La cloche sonna, indiquant la fin du cours que Juliet n’avait pas suivit… ou plutôt le cours qu’elle aurait du suivre. Plusieurs étages plus haut se déroulait le cours de Runes du Professeur @Dhan Chaffinch que Juliet avait volontairement manqué… Voila plusieurs semaines, près de deux mois enfaite, que la jeune femme ne se présentait pas à ce cours qu’elle adorait de peur d’y croiser @Peter Drummond , de peur de devoir lui parler… De peur de ne pas savoir garder son masque de marbre. Elle préférait de loin battre en retraite, elle n’avait plus de forces pour ce genre de bataille…

La jeune Blackthorn avait donc passé sa première heure de cours de l’après midi planquée dans le fond de la bibliothèque, dissimulée par une pile de livres de Runes. Elle séchait peut être les cours mais elle prenait grand soin de rattraper les cours qu’elle n’avait pu suivre, heureusement @Pina Jakobsdóttir avait la gentillesse de lui donner ce qu’il fallait pour qu’elle puisse suivre, même si elle désapprouvait la politique de l’autruche de la cadette Blackthorn…

Pas besoin de regarder sa montre, Juliet savait qu’elle avait encore deux heures devant elle avant d’aller rejoindre le cours de Potion. Elle avait bien avancé sur le cours de Runes, aussi se décida-t-elle à fermer le livre de Runes appliqué à la matière organique qu’elle alla ranger. Elle voulait avancer un peu sur la médicomagie et plus précisément sur les pathologies pulmonaires qu’elle étudiait en ce moment.

Quand elle revint, un autre livre sous le bras, elle fronça les sourcils en voyant un hibou posé sur le dossier de sa chaise. Elle posa son livre rapidement pour récupérer le parchemin roulé sur la patte de l’animal qui s’envola aussitôt. Sentant venir les ennuis, elle se déroula la missive et reconnu aussitôt l’écriture de son Professeur de Runes, pour l’avoir si souvent vu au tableau.

Courte mais incisive, Juliet n’avait pourtant pas terminé de lire les mots qui y étaient inscrits que ses yeux se remplissaient déjà de larmes. Elle essaya de contenir les larmes mais c’était ça ou une crise d’angoisse assurément… Ses larmes commencèrent à couleur sur le parchemin qui n’était autre qu’un ultimatum… Elle devait se présenter aux prochains cours où elle risquait d’être recalée dans cette matière.

Juliet se laissa tomber sur la chaise et commença à sangloter, les mains autour de son visage, les larmes coulant sur le morceau de parchemin qui commençait déjà à déteindre. Elle n’avait pas vu que quelqu’un s’était approché d’elle… Elle n’avait même pas prit conscience qu’elle pleurait si bruyamment. Les mots d’une jeune femme lui firent lever les yeux subitement. Elle tenta d’effacer les larmes qui avaient creusé des sillons transparents sur ses joues.

- Je… je suis désolée.

C’était peine perdue. Les larmes coulaient de nouveau…

Cette lettre, c’était le coup de grâce pour la cadette Blackthorn. S’éloigner de Peter et de Maximilien c’était une manière pour Juliet de se reconstruire, tout ce qu’elle voulait c’est prendre le temps de soigner son moral et son coeur avant de pouvoir les affronter. Il résidait encore beaucoup de tristesse et d’incompréhension dans l’esprit de la jolie blonde.

Maintenant, elle n’avait plus d’autre choix que d’affronter le regard de Peter en cours de Runes. La rupture de ces fiançailles l’avait mise plus bas que terre et il était hors de question qu’en plus de cela elle rate ses études… Son stage et son avenir de psychomage c’était l’une des rares chose qui la maintenait debout.

Alors oui, elle pleurait. Pourtant, pleurer n’était pas dans ses habitudes. Pas en public en tout cas. Elle avait été élevée pour dissimuler ses émotions, pour les garder au fond d’elle et les gérer sans que personne ne puisse soupçonner quoi que ce soit. Aujourd’hui, elle n’en était tout simplement pas capable.  La jeune femme qui venait de la surprendre dans ses sanglots ne fut pas des plus tendre et après que Juliet se fut excusée elle le fut moins encore. Elle eut le mérite de faire stopper les sanglots de Juliet, surprise par tant d’agressivité.

- La compassion c’est pas vraiment ton truc…

Ses parents n’étaient pas très contents en effet, mais ce n’était pas du aux notes de la blondinette qui étaient excellentes au demeurant. Non… Mais on avait pas hésité à lui reprocher le fait que Maximilien lui ait préféré Peter… Et elle n’avait pas besoin de la jeune sorcier face à elle pour le lui rappeler. Heureusement elle fit demi tour ce qui permit à la jeune femme de chercher un mouchoir dans son sac. Elle n’eut même pas le temps de se moucher ni d’effacer ses larmes que la Pokeby était de nouveau face à elle, lui demandant si elle était bien Juliet…

- Ca dépend. C’est plus ou moins m’enfoncer ?

Egale à elle même, la voix de la jeune abeille n’est même pas agressive. Elle est neutre avec une pointe de tristesse. Elle ne veut pas nécessairement attirer la sympathie de cette fille qui a l’air de venir d’un monde bien différent du sien… Elle avait l’air de ce genre de fille trop parfaite… Vous savez, ce genre de fille grande et mince, aux cheveux impeccablement lisses, aux yeux impeccablement maquillés, avec une élocution parfaite et une confiance en elle à toute épreuve… Bref, tout ce que Juliet ne serait jamais.

Juliet avait arrêté de pleurer. Aussi soudainement qu’elle avait commencé en réalité. Faut dire que la remarque acerbe d’une inconnue aussi belle qu’hautaine n’avait pas vraiment donné d’autre choix à la jeune femme tant celle-ci avait été surprise. Ca coupait même la chique aux larmes quoi… Elle avait eut un dernier sanglot puis… plus rien. La surprise et l’état de choc avait prit le pas sur la tristesse.

La blondinette s’affaira donc à retrouver une mine convenable. Son mouchoir à la main, elle élimina ses larmes et se félicita de ne pas s’être maquillée ce matin, évitant ainsi les vilaines traces de mascara sous ses yeux. Elle avait répondu comme elle pouvait à la jeune femme… relevant le fait que la sorcière ne connaissait pas la compassion… Et la réponse de la jeune femme ne vint pas vraiment satisfaire la cadette Blackthorn.

- En même temps quand il s’agit de compassion c’est nécessairement au sujet de quelqu’un d’autre…

Juliet était future médicomage de formation mais les romans, la littérature, les phrases et les mots c’était son truc. La sémantique c’était important quand même non ? Pour Juliet ça l’était… Mais puisqu’elle n’avait pas un caractère très affirmé elle l’avait dit à demi voix. Ne souhaitant pas particulièrement passer plus de temps que ça avec la blonde, elle avait essayé d’esquiver comme elle pouvait. Mais ça n’eut pas vraiment d’effet escompté puisque que la sorcière s’installa sur la chaise face à elle.

Bon… Non seulement elle savait qui elle était mais en plus de ça elle avait l’air de bien connaitre sa vie privée… La renommé de sa famille était pesante parfois. Ce nom était si lourd à porter certains jours. Il ouvrait autant de porte qu’il n’engendrait de douleurs. Maximilien et Peter n’étaient pas directement la raison de ces larmes du jour mais la jeune Blackthorn ne pouvait pas totalement la contredire.

- Disons que si c’est bien moi, je pense que tout ceci ne te regarde en rien.

La voix de la jeune femme est mal assurée et elle n’arrive pas du tout à regarder la jeune femme dans les yeux. Elle préfère se replonger dans son livre, espérant que la jeune femme ne lâche sa proie… Elle avait  cette drôle d’impression d’être @Grace de Launay en face de Meghan. Malheureusement la jeune femme revint à la charge. Un de perdu, dix de retrouvé… Sérieusement ? Elle avait pas juste rompu avec son petit copain. Elle avait vu son fiancé la langue dans la bouche de son cousin… Si elle avait effectivement les informations, son conseil était vraiment hors de propos. Elle ne répondit pas, espérant encore que la Pokeby finisse par s’en aller. Mais non… toujours pas… décidément… La jeune femme ne s’interrompait pas.

- Qu’est ce qui pourrait te faire dire que je mérite mieux ? Tu connais peut être les grandes lignes de mes récents déboires mais tu ne me connais pas.

Juliet fit un effort incroyable pour retenir ses larmes. Malgré tout, les mots de la jeune femme la remuait. Elle ne sut pas retenir les trémolos dans sa voix.

Juliet était effectivement une littéraire dans l’âme. Elle aime les romans, ceux à l’eau de rose comme ceux d’aventure. Elle aime les classiques du théâtre comme le tout dernier roman de l’auteur coqueluche moldu. Elle aime les mots, les jolies phrases et les belles histoires. Si elle n’avait pas voulu faire un métier pour aider les gens, elle aurait surement choisit la section littéraire…

Ce n’était pas la seule raison pour laquelle elle avait corrigé la parfaite poupée blonde aux grand yeux. Elle l’avait fait ainsi parce c’était surement le seul moyen qu’elle avait. Parce que cette fille avait parfaitement raison. C’était particulièrement déplacer de pleurer ainsi. Comme c’était particulièrement déplacer d’enfoncer la Blackthorn dans son chagrin. La réponse de la jeune femme, Juliet n’y réagit même pas. Elle ne se sentait pas concernée ? Alors pourquoi n’avait elle pas passé son chemin ? Et si elle venait tant, ils y avait de nombreuses salles de classes où l’ont pouvait réviser.

Pourtant la blonde s’est assise et l’interroge sur son identité et pour ainsi dire sur sa vie. Juliet le sait : en informant ses interlocuteurs qu’elle s’appelait Blackthorn, elle prenait le risque que la personne de connaisse sa vie presque mieux qu’elle même. Elle avait également une chance sur deux d’être jugée aussitôt. C’était fatiguant… Les mots de la jeune femme sonnaient juste et pourtant Juliet avait comme l’impression qu’ils ne s’appliquaient pas à elle.

- Tu devrais être gentille et attentionnée avec les personnes tristes avant d’essayer de leur remonter le moral, ça marche plutôt bien avec les humains.

Lui expliqua Juliet comme si elle essayait d’expliquer à Raven comment communiquer avec cette espèce dont elle était trop parfaite pour en faire partie. Juliet renifla une dernière fois et effaça ses larmes. La sorcier se leva, comme sur le départ. Elle ajouta qu’elle n’avait jamais eut à subir ça, qu’elle ne pouvait donc pas le comprendre.

- Tu m’étonnes…

Ce n’était tellement pas le genre de Juliet. La douce Juliet qui s’essayait à la provocation… Si Awa savait ça, elle lui décernerait surement la médaille de l’espoir. En même temps, elle n’avait peut être pas tort l’abeille. Qui voudrait sortir avec une fille aussi distance, froide et autoritaire ? Elle lui ferait presque pensé au fiancé de sa soeur. Un Muller… C’est dire. La voix de Juliet était neutre et pourtant elle transpirait l’ironie. Mais au moins, elle avait arrêté de pleurer et son visage n’était plus déformé par le chagrin. Une petite flamme de rébellion flottait même dans son regard. C’était surement mieux que les larmes…

Si Juliet entendait les pensées de la Pokeby, elle rirait bien. Elle ne savait absolument pas qui elle était. Ni quelle était sa réputation. Elle ne saurait même pas la nommer, ni la prénommer. Elle pensait avoir une certaine réputation ? Qu’elle essaye de devenir une Blackthorn juste une journée… Ce nom était une épreuve tout les jours. Il ouvrait des portes, certes, mais elle avait parfois l’impression d’être un drapeau de laboratoire que tout le monde pouvait et voulait venir observer.

Une journée dans la peau de Juliet, une journée dans la peau de celle qui est connue comme le loup blanc alors qu’elle est l’une des filles les plus discrète de l’université. Vous pensez que ça lui plait à la timide Juliet d’être au centre de l’attention à cause de toute cette histoire ? Elle était comme une accidentée de la route… tout le monde ralentissait pour voir à quel point elle allait mal. C’était suffisamment difficile pour ne pas avoir en plus besoin de se prendre la méchanceté de la jeune femme.

Juliet soupire tandis que l’étudiante la comparait à une enfant. Si elle savait à quel âge elle avait perdu le droit de jouer aux poupées. A quel âge elle avait du enfiler les désagréable robes à corset pour être pavanée par ses parents… A quel âge elle avait apprit que sa cousine s’était défenestrée à cause de ces derniers… Baby avait à peine l’âge d’arrêter de jouer à la poupée quand elle avait décidé d’en finir. Si seulement c’est elle qui avait prit la décision.

Elle n’avait plus envie de pleurer. Elle se sentait lasse d’être observée et lasse d’être incomprise. Mais un incroyable sentiment d’injustice venait de prendre possession de son corps. Ce jugement et ces méchancetés de la part de la blonde… Elle n’avait peut être pas tort sur le fond. Elle devait s’endurcir la Blackthorn. Juliet le savait. @Awa Blackthorn lui disait presque depuis sa naissance. Pour autant, elle n’avait pas honte d’avoir aimé @Maximilien Leroy . Elle avait écouté son coeur. Elle apprendrait surement un jour à écouter la raison.

- « Vouloir aimer sans risquer de souffrir est une contradiction, et vouloir vivre sans aimer, c'est se tuer. »

Une citation lu au détour d’un ouvrage d’Amiel. Une citation qu’elle trouvait juste. Et si la Pokeby se permettait de lui faire la leçon, pourquoi la Blackthorn ne pourrait pas en faire autant.

- Je dois peut être apprendre à m’endurcir. J’en suis consciente. Mais je ne regrette pas de savoir aimer… Même si ça peut faire souffrir.

La vie sans amour n’était elle pas terriblement triste ? Juliet le pensait.

Citation bidon peut être, mais il semblerait que ça ait touché la Pokeby plus qu’elle ne voulu le laisser paraitre. Et pour être tout à fait honnête, la réaction de la jeune femme intéressa Juliet. En vérité, elle avait plutôt dit ça pour se convaincre elle même qu’elle n’était pas folle, que son chagrin était légitime, que ses craintes étaient fondées. Elle avait assez régulièrement eut des moments difficiles et elle avait toujours remis en question ses émotions. Pourquoi les ressentait elle ? Comment les vivait elle ? Comment interagissait elle avec elles ? Elle ne le savait pas encore à l’époque mais elle avait déjà certaines capacité d’auto-analyse interessante.

Et maintenant que la jeune Blackthorn envisageait de se spécialiser en psychomagie, maintenant qu’elle était en stage dans ce secteur depuis plusieurs mois… Et bien elle était parfois surprise et intéressée par les réactions des autres. Elle pensai que la blonde aux cheveux lisses s’en irait en claquant des talons mais elle fit demi tour. Le besoin d’avoir le dernier mot ? Non… Non, sinon elle n’aurait pas posé cette question.

- Personne n’est incapable d’aimer.

A part les psychopathe. Mais ces derniers étaient des cas cliniques particulièrement rares, souvent présentant des neuroatypies passionnantes… Juliet était a peu près sûre que la jeune femme n’en soit pas. Pour preuve, elle avait été piquée lorsque Juliet avait été provocante plus tôt. Un psychopathe n’aurait pas été touchée ainsi…

- Je pense plutôt que tu te le refuses.

C’était humain d’aimer. C’était naturel. Comme respirer. Comme dormir. C’était un besoin affectif qui était l’un des accomplissement de l’Homme : trouver une sécurité affective. Aimer et être aimer en retour. Mais il semblerait que la jeune femme ne le souhaite pas… Elle ne le connaissait pas, parce qu’elle n’avait sûrement jamais accepté d’aimer. Pour une raison que Juliet ignorait et que la Pokeby devait connaitre a moins que le déni ne soit plus fort que la raison. Ca arrivait parfois.

- Tu as de la famille ?

Question qui semble sortir de nul part et pourtant elle est fondée. Les humains apprenaient l’amour d’abord par le biais de leurs parents, de leurs frères et soeur ou de toute personne avec qui il aura pu tisser un lien pendant l’enfance. Une carence à ce moment de la vie pouvait expliquer les difficultés affectives que Juliet devinait chez l’étudiante. Elle adressa malgré tout un sourire à la jeune femme, après tout ce n’est pas parce qu’elles avaient eut un différent temporaire qu’elles ne pouvaient pas discuter.

Juliet n’avait pas posé la question par hasard. En effet, les difficultés relationnelles remontaient souvent aux difficultés rencontrées avec la famille, notamment avec les parents, quelles quelles puissent être. Raven n’étudiant pas la psychomagie et les thérapies comportementales, il n’était pas surprenant que la question soit incongrue à ses yeux et pourtant la réponse fut interessante.

Oui, elle avait de la famille. Elle avait haussé les épaules ce qui était suffisant en soit, elle n’était pas obligée de rajouter « qu’est ce que ça peut te faire » sur un ton désagréable mais Juliet passa rapidement l’éponge. Elle avait bien comprit que toutes ces petites piques étaient plutôt un moyen de défense que de vraies armes d’attaque. De quoi la blonde se protégeait elle exactement ?

- L’amour filial, l’amour fraternel, ce sont des expériences qui déterminent beaucoup de chose dans la capacité à créer du lien avec autrui.

Dans le cas de la Blackthorn, c’était clairement l’amour fraternel qui avait primé. Elle n’osait pas imaginer ce qu’elle serait devenue si elle n’avait pas eu l’amour et le soutien inconditionnels de sa fratrie… Une sorte de monstre surement. Quelque-chose d’horrible. Sûrement quelque-chose qui ressemblerait de près ou de loin à sa tante Claudia. Qu’elle angoisse.

- Par exemple, en ce qui me concerne, j’ai développé ces capacités grâce à ma fraterie, je les aime sans condition aucune. Mais a contrario, ils ont toujours voulu et su me protéger… sûrement trop... ce qui fait de moi ce que tu considères comme une petite chose sensible et pleurnicharde. Vois-tu ?

Finalement elle sourit et ajouta :

- Il doit bien y avoir un juste milieu, tu ne penses pas ?

C'était presque amusant ces analyses de psychomagie comparée. En tout cas, Juliet avait cessé de pleurer et elle souriait même un petit peu. Parfois, il suffisait juste de distraire son esprit de la peine pour trouver un peu de réconfort.

L’enfance de Juliet aurait pu être un cauchemar. Il ne l’a pas été. Elle en est consciente, sans même l’avoir vécu. Elle le sait, c’est inscrit en elle depuis qu’elle le temps où elle n’était qu’un bambin. Depuis le temps ou elle avait vu Mikhail encaisser un doloris parce qu’il prenait sur lui la bêtise des deux cadette de la famille : Juliet et Eleanore. Ses parents n’ont jamais porté la main sur elle. Mais pour autant la douleur est présence. Elle est insidieuse, vicieuse, perverse. Juliet n’a pas le droit à l’erreur, encore moins que sa fratrie, parce que sinon c’est la culpabilité de savoir que l’un de ses aîné paiera à sa place. L’erreur n’était pas tolérée chez les Blackthorn. Pas envisagée.

Alors oui, elle est terriblement reconnaissante envers sa fratrie. Elle les aime d’un amour inconditionnel, tous autant qu’ils sont. Même le pire. Même s’ils faisaient les pires horreurs, elle serait à leurs côtés. C’était comme inscrit dans son code génétique. C’était viscéral. Elle ne pouvait pas lutter contre ça.

Du côté de la rousse, rien d’autre que des parents. Absents, d’après ce que Juliet pouvait en décoder. Il était évident que ce n’était suffisant… pour n’importe quel être humain. Juliet hoche la tête d’un air entendu. Il est clair quelles avaient parcouru des chemins forts différents.

- Je suis désolée que ça ait du être ainsi.

Ca avait du être dur pour la Pokeby et Juliet était du genre empathique. Toujours. Trop. Elle hoche la tête tandis que la jeune femme considère qu’un juste milieu sur la route qui les séparent doit exister. Mais elle, elle pense qu’on peut changer. Qu’on peut s’améliorer. Aller mieux. Jusqu’à être heureux.

- Pas en un claquement de doigt, non… Mais avec le temps. En y travaillant. Ou juste en fréquentant les bonnes personnes…

Juliet aime beaucoup la psychomagie, elle s’en est rendue compte le jour où elle a assisté à cette conférence sur les conséquences des sortilèges dont l’effet est impérieux sur le cerveau humain. Elle avait trouvé ça passionnant. Et quand elle avait commencé ce stage, elle avait élargi ses connaissances sur la psychomagie de façon beaucoup plus large.. elle avait adoré manipuler les sortilèges qui permettaient d’aider les neurones à fixer les hormones d’humeurs… Elle avait adoré écouter ces gens parler de leur histoire, de leur maladie…

Là, il s’agissait plutôt de psychothérapie que de psychomagie. La jeune femme n’était pas dépressive, elle ne souffrait d’aucun trouble mental, c’était évident. Peut être de petits blocages comme tout à chacun. Et Juliet avait cette drôle d’impression, ce sentiment, non ce pressentiment qu’elle avait quelque-chose à apporter à cette fille. Mais plus encore, qu’elle avait quelque-chose à en apprendre. N’était ce pas ce qu’Awa lui avait suggéré ? Ou plutôt imposé ? De s’entourer de personnes qui pourraient la rendre plus forte ? Moins sensible ?

Elle s’est perdue dans ses pensées, son regard s’est fait vitreux un instant mais elle retrouve le fil tandis que la Pokeby lui souligne qu’il faut avoir envie de changer pour opérer de tels re-virements dans sa vie. Elle a tout à fait raisons et la douce Blackthorn hoche le menton. A-t-elle envie de changer ? La réponse n’est pas évidente… Disons plutôt qu’elle en a besoin si elle veut s’en sortir dans le monde qui est le sien.

- Tu as raison.

Juliet passe volontiers sur le commentaire de la jeune femme en ce qui concerne son analyse. Juliet la trouve justifiée mais elle n’ira pas la défendre bec et ongle. Le plus important, c’est que Raven met le doigts sur ce qui l’importe. Le changement qu’elle doit opérer en elle même.

- Besoin plus qu’envie en réalité. Tu avais raison quand tu disais que je devais m’endurcir. Le fait est… que je ne sais pas comment faire.

Et comme si la perche n’était pas évidente, elle ajouta :

- Je pense que quelqu’un comme toi pourrais m’aider.

Rp

A ce niveau là, oui, c’était devenu un besoin. Elle ne pouvait plus se cacher derrière les autres. Elle ne pouvais plus être naïve au point de nier chaque problème qu’elle rencontrait. Elle ne pouvait plus fuir au moins risque de confrontation. Elle ne pouvait pas pleurer dès qu’un mot était prononcé plus haut que l’autre. Elle avait 21 ans, elle n’était plus une enfant. Elle devait apprendre à faire face.

Et pour apprendre, il lui fallait de l’aide. Elle aurait pu solliciter Awa. Mais sa cousine avait beau la secouer depuis près de dix ans maintenant, elle savait qu’à ses yeux elle était et resterait la toute petite Sixtine. La dernière. Celle à protéger. Le clan Blackthorn avait toujours fonctionné ainsi et elle ne voyait pas comment cela pouvait changer rapidement.

- Oui, je pense que tu le pourrais.

Elle hoche la tête en répondant à l’interrogation de la Pokeby. Pourquoi elle ? Parce qu’il est clair que Raven Stone n’a pas de pitié. Elle ne traitera pas Juliet comme une petite chose fragile mais comme une femme quelconque. Elle en avait fait la démonstration quelques minutes plus tôt. Elle n’avait pas besoin d’elle mais elle avait besoin de quelqu’un comme comme. Et Juliet fut ravie de constater que la jeune femme n’était pas contre l’idée, lui demandant même de lui raconter ce qui lui était arrivé.

Consciente que toute cette histoire ne mettrait pas trois minutes à être contée, la blonde jeta un coup d’œil à sa montre. Elle avait un cours de potions dans quelques minutes et si elle ne bougeait pas maintenant, elle allait être en retard. Elle commença à ranger ses affaires tout en expliquant à la Stone :

- Est ce qu’on peut se revoir un autre jour ? J’ai un cours de potions qui va commencer et crois moi cette histoire est longue ... très très longue. Tu as un numéro de téléphone ?

Pianotant sur son smartphone, elle récupéra le numéro de la jeune fille, se promettant de l’utiliser le soir même. Elle sourit et ajoute en posant son sac sur son épaule :

- Merci pour la « claque ». À bientôt, j’espère.

Rp terminé pour Juju !