Habillé de noir dans un effort perpétuel de longer les murs sans être vu, tu avances dans les couloirs du minitère. Personne ne fait attention à toi, tu es dans le flot continu de gens qui marchent vite voulant rejoindre le plus rapidement possible leur destination. Ici, personne n’a le temps de le perdre. Il y a des décisions qui se prennent, des accords qui se concluent, des enquêtes qui se mènent. Hélas, rien de tout cela ne se fait seul, et voilà pourquoi cet endroit, aux milliers de couloirs, est une réelle fourmilière qui ne se tarit pas.

Toi même tu fais partie de la masse, pressé, tu veux quelqu’un qui signe le papier dans la pochette. Tu veux qu’on te donne l’autorisation de poursuivre dans ton enquête. Pour ça il faut que tu avances l’audience. Tu as besoin de toutes les déclarations, ça fait trop longtemps que tu attends. Tu as été informé que ça allait être décalé une fois de plus, par une simple note, cette fois ci tu as décidé que ça ne se passerait pas comme ça.

Mais comme tu ne fais jamais les choses sans réfléchir, tu as d’abord recueilli des informations. Qui pourrais-tu tenter d’amadouer pour avoir ce que tu veux ? Qui serait prêt à négocier ? Il y a toujours moyen d’intéresser les gens, de leur donner ce qu’ils veulent, voire même de leur faire miroiter quelque chose qu’ils ne pensaient pas même vouloir. Tu es doué pour ça.
Après avoir glané des informations de ci de là, tu as trouvé ta victime.

Il y a des avantages à faire partie d’une école comme Hungcalf, il y a un réseau d'étudiants, et chez les Grymm d’autant plus pas vrai ? Ces gens qui aiment le pouvoir plus que tout, qui veulent absolument réussir. Sans doute que tu es dans la maison qui te correspond le plus. Oui, marcher sur les autres n’a jamais été un problème pour toi. Pourquoi ça le serait ? Enfin là n’est pas la question.
Aujourd’hui c’est Calliope Muller que tu cherches alors que tu passes divers bureaux. On t’a prévenu alors que son nom avait fini par sortir plusieurs fois lors de tes recherches. Intelligente, belle à n’en pas douter (je vous passerais les commentaires plus graveleux), mais pas commode. C’est ton affaire les gens peu commode, un challenge même. Si on peut rajouter “la cerise” sur le gâteau d’une banale demande. D’autant qu’elle ne doit pas être totalement étrangère au fait qu’on t’ait déjà reculé l’audience sur ton enquête.

Arrivé devant le bureau tu tapes sur la vitre. Il n’y a plus qu’à attendre. Tu as rendez vous à 16h30 et il est 29. Tu espères qu’elle sera ponctuelle, c’est une qualité que tu sais apprécier.

Elle est là, disponible quand tu tapes à la porte. Si elle te met des bâtons dans les roues, tu pourras au moins noter qu’elle était à l’heure, ça sera en sa faveur.
C’est donc ainsi que tu découvre la dite Calliope Muller, fille de l’illustre famille connue, et reconnues. Sans doute parce que tous ses membres sont actuellement à Hungcalf. Calliope fait partie des aînés, pour les autres, tu en connais nombre, parce qu’ils sont Grymm pour la majorité, et que pour certains ils ont le même âge que toi, et des cours en commun. Cependant tu n’as pas croisé la jeune et jolie Calliope.

Une fois la porte passée, tu t’armes d’un sourire charmeur, monté et étudié. En général ça suffit à faire son effet. Voilà le côté pile de la pièce, en temps normal tu réserves tes sourires, surtout les sincères. Mais aujourd’hui tu veux obtenir quelque chose, et tu sais que pour ça, il va falloir faire des efforts. Parfois il faut savoir donner de sa personne pour obtenir ce que l’on veut.
Elle rend un sourire tout à fait professionel, en t’engageant à t’asseoir face à son bureau derrière lequel elle prend place elle aussi.

En un instant tu as scanné la pièce. Chaque chose est à sa place, chaque place semble avoir été étudiée à l’avance. Intéressant. Ca ne sera peut être pas aussi simple que tu le pensais… Ou bien si. Est elle une femme stricte ? Ton esprit cynique lui invente des lunettes sévères, un chemisier blanc, sur une jupe crayon qu’elle ne porte pas… Tu divagues trop vite, et reviens rapidement à tes moutons quand sa voix s’élève cassant le silence des quelques secondes dédiées à l’installation dans le bureau. Elle est à son avantage, elle se sent à l’aise, chez elle, dans son bon droit, tu le vois dans sa posture. Tu décides de ne pas prendre le même chemin, tu risques de l’agacer si tu prends un air d’avoir déjà gagné la partie. A ce qu’elle dégage, elle ne doit pas apprécier qu’un homme se sente supérieur juste parce qu’il s’agit d’un homme, et tu n’as pas besoin d’avoir le moindre talent de voyance pour savoir que ça lui est arrivé nombre de fois. Éviter le frontal, prendre des chemins détournés.

« J’ai reçu une nouvelle note de votre bureau décalant l’audience liée à mon enquête.»

Tu sors de la pochette en cuir brun que tu tiens sous le bras, divers documents, donc la note reçue, peut être écrite de sa plume, attachée par un trombone.

« Etant donné l’ampleur et l’urgence de l’enquête, j’aurais aimé pouvoir plaidé ma cause en personne. »

Tu parles d’un ton calme, s'abstenant de facéties ou de phrases de politesse désuètes. Puisqu’il s’agit d’un empoisonnement avec des matières stupéfiantes rares, tu as besoin d’une audience, qui débouchera sans doute sur plusieurs perquisition. Tu as peur qu’attendre trop ne laisse pas le temps au coupable de retourner leur veste. Pour l’instant tu as des preuves, pas suffisamment en l'occurrence, tu as besoin que ça avance plus vite.

“J’ignorais que les aurors stagiaires avaient la plaidoirie pour compétence…”

Tu ne réprimes pas le sourire qui te vient aux lèvres alors que ces quelques mots s’échappent de ses lèvres. Tu aimes trop le cynisme des mots à peine détourné pour ne pas apprécier la remarque bien que celle-ci ne va pas réellement dans ton sens. Et encore. Tu as ce don de tout détourner pour être toujours dans le sens du courant. Cependant, c’est le genre de chose que Miss Calliope Muller ne peut pas savoir.
Tu as le bon sens de ne rien dire. Tu n’as pas besoin de répondre. Tu ne te justifieras pas à une assistante juridique trop zélée qui aime faire des jeux de mots sur tes compétences. Cependant tu apprécies, tu ne le nierai pas, et tu penses donc avoir une chance de parvenir à tes fins.


Elle t’encourage à poursuivre et c’est ce que tu comptes faire. De cette même voix posée et calme tu reprends.

« Une audience avec victime et témoins nous permettrait d’accéder à une perquisition des apothicaires sur la liste. »

Tu indiques du doigt le papier que tu lui as fait passé où effectivement différentes entités sont répertoriées, ainsi que les noms des propriétaires et employés. Les mêmes noms qui sont ressortis de ton enquête approfondie dans ce trafic étrange et sans doute insolite.

« Ce n’est pas un vol de balais, ou de trafic de tentacula. »

Tu laisses une espèce de suspens s'installer. Tu veux être sûr d’avoir capter l’attention de Miss Muller.

« C’est une substance qui lui est rajoutée qui n’est pas encore identifiée mais qui semble mortel, indétectable même pour un maître de potion, et qui ne se déclenche jamais au même moment. Ca pourrait faire davantage de dégâts que les quatre premiers cas, et se propager rapidement. Pour l’instant personne ne semble avoir de soupçons, mais si l’apothicaire se rend compte du lien que je suis en train de faire, il pourrait fuir et il faudra attendre qu’il frappe à nouveau, ailleurs sans doute. »

Tu marques une pose pour laisser les mots faire leur chemin dans l’esprit de la jolie brune.

« Le vol de balais est une diversion de bas étage pour ce qui se cache derrière. »

Ce qui est vrai, et tu t’en es rapidement rendu compte en suivant le fil d’Ariane des indices disposés de ça de là par des malfrats négligents.

« J’ai besoin de votre aide pour qu’il n’y ait pas d’autres victime. »

Tenterais tu de jouer sur la corde sensible d’une femme qui pourrait en effet avoir pitié des pauvres drogués qui meurent d’autre chose que d’overdose ? Ton ton s’est quelque peu réchauffé, teinté de notes plus graves. Est ce que la dame va se ranger de ton côté et tenter de faire quelque chose pour toi ? Tu n’as pas encore abattu toutes tes cartes, mais tu as fait un travail propre.

Un rapport ? Tu en as un. Tu es venu équipé. A vrai dire, tu es souvent préparé à diverses possibilités, comme d’avoir en face de toi un adversaire d’envergure. On ne peut pas dire que ça arrive souvent, mais ça arrive oui. Tu ne sais pas encore si Calliope Muller remplit tous les critères de ta liste des gens intéressants, mais en tout cas, elle a l’air déterminée. Déterminée à ne pas signer le papier dont tu as besoin. Mais tu as décidé que le challenge du jour serait de la faire changer d’avis, et tu comptes bien y parvenir. Tu as des arguments, tu as de quoi appuyer tes demandes, et tu vas t’en servir.

Aussi de la pochette en cuir tu sors le dossier regroupant tes liens, conclusions sur ce qu’il c’est passé, voilà là l’ensemble des preuves, des indices, des fils rouges que tu as tirés entre chacun d’entre eux. Tranquillement tu le sors et tu le donnes à la jeune femme. Il faut qu’elle comprenne que tu maîtrises ton sujet. Tu n’es pas un petit stagiaire qui s’embrouille dans ses explications et qui tremble devant une magistrate zélée. Oui elle a du pouvoir, mais tu ne compte pas lui en donner davantage.

« Le voici. »

Il contient un nombre important de pages et tu doutes qu’elle le lise maintenant bien sûr. Mais de toute façon elle te demande implicitement de lui faire un résumé. Les choses se déroulent plutôt bien de ton côté du trouve.

« Comme vous pourrez le lire dans le rapport, le tout a effectivement commencé avec un vol de balais. De balais neufs, rapides et sans le moindre traceurs placés pour prévenir leur vol et des balais vendus dans le magasin avec traceurs. Il a fallu un certain moment avant de se rendre compte de ce détail. Principalement parce que le vendeur de balais n’avait pas signalé que certains des balais n’étaient pas encore achevés. Je pense que les voleurs ont profité de ce détail. »

Les gens ne sont pas toujours coopératifs, ni intelligents.

« Ca aurait été impossible sans un indic. Il a réussi à se procurer un de ses balais, et après quelques sorts intéressants nous avons finalement réussi à retracer une partie du chemin. Sans retrouver qui l’avait volé exactement nous sommes remontés à un ancien lieu de production de tentacula -vous savez que ce genre d’endroits changent souvent. »

Tu pars du principe qu’elle sait.

« C’est en examinant le lieu qu’on a trouvé des traces de la substance en question. Impossible à identifier pour l’instant, mais reconnaissable par son essence dans le corps de plusieurs personnes mortes ou malades. »

Des semaines d’enquête à suivre son instinct car le lien n’étant pas évident, les supérieurs n’étaient pas forcément enclins à poursuivre. Il y a davantage de détail scabreux dans le rapport. Mais elle aura tout le temps de le lire seule dans son lit sans doute.

« Il y a différents apothicaires en ligne de mire, surtout parce qu’ils ne sont pas clairs sur leurs inventaires et ont eu plusieurs contrôles par le ministère après certaines plaintes. C’est pour l’instant la seule piste que j’ai. Et maintenant j’ai besoin de vous pour la creuser. »

Tu l’intègres dans le jeu de piste, peut être qu’elle voudrait s’y frotter qui sait ?

Tu es étonnamment bavard et ton interlocutrice plus avare de mot maintenant qu’elle a le dossier sous les yeux. Tu aurais pu l’envoyer avant, mais tu sais comment sont les bureaucrates fainéants: ils stockent sur leur bureau et relègue le travail à plus tard. Il y a en a la pelle des gens comme ça, et même si l’assistance Muller ne semble pas être faite de ce bois là, tu as quand même noté que jusqu’ici elle n’accordait que peu de valeur à tes propos, aussi sa décision est toujours la même dans son esprit, tu peux le dire par son regard. Tu ne l’as pas encore fait changer d’avis. Elle est sur ses gardes, et comme elle se sait en position de force, ne fait pas le moindre geste qui pourrait laisser prétendre que la balle à changer de camp. Hélas pour toi, tu es tombé sur quelqu’un d’intelligent et d’impliqué. Même si avoir à faire à ce genre de personne est nettement plus intéressant, ça implique aussi fournir davantage de travail pour les convaincre. Toi tu as besoin que ça aille vite, tu n’as pas le temps de te perdre en courbette et bavardage.

« Page 87. »

Bien sûr, il est inclus dans ce rapport, quel intérêt sinon? Tu as beau être stagiaire, tu n’es pas un débutant. Tu sais comment écrire une histoire bien ficelée. N’est ce pas tout l’intérêt. Toi qui est un maître menteur, tu sais comment tourner les faits notamment pour qu’ils paraissent à ton avantage, mais aussi et surtout pour convaincre auditoire ou lecteur. Si des améliorations sont possibles dans ton travail, ce n’est clairement pas d’un point de vue rédactionnel comme ça pourrait être le cas pour certains de tes camarades. Ton esprit torturé voit les failles, les anticipe, et les bouche avant que quelqu’un du genre de la demoiselle assise en face de toi ne les exploite.

« Il y a aussi le rapport d’analyse de la substance en question rendu par l’alchimiste en chef dans les pages suivantes. »

Une chance pour toi que cette affaire l’ait intéressé au point qu’il accepte de le faire. L’avantage avec les hommes de la trempe de l’alchimiste en chef, c’est qu’ils sont assez curieux pour que ce genre de mystère soit plus qu'intéressant à leurs yeux, se sont des challenges à part entière. Nul doute que l’homme soit encore en train de tenter l’identification.

« Y a t’il suffisamment d’élément pour revoir la date de l’audience ? »

Pour toi la réponse est évidente mais la brune semble récalcitrante. Aussi faire à nouveau changer la date voudrait inclure qu’elle s’est trompée sur son jugement. Bien entendu, elle pourrait toujours simuler le fait que de nouveaux éléments ont donné une nouvelle face à cette enquête, la vérité est autre, les éléments principaux étaient dans la première demande que tu as adressé, mais pas le dossier complet. Enfin, le résultat devrait être le même non ? Tu affiches un air légèrement inquiet, concerné pour sûr. Tu n’affiches pas ouvertement ton impatience bien qu’elle soit mise à rude épreuve devant le peu de déférence que l’on t’accorde.

Elle ne compte pas lâcher l’affaire si facilement que ça. Sa remarque acerbe le montre bien. Elle ne se laisse pas démonter bien que tu apportes toutes les preuves dont elle va avoir besoin. Tu vas partir pour la laisser lire le dossier dans son intégralité, mais tu veux être là pour défendre ce que tu as écrit, et l’intéressée. Tu as peur que si tu ne le fais pas, tout finisse à la poubelle sans qu’elle n’y ait accordé une grande importance. Si c’était le cas, il te faudrait revenir, recommencer le speech, donc perdre ton temps. Tu détestes perdre ton temps, et tu es sûr que c’est aussi le cas de Calliope.

Tu ne dis rien, et fais preuve d’une grande patience envers la jeune femme. On peut dire que ta patience est mise à rude épreuve, c’est une femme procédurière, elle doit aimer ça, sinon elle ne mettrait pas tant de coeur à la tâche, elle te dirait oui ou non, plutôt non que oui, et basta. Donc elle a une conscience professionnelle, un goût pour le travail bien fait. Pendant un instant tu te demandes si c’est sincère ou si elle a un coeur corruptible. Ce serait intéressant d’avoir cette information, tu pourrais faire en sorte de l’avoir. Un challenge de plus ? Il y a des terrains où tu fais prendre d’une grande passivité, car peu de chose que les autres ont à t’offrir t'intéresse réellement il faut le dire. Qu’en est il de Calliope Muller ?

Elle parcourt les pages du manuscrit. Reconnaît- t- elle le nom de l’alchimiste ? Sans doute. Il intervient dans des dossiers de grandes envergures, et le fait qu’il se soit intéressé à ton travail, est un gage de qualité.
Ses yeux se relèvent vers toi. “Admettons que ça soit le cas” La balance commencerait-elle à pencher enfin de ton côté ?
Hélas tu ne peux te réjouir, tout au contraire, elle te fait réitérer en te demandant ce que tu comptes demander. Tu lui as dit dès le début: une perquisition. Une perquisition pour pouvoir faire des relevés chez différents apothicaires et contrôler leur marchandises. Il faut le faire avant qu’il ne soit trop tard, avant qu’il n’ait le temps de se rendre compte d’un quelconque soupçon. Cependant il ne faut pas que tu présentes les choses comme ça, ne pas non plus que tu insuffles trop d’émotions à ton discours sinon elle pourrait repérer une faille, s’y engouffrer. C’est souvent comme ça que tes collègues se font avoir. Il est connu que les aurors sont parfois des chiens fous qui ne savent pas se contenir, ce qui peut parfois s’avérer comme un atout et aussi par biens des abords, un défaut.

« Je voudrais qu’il me soit octroyé le droit de procéder à plusieurs perquisitions. Il faudrait faire des relevés d’échantillons dans les matières premières qui servent à façonner la tentacula, et aussi à la transporter chez tous les Apothicaires de la liste. Ca nous permettrait d’identifier tous potentiels collaborateurs, de les arrêter, de les interroger. Pour l’instant le nombre de personnes au courant de cette enquête se comptent sur les doigts d’une main, je voudrais pouvoir le faire avant que d’autres aient des soupçons et qu’ils fassent disparaître les preuves. »

Ta voix est calme, tu modules l’agacement de devoir répéter. Finalement tu joins tes mains alors que tu appuies tes coudes sur tes genoux.

« Les enjeux sont importants… On pourrait faire une pierre deux coups de cette affaire… Si vous prêtez attention aux victimes, se sont parfois des étudiants, pas des drogués notoires, de simples gamins qui testent des choses pour s’amuser… Ils ne méritent pas de mourir pour ça… »

Ca serait mal te connaître que de croire totalement à ce discours monté de toute pièce. Mais elle ne te connait pas.

Elle voit. Tu serais bien curieux de savoir ce qu’elle voit réellement, de savoir ce qui se passe dans son cerveau, derrière ses prunelles noires. Parfois, dans ce genre de circonstances, tu voudrais être capable d’effleurer l’esprit des gens. Cependant toi tu as choisi la défense dans ce cas ci. Tu as choisi la faculté de fermer ton esprit aux autres pour protéger tes secrets. Qu’elle est l’ouverture d’esprit de la magistrate en face de toi ? Tu ne sais pas encore.

Elle s’autorise un sourire, ce qui est assez rare pour le remarquer. Mais ce n’est pas encourageant pour toi, au contraire. L’ironie facilement lisible sur son visage ne laisse rien présager de bon, et tu sens qu’il va encore falloir batailler. Il faut que tu avances davantage d’arguments pour la convaincre, ou plutôt que tu laisses le temps à ce que tu as donné de faire leur chemin dans son esprit.

En tout cas, elle de son côté n’en a pas fini avec toi. Elle reprend avec un ton aligné à l’expression de son visage.
Elle joue, un rôle qu’elle tient à la perfection. Franchement tu pourrais lui décerner un oscar de l’assistante blasée qui prend un malin plaisir à montrer à quel point elle est débordée, alors que dès qu’on passe la porte, elle se fait les ongles. Oh bien entendu c’est une caricature, mais tout de même. Tu n’aimes pas ça. Elle t’agace, et aucun doute qu’elle le sait. C’est pourtant à toi de faire profil bas aussi dur que ça puisse être. Tu sais être patient pour avoir ce que tu veux, même si en règle générale on ne te donne pas autant de fil à retordre. Tu aimes jouer, mais gagner surtout. Quand ça commence à sentir le roussi, en général tu prends la tangente, cependant, dans le cas présent, il n’y a pas d'autre voie empruntable. Il faut passer par elle pour obtenir ce que tu veux.

Elle énonce tout un tas de fait, dont des enquêtes dont tu as entendu parlé, notamment la dernière. Bien sûr. Tout cela n’est que pure rhétorique. Elle n’attend pas de réponse de ta part, elle veut juste de faire te sentir insignifiant, te faire comprendre que son travail l’est en tout cas plus que le tiens, et qu’il est surtout primordial. Si tu n’avais pas encore compris qu’à ces yeux tu n’es qu’un petit auror inutile.

“M’est avis que ce genre de décision ne m’appartient pas Miss Muller. C’est pourquoi je suis ici pour plaider ma cause mais que la décision vous revient.”

Rendre les armes, s’avouer vaincue, montrer à son adversaire qu’on peut être docile, et aussi peu dangereux qu’un chaton sans griffe. Tu ne lui donneras sans doute pas la satisfaction de te voir te rouler par terre et pleurer. Tu gardes un air affable, calme, tu ne laisses rien fuiter de la tempête intérieure qui a envie d’éclater. Qu’on te résiste n’est pas agréable, il faut que tu sois plus intelligent qu’elle.

“Toute l’avancée de mon enquête est dans ces pages. A présent j’ai la satisfaction de savoir que je ne suis pas venu pour rien et je suis certain que vous avez enfin toutes les pièces en votre possession pour prendre une décision juste. Je m’en remet à vous Miss Calliope Muller.”

Cette dernière phrase sonne comme une réelle déclaration, tu es capable d’utiliser bien des charmes.