix de cursus. Est-ce réellement son choix ? Peut-être pas. Il est plus que probable que ses parents, sa famille, l'ait poussé dans cette direction, mais je l'imagine bien en médecin. Peut-être parce qu'elle est devant moi, en blouse, et que je dois reconnaitre que ça lui va très bien. Ou peut-être parce qu'elle s'appelle Juliet Blackthorn, et que je lui connais un grand coeur, et qu'un avenir altruiste lui colle à la peau, la parant d'une beauté d'âme tellement supérieure à celle que peuvent afficher d'autres.

Troisième année à hungcalf. Bien que je sache quelque part que je suis amnésique, l'information me semble lourde. J'ai raté tant que ça. Voila l'idée qui se dessine dans mon esprit un instant. Je me sentais coupable, comme si j'avais disparu moi-même de leur vie pendant tout ce temps. Je ne savais même pas si j'avais été là, présent pour eux. Je...  - Comment tu te sens ?
La question me fait relever le regard vers elle, respiration à la fois lente et profonde. Que puis-je répondre ? Quelle réponse serait la plus honnête ? Ma main trouve la sienne dans un geste affectif presque mécanique alors que j'entame ma réponse : "Epuisé. Vidé." Pas de sa présence, bien au contraire. Ma réponse en appelle plus à mes actes. C'était comme si une part de moi s'en était allé, comme si j'avais lutté pour la retenir jusqu'à l'épuisement, pour me réveiller vaincu. "Attaché aussi." Petite pointe d'humour, au rictus qui se dessine sur la commissure de mes lèvres. "Ils disent que j'ai fait le con, qu'un sort à mal tourné. Je me rappelle même pas... pas du tout."

Juliet essayait de se mettre à sa place et de voir au travers l’esprit du De Launay depuis qu’elle était installé sur ce lit. Elle ne pouvait qu’imaginer à quel point tout ceci pouvait être perturbant pour lui. A quel point sa psychologie en avait prit un coup… Imaginez vous réveiller un matin et avoir oublié trois ans de votre propre vie. Imaginez tout ces changements que votre esprit n’a pu fixer, ni anticiper. L’amnésie rétrograde était un symptôme sérieux en psychomagie et la jeune Juliet en avait vu des patients très perturbés à cause de ça…

Elle lui restitue son parcours de ces dernières années pour l’aider à la re-située dans la chronologie d’aujourd’hui. Les étapes, sans les détails. Inutile de le noyer sous un flot d’informations qu’il ne peut pour l’instant pas assimiler de toute manière. Elle voit bien que son ami est perturbé d’apprendre tout ceci. Elle a tant changé… Et lui aussi. Et il ne le sait même pas encore.

Elle demande comment il se sent et elle n’est pas étonnée par la réponse. Le sort qu’il a voulu lancé s’est retourné contre lui et il a du se battre pour rester en vie. Il y avait de quoi être épuisé. La main du Summerbee rencontre celle de la Blackthorn qui la serre doucement comme pour lui assurer sa présence et son soutient. Elle sourit pauvrement tandis qu’il mentionne les contentions qui entravent ses poignées.

- Tu as voulu faire un sort puisant, on ne sait pas encore lequel, et oui, il a très mal tourné. Tu as sûrement lutté longtemps avant de tomber dans une sorte de coma durant lequel tu as encore lutté contre la magie. Les médecins pensent que c’est à ce moment que tu as perdu la mémoire, en réponse au choc qu’à subit ton cerveau. C’est une amnésie rétrograde et ils ont l’air de penser que ce n’est pas définitif…

Elle caresse doucement la main de Victor et ajoute :

- Tu t’es réveillé très désorienté et tu as voulu t’en prendre à une infirmière. Tu n’étais pas vraiment toi même à cause du syndrome post-traumatique. Ils t’ont sédaté pour te calmer et pouvoir contrôler ton réveil, qu’il se fasse en douceur et que tu reprennes peu à peu le pas sur la réalité.

Dieu qu’elle aurait aimé qu’on fasse pareil sur elle quand elle avait apprit pour Maximilien et Peter. Qu’on l’assomme et qu’on lui laisse le temps de digérer tout ceci avant de se réveiller. Malheureusement, les peines de coeur n’étaient guère un motif d’hospitalisation. La Blackthorn sorti sa baguette et demanda :

- Tu veux bien que je t’examine ? J’ai promis à l’interne de m’en charger s’il me laissait passer un peu de temps avec toi maintenant même si normalement les visites ne sont pas autorisée le midi…

Les mots se heurtent dans mon esprit une nouvelle fois. Des mots, expressions comme "sort trop puissants", "coma", "lutté". Ca expliquait beaucoup de choses, mais je ne les comprenais pas encore toutes. "Toi ?" Une question en lien avec sa réponse, alors qu'elle parlait de mes actes. J'avais cru comprendre que je m'en étais pris à un membre du personnel soignant, elle semblait le confirmer. Mais par Merlin j'espérais que ce n'était pas elle. Comment l'aurais-je vécu si c'était le cas ? Aurais-je trouver la force de me relever ? D'accepter cette idée ? Juliet faisait partie de mes meilleures amies, c'était impossible à mon esprit d'effectuer un tel acte. Mais en meme temps, échouer un sort me semblait tout autant impossible avant l'accident. Perdre la mémoire également. Et pourtant j'étais là, allongé, la main dans celle de mon amie de toujours.

En réponse à sa demande, j'hochais la tête, laissant un Oui franchir le mur de mes lèvres. Le sourire naissant sur mon visage, visible malgré la pénombre dans laquelle la pièce se trouvait, j'ajoutais par la même : "C'est pas comme si j'pouvais t'empecher de quoi qu'ce soit." Je n'aurais pas pu. L'idée même de m'opposer à un quelconque acte emportait l'idée d'une énergie que je n'avais pas à fournir. Ajoutez à ça la promesse qu'elle avait faite, je n'allais pas lui mettre de batons dans les roues. Libérant sa main, privant dès lors mon épiderme de sa présence, je soupirais un instant la regardant faire. Appliquée, il me semblait qu'elle l'avait toujours été, tant et si bien que j'avais confiance en elle facilement, peut-être plus qu'en toute autre infirmière du service.

"Ca fait longtemps que tu travailles ici ?" J'imagine qu'à une époque, je devais le savoir. Et pourtant tout me semblait nouveau. Alors j'osais les questions les plus saugrenues, les plus étranges peut-être. Il faut dire que je n'avais pas non plus tous les neurones de connecter, du coup réfléchir à ce que je savais ou non était au moins autant compliqué. "Ta famille va bien ? Tu vas bien ?"

Juliet était mon amie et une des plus précieuses. Je n'aurais su dire pourquoi, mais il y avait cette chose dans ma tête, régit pas son regard, qui m'inquiétait parfois. Cette chose inexplicable qui faisait que j'aimais être là pour elle, comme elle l'était maintenant, présentement, pour moi. "Tu dessines toujours ?"

Juliet voit bien dans le regard de son meilleur ami que tout n’est pas très clair pour lui dans ce qu’elle lui raconte. Elle essaye de lui parler de façon très terre à terre, très concrète pour que ce soit facile de compréhension pour lui mais malheureusement il semblerait que ça ne suffise pas. D’un mot, d’un seul, il lui demande si c’est elle qu’il a faillit agresser et Juliet n’attend pas une seule seconde avant de le rassurer.

- Non, ce n’était pas moi. C’était une infirmière de nuit plusieurs heures après ton arrivée. Mais je t’avais déjà vu auparavant, j’étais de garde quand tu as été admis.

Autant dire qu’elle avait été particulièrement inquiète et qu’elle avait suivi de très près les soins d’urgences qui avaient été administrés au De Launay. Elle ne les avait pas fait elle même, en général on évitait de soigner ses proches en urgence… Il faut dire que le fait d’avoir un ami à sauver pouvait être vraiment paralysant. Elle était restée dans la salle de trauma sans rien dire, elle avait juste veillé de loin. Priant tout les dieux qu’elle connaissait mais en qui elle ne croyait pas, espérant que son ami d’enfance s’en sortirait indemne.

Ou presque. Elle hoche doucement la tête alors qu’il accepte qu’elle l’examine. Elle sourit avec tristesse tandis qu’il mentionnait ses contentions aux poignets et aux chevilles. Elle se voulu rassurante quand elle lui expliqua :

- Je ne peux pas te les enlever, seul un psychomage sénior pourrait en donner l’ordre. Mais ne t’inquiète pas, tu m’as l’air d’avoir retrouvé toutes tes capacités cognitives, je suis sûre qu’elles te seront vites retirées. Inspire, s’il te plait.

Elle avait glissé sa main sous le tee shirt de Victor en tenant son stéthoscope à la main. Pour n’importe quel autre patient elle aurait demandé avant de réaliser ce geste intrusive mais en ce qui concernait son ami, elle avait considéré que son accord obtenu quelques minutes plus tôt lui permettait ce geste. Son coeur allait bien. Ses poumons aussi. Elle retira le stéthoscope tout en répondant à son ami.

- Depuis l’été dernier. J’ai fait un stage et j’ai continué en alternance avec les études. Tu m’as même dit que j’allais me tuer à la tâche avec toutes ses heures.

Doucement, elle commençait à réintroduire des éléments de souvenirs. Elle ne voulait pas mettre la pression à Victor alors elle glissait ça de la façon la plus naturelle possible au fil de leur conversation. Elle posa sa main dans le cou du jeune homme et regarda sa montre en comptant les battements qu’elle ressentait sous ses doigts. Le rythme était bon :

- Ma famille va… disons que c’est assez mouvementé mais dans l’ensemble ça va bien. Eliott est parti vivre avec Lys au Danemark parce qu’elle est enceinte, sa grossesse se passe très bien. La nouvelle copine de Mikhail est enceinte également. Ca va en faire des bébés… Mon frère est rentré du Moyen Orient un peu avant toi, vous étiez partis en même temps après l’été…

Elle egraines quelques informations ici et là pour restituer un peu de contexte à son ami tout en allumant sa baguette. Elle vérifia les réflexes des pupilles du franco-britannique et continua de lui répondre :

- Pour être honnête avec toi, pas très bien. Une histoire de coeur…

Doux euphémisme, triste sourire et voix qui esquive un tremolo qu’elle maitrise du mieux qu’elle peux, elle se concentre sur la suite des examens et sur la question venue ensuite :

- Plus tant que ça. Mais ça m’a manqué de dessiner avec toi. On passait beaucoup de temps ensemble dans la salle de musique à Poudlard et on continué à Hungcalf. Je jouais du piano et tu dessinais.

"Désolé..." Un murmure alors qu'elle m'informait qu'elle était de service à mon arrivée. Juliet faisait partie de cette poignée de personne que je ne voulais pas inquiéter par mes actes, d'aucune manière. Mais si j'étais désolé, j'était également heureux, soulagé qu'elle ne soit pas la personne qui avait du encaisser ma rage. C'était bien là une chose qu'il m'aurait été difficile d'accepter, inculqué sous le regard et dans les preceptes des Chevaliers de la Table Ronde et de leur éternelle quête de l'Honneur.

Alors qu'elle m'informe ne rien pouvoir faire au sujet de mes entraves de cuir, je souris légèrement. Je n'attendais pas à ce qu'elle le fasse, et au regard de mon attitude récente, je n'en avais pas plus envie. Au cas où l'inconscient reprenait le dessus, j'affectionnais ces liens sous différents aspects. Menottes dans un sens, je savais reconnaitre leur bien fondé et les accepter comme un bouclier pour les autres. Espérant la rassurer d'un sourire, je la laissais à son art, écoutant et suivant les consignes avec autant d'application que possible.

"Pas sur que je sois celui ayant le meilleur avis." Une phrase lourde de sens, qui s'accompagne un instant de la marque de la douleur sur mon visage. Car si à une époque j'avais visiblement porté ce jugement, la personne face à moi maintenant semblait équilibrée, autant qu'il était clair que mes propres choix et avis pouvaient avoir de funestes conséquences. Prenant des nouvelles du reste de sa famille, j'hausse un sourcil à la mention de Lys, répétant son nom avec une dose d'hébétement. Etait-ce possible ? La savoir avec le réputé Eliott n'était déjà pas la meilleure nouvelle que je pouvais espérer, mais la savoir enceinte avait tout fait de m'étonner encore plus. Et malgré mon amnésie, j'étais pret à parier que ces deux-là ne s'étaient pas choisis de leur propre initiative. Enfoirés de parents, toujours à manigancer. Tout ça pour une pseudo pureté du sang !

"De coeur ?" J'étais incapable de la questionner autrement que par des mots simples, des répétitions de ses propres dires, suivant ses mouvements du regard alors qu'elle prenait soin de moi d'une manière à laquelle notre amitié ne m'avait pas habitué, pour autant que je m'en souvienne en tout cas. Tentant alors de la ramener sur un terrain plus doux, je suis persuadé que si elle a envie de m'en parler plus, elle le fera. Qu'elle saura qu'elle peut, parce qu'entre nous, il y aura toujours cette chose précieuse, cette amitié semblable à du cristal. Et sa réponse ne m'étonne pas le moins du monde, me faisant même sourire un peu. "Au moins une chose qui n'a pas changée." C'était rassurant, et ne le cachons pas, j'en avais besoin de cette dose de sécurité, de cette zone sur laquelle une information pareille m'amenait. "On pourra le refaire, si tu veux." Une proposition qui n'avait rien de factice tant elle était sincère. Parce qu'il est vrai que j'appréciais l'entendre jouer, autant que la voir dessiner. C'était un truc à nous, à nous deux. Un moment de complicité comme je n'en partageais qu'avec mes amis proches. J'avais un truc avec chacun d'entre eux. Et entre Juliet et moi, il y avait cette compréhension qui se passait de mots, beaucoup plus sibylline et marquée de notes et de coup de crayons. "A ce rythme, je vais demander que tu sois mon infirmière en charge, méfies-toi."

Avec beaucoup de douceur, la Blackthorn secoue la tête tandis que le De Launey s’excuse. Elle ne refuse pas ses excuses, mais elle considère que son ami n’a nul besoin de les présenter. Il pourra à la limite les présenter à l’infirmière en question mais elle est certaine que Molly ne lui en a jamais voulu. Elle travaille aux urgence depuis près d’une décennie et elle savait faire la différence entre un patient souffrant d’une crise liée à un stress post traumatique et un patient tout simplement hargneux.

Ses prochains mots suggèrent qu’il n’a pas vraiment confiance en lui et en ses capacités à dépasser son stress post traumatique et aux crises d’angoisses et de colère qui vont avec. La jeune blonde fronce les sourcils et se promet de demander à son maître de stage de passer voir Victor pour discuter avec lui. Il a vraiment besoin d’être rassuré et elle n’est pas sûre d’être la mieux placée pour l’aider.

- Cesse de te flageller. Tu as été victime de ton inconscient, ça arrive…

Un sourire s’affiche sur les lèvres de la Summerbee tandis qu’elle continue son examen. Physiquement, Victor semble aller bien, si on exclue les différentes blessures dues au sortilège et son air terriblement épuisé… C’est plutôt psychologiquement que ça reste d’être plus compliqué… entre la perte de mémoire et la culpabilité…

Juliet voit très bien le regard surpris et dérangé de Victor quand il apprend le mariage et la grossesse de Lys. Ca doit être étrange pour lui… Lys était une de ses meilleure amie mais également une ancienne petite amie. La savoir avec Eliott dont la réputation sulfureuse n’était pas à refaire… Oui ça devait être étrange. A l’époque, Victor avait déjà eut beaucoup de mal à s’y faire. Quant à sa question sur elle même, Juliet hésita quelques minutes avant de répondre… Elle ne voulait pas inquiéter son ami avec ses propres problèmes mais elle ne pourrait pas lui cacher longtemps. Cette mésaventure était sur toutes les bouches… notamment dans la communauté sang pur. Même les parents de Victor devaient être au courant… De toute façon, le mal être de la blondinette était lisible sur son visage alors autant être sincère…

- Après ton départ, ma famille a arrangé mes fiançailles avec Maximilien Leroy. Je suis bêtement tombée amoureuse de lui mais il semblerait qu'il aurait préféré être fiancé à un Drummond plutôt qu’à une Blackthorn…

Elle secoua la tête. Assez de phrases énigmatiques. Ce n’était pas pour aider le jeune homme…

- Les fiançailles ont été rompu quand je l’ai vu embrasser Peter.

Une grosse larme coula sur sa joue. Elle l’essuya rapidement tandis que la seconde perlait au coin de son oeil. Il ne fallait pas qu’elle re-pleure, sinon elle serait partie pour une crise de larme qui pourrait durer plusieurs heures. Elle hoche la tête alors que Victor lui annonce qu’ils pourront repasser leurs soirées en tête à tête. Il n’en fallait pas plus pour arracher un sourire à la jeune femme. Elle hoche le menton avant de demander :

- Est ce que tu vas rester ? Je n’ai vraiment pas envie que tu t’en ailles de nouveau…

La jeune médicomage rit alors que Victor lui indique qu’il va réclamer qu’elle soit son infirmière attirée. Elle touche son nez avant de le corriger :

- Médicomage, s’il te plait ! Je n’ai pas l’intention de m’arrêter là dans mes études !

Ca arrive peut-être. Mais Blackthorn comme De Launay sont élevés pour que cela n'arrive pas. Si elle ne me voyait pas coupable de l'acte, j'étais responsable de ce qui m'avait amené ici. A jamais, ou jusque je sois guéri, je devrais porté peut-être ce fardeau. Une idée qui m'oppressait, me perturbait, me façonnait. Ce n'était peut-être pas bon ni sain, mais ce n'était pas une chose que j'étais en mesure d'empêcher.

Me laissant examiner, je l'écoutais patiemment, calmement. Et si bien sur je profitais de ses récits pour prendre des nouvelles de mes amis, il n'en demeurait pas moins que j'étais plus attentif alors qu'elle me parlait d'elle, même si au départ tout se mélangeait un peu dans ma tête. Leroy, un nom que je connaissais pour l'avoir déjà entendu, mais était-ce surprenant ? Probablement pas, dans la mesure où Juliet était qui elle était, une sang-pur aux parents ayant une mentalité proche des miens. Aussi, qui que soit ce Maximilien, j'avais probablement déjà rencontré l'un ou l'autre membre de sa famille un jour, peut-être même lui sans le savoir. Mais les explications de la Summerbee restait vagues dans mon esprit. A peine un nom était-il prononcé qu'un autre venait s'en mêler, dans un dédale d'infos que je n'arrivais pas complétement à suivre. Une information qui n'échappa peut-être pas à la médicomage, puisqu'elle s'exprima plus clairement rapidement. Il semblerait qu'il aurait préféré être fiancé à un Drummond plutôt qu’à une Blackthorn… Mes yeux plissèrent légèrement. Sans juger les hommes ayant ce genre de penchants, j'avais toujours un peu de mal, ne le partageant pas moi-même. Moins quand il s'agissait de deux femmes, mais l'idée de deux hommes, quoi que je fasses me laissait toujours perplexes. Avais-je dès lors mal entendu ? Non, car au nom de Peter, la réalité transparaissait clairement. Sauf si bien sur les parents du bien-nommé Peter avait eu une fille et peu d'amour pour elle au point de lui donner un prénom masculin. Chose qui ne m'échappa pas, ce fut cette larme. En réflèxe, ma main voulu venir l'essuyer, la chasser, mais se retrouva une nouvelle fois stoppée dans son élan par mes attaches, tant et si bien que mon amie l'enleva elle-même.

C'était dur. Réellement. Ne pas pouvoir être là pour ceux que j'apprécie. Ne pas pouvoir être l'épaule dont elle pouvait avoir besoin pour se réfugier. Pour ça, et pour cette larme, j'étais capable de maudire Leroy et Drummond. Pour la peine qui pouvait s'inscrire sur le visage d'une de mes soeurs, meme celle de coeur, je pouvais vite m'emporter et agir comme un débile écervelé. Mais à coté de ça, où étais-je ? Allongé là, faible, attaché dans ce lit d'hopital. Fichu destinée qui m'avait amenée ici.

Est-ce que des liens de cuir peuvent me retenir ? Non, pas réellement. Promesse faite de moments complices futurs, je revois ce sourire qui apaise mon âme, l'égaye de nouveau à sa façon communicative, et entend alors la question de la soignante. Nouveau regard pour ma condition actuelle, je ne peux m'empêcher de répondre avec douleur et humour : "Rien de prévu pour le moment." Partir. Alors que je venais de me réveiller déboussoler, désorienter quelques jours auparavant, ce n'était vraiment pas une option envisageable. Je ne savais même pas quand je pourrais sortir d'ici. "Je... Je ne sais même pas pourquoi... je suis parti." Une autre vérité, qui s'annonce comme un mystère au centre d'un trou béant dans ma tête et dans mes souvenirs. Avais-je voulu entreprendre un voyage particulier ? M'étais-je rendu quelque part en relation avec un travail ou des études ? Voulais-je retrouver quelqu'un ou quelque chose ? Le sort que j'avais lancé avait-il quelque chose à voir avec tout ça ? Je n'en savais rien. Rien du tout. "Dois pouvoir trouver des raisons de rester. Te regarder devenir une grande médicomage par exemple..." Il y avait ça, et le fait que je connaissais aussi l'avenir qui m'était réservé depuis ma naissance : la reprise du cabinet familial. On échappe pas à ses responsabilités, et si j'aurais du parier, j'étais persuadé que le père De Launay ne me laisserait plus crapahuter par monts et par vaux, au risque de perdre son espoir de voir son nom exister encore pour une génération au moins. Définitivement, partir serait surement maintenant un luxe que m'offrir deviendrait difficile. Et à voir mon état, il s'agissait peut-être là d'une sage décision.

C’était étrange. Elle avant raconté cette histoire mille fois. A @Enora Blackthorn , a @Grace de Launay , à @Ymkje de Booij , à @Isaac Hansberry , à @James Blackthorn … Tous la connaissaient très bien, connaissaient Maximilien et connaissait l’histoire qu’ils avaient partagé tout les deux. Elle avait eut des analyses plus ou moins pertinentes, des prises de positions… Mais jamais un tel silence. C’était… c’était incroyablement agréable. La peine était toujours très présente, vive, et pourtant c’était comme si une part d’elle même l’acceptait. Evidemment, Victor était silencieux parce qu’il essayait de restituer les noms, les visages et les histoires… Elle lit dans ses yeux l’incompréhension. L’incompréhension puis la colère de la voir si triste, si peinée. Elle effaça sa larme, secoua sa tête doucement et afficha un léger sourire, comme pour se convaincre :

- Ne t’inquiète pas. Je te re-raconterais tout ceci quand tu seras capable de tout assimiler. Et d’ici là, j’irais sûrement beaucoup mieux.

Elle inspire doucement, pour chasser le chagrin, chasser le négatif, se concentrer sur la chance de retrouver Victor presque d’indemne malgré ce qu’il a subi. Elle aurait bien été incapable d’accepter qu’il souffre d’avantage, ou pire qu’il ne soit plus de ce monde. Elle s’amuse de son humour noir, un point douteux quand même. Effectivement, il était logique qu’il reste là un temps. Elle lui pince doucement la joue pour le punir de cette vilaine moquerie.

Un sourire triste de nouveau s’affiche sur le visage de la future médicomage. Elle, elle savait très bien pourquoi Victor était parti. Malgré le fait qu’il n’ai laissé qu’une lettre assez peu explicite… Elle savait quelles pressions Victor avait subit, quels choix terribles il aurait du faire. Elle soupire avant de lui répondre :

- Tu es parti en disant que tes parents voulaient que tu fasses tes études ailleurs, pour reprendre le cabinet de ton père plus tard… Je pense que Jennifer et Nicolas t’ont imposé de partir pour t’éloigner de ta copine… Tu leurs a présenté pour ton anniversaire et malheureusement elle n’a pas été très bien reçue…

Juliet avait d’ailleurs eut le droit à une vilaine altercation avec ladite copine. Ymkje avait mal supporté la présence de celle que les De Launay connaissaient depuis enfant, qu’ils adoré, qu’il avait toujours espéré voir avec leur fils… Même s’il n’y avait rien eut  entre Victor et Juliet… Rien si ce n’est un petit crush d’enfant de la part de la cadette Blackthorn. Heureusement, depuis, Juliet et Ym avaient pu discuter de leurs différents et mieux encore devenir amies.

Elle leva les yeux au ciel alors que Victor précisait pouvoir avoir envie de rester pour la voir devenir une grande médicomage. Juliet venait à peine de se décider à poursuivre ses études et ne pas se contenter de devenir infirmière… Si elle devait médicomage ça serait vraiment super… Mais grande médicomage, fallait pas rêver. Elle avait terminé d’examiner son ami.

- Tes examens sont normaux, tout semble aller bien.

Elle range sa baguette et se penche pour récupérer le dossier suspendu au pied du lit. Elle sort une plume autoencreuse et repousse les feuilles distraitement les feuilles jusqu’à atteindre celle qui l’intéresse pour commencer à noter ce qu’elle avait pu observer sur son patient préféré.

Inquiet, l'étais-je ? Peut-être. Et peut-être pas pour les raisons qu'elle pense. Juliet, elle était de celle que je connaissais depuis tout petit. J'avais toujours su que ses parents dicteraient sa vie, et au fond je l'avais peut-être aussi toujours redouté. Juliet, c'était comme notre petite soeur, et une petite soeur on veut la protéger, on refuse qu'il lui arrive le moindre mal. Mais que pouvais-je dire ? Ou que pouvais-je faire ? Même si je n'étais pas coincé dans ce lit d'hopital, je n'aurais pas c'était certain la notoriété nécessaire pour lui permettre d'avoir ce qu'elle mérite. Alors je me résignais, en quelques sorte. J'acceptais la fatalité d'être ici, attaché, à ne pouvoir que l'écouter et à lui murmurer dans un silence que j'étais là. Mais l'avais-je été alors qu'elle en avait besoin ?

Mon départ, je n'en comprends pas les raisons. Mais peut-être est-ce parce qu'au fond de moi je ne comprends pas le départ en lui-même ? Pourquoi ai-je seulement agi de la sorte ? Etais-je comme elle, mon amie, prisonnier de la volonté de mes parents, coincé dans un cercle dont je ne pouvais m'exclure ? Etais-je au pied du mur ? Car notre monde est celui-ci, avec ses règles passées, ses normes désuètes pour beaucoup et surtout ses arrangements internes ? J'affirme alors mon intention de rester. De la voir évoluer, et même d'être là pour l'encourager dans cette évolution. Une promesse sans fondement, peut-être même vide de sens pour qui l'entend, mais sincère. Sans savoir si je récupérerais ma vie d'avant, je peux au moins affirmer que présentement, je veux être de nouveau là pour ceux qui comptent : mes amis. Et la demoiselle ici présente reste l'une des plus précieuse.

- Tes examens sont normaux, tout semble aller bien.

"Dommage..." Un son qui se faufile entre le mur de mes lèvres, regard taquin à son encontre. Si je suis fatigué, et que la pièce reste plongée dans la pénombre malgré l'heure de la journée, j'apprécie sa compagnie. Elle était une surprise inattendue, un courant d'air frais dans un monde où tout me semblait si étrange, presque hostile. Elle était sur le moment présent l'ancre à laquelle je m'accroche pour ne pas dériver, malgré mes actes commis et leurs conséquences aujourd'hui. "Je dois faire quoi pour que tu reviennes me voir ?" Elle pouvait demander, au vu de mon état et de mon dossier qu'elle avait entre mes mains, il était clair que j'étais prêt à tout.

Dans le fond, elle était bien contente de ne pas devoir tout expliquer à Victor. Pourtant, dieu sait qu’il l’aurait écouté. Dieu sait qu’il ne l’aurait pas jugé. Dieu sait qu’il l’aurait comprise. Peut être même mieux que d’autres personnes à qui elle en aura discuté antérieurement. Mais elle en avait déjà tellement parlé… sans que la blessure qui résidait dans son coeur ne cesse de saigner pour autant. Peut être que pour guérir il fallait tourner la page plutôt que de ressasser le passé ?

Elle voit dans les yeux de son ami la frustration de ne pas pouvoir comprendre. Celle de ne pas pouvoir la prendre dans ses bras. Elle aurait tellement aimer lui retirer ces contentions. Elle aurait aimé se fondre dans ses bras comme elle avait pu le faire à de nombreuses reprises pour des chagrins d’enfance ou d’adolescence. Elle se contenta d’un sourire triste.

Un silence s’installe entre les deux amis alors qu’elle achève de lui expliquer les raisons de son départ. Il semble un peu confus et Juliet n’en rajoute pas, lui laissant le temps de décanter toutes les informations qu’elle venait de lui apporter. Elle préféra se concentrer sur le positif et sur le fait que l’ensemble des examens neurologiques qu’elle vient de faire étaient vraiment excellents. Elle sourit en annonçant cette nouvelle et elle sourit en entendant le De Launay demander ce qu’il faut faire pour qu’elle revienne. Pour répondre, elle regarde sa montre :

- Patienter quelques heures, je finis ma garde mon service à dix huit heures.

Mais là, il va falloir qu’elle y aille bientôt. Sa pause est presque terminée et elle a rendez-vous avec le Docteur Sanahuja pour faire passer les entretiens individuels des patients en adictologie. Elle nota les examens qu’elle avait fait et les résultats qu’elle avait constaté rapidement avant de reprendre le début du dossier de son ami pour le lire en diagonale avant de s’en aller.

Elle n’avait pas l’intention de s’y attarder mais une ligne de résultats d’analyse de sang attira son attention. Le taux  d’ingrédients chimiques explosait le plafond et ça ne pouvait vouloir dire qu’une chose… Victor avait ingéré des médicaments ou des potions… Elle fronça les sourcils mais garda l’information pour elle. Elle préférait en parler avec son psychomage avant… elle savait qu’une telle information pouvait être mal interprétée. Elle mit l’information dans un tiroir dans un coin de sa tête pour y revenir plus tard.

- Tu resteras sage jusque là d’accord ?

Elle déplaça une mèche de cheveux de Vic pour dégager son front et y déposa un baiser.

- A toute à l’heure.