Elvira ━ Una Madrigal no es convencional ! Cette rengaine, Elvira l’a traînée toute sa vie. Une phrase répétée en boucle un peu pour se rassurer, un peu pour affirmer sa différence. Fille d’une expatriée espagnole moldue mariée à un sorcier sang-mêlé mexicain, c’est dans ces quelques mots qu’elle a puisé la force de revendiquer qui elle était, et de vivre sa vie comme elle l’entendait. Sorcière sang-mêlée, donc, mais artiste avant-tout, elle a plus généralement vécu comme sa mère avant elle : à la manière moldue. Bien qu’elle sache user de magie, elle juge non nécessaires les sortilèges visant à animer les toiles, et étant intégrée surtout dans son village non sorcier, c’est à eux qu’elle destine ses paysages et portraits. Et cette habitude, elle l’a transmise, pour ne pas dire imposée (car la grand-mère d’Ofelia a toujours eu un caractère bien trempé), à toute sa famille, son mari autant que ses enfants, qui n’ont guère eu d’autre choix que de suivre son exemple.

Francisco & Emilio ━ star-crossed lovers. Francisco est un fils à maman et l’a toujours été, sans même chercher à le cacher. Alors quand il est tombé amoureux d’Emilio, ce magnifique espagnol aux yeux verts et au sourire solaire, il s’est longtemps caché de peur de perdre l’estime et la confiance de son aimante mère, Elvira. Impressionnante femme au caractère bien trempé et au parcours de vie sans bavure, elle a toujours su offrir à son fils autant d’amour que de fermeté, lui apprenant les bonnes manières et l’importance des traditions familiales. Faire accepter Emilio à la matriarche Madrigal ne fut pas chose aisée car, depuis quelques années déjà, Elvira espérait voir son fils aimé se marier avec son amie de toujours, Lucia. Règne entre eux une amitié profonde et intense que la Mexicaine avait apparenté à de l’amour… Un amour, certes, mais bien différent de celui imaginé par Elvira. Entre Lucia et Francisco, rien n’est charnel, tout est spirituel. Comme deux mêmes pièces d’un puzzle, ils ne peuvent s’emboîter l’un avec l’autre mais se ressemblent à s’y méprendre. C’est sa meilleure amie, sa confidente, celle qui réceptionne ses chagrins et ses bonheurs sans broncher. La seule, hormis Elvira, qui peut lui mettre un pied au cul pour qu’il agisse. Et c’est ce qu’elle a fait afin qu’il demande en mariage l’homme qu’il aime. Une union controversée et non officielle, car non légale dans leur pays, mais d’une symbolique puissante. Entre Emilio et Lucia ne règne ni n’a jamais régné aucune animosité. S’entendant comme larrons en foire, ils sont les premiers à mettre sur pied des plans pour embêter Francisco et le faire sortir de son carcan traditionnel. C’est pourquoi, avec le bug de l’an 2000, Lucia a accepté la demande de son meilleur ami de porter leur enfant. Un peu plus de deux ans plus tard, Ofelia est née…

Elvira & Lucia ━ one way or another. C'est entourée de plusieurs figures féminines fortes qu'Ofelia a grandi. Entre sa grand-mère Elvira et sa mère Lucia, elle s'est imprégnée de modèles d'indépendance, de caractère et de sensibilité. Enfant vive à la palette d'émotions colorée, elle est un savant mélange de ses aînés, diront les parents fiers de leur progéniture. Car dès sa plus tendre enfance, la petite Ofelia révèle sa ressemblance avec les deux plus grandes femmes de sa vie. C’est par le chant qu’elle illustre le caractère singulier de Lucia et sa voix, enchanteresse, qui sait charmer même les plus récalcitrants. Ofelia tient d’elle son timbre chaud et profond. Faisant la fierté de sa mère, c’est dès son plus jeune âge qu’elle intègre des chorales et participe à des compétitions de chant. Poussée par la foi inconditionnelle de Lucia en elle, Ofelia prend vite goût à cet art et s’entraîne à chanter tout ce qui lui passe par la tête.
Elvira est une artiste née et s’illustre dans son petit village par ses belles peintures et ses portraits saisissants. Travaillant la matière de ses propres mains, elle aime peindre de ses doigts et dessiner au fusain, à s’en tâcher la peau sans retour. C’est d’elle que la petite Mexicaine tient sa fascination pour les arts. Peinture, poterie, sculpture et dessins sont autant de plaisirs qu’elle apprend à exécuter à sa manière, laissant parler son originalité.
D’Emilio, elle hérite de son pas gracieux et son sens du rythme. L’harmonie entre son corps et son esprit la conduit à prendre quelques cours de danse. Si Ofelia y voit là un exutoire parfait pour sa grande énergie d’enfant, elle se rend vite compte que la danse classique ne la passionne pas et qu’elle préfère pratiquer le rock, ou le tango.
Francisco, lui, transmet à sa fille chérie et adorée la passion de la musique. Il l’inscrit très jeune à un cours de violoncelle et Ofelia, fascinée, découvre et apprivoise cet instrument bien plus grand et gros qu’elle mais dont les sonorités parlent à son cœur. Bien plus tard, à l’adolescence et par amour de la contradiction, elle se passionne pour la batterie, cet “instrument de l’enfer” dixit Elvira, qui fait trembler son âme et s’emmêler ses pensées.

Ofelia ! ━ a star is born. Ofelia participe à son premier concours de chant à huit ans et finit sur le podium, sans pour autant être la première. Les félicitations du jury gonflent l’ego de la Mexicaine qui se jure, alors, de faire mieux. Loin d’abandonner en si bon chemin, Ofelia s’inscrit à tous les concours de chant existant dans les alentours de sa ville natale, en parallèle de ses études. On la coache, façonne son image de poupée, un peu plus lisse à chaque nouveau casting.  Élève peu exemplaire, tantôt clown tantôt bougonne et très souvent perturbatrice, elle ne parvient pas à accorder à l’école l’intérêt que lui vouent les autres enfants. Elle s’y ennuie et le sujet devient rapidement source de discorde entre elle et ses papas. L’adolescence la frappant comme tous les autres enfants et accumulant la frustration de ne pas être reconnue comme une bonne chanteuse, elle se range peu à peu du côté des rebelles. Son répondant se fait tranchant, sa répartie acide et à quinze ans, elle fait une fugue. Mais deux ans plus tard, c’est la consécration.
Pour la première fois de sa vie, Ofelia devient numéro un aux yeux des autres. Et elle adore ça. La promesse de devenir célèbre et de réaliser son rêve stoppe ses envies de rébellion. La petite sorcière le découvre bien vite, elle a besoin de la reconnaissance de ses proches et des autres pour se sentir pleinement heureuse. “La voz… México", cette émission de chant moldue pour découvrir de jeunes talents à l’aveuglette, la propulse sous la lumière et fait d’elle la petite étoile qui brille plus fort que les autres dans le ciel d’été. Accompagnée d’un artiste mentor, un “coach”, Ofelia est la grande gagnante de la dixième saison de l’émission en 2020, à l’aube de sa majorité. Elle trépigne, promise à une grande carrière, et obtient difficilement ses ASPICs à la fin de sa septième année (sauf en sortilèges, où elle s'en sort étonnamment bien), plus concentrée sur la préparation de son single, puis de l'album à suivre, que sur ses cours.
La suite s’enchaîne à une vitesse folle pour la Mexicaine. En tête des ventes, sans cesse sur le devant de la scène, elle est consacrée l’année suivante “New Artist of the Year” au Latin American Music Awards. Elle rencontre Enrique Iglesias - un autre de ses rêves/fantasmes devenus réalité - et devient l’une des artistes pop mexicaines favorites du public, tant chez les moldus que chez les sorciers, pour qui elle adapte ses albums ; un tout autre marché à part qui lui assure une couverture sur les deux mondes. Des conseillers sont aussi engagés pour cacher la nature sorcière de la jeune femme, qui se fait le plus discrète possible en public, jusqu'à utiliser du polynectar à certaines occasions. Début 2022, son compte instagram dépasse les trente millions de followers.

Ofelia ? ━ who are you ? tw : scarification
Les rêves d’Ofelia ont pris vie. Elle chante, danse, vie de ses passions. Elle a la reconnaissance de ses pairs, l’admiration de ses fans… Et pourtant, la jeune diva s’effondre. Les sourires lui pèsent, tout comme les mots retenus au fond de sa gorge. Devenue adulte, la jeune femme a envie de crier, de se défaire de cette image de petite princesse souriante et plaisante qu’on lui attribue depuis qu’elle a gagné sa première émission de chant. Aux yeux du public, Ofelia n’est qu’amour, douceur et paillettes quand, en réalité, la Mexicaine souffre de la pression des regards tournés vers elle. Une pression à laquelle elle n’avait pas songé en faisant le vœu de devenir une grande chanteuse. Une pression qu’elle soulage en se tailladant les cuisses une fois seule dans son bel appartement de Guadalajara. Elle déchire ses photos dans les magazines, crache sur les commentaires qui font d’elle une poupée sans fond ni forme mais surtout, Ofelia se remet en question. Débarrassée du devoir scolaire imposé par ses parents, elle ne sait plus à qui se confier. Si les amis ne manquent pas, aucun d’eux ne lui semble réel et elle se méfie, la jeune étoile, de leurs sourires et de leurs compliments.
Bientôt, l’évidence s’impose à elle : elle n’est plus la petite Ofelia qui rêvait de gloire. Elle veut pouvoir dévoiler au monde ces facettes d’elle qu’on lui interdit de montrer ; sa fascination pour les films d’horreur, son côté un peu creepy, ses émotions négatives qui la rendent parfois impossible à vivre, ses petites manies et ses passions hors du cadre de l’élégance et de la perfection. Elle veut arrêter de s’habiller en ton clairs et pastel, porter du maquillage glamour et changer de coupe de cheveux si ça lui chante. Elle veut être sexy plutôt que mignonne.
Et c’est ce qu’elle fait, Ofelia, contre l’avis de son agent. Elle dépasse des limites, provoque la surprise et découvre un monde qui l’irrite, la froisse et cherche à écraser son individualité, en même temps que d’ignorer sa voix. En février, la petite starlette innocente ose l’impensable : lors d’une sortie officielle pour la promotion de son dernier album, elle met une gifle à son hôte dont le geste lui a paru déplacé et, surtout, initié sans son consentement. Si la communauté se range de son côté, son image est désormais tachée par cet acte de violence et du jour au lendemain, Ofelia disparaît des réseaux.

Ofelia ✧ ━ be yourself, everyone else is taken. C’est à Hungcalf que la jeune femme réapparait, six mois plus tard. Contre toute attente, elle a fait part à ses parents de l’envie de reprendre ses études et de se spécialiser en arts. Son nom poursuivi par un scandale (ou ce que les tabloïds identifient comme tel), Ofelia fait profil bas pendant ses premières semaines à l’université écossaise, un monde bien différent de celui dans lequel elle a évolué jusqu’à présent. Tout, de la météo à la nourriture, est nouveau mais cela lui fait un bien fou. Inespéré. Semblable aux étudiants, sans artifice ni passe-droit, se mêlant à la foule de ses camarades dans les couloirs parfois trop froids pour son sang chaud, Ofélia revit. Elle reprend goût à la danse, au chant et à la musique. Elle se rend compte qu’avec la pression sévissant sur elle, elle avait arrêté de dessiner. Sa créativité renaît de ses cendres et peu à peu, la Mexicaine s’autorise de nouvelles relations. Fortes ou frivoles, insignifiantes ou rapidement interrompues, elles ont au moins le mérite d’exister. Car la célébrité a coupé court la course de ses émois adolescents. Oh elle en a eu des expériences, mais toutes privées de confiance en l’autre. Toutes fades, malheureuses ou sans réel intérêt pour la jeune femme qu’elle était et est encore, obsédée par l’Amour véritable. Encore aujourd’hui, elle ne sait pas à qui confier ses pensées et ses peines. Libérée des chaînes de sa popularité, Ofelia n’est pas dupe : ici aussi, on finira par la reconnaître, la suivre et lui demande "Pourquoi tu as changé ?". Et le cercle vicieux recommencera. La pression reviendra. Elle tient juste à retarder ce moment loin des caméras, des photographes et des comportements masculins douteux. Même si, au fond, elle souhaite toujours briller dans le regard des autres… Car Ofelia ne veut pas abandonner sa carrière. Juste la vivre avec plus d'honnêteté et de transparence.