Runaway ft. @Juliet Blackthorn - 14.09.21

Malgré ses espérances, les confidences n’avaient pas supprimé le poids sur ses épaules et dans sa poitrine. Il le ressentait toujours autant. A la limite, il avait peut-être diminué un tout petit peu… Mais pas de quoi se sentir mieux et heureux. Il avait lâché toutes ces paroles sans savoir si elles trouveraient réceptacle et oreille compréhensive. Après tout, les jugements sur les tentatives de suicides allaient bon train. Bien sûr qu’il avait pensé aux personnes qu’il aurait laissé derrière lui et qui auraient ressenti de la peine - autant que lui à la mort de son frère aîné. Et il ne démentait pas totalement le fait qu’il y avait un peu d’égocentrisme dans ce geste. Mais de là à se sentir honteux ? C’était le plus difficile, lorsqu’on survivait à une telle atteinte à sa personne. Croiser le regard de ses proches et savoir qu’on ne pourra jamais leur faire comprendre pourquoi on l’a fait, pourquoi on en a ressenti le besoin et que, sur l’instant, leur bonheur à eux n’a absolument pas compté dans la décision. Ainsi, Maximilien espérait que ses parents ne l’apprennent jamais, cela éviterait beaucoup de conversations gênantes et d’explications sans fin sur qui il est vraiment et ce qui l’angoisse. Et face à Juliet désormais, le poids de ces révélations s'abattait sur lui. De surcroît, elle avait prévenu Peter de son passage à l’hôpital. Il le savait, ce dernier n’allait pas tarder à débarquer. Qu’allait-il dire ? Mentir ne le sauverait que quelques heures tout au plus car il ne voyait pas la Blackthorn cacher une si grande information à son cousin, avec qui elle avait mis des mois à se rabibocher. De toute façon, il ne lui demanderait pas une telle chose. Ce serait affreux de remettre sur elle la gravité de son acte et les décisions qui l’y ont mené.

Elle ne répondit pas à tout ça, sûrement tentait-elle d’ingérer les informations auxquelles elle ne s’attendait probablement pas en prenant son poste ce matin. Par contre, elle demanda à s’approcher de lui et après un court instant de réflexion, il hocha de la tête en signe d’accord. Au point où il en était… Autant montrer un peu de bonne grâce. Maximilien craignait les paroles qui allaient suivre. Il savait qu’il n’arriverait pas à entendre certaines d’entre elles et qu’il risquait de mal les prendre. De se sentir incompris. Ce n’était pas de la faute de Juliet mais bien de la sienne.

« Est-ce que tu vas me remonter les bretelles, c’est pour ça que tu veux venir plus près ? » Même s’il n’en portait pas, obviously. Il serait pourtant étrange que de toutes les personnes, ce soit Juliet qui le dispute sur sa façon de gérer les choses. Comme une mère le ferait avec son gamin. Rien que d’y penser, il trouvait l’idée vraiment bizarre. A vrai dire, il ne savait pas quelle position elle voulait prendre face à lui. Si elle parlerait comme une amie, une professionnelle ou une simple connaissance. Pour sûr, la désapprobation faisait partie des sentiments qui devaient la traverser à ce moment-là. Il ne pouvait penser autrement. Mais surtout, il se demanda comment lui réagirait si les places étaient échangées. Sûrement qu’il ne gérerait pas mieux la situation que la Blackthorn en ce moment-même. Il ne saurait pas quoi dire pour réconforter une personne qui venait de manquer la mort. En tant que victime, il ne savait pas non plus ce qu’il voulait entendre de la part des autres. Tout et rien. En ce moment, surtout rien.

Runaway ft. @Juliet Blackthorn - 14.09.21

Il se demandait bien sûr quel ton elle allait prendre envers lui. Il y avait plusieurs manières de réagir à ce qui venait de se produire et de son côté, Maximilien était confus également. Parler à Juliet de ses problèmes ne semblait pas être une évidence, pas après tout ce qu’ils avaient vécu et il lui fit comprendre que, pour lui, l’acte n’était pas pardonné. Sinon, pourquoi seraient-ils restés tant de temps sans se parler ? Sans même s’adresser quelques mots de politesse ? Une partie de lui s’était brisée le jour où Juliet avait découvert la vérité sur sa liaison avec Peter. Exit le garçon bien attentionné et poli dont on ne cessait de vanter les mérites, il était devenu un connard qui trompait sa fiancée et la transition ne fut pas simple pour Maximilien qui n’avait jamais imaginé faire tant de peine à quelqu’un. Qu’elle lui annonce l’avoir pardonné, donc, le déstabilisa au plus haut point. Comment pouvait-elle lui avoir pardonné alors que lui-même n’y parvenait pas ? Cela n’avait aucun sens. Il mit cette décision sur le compte de sa récente hospitalisation. Elle avait dû se sentir coupable alors qu’en fin de compte, elle n’y était clairement pour rien. On s’inventait parfois des responsabilités qui n’existaient pas. Le Français n’ouvrit pas la bouche pour la contredire, il avait déjà causé assez de peine comme ça. S’il commençait à la remettre en question au sujet de ses propres sentiments, elle finirait par quitter la chambre sans même regretter qu’il y soit.

Dépassé. Ce mot avait du sens. Beaucoup de sens. Las, aussi. Maximilien ne savait plus quoi faire ni à quel saint se vouer. Il était jeune mais déjà très fatigué par ce que la vie lui réservait. D’autres trouveraient sûrement ça ridicules, mais ses épaules n’avaient apparemment pas été construites pour supporter toutes ces choses. Il aimait la légèreté, la simplicité et oui, la facilité quand elle témoignait sa présence. Un garçon souriant et simple qui ne cherchait pas les ennuis, voilà comment on le décrivait depuis longtemps. Aujourd’hui marquait un tournant dans sa vie car il mettait en avant tout ce qu’il ne montrait pas d’ordinaire, tout ce qui restait enfoui par peur du jugement.

Il fixa sa main sur sa jambe dont le pouce en caressait la surface. Un geste presque maternel qui lui rappelle sa mère de façon douloureuse. Avec Elsje loin de lui, Peter fut longtemps le seul être humain à lui témoigner de l’affection physique et maintenant qu’ils avaient rompu, il n’en recevait plus de qui que ce soit. Quelques embrassades avec des amis, certes, mais rien de profondément rassurant comme un câlin ou un baiser. La proximité avec une autre personne lui manquait affreusement. La chaleur d’un corps contre le sien. Il n’était définitivement pas fait pour vivre seul.

« C’est gentil de dire ça mais, tu vois, ce n’est pas une évidence. » Elle pouvait être sincère et croire en ses propres mots, mais la vérité n’en restait pas moins inchangée. « Sensible, je veux bien le croire. Mais droit ? Non, ça fait bien longtemps que je ne peux plus me décrire ainsi. Je fais du mal partout où je vais et ceux qui ne décident pas de me quitter, je les repousse. Je ne comprends pas ce qui ne va pas, pourquoi je prends tant les choses à cœur alors qu’il suffirait d’un peu de… de je ne sais pas. Je suis trop bête et naïf. Je laisse à n’importe qui le loisir de me la mettre à l’envers et je m’étonne encore que les personnes les plus proches de moi s’emparent de l’occasion. Je suis seul. Ces dernières semaines me l’ont prouvé. Et pour être honnête, je ne pense pas qu’on m’aime pour moi, mais plutôt qu’on aime se servir de moi. » Trop con, il était juste trop con de se laisser avoir à chaque fois. Le pire, c’est qu’il avait le même comportement que les autres envers lui-même. Il se mentait, jouait avec sa propre naïveté. Une chose était sûre : la confiance que Peter avait brisé avait peu de chance de se réinstaller. Le voulait-il seulement ?

Runaway ft. @Juliet Blackthorn - 14.09.21

En vouloir à Peter avait été facile. Comme si Maximilien avait attendu toute leur relation que le Wright fasse un faux pas pour ensuite le blâmer de tous ses maux. Il ne pouvait le nier : lui aussi avait omis de lui transmettre certaines informations à son sujet. Peter ne connaissait la vérité sur son animagus que parce qu’un accident s’était produit, le forçant à se prendre l’information en pleine face. Maximilien, après avoir caché tant de choses sur son passé, n’aurait pas dû être surpris que Peter en ait fait de même. Pourtant, il s’imaginait naïvement qu’on ne pouvait pas lui mentir. Qu’il n’avait jamais donné à l’Ecossais une bonne raison de se méfier de lui. Car n’était-ce pas là ce qui l’attristait le plus ? Que Peter se soit senti obligé d’attendre tout ce temps pour lui avouer la vérité sur sa condition. Alors bien sûr qu’il avait rompu avec lui, mais pas pour les raisons qu’on lui inventait. Maximilien ne cessait pas d’aimer son ex. S’il avait pris ses distances, c’était dans l’unique but - certes stupide maintenant qu’il en était arrivé là - de réfléchir à tout ce que cela impliquait de sortir avec un semi-vélane. Il se posait des questions sur les raisons pour lesquelles il avait retourné tout son monde. Les doutes sur ses sentiments pour Peter étaient fondés et peut-être que cela expliquait pourquoi il n’en avait pas fait mention plus tôt. Quelle preuve lui avait-il donné que son amour pour lui était sincère ? Aucune, en réalité. Pire encore, à l’entente de la nouvelle, il l’avait quitté. Comment pourrait-il donc lui faire confiance désormais…

« Du courage hein… » Peut-être. Peut-être pas. Il ne parvenait plus à discerner le vrai du faux. La réalité de ce qu’il était avec l’image qu’il se renvoyait de lui-même, si négative. Comment aimer quelqu’un alors qu’il ne s’aimait pas lui-même ? Le sorcier baissa de nouveau les yeux en écoutant Juliet. Il n’était pas totalement d’accord avec ses propos. Oui, il ne pardonnait pas, mais qu’à très peu. Lui, surtout.

« Oh non crois-moi, je pardonne bien trop souvent les crasses qu’on peut me faire. Je ne pardonne pas mes erreurs et à vrai dire, cette situation avec Peter est la première fois que j’ai du mal à simplement fermer les yeux et encaisser. Je peux avoir de la rancune, mais pas si forte. Pas au point de rejeter la seule chose qui me fait me sentir bien… » Ce qui semblait avoir du sens il y a un mois lui paraissait futile désormais. Il tenait néanmoins à mettre certaines choses au clair. Du moins, une chose.

« Tu sais, je ne pense pas non plus que ce soit une mauvaise personne. S’il y a un méchant dans cette histoire, c’est moi. J’ai rompu sur le coup de la colère, je n’ai pas réussi à venir le voir à son anniversaire… J’ai tout fait pour le pousser le plus loin possible parce que c’est un fait… En ce moment, je n’accepte pas d’être heureux. Il y a tellement de choses qui partent en couilles que le fait d’être bien avec lui et complètement satisfait ne… ne colle pas. Mais putain, si tu savais… comme il me manque… » Il chassa rapidement la larme sur sa joue. Au fond, tout ça n’était que des excuses. De fausses, de surcroît. Pourtant, jouer le martyr n’avait jamais été dans ses habitudes. Les chances pour qu’il arrange cette situation lui semblaient faibles, si tant est qu’il le veuille vraiment.

Runaway ft. @Juliet Blackthorn - 14.09.21

La vérité que Juliet lui lança à la figure faisait plus mal que toutes les bêtises qu’il s’imposait de penser depuis des semaines. Maximilien n’avait pas assez confiance en lui pour oser se considérer comme une personne formidable, mais Peter l’était à ses yeux et il ne pouvait que confirmer qu’il l’aimait. Il nota cependant que, par ces mots, la Blackthorn lui faisait connaître les sentiments de son cousin à son égard. Difficile de savoir où il en était de ses sentiments amoureux depuis qu’ils avaient rompu. C’était, bien sûr, de sa faute. La perspective que le semi-vélane puisse toujours l’aimer comme au premier jour lui redonna du baume au cœur. Tout n’était peut-être pas perdu.

Juliet, de toute évidence, connaissait la condition de Peter. Étant sa cousine, cela coulait de source mais cette confirmation lui permettait d’avoir un discours un peu plus ouvert avec elle. Il n’aurait pas voulu divulguer le secret du Wright par mégarde… Sa certitude était belle à voir, quoique non partagée. En fin de compte, Maximilien savait que le charme de vélane ne faisait plus vraiment effet sur lui et que ce qu’il ressentait était réel. Mais en apprenant la chose, il avait forcément remis en question tous ces choix. Plus encore, il en avait voulu à Peter d’avoir gardé l’information secrète si longtemps. En le voyant abandonner toute sa famille pour être en couple avec lui, il aurait aimé que l’Ecossais prenne son courage à deux mains et lui avoue la vérité, car tourner le dos à son grand-père pour un homme était, à ses yeux, une preuve qu’il pouvait lui faire confiance. Mais ça n’avait pas été le cas…

« Je ne dis pas que c’est faux. En fait, il n’y a sûrement rien de plus vrai que ce que tu dis. Le problème, c’est la façon dont ça s’est passé, pas le contenu en lui-même. On a tous les deux pris des décisions qui ne sont plus modifiables désormais. Et se remettre ensemble impliquerait de se les pardonner et je ne sais pas si c’est possible. Pour lui. » Il soupira et renfonça sa tête dans l’oreiller. Toutes ces émotions l’avaient lessivé et il lui venait une furieuse envie de dormir. Pourtant, d’une certaine façon, Juliet avait su l’apaiser par ses mots. Ce n’était pas gagné… Maximilien se sentait déjà un peu plus libre mais pas délivré pour autant. Beaucoup de décisions restaient à prendre et il n’avait pas le courage d’en combattre une seule pour le moment. De toute façon, personne ne lui demandait de se précipiter, n’est-ce pas ?

« Désolé de t’imposer toute cette discussion. T’étais pas obligée. Merci pour ton honnêteté, cela a… remis certaines choses en perspective. Tu vas vraiment faire un super médecin, tu sais. » Il lui offrit un léger sourire, un peu fatigué. Mais ses mots respiraient la sincérité car, en se retrouvant dans cette chambre, il ne pensait pas ressentir autre chose que de la peine et de la misère. A sa manière, Juliet avait réussi à l’en écarter, ne serait-ce qu’une petite heure.

Runaway ft. @Juliet Blackthorn - 14.09.21

Il leur reprochait de ne pas se faire confiance. Car pour sûr, cacher une telle information pendant presque un an devait forcément signifier que Peter n’avait pas assez foi en lui pour lui dire la vérité. Comme s’il était susceptible de ne plus l’accepter avec cette condition. Le Wright savait pour son animagus depuis le début. Qu’est-ce qui l’avait poussé à croire qu’il n’était pas digne de la même confiance ? Mais en même temps, Maximilien ne pouvait nier que, peu importe l’effort qu’il y mettait, sa foi en Peter n’avait pas grandi avec le temps. Il pensait qu’être proche de lui lui permettrait de l’intégrer complètement à sa vie et de lui vouer une confiance sans faille… Peut-être avait-il cherché la moindre excuse se présentant pour rejeter le semi-vélane. Peu importe qui avait commencé et pourquoi : la vérité résidait dans le fait qu’aucun des deux ne semblait capable de se jeter dans la relation sans filet sécuritaire pour se rattraper en cas de chute fatale.

« Je nous le reproche à tous les deux. » Blâmer uniquement Peter ne servirait à rien, en plus d'être profondément injuste. Maximilien donnerait tout pour recommencer cette histoire à zéro. S'il avait réussi à attirer l'attention de Peter plus tôt, ils n'auraient pas eu l'un comme l'autre à faire du mal à leurs partenaires et amies. Blesser Elsje et Juliet faisait partie de ses plus grands regrets à ce jour. Malheureusement pour le Wright, il avait décidé de se rapprocher de Maximilien au mauvais moment. Dire que leur timing était mauvais relevait de l'euphémisme. Il ne parvenait pourtant pas à l'oublier.

Il remercia Juliet d'être à ses côtés quand rien ne le lui demandait. Elle faisait preuve d'une grande patience et d'une compréhension infinie à son égard, qui n'était certainement pas méritée aux yeux du Français. La voir partir ravivé une certaine angoisse qui logeait dans sa poitrine depuis plusieurs semaines, mais il n'en manifesta rien. La medicomage n'allait certainement pas rester indéfiniment à son chevet, sachant tout ce qu'elle avait déjà fait pour lui jusqu'à présent. Maximilien hocha péniblement de la tête.

« Promis » dit-il simplement. Il lui fit un léger signe de la main alors qu'elle disparaissait derrière la porte de sa chambre, dorénavant fermée. Le sorcier inspira profondément, tentant de trouver en lui-même le courage de supporter les heures à venir, enfermé dans cette cage à coucou. Il pensait aux promesses qu'il avait faites d'aller mieux, que ce soit à voix haute ou non, et se demanda comment il parviendrait à les tenir sachant que les ténèbres se traînaient déjà au pied de son lit…