Petite, Inès voulait être acrobate de cirque ou détective privée. En grandissant, elle a compris que même dans le monde magique, les rêves se devaient d'être plus terre à terre.

Lumière
Avril 2001. Pendant que le tout premier touriste de l'espace flottait à quelques milliers de kilomètres de la Terre, dans une petite ville d'Écosse, une jeune sorcière de 17 ans accouchait d'un gros bébé en santé aux joues rebondies et bien écarlates sous la puissance des cris qu'il poussait.

Fast Forward
Juillet 2008. «Inès Neïla Saouli! Tu déposes ça tout de suite et tu vas demander pardon à Mme Samian, et pas de discussion!» La fillette de 7 ans et presque 1/4, le menton fier, mais couvert de confiture, avait des éclairs furieux dans les yeux, mais ne tenta pas même un instant de dissimuler la tarte dérobée à la voisine et qui lui glissait entre les doigts. Elle tapa du pied autant qu'elle put, mais dut se rendre à l'évidence : son oncle ne flancherait pas cette fois et elle avait intérêt à s'exécuter si elle voulait assister le samedi suivant au premier match de Quidditch professionnel disputé par sa mère avec les Pies de Montrose.

Août 2010. Il n'était pas question que Salim parte à Poudlard avec Mehdi et qu'elle reste seule à la maison avec grand-mère et Akim! Pas question de laisser passer une telle injustice! Elle allait leur montrer à tous qu'elle savait déjà faire de la sorcellerie et qu'elle serait la plus jeune élève de l'école et la plus douée et la plus savante! Elle brandit le bout de bois qu'elle avait ramassé plus tôt au bord du ruisseau et le pointa férocement vers la branche du pommier où trônaient de délicieux fruits pour le moment hors d'atteinte. «Accio pomme!» Elle attendit. Rien. «Accio pomme!» Impatience. «Accio! Accio! Accio j'ai dit!» Mais elle eut beau secouer sa baguette improvisée, les pommes restèrent sur la branche, et Salim allait partir sans elle pour ce château magique où sa mère et son père avaient étudié ensemble pour devenir de formidables sorciers (parce que oui, même si elle ne connaissait pas son père, elle était convaincue qu'il était un grand sorcier).

Septembre 2012. C'était enfin le moment. Celui où tout le monde saurait qu'elle avait un avenir brillant devant elle, aussi et même plus brillant que celui de sa mère, tout récemment nommée capitaine des Pies de Montrose. Oh, ce serait une année magnifique. «Poufsouffle!» À peine posé sur sa tête, le vieux chapeau rapiécé avait réduit à néant ses plus grandes aspirations. Poufsouffle?! La maison où atterrissaient tous ceux dont les autres maisons ne voulaient pas? Ceux qui, selon Salim, perdaient la coupe année après année? Catastrophée, sonnée, la jeune fille tourna la tête vers son oncle, mais n'alla pas s'asseoir à ses côtés, comme elle l'avait tant espéré. Elle traîna plutôt les pieds jusqu'à la table où l'attendait en souriant une rangée d'élèves vêtus de jaune et noir.

Octobre 2013. Elle s'en fichait de toute façon. Ça n'avait jamais été son rêve à elle. Juste celui de sa mère. Et s'ils ne savaient pas reconnaître son talent sur un balai, sous prétexte qu'il était inutile de faire autant de pirouettes pour attraper le souaffle, eh bien tant pis pour eux! De quel droit ils lui collaient sur le dos leur défaite à ce premier match de la saison? Inès quitta le vestiaire de l'équipe de Quidditch de Poufsouffle la tête haute et le pas fier, sans un regret. Le vol acrobatique, c'était bien mieux que le Quidditch, de toute façon. Si pincement au coeur il y avait, c'était à l'idée d'annoncer la nouvelle à sa mère à son retour d'Oxford.

Février 2015. «Mooom, j'ai 13 ans, je suis plus une enfant!» Devant le miroir de sa chambre, une adolescente aux bras trop longs, à la poitrine trop plate, aux genoux cagneux et aux taches de rousseur envahissantes jetait un regard maussade à sa réflexion. Elle avait passé tout l'après-midi à se coiffer, à se maquiller comme elle avait vu sa mère le faire, en allongeant l'amande de ses yeux pour les rendre plus mystérieux, et avait soigneusement choisi l'agencement de ses vêtements. Elle avait opté pour sa robe orangée, celle qui, selon Akim, lui donnait trois ans de plus et faisait ressortir son teint de pêche. Mais sa mère, en passant la tête par la porte de sa chambre et en lui lançant un «Tu es toute mignonne, Nessie», avait ruiné tous ses efforts. Dire que c'était la première fois qu'Akim acceptait qu'elle et Salim l'accompagnent à une soirée!

Délinquance
Juillet 2016. Le souffle précipité, le coeur battant à tout rompre, mais un large sourire aux lèvres, Inès éclata de rire, s'attirant le regard noir de Salim et de son ami, le beau Tarek. Ils avaient couru comme des dératés en fuyant la police moldue dans les rues de Glasgow, et avec les talons haut portés par Inès, ça relevait de l'exploit. La pluie s'était mise de la partie et Inès était trempée des pieds à la tête, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de rire. La main sur le collier tant convoité, elle tira la langue à son oncle et presque frère. «Oh, allez, vous avez réussi votre trafic, j'ai bien le droit à une récompense!» Sur un gros soupir, mais avec la pointe d'un sourire, Salim attrapa Inès par le bras, il était temps de regagner le Myrddin Wyllt district d'Inverness. Sur un signe de tête à son ami, tous trois disparurent, laissant la ruelle à la nuit et au silence.

Avril 2018. Inès avait 17 ans ce jour-là. Elle passerait bientôt son permis de transplanage. Sa 6e année s'achevait à Poudlard. La vie d'adulte s'offrait à elle. La liberté, enfin. Mais sa vie s'apprêtait à prendre un tournant étonnant, et ce tournant se présenta sous la forme d'une porte qui claque. Inès aperçut sa mère, blême et furieuse, le dos tourné à la porte. « C'est qui? » Ferme, dure, le regard fermée, Zahia tenta de l'éloigner de la porte. « Personne. » Inès se débattit puis se figea en entendant une voix mâle. « Come on, Zahia, it's time ! » Le bruit sourd derrière la porte fit sursauter Inès. « Mom? » fit-elle d'une voix où pointait le doute. « Let me see her », reprit l'homme. Zahia relâcha sa fille, levant les bras en signe d'abandon, et alla ouvrir la porte, résignée. « Très bien ! » Sur le pas de la porte, Inès vit pour la première fois son père. Malik.

Décembre 2018. Mehdi se tenait à l'autre bout du salon, mais Inès pouvait sentir le rayonnement de fierté qui se dégageait de son oncle. Les bras croisés, il fit signe que "oui" à la question silencieuse que lui adressa sa nièce après avoir ouvert le paquet à son nom sous le sapin. Aussitôt, elle lâcha la boîte et s'élança dans les bras de Mehdi pour le serrer si fort qu'il en eu le souffle coupé. «Tu le mérites bien, va. Tu as des notes excellentes dans toutes les matières et ça te sera utile pour tes ASPIC et ta rentrée à Hungcalf l'an prochain.» Malgré une petite pointe de culpabilité à cette dernière mention, Inès lui colla deux grosses bises sur les joues pour le remercier, et retourna admirer le sac magnifiquement brodé qu'elle venait de recevoir. Pendant tout le congé des Fêtes, elle s'amusa à le remplir de tout ce qu'elle pouvait trouver, s'émerveillant de sa capacité apparemment infinie.

Fuite
Août 2019. «Et si on partait?» Perdue dans les yeux noirs de Tarek, la main passant et repassant distraitement sur la clavicule de son copain, Inès n'entendit pas sur le coup la question. Tarek lui attrapa les deux mains. «Ness! On part, ensemble. On va à Barcelone, à Paris, à Alger! T'as un passeport, non? Come on, juste toi et moi.» Mais sa mère, qui croyait toujours qu'elle devait commencer ses études à Hungcalf, le travail, l'argent moldu? Les arguments d'Inès étaient bien faibles; elle ne pouvait jamais rien refuser à Tarek et ça faisait des jours qu'elle se lamentait de devoir dire la vérité à sa mère au sujet de l'université. «Elle voudra jamais.» Inès imaginait déjà les protestations de sa mère, ses haut cris. Une autre dispute. «On n'a qu'à ne pas lui dire...»

Un matin. Envolée. Chambre désertée. Livres d'école abandonnés. Pas de nouvelles. Une semaine. Deux semaines. Cinq semaines. Deux mois. Un hibou adressé à Mehdi. Quelques mots pour rassurer. Je suis à Nice, tout va bien. Je travaille comme serveuse. Des bises à mom. Des lettres plus régulières, toujours les mêmes mots. Tout va bien. Puis Je ne serai pas là pour les Fêtes. Joyeux Noël à tous! Puis un autre long silence. Mars 2020. Un appel du service de police de Londres à Zahia. Votre fille a été arrêtée en France. Elle sera rapatriée dans deux semaines. Parution devant un juge, clément, compréhensif. Non, pas de dossier judiciaire. Devra vivre sous la surveillance de sa mère. Plus de Tarek. Retour à la case départ, à Inverness.

TOI ET MOI ETC.
Famille Saouli

Inès et Zahia (et Sebastian et bébé Charlie...)
La relation entre Zahia est sa fille est pour le moins compliquée. Si mère et fille s'aiment plus fort que tout, elles sont aussi les deux plus grosses têtes brûlées de l'univers entier (très probablement). Inès garde rancoeur à sa mère d'avoir été si peu présente dans sa vie et de l'avoir coupée de son père, même si elle ressent beaucoup de fierté en voyant la carrière de sa mère et la femme forte et indépendante qu'elle est. Au quotidien, leurs forts caractères créent de nombreuses étincelles et leurs disputes prennent parfois des allures de rencontre entre plaques tectoniques. Depuis qu'elles vivent loin l'une de l'autre, elles sont comme des amies. L'arrivée de bébé Charlie dans la vie de sa mère et de son beau-père la rend confuse : elle est à la fois heureuse d'avoir enfin un petit frère, et envieuse de cet enfant qui connaîtra une vraie maman et un vrai papa présents.

Inès et Malik
Après avoir été absent pendant plus de 17 ans, Malik a débarqué dans la vie de sa fille comme tout droit tombé du ciel, apparaissant un jour sur le pas de la porte des Saouli. Avec son retour un peu forcé dans sa vie en 2018, Inès découvre un homme qui lui à souvent manqué en grandissant, mais dont la place était prise par trois oncles, remplissant chacun parfaitement un rôle. Bien qu'elle passe des bons moments avec lui, elle ne lui fait pas totalement confiance, ne lui confie pas grand chose et craint toujours un peu de le voir repartir comme il est arrivé.

Inès et ses oncles
Si Akim remplit la place manquante de son père pour les bêtises, les moments loufoques, les gros câlins, les vols de cookies dans la cuisine et les bobos, il n'a jamais été celui vers qui Inès se tournait pour les questions sérieuses. Mehdi, lui, a été l'oncle le plus présent pour elle, ayant hérité très jeune de sa responsabilité. Pendant les vacances ou les absences de sa soeur, Mehdi était celui qui devait s'occuper de la plus jeune des Saouli. Avec sa musique et sa poésie, il a su canaliser les émotions de la tornade qu'était (et est toujours) Inès. Ils gardent un lien très soudé. Salim, c'est presque comme un cousin, comme un frère, comme son double maléfique. À l'entraîner dans les soirées, à la faire traîner avec ses potes (pas toujours recommandables), à l'amener là où elle voulait même avant son permis de transplanage. Salim, c'est son échappatoire, l'adrénaline, la folie. Et Salim ne cautionne pas vraiment le retour du père d'Inès dans leur vie.

Inès et Tarek
Tarek, ce fut le prince noir monté sur un grand destrier, le voleur des mille et une nuits, l'accrocheur d'étoiles, le parfum de danger. Attirée par Tarek comme un papillon par la flamme, Inès s'était prise dans la toile de cet ami de Salim, un jeune homme charmant, de cinq ans son aîné, mais à l'avenir incertain. Ce fut le premier grand amour d'Inès, la première histoire sérieuse, et elle l'aurait suivi n'importe où. Elle qui regimbe face à l'autorité se perd dans les yeux noirs de Tarek et serait prête à tout accepter de lui. Même après leur séparation forcée et son retour en Écosse, Inès a tenté de maintenir le contact. Il l'a laissée à la fin de l'été 2020.

Inès et ses grands-parents
Dounia, c'est le roc d'Inès. Toujours là quand elle en a besoin. Toujours aimante. Toujours là pour lui pardonner ses excès ou lui remettre ses mensonges sur le nez. Petite, Inès adorait lui tenir compagnie au Cochon à plumes. Noham, lui, est un homme de son temps, pas des plus démonstratifs, plus préoccupé par la politique que par les bêtises de sa petite-fille. Quand il passe du temps avec elle, il se rattrape et la gâte exagérément. Il l'adore.