La journée commençait très mal. Quelqu'un d'avisé avait eu la mauvaise idée de mettre de la bombabouse juste au pied de mon lit. Je vous passe la scène de guerre qui a suivi et mes hurlements de folle furieuse. Mauvais présage sans doute, parce que toutes les merdes s'enchaînaient. La pluie avait rendu illisible mon devoir de Botanique, j'étais bonne à le recommencer. Et je n'en avais pas la moindre envie. Assise sur une table de la bibliothèque, je ne parvenais pas à me concentrer. Il y avait trop de choses qui n'allait pas. Le retour brutal de Maddox et de sa petite gueule de gagnant. La guerre infâme que je menais à Morgan. La relation étrange que j'entretenais avec mon professeur d'étude des moldus. Et pire, l'absence de nouvelle d'Eden. Je savais qu'il avait reçu ma lettre. Et ce petit con n'avait pas daigné me répondre, ce qui ne faisait qu'accentuer ma colère. Depuis quelques jours déjà, je marchais sur des charbons ardents. Un rien me poussait à bout et j'éclatais sans prévenir, passant mes nerfs sur la première personne qui me tombait sous la main. A croire que la perversion commençait à me gagner moi aussi malgré tous mes efforts pour rester fidèle à moi-même, y compris en temps de crise.

Abattue, je refermais mon livre. Je ne réussirai pas à travailler aujourd'hui, il aurait été stupide de feindre la concentration alors que mes pensées vagabondaient depuis quelques bonnes minutes. Je quittais donc la bibliothèque en adressant un sourire crispé à sa gérante qui me rendit un regard interloqué. Cela ne me ressemblait pas de partir en coup de vent, je le savais. Bref, c'était une sale journée. Et il pleuvait des cordes. J'avais presque envie de pleurer de frustration. Je ne pouvais donc pas aller m'aérer dans les jardins, il me fallait trouver une autre solution. Je me laissais plus ou moins guider par mes pas, explorant le château. Il y avait forcément des coins que je n'avais pas encore visités. Je terminais ma quête devant une porte de bois fin et la poussais sans ménagement. Pas de quartier, tout le monde allait pâtir de ma fort méchante humeur, c'était garanti.

Je pénétrais dans une pièce poussiéreuse, tant et si bien que je toussais malgré tout. Les yeux piquants, j'avançais dans la pièce, découvrant de vieux instruments ternes et sans vie. Quoique... Non, ils étaient vivants. Car presque aussitôt, une violente symphonie éclata dans la salle. Les instruments fantômes me sciaient les tympans. C'était beau, mais si féroce... Et je compris bien assez tard qu'ils reproduisaient exactement mes émotions. Quelques secondes plus tard, la musique changea légèrement. Surprise, je fis volte-face. Et me retrouvais nez-à-nez avec Eden. Quand je dis journée de merde, autant y aller jusqu'au bout !